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EAN : 9782868536594
165 pages
Le Temps qu'il fait (06/06/2019)
3.75/5   4 notes
Résumé :
Après avoir décrit sa campagne au fil de nombreux récits, Jean-Loup Trassard, à partir des années 1970, s'est inquiété, en plein remembrement administratif, de la destruction du bocage formé par des siècles d'agriculture. C'est donc une défense des ruisseaux, des arbres et des haies qui est proposée ici avec des textes publiés sur une quarantaine d'années dans diverses publications (du journal municipal au magazine national). Au fil du temps, ses préoccupations envi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
J'aime flâner dans ma campagne qui m'embrasse chaque jour de sa plénitude et de sa liberté de vie, je chausse mes chaussures de marche, je prends mon sac à dos (Dora), mes mollets pour me porter sur les chemins de traverses qui découpent les champs, ma casquette et mes lunettes de soleil, je pars respirer les effluves des sous-bois, retrouver l'humidité de cette verdure me caressant la peau, je me perds dans cet univers, en prenant des clichés de ces instants pour en faire profiter mes amis urbains, je picore de temps à autre, Fenêtre sur terre de Franck Bouysse qui entremêlent photos et proses sur sa région la Corrèze, comme un parallèle de mes balades auboises, pendant ce temps, Verdure que j'ai dévoré avec cette lenteur rurale, la Mayenne cristallise le paysage que modélise Jean-Loup Trassard dans ce recueil de textes qu'il a écrit au fil de sa vie, la nature est génitrice d'elle-même, les jardins, les bocages, les ruisseaux, les arbres, les fleurs sont mises en proses tout le long de ce magnifique livre sur la Nature sauvage sans l'artifice de l'être humain, dénonçant le désastre humain sur le paysage, son travail de démolition, ce carnage de vouloir être l'architecte d'une Nature sauvage indessinable et indépendante. Jean-Loup Trassard est photographe et écrivain français, originaire de la Mayenne, il se dit écrivain de l'agriculture, ce livre est un regroupement de divers écrits qu'il a tout le long de sa vie, publié dans diverses revues, cet apanage de textes comme le dit le quatrième de couverture « décrit sa campagne », des années 70 à nos jours, ces récits ont la saveur de la terre, respirant la monde rurale et ces paysages qui petits à petits se meurent d'une urbanisation rurale.

Ces quatorze textes de 1975 à 2017 forment une farandole naturaliste de la campagne, où la vision de l'auteur pour un monde rurale sans artifice sociétale de ce monde libérale où le profit, la destruction, le rendement, les herbicides sont le flambeau d'un monde qui se meurt, les bocages de son enfance disparaissent, les chemins creux ne sont que des souvenirs, la faune et la flore vont devenir des espèces protégées, s'étalent dans sa prose poétique et éducative. Personnellement pouvoir me perdre dans la redondance rurale des paysages que notre auteur raconte avec beaucoup de passion et d'amertume lorsque celle-ci est mise à mal, est un plaisir, j'apprends, je découvre, j'imagine, je respire, j'erre dans ces lieux comme si ma chair foulait cette terre millénaire et ces ruisseaux fantômes, ces arbres centenaires abattus par bêtises et lâchetés, ces bocages lointains qui ne sont plus et me dire aussi, la tristesse de voir mourir ce monde paysan, ce matin encore flânant dans un chemin entre les champs, un chevreuil a débusqué d'un talus, pour s'évanouir dans un bosquet comme un mirage, une libellule accrochée sur une herbe, devenant mon modèle le temps de deux ou trois clichés, et ces coquelicots rouges attirant les abeilles et boudons, ces fleurs devenues invisibles dans le regard des autres, qui illuminent toujours mes azurs, je retrouve cette nature dans ce livre ou la chlorophylle abonde, ou chante la Nature, celle que la terre façonne seule depuis des siècles. La bibliographie des textes a diverses origines comme Le Figaro Littéraire, des préfaces, dans des magazines, des journaux quotidiens comme Ouest-France, le bulletin municipal de Saint-Hilaire-du-Maine, un livre d'artiste avec Odile Levigoureux sous le titre, le temps qu'il fait et des inédits.

De page en page, Jean-Loup Trassard sublime sa campagne, sa Mayenne, ses souvenirs germent au fil des textes, le poirier cidre, les châtaigniers que l'on nomme écussons à Mayenne disparaissent des paysages français, restant dans la mémoire de notre auteur, peuplant son enfance, Les arbres de la famille, Châtaigne sont des proses intimes, laissant l'auteur peintre de ces mots le paysage de son enfance, la châtaigne respire la douceur de vivre de sa campagne, le bonheur de manger ce gâteau à la châtaigne enfant restera une empreinte indélébile, devenant un rêve de toute une vie, La Flore de la Mayenne est une ode des plantes et de leurs secrets, comme Portrait du bourrier, listant comme un livre de botaniste ces fleurs de nos campagnes dites importunes, les recensant, les décrivant, donnant leurs caractéristiques et aussi leur pouvoir médicinal, ces plantes souvent méprisées revivent sous la plume de notre passionné, nous retrouvons, la capselle, le séneçon, la fumeterre, le plantain, la mercuriale, la cardamine, le bouillon blanc, l'euphorbe, l'achillée, la bryone, la reine des prés, l'arum ou gouet, les liserons, la mauve, l'ortie, la chélidoine, la bardane, l'iris jaune, la digitale, le sceau de Salomon, la morelle noire, Jean-Loup Trassard fera aussi des lettres dédiées à certaines plantes, comme Lettre à l'ortie, Lettre au lin, Lettre à la prêle, pour explorer nos campagnes de ces espèces qui la peuplent que beaucoup oublient. L'ortie est une herbe piquante, une mauvaise herbe que l'on doit désherber à tout prix, en oubliant son pouvoir médicinal et ces vertus incroyables pour notre corps, comme le lin qui reprend sa place de noblesse, dans l'habillement et la nourriture.

Il y a aussi beaucoup de colère dans ces différents textes, une amertume, le remembrement est une hérésie pour le paysage rurale, le dénonçant dès qu'il le peut, critiquant les politiques, les banques, l'agriculture intensive et toutes ces conséquences, Jean-Loup Trassard déteste ces passéistes, ces logiques de destructions, et cette violence mécanique qui travaille la terre, cette terre sans repos inséminée, dans son dernier texte, Un procès moderne, Jean-Loup Trassard retrace l'agriculture moderne, sa mécanisation, les engrais, les désherbants et les insecticides, et ces conséquences environnementales et humaines. La nostalgie de notre auteur, c'est comme un refrain tout le long de ce livre, ces châtaigniers porteurs de nourriture souvent oublié avec l'introduction des patates, les merisiers et leurs floraisons de fleurs blanches, les pommiers et son cidre, les haies, la biodiversité des cultures, ces variétés florissantes, pommes de terre, betteraves fourragères, grands choux pour nourrir les vaches, trèfle rouge, maïs à couper vert, navette fleurie en jaune, avoine… Sont désormais des souvenirs, laissant des vastes étendues de monoculture. Les couleurs disparaissent du paysage avec cette diversité qui s'évapore avec le temps, Jean-Loup Trassard n'oublie pas le rôle des haies, avec ces arbustes, le noisetier, le sureau, le frêne et le merisier, les épineux aussi, le néflier, l'aubépine et le prunelier, sans oublier ces lièvres nichés dans les haies, comme les nids à bourdons utiles aux colportages des pollens et ces oiseaux !

Verdure est un hymne à la campagne, à la vie, à la diversité, à cette campagne d'autrefois par son amour de la terre et sa flore, sans oublier sa faune comme l'alouette chantant dans les chants. Jean-Loup Trassard laisse son amertume se dissoudre dans ces textes pour y faire germer une colère sourde face à l'argent qui gangrène l'agriculture, je n'oublie pas cette loi stupide des semences devenues privées diminuant la biodiversité de plus de 75 pour cent, la nature se privatise en dépit du bon sens.
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Ce recueil de récits est un hommage à la terre et à la nature, mais aussi un regard critique sur le saccage fait par l'homme sur son environnement avec l'intensification d'une agriculture industrielle.
Le regroupement de ces récits offre de nombreuses redites qui peuvent lasser. Mais cela est pour la bonne cause et pour la défense de la vie.

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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Les passéistes, qui s'ignorent mais font de grands dégâts, ce sont ceux qui continuent à croire que l'homme est là pour asservir la nature, qui assurent que c’est pour un mieux-être de tous alors que c est pour le profit de quelques-uns, qui possèdent une notion partielle et partiale du rendement financier admis pour but unique et qui, avec un entrain communicatif (changez donc aussi votre voiture, votre machine à laver, votre tracteur), peuvent déclarer, comme le chef du bureau d'études de remembrement et de voirie au ministère de l'Agriculture et du développement rural (interview publiée dans la presse le 29 août 1973):«On crée une nouvelle géographie rurale. Œuvre passionnante car on remodèle la campagne pour plusieurs siècles. »
Si nous nous contentons d'envoyer une giclée d'encre à la face d'une telle imbécillité, croyez-vous que les ruisseaux et nous-mêmes pourrons continuer longtemps à suivre les méandres qui nous plaisent?

1975
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Conserver, protéger, entretenir les chemins, c'est respecter dans le paysage l'histoire de la relation que les hommes ont eue avec l'espace agricole. Emprunter aujourd'hui les chemins creux, même si ceux qui restent encore ne forment plus le labyrinthe que nous connaissions il y a trente ou quarante ans, c'est non seulement retrouver le rythme et la respiration des antiques déplacements à pied, s'approcher de la nature sans les déformations de la vitesse ou le bruit d'un moteur, mais visiter le plus discret des monuments: celui que nous a laissé en creux (presque bâti par frottement, par une usure du sol) le passage des générations occupées au travail de la terre, dont la présence hante toujours ces couloirs moussus.

1985
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La civilisation rurale s'est laissé mourir parce quelle ne s'aimait pas. Elle avait adopté le point des villes qui toujours se moquent des campagnes. Elle n'a pas défendu ses valeurs. Nous n'en sauveront que des souvenirs, encore faut-il se dépêcher !
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Planter, c'est long, construire c'est cher, le plus facile et le plus rapide est démolir ce qui existe : on abat les arbres, on élimine les haies, on aplatit le terrain...
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L'Etat détruit le mode de vie de la France rurale comme I'Occident a détruit les civilisations africaines, au nom du progrès. «Modernisation» est un terme employé par toutes les admministrations pour nous faire avaler nimporte quoi !
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Videos de Jean-Loup Trassard (11) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean-Loup Trassard
La Fête du Livre de Bron propose chaque année une journée de réflexion sur des enjeux majeurs de la littérature contemporaine. le vendredi 8 mars 2019, nous proposions un focus sur les liens entre littérature, nature sauvage, grands espaces, sciences humaines et environnement. Lors de cette 33ème édition, nous avions la chance d'accueillir Pierre Schoentjes, professeur à l'Université de Gand, spécialiste du « nature writing » en langue française pour un grand entretien exceptionnel, animé par Thierry Guichard, à revivre ici en intégralité.
Dans Ecopoétique, Pierre Schoentjes étudie les spécificités du « nature writing » en langue française – le terroir plus que la terre, le lieu plutôt que le paysage, l'esthétique plutôt que l'éthique – en délimitant un corpus littéraire constitué d'écrivains comme Jean-Loup Trassard, Pierre Gascar, Charles-Ferdinand Ramuz ou Philippe Jaccottet. Mais il explore aussi les oeuvres d'écrivains très contemporains comme Emmanuelle Pagano, Belinda Cannone ou Marie-Hélène Lafon. En partenariat avec l'Université Lyon 2, la Médiathèque Départementale du Rhône et Médiat Rhône-Alpes.
©Garage Productions.
Un grand merci à Stéphane Cayrol, Julien Prudent et David Mamousse.
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