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EAN : 9782729123086
208 pages
Editions de La Différence (02/03/2017)
4.15/5   10 notes
Résumé :
La Halle est une fable contemporaine, réaliste et endiablée, qui raconte la cohabitation laborieuse d’hommes et de femmes dans une halle grande comme le monde, où ils viennent travailler, boire, manger et tenter de rêver. Le rêve, pour certains, c’était encore la galerie d’art au premier étage de la Halle. Mais elle fermera ce soir, bientôt remplacée par un supermarché végétalien. Dans le microcosme de la Halle, l’annonce de ce changement de voisinage fait l’effet d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Premier roman d'un jeune auteur très prometteur tant il y a en son sein de belles choses. Tout d'abord, j'ai pu être dérouté par le lieu choisi et le quasi huis-clos. Puis, très vite les images abondent et les portraits des protagonistes me ravissent : "La grosse bouchère, son mari le petit boucher apeuré, le fils débile et déjà obèse, incarnation trinitaire de tout ce que l'étal propose, de la farce de porc au cou maigre et déplumé des poulets, le saignant et le blême dans une orgie de rouges assassins sur fond de carrelage de morgue." (p.33)

Julien Syrac use d'une belle langue, à la fois riche et argotique, délicate et grossière. Il mélange les genres, ne s'arrête pas à un style qu'il aurait cherché et trouvé et qu'il utiliserait jusqu'au bout. le risque, c'est que son roman puisse paraître partir dans tous les sens, ce qui peut se vérifier dans ses envolées, ses digressions sur le véganisme, la peinture, les livres, les vendeurs et les travailleurs de la Halle qui gagnent chichement leur vie et travaillent durs, les profiteurs comme Patrick M, le patron de Julien qui travaille peu et gagne beaucoup, les amours de telle libraire ou telle cuisinière, ... C'est dans ces moments-là que parfois, je trouve qu'il pousse un peu le bouchon. Oui, mais, aussitôt après, il revient dans la Halle et on y retourne avec bonheur. Cette quasi unicité de lieu m'a beaucoup plu. Elle permet la rencontre de gens qui ne feraient que se croiser autrement, qui n'ont rien en commun sauf la Halle. Et dès que le romancier se penche sur ses personnages, ils deviennent plus denses, plus complexes qu'il n'y paraît, il les dessine au-delà des apparences : untel est plus cultivé qu'il ne veut le laisser croire, l'autre est vraiment tel qu'on le pressent, un beauf dans toute sa splendeur, unetelle a vécu des drames assez terribles, ... Fouad est un peintre raté, un galeriste qui ne vend pas mais il a cette très jolie réflexion : "Fouad dit avoir enfin compris que le plus grand de tous les arts, ce n'est ni la littérature, ni la peinture, ni la photographie, ni la musique, mais le silence. La plénitude du silence. le foisonnement du silence. L'éternité du silence. La sidérante beauté du silence. le silence est le plus grand chef-d'oeuvre auquel un homme puisse aspirer." (p.123)

Le risque dont je parlais plus haut est largement compensé par le vrai plaisir de lire un roman original et dans le fond et dans la forme. C'est une fable très contemporaine sur la condition humaine, délicatement et violemment écrite. le fait de changer de style d'écriture perturbe le lecteur que je suis, me met en intranquillité ne sachant ce que je vais découvrir en tournant la page : des phrases nominales courtes ? de grandes envolées lyriques ? Une description plus classique ? Quel plus grand plaisir de lecture que celui de ne pas savoir ce que l'on va trouver en tournant la page ?

Très belle découverte que ce premier roman, La différence est un éditeur que j'aime beaucoup exigeant et de qualité. A noter que Julien Syrac a traduit -pour les éditions Actes sud- le silence même n'est plus à toi d'Asli Erdogan récemment emprisonnée par le pouvoir turc.
Lien : http://www.lyvres.fr/
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J'ai beaucoup aimé ce roman. Les portraits des personnages sont géniaux, tous les protagonistes sont présentés avec justesse et j'y trouve même de la poésie avec des motifs récurrents.
Tout est perturbé par l'annonce de la fermeture de la galerie d'art et ce sont ces déviations et anomalies dans le fonctionnement de la Halle, sorte d'organisme vivant, que l'on va constater.
L'action est très circonscrite dans l'espace : la Halle et ses alentours immédiats, des flashbacks qui prennent place dans le squat des artistes, le café vert à la fin ; et l'est également dans le temps : l'histoire commence lorsque l'on apprend la fermeture de la galerie et l'ouverture prochaine d'une supérette végétarienne à son emplacement, et s'achève au dernier jour de cette galerie.
On observe la vie de la Halle à travers les yeux du vendeur de saucissons, qui de son emplacement voit tout. Il a ses entrées dans les caves, où règne Sacha qui contrôle tout depuis le bas de la pyramide. Il est ami avec le galeriste. Il fréquenterait même Alma, la libraire italienne, "les plus belles jambes de la Halle, de Marrec et du monde".
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Plongée immersive dans une halle de grande ville. Cet endroit où se côtoie toute une faune bigarrée, épicée et pleine de tempérament.
Nous suivons Julien, le vendeur de saucisson sur une journée entière, de la mise en place de la table et sa nappe à carreaux jusqu'au rangement des invendus (ces saucissons au fenouil et à l'olive si difficile à écouler…) et le verre de débauche avec la belle libraire sicilienne.
Ce jour là la halle bruisse d'une rumeur inédite : la galerie d'art de Fouad, à l'étage, va fermer et être remplacée par un supermarché pour végétariens !
Ce n'est pas tant la trame de l'action qui vous fera lire ce livre mais plutôt l'ambiance, la gouaille, la description de tous ces personnages, et, juste derrière, la critique de notre société.
Lisez le au moins pour le passage sur les acheteurs de saucisson ; c'est délicieux !
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Description de ce qu'il y a de plus sombre chez les personnes dont la vie est grise (voir noire).
Plus glauque que comique. Un côté acerbe pour les techniques de ventes ou le client est pris pour un "gros cons". Ce dernier terme n'est pas dans mais habitudes, surtout pour parler de littérature, mais adapté dans le contexte. C'est probablement pour cela que je n'ai pas apprécié ce livre. C'est trop facile de critiquer la "connerie" humaine (et beaucoup de clichés).  Mais j'avoue que les descriptions et les réparties sont bien travaillées. 
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Julien Syrac ne nous promet pas un roman au rythme trépidant, enchaînant rebondissements et révélations, ni une épopée épique, il nous dresse plutôt des portraits de vie, sur une journée, sur un temps donné, dans cette Halle bouillonnante où se croisent tant de destins. Moi qui suis habituée à lire des romans qui ne laissent pas respirer le lecteur un seul instant, je craignais la lecture de cette « fable contemporaine », imaginant un récit contemplatif plat. Loin de là, car si il y a de la poésie et de la philosophie dans la plume de l'auteur, le récit qu'il propose est loin de se contenter de jolis mots lancés dans le vent. Sa sincérité embarque complètement au point que je n'arrivais pas à décrocher du roman. Et si parfois, vers la fin, quelques moments plus lents se sont fait ressentir, l'écriture sublime les a éclipsés dans mon esprit. C'est une histoire touchante qu'il nous propose, comme un [...]

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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
L'habitué est un client délicat, Julien.
[...] L'habitué est redoutable parce qu'il croit te connaître et il veut que tu le reconnaisses.
[...] L'habitué est un susceptible, si tu ne le bichonnes pas, de meilleur ami il devient vite ton pire ennemi.
[...] Pour l'habitué, tu n'es pas un simple vendeur, mais un repère dans son monde, une étape du parcours quotidien, peut-être le moment le plus attendu de la journée.
[...] Pour l'habitué, tu es un être précieux, une figure rassurante qui flatte son besoin de trouver les choses à leur place.
[...] Si tu ne reconnais pas l'habitué, si tu le traites comme un client ordinaire, sans un petit mot gentil, sans une allusion à sa nouvelle coiffure ou à ses vacances dans le Sud, tu ébranles une série de certitudes, tu brises un cœur.
[...] L'habitué croit qu'il est ton seul client. Sa naïveté est immense, c'est là qu'il est émouvant. C'est l'homme qui va au bordel pour s'entendre dire je t'aime.
[...] Le drame, Julien, c'est que tu t'habitues aux habitués. C'est toi qui finis par les attendre.
[...] Tu les attends parce que tu as besoin, dans le vertige solitaire de ton numéro de clown, de t'accrocher à quelques têtes familières dans le public.
[...] Tu t'attaches à ces habitués qui viennent t'applaudir chaque jour, et tu finis par croire que ces applaudissements sont de l'amour.
[...] Ta naïveté est immense, c'est là où tu es émouvant. Tu es la prostituée qui attend qu'on lui dise je t'aime.
[...] Le drame, Julien, c'est qu'il n'y a aucun amour là-dedans.
[...]C'est juste un boulot de con mal payé.
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La librairie Rouge est comme un aquarium. Encastrée à l’entrée sud-ouest de la Halle, un petit écrin rectangulaire derrière une grande baie vitrée, entièrement visible depuis la rue. Entre le présentoir en vitrine, une table centrale et la grande étagère d'un seul tenant qui couvre tout le mur, Alma Constanza évolue en apesanteur, au vu de tous, comme un poisson rouge dans son bocal. Elle disparaît accroupie sous la table, puis se redresse, découverte jusqu'à mi-cuisse, ses lunettes d'écaille posées à l'avant du nez, les cheveux ramenés en chignon au dessus de la nuque, puis s'élève, montée sur l'escabeau de bois, vers les rayonnages supérieurs, les mains gantées de blanc - les livres sont des nids à poussière -, se penche en avant, les bras nus dépliés vers l'étagère, discrète flexion des lombaires qui n'entame pas la rectitude du dos, alors la jupe fendue d'Alma se relève, et pour qui regarde depuis la rue, dans un infime interstice entre le haut des cuissardes en latex vermillon et la frange noire de la jupe, s'esquissent, le temps d'une seconde, les plus belles jambes de la Halle, de Marrec et du monde. Puis Alma Constanza descend de l'escabeau avec un livre et retourne s'asseoir derrière son bureau en bois, sur un tabouret de pianiste, plus basse que les clients qui font semblant de déchiffrer la tranche des livres sur les étagères en attendant que se lèvent vers eux les yeux d'Alma Constanza. L'accroche tant espérée qui les autorisera, un livre quelconque à la main, à s'approcher de la libraire pour lui poser une question que depuis des semaines ils tournent et retournent dans leur tête jusqu'à lui avoir donné la tournure idéale qui, le moment venu où ils oseront enfin la poser, leur permettra, pensent-ils, de briller aux yeux de la libraire qui ne relève pas les siens. De quelle couleur sont ceux des renards ? Tout le monde a des yeux mais Alma Constanza est la seule qui s'en sert pour voir.
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Avec le gaz du mousseux, les hormones se libèrent. l'heure de la curée sonne dans la savane. Michel est le premier à sentir l'appel : comme dans les meilleurs documentaires animaliers, le petit chauve, tapi dans les casseroles, suit l'avancée d'un prédateur formidable à neuf heures. Tous les mâles de la Halle se sont alignés sur sa mire, Mirko, Djihad Potiron, Petar, les avinés du Napoli, yeux béants, bouche bée dans une seule direction. Je suis les flèches en connaissant déjà la cible : Alma Constanza vient d'entrer dans la Halle.
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L'aliénation, dirait Avi. Toi et moi, Julien, faisons un travail fondé sur la répétition. La répétition est aliénante parce que faire mille fois par jour la même chose, ce n'est pas avoir fait mille choses, mais une seule neuf cent quatre-vingt-dix-neuf fois de trop. Nos journées sont pleines de vide à ras bord, Julien. Nous sommes de grands tonneaux des Danaïdes dans lesquels tout le monde pisse sans fond. Ça nous glisse dessus, Panta rhei, mais on ressort sali.
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Il dit que la ville est une machine à te prendre, te recracher, t’oublier, qu’on n’y bâtira jamais rien, que vouloir y laisser une trace est absurde, qu’au mieux ça donne une de ces pathétiques photos en noir et blanc comme il y a à l’entrée de la Halle à côté du panonceau Histoire de la Halle de Marrec. Alors autant être une petite fleur, faner et mourir, mais avoir eu des couleurs.
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