Évanouie

Évanouie est un roman singulier.
Mathilde de Télossie nous entraîne au fil des pages sur les traces d'un personnage qui tombe dans l'oubli.
C'est une histoire qui se déguste et qui se laisse lire entre les lignes.
Les mots sont choisis avec justesse, l'écriture est subtile et traite d'un sujet grave avec tendresse et poésie.
Ce premier ouvrage, à la saveur toute particulière, nous en fait espérer beaucoup d'autres.
Merci pour le plaisir que m'ont apporté votre regard et imagination.

Un coup dans l'âme, un livre qui fait que j'aime lire et découvrir des nouveaux auteurs !

Évanouie suit la ligne parfaite de sa vie, mari parfait, gestionnaire d'une entreprise à grande renommée, repas de famille démesurés parfaits, bref elle n'a rien à envier.
Sauf que cette vie parfaite n'est pas la sienne…!
Évanouie passe sa vie à entrer dans un cadre, à ne pas contrarier, ne pas faire de vague mais est elle satisfaite ?

Voici un livre initiatique inspiré par Nietzsche concernant l'oubli, faites vous le lien?

Il est drôle, simple, surréaliste et tellement contemporain, un livre qui fait appel à l'introspection.
Sans prétention ni présomption il s'infiltre dans nos veines où la persécution du regard des autres nous brûle encore plus, puis
subtilement cette plume douce presque contemplative nous apaise mais l'histoire électrique réveille peu à peu cette conscience collective et nous sort de cette torpeur dans laquelle nous vivons depuis trop longtemps.

Un opus court mais efficace, apaisant, qui m'a donné de l'espoir et de la satisfaction personnelle ne le lisez pas trop vite, prenez le temps de le laisser s'installer dans votre vie et de vous aider à construire celle ci avec bonheur.

Comment qualifier ce roman ? Étrange ? Surréaliste ? Ce qui est certain c'est qu'il capte et crée d'emblée un attrait particulier pour le personnage. Puis, tout à coup, quand le lien est bien installé, tout bascule, se déstabilise, les repères sont perdus, l'incompréhension s'installe. C'est lorsqu'Évanouie sort de l'oubli, prend consistance, qu'elle s'évanouit pour de bon, laissant un goût amer d'abandon et de déception.
Évanouie est une enfant puis une adulte qu'on oublie, qui s'oublie et se laisse oublier. Elle se complet dans cette situation et ne vit intensément que dans ses songes où le désir prend forme avec le Corps.
Maintenu dans le réel d'Évanouie, sa famille et le chais paternel, le lecteur commence à vraiment s'attacher à sa personne. Il a l'impression d'être le seul à lui donner de l'importance, il éprouve même le désir de la retrouver et a hâte de reprendre la lecture. Il devient en quelque sorte le seul à la faire vraiment exister, c'est alors que l'auteur opère une rupture inattendue qui fait tout basculer, emporte tout comme une lame de fond, le laissant dépité. Alors qu'Évanouie décide de briser les chaînes de l'oubli, elle devient invisible aux yeux des siens. Évanouie s'efface pour de bon. "Alors, la dernière chaîne serait évanouie et bientôt, c'était sûr, oui bientôt, elle serait libre".
Évanouie est un roman mystérieux et subtil sur l'oubli, l'oubli qui détruit ou qui libère. C'est aussi un écrit sur le regard des autres, le poids de la famille et de ses membres aux blessures dévastatrices, sur l'amitié et la domination, le désir et la capacité à le préserver.
Ce premier roman est très prometteur. Mathilde de Télossie navigue entre réalité et fiction avec aisance et une maîtrise romanesque digne d'écrivains chevronnés. La qualité de l'écriture est indéniable.
Évanouie, un roman original qui ne s'oublie pas !

« Évanouie pouvait alors compter sur sa prudence, vaillamment acquise. Quand l'ennui l'envahissait et que les imaginations naissaient dans son esprit pour combler le vide, la prudence les harnachait, et serrait la bride, puis serrait encore, jusqu'à ce qu'elles deviennent foues et disparaissent.
La plupart du temps désormais, il suffisait aux imaginations d'apercevoir la prudence au côté d'Évanouie pour rebrousser chemin. »

Évanouie, Mathilde de Télossie @mathilde.de.telossie @leseditionspassiflore #premierroman

Évanouie, quel prénom énigmatique et mystérieux! Évanouie que l'on peut transformer en Eva mais qui n'en perd pas pour autant ce côté éthéré, évanescent…

Évanouie, c'est cette fille sage qui, depuis toujours, fait gentiment ce qu'on attend d'elle, ne fait pas de vagues, ne se laisse pas emporter par son imagination, ses envies, ses pulsions parce que, comme le dit sa mère:« fais attention à ce que tu veux, tu risques de l'avoir ». Alors elle ne choisit pas ou plutôt elle choisit de ne rien vouloir, de ne rien décider, soumise au bon vouloir de son père et de son mari… eux savent ce qui est bon pour elle, ce qui lui convient!

La seule chose qu'elle choisit c'est cette représentation sur son bureau « la photographie d'un détail d'une sculpture du Bernin. La main d'Hadès qui s'enfonce dans la chair de marbre de l'infortunée Proserpine. La main qui emporte ailleurs, au fond des enfers. Infortunée? Pas sûr lorsque l'on voit ses veines et la vigueur de ses doigts... […] Elle regardait souvent ce détail, subjuguée, en se demandant si la main de marbre aurait été froide sur son corps à elle. »

Ce détail, qui n'est pas anodin, révèle tout de la personnalité de celle que ses parents ont prénommée Évanouie…

Jusqu'au jour où… quelques rêves viennent malgré tout nourrir son imagination « Il y a du bleu, partout. Dans les yeux, incrusté dans la pierre, sur les habits. Tout ce bleu, c'est trop.
Ce ne pouvait être que l'Ouzbékistan.
Évanouie sourit.
[…]
Le monde dormait, mais pas elle.
Elle, elle était en Presqu' Ouzbékistan. »

Jusqu'au jour où elle se réveille, ébahie… quelque chose a changé… une vibrance dans l'air, un soupçon de volonté, une frissonnement de liberté…

« Tout était identique et aujourd'hui, sans comprendre, ça venait de changer. Ç'avait été simple, finalement. »

Évanouie…

Je vous laisse à votre tour découvrir la signification de ce prénom ô combien prédestiné…

Évanouie est un premier roman ambitieux sur la mémoire et l'oubli. le titre éponyme témoigne d'ailleurs d'un paradoxe : l'existence de la protagoniste et sa disparition.

Silencieuse et soucieuse de respecter les conventions sociales, elle vit dans un carcan conformiste qui l'emprisonne. Il la bâillonne et l'empêche d'être elle-même. Mais sait-elle vraiment qui elle est ?

On pourrait penser que c'est une femme qui subit sa vie, son mari, sa famille. Elle est bien plus que cela. Sa solitude et l'indifférence de ses proches prend à la gorge.

Si Évanouie se démarque par ses aspirations à un ailleurs loin des apparences, elle reste néanmoins tourmentée par les injonctions prônées par son entourage. L'omniprésence de la vue (yeux, pupille, regard, coup d'oeil...) et des reflets (miroir, eau...) le révèle bien.

Georges Perec écrivait : « Ce que nous appelons quotidienneté n'est pas évidence, mais opacité : une forme de cécité, une manière d'anesthésie. » Anesthésiée, Évanouie l'est assurément dans la première partie du roman. le livre est structuré en deux temps, l'intrigue se déroulant en deux jours. le premier sert à planter le décor et le deuxième, qui intervient à la moitié du roman, fait basculer le lecteur dans le surréalisme. Évanouie a disparu des esprits. Elle qui était absente à elle-même devient du jour au lendemain une étrangère aux yeux des autres.

Mathilde de Télossie signe un récit philosophique et surréaliste qui entremêle rêve et réalité. le désir d'Évanouie pour un corps fantasmagorique est, de ce point de vue, particulièrement marquant.

L'autrice suscite le mystère par des scènes oniriques et des métamorphoses : celle de l'oncle de la protagoniste puis la sienne, lorsque Évanouie se sera totalement affranchie du regard des autres.

Le chapitre dans lequel l'héroïne va retrouver sa mère alors qu'elle a été oubliée de tous m'a beaucoup émue.

Je vous invite à découvrir cette plume prometteuse.