Pouvoirs et institutions dans la France médiévale, tome 2 : Des temps féodaux aux temps de l'Etat

Le trio Sassier, Guillot et Rigaudière a fait merveille ici pour faire comprendre comment, de rapports basés sur les relations et hiérarchisations féodales saisies souvent de fait dans leurs formes les plus caricaturales, avec leurs effets pervers - rivalités territoriales à tendance lourde accentuées par des luttes de personnes et des problèmes d'ego, quand l'économie ne s'en mêlait pas de surcroît, enchevêtrement des questions de fidélités et de droits pluriels, plus ou moins grande force des moyennes ou plus grandes entités politiques, plus facilement tentées de s'agrandir aux dépens de plus faibles voisins, on est passé à la construction sinon de véritables États au sens où on l'entend de nos jours, du moins à la lente constitution des structures qui ont permis leur émergence, surtout par la politique continue de dynasties bien installées aux commandes, comme les Capétiens puis les Valois, dans le royaume de France, la centralisation étant toutefois une oeuvre de longue haleine et se heurtant aux résistances difficiles à vaincre de grands feudataires rétifs à la remise en question de leur pouvoir local et luttant tant bien que mal contre les empiétements de ceux qui se prétendaient leurs "souverains seigneurs". Coups de chance, action délibérée, ambitions tenaces, poursuite des acquis, tout a joué dans le temps long du Moyen Âge pour favoriser ce phénomène de concentration des pouvoirs entre les mains des plus puissants, les rois ou les grands princes, conscients d'assumer une responsabilité, celle de coiffer un édifice qui, de nouveau morcelé après la mort de Charlemagne comme après l'éclatement de l'Empire romain, avait tendance à se reconstituer dans des limites plus modestes qui se reconnaîtront comme États avant de s'identifier plus tard comme Nations, autour d'une organisation fiscale, juridique et militaire tenue par les "mangeurs" des plus petites principautés ou de celles qui avaient refusé un temps ce mouvement avant de succomber à la force.

François Sarindar, auteur de : Jeanne d'Arc, une mission inachevée (2015)