[Lu en 2012] En rédigeant une sélection bibliographique de cette collection de J. B. Pontalis, "L'UN et l'AUTRE ", je range mes propres exemplaires et retrouve ce texte très captivant et remettant à l'honneur un auteur, injustement tombé dans l'oubli !
J'écrirai de mémoire quelques lignes de ce beau texte , hommage intelligent et "nourri" à ce méconnu de la littérature française: Charles-Louis Philippe, qu' André Gide admira, aida... ira jusqu'à éditer des inédits, après la mort prématurée...de cet écrivain...
"La grandeur de Philippe, aurait pu, aurait dû ajouter Claudel, c'est d'avoir été à la fois au-dessous et au-dessus, l'opprimé et celui qui, par son travail, a réussi à s'élever au-dessus de l'oppression , de la douleur et de la servitude pour dire celles-ci. Philippe n'est pas - à la place-, il -est- le peuple, le peuple écrivain entrant de plain-pied en littérature. Et pour cela nous l'aimons infiniment. "
(p. 136)
Je note dans un petit coin de mon cerveau un texte de lui , inachevé, et défendu par André Gide. Il s'agit de "André Blanchard", un texte de "réparation" pour son père aimé, qu'il comprenait mal et réciproquement.
"Préface
Charles, son père, sabotier du village de Cérilly, dans l'Allier, avait mendié dans son enfance et puis, à force de travail , avait réussi à sortir de la misère. Son fils, qui meurt en décembre 1909, voudra lui consacrer son dernier livre, - Charles Blanchard-, mais le laissa inachevé. Les éditions
de la N.R.F le publieront en 1913, avec une très belle préface de Léon-Paul Fargue pour qui ces chapitres ne sont pas des "études" pour un tableau à venir, mais le tableau lui-même, sans cesse recommencé. Gide, qui imposera la publication des différents états du texte, considère que c'est le plus beau livre de Philippe; il en parle comme du "chantier des
tâtonnements incomparables" (p. 12)
Une biographie atypique, enflammée et convaincante... sur un écrivain
à connaître ou à re-découvrir...!!
"Quand on parle littérature, il n'y a plus de riches et de pauvres. "(p.115)
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Préface
Charles, son père, sabotier du village de Cérilly, dans l'Allier, avait mendié dans son enfance et puis, à force de travail , avait réussi à sortir de la misère. Son fils, qui meurt en décembre 1909, voudra lui consacrer son dernier livre, - Charles Blanchard-, mais le laissa inachevé. Les éditions de la N.R.F le publieront en 1913, avec une très belle préface de Léon-Paul Fargue pour qui ces chapitres ne sont pas des "études" pour un tableau à venir, mais le tableau lui-même, sans cesse recommencé. Gide, qui imposera la publication des différents états du texte, considère que c'est le plus beau livre de Philippe; il en parle comme du "chantier des tâtonnements incomparables" (p. 12)
La grandeur de Philippe, aurait pu, aurait dû ajouter Claudel, c'est d'avoir été à la fois au-dessous et au-dessus, l'opprimé et celui qui, par son travail, a réussi à s'élever au-dessus de l'oppression, de la douleur et de la servitude pour dire celles-ci. Philippe n'est pas - à la place de-, il -est- le peuple, le peuple-écrivain entrant de plain-pied en littérature. Et pour cela nous l'aimons infiniment. (p.136)
Tous les textes ne sont pas aussi violents, mais partout s'exprime ce sentiment de classe auquel Philippe reviendra toujours. Dans son cher Dostoïevski, il a lu qu'en russe, dans un certain contexte, le même mot peut désigner le criminel et le malheureux.
Ces chroniques, comme celles de la Revue blanche, mettent en cause toutes les formes du malheur social: l'enfermement dans les asiles, le statut des domestiques aussi bien que l'injustice des orphelins élevés dans la rue : revoilà le Philippe socialisant de l'Enclos Revue libertaire et anarchiste]- mais avec encore plus d'âpreté et une fascination certaine pour les exclus, marginaux, anarchistes de tout poil. (p. 109)
Se passionner pour un écrivain si singulier, pour son écriture, si peu commune. Admirer, avec peu d'envie, l'invraisemblable énergie du bonhomme, souvent malade, malheureux dans ses amours, mais renaissant sans cesse, transformant en livres toutes les circonstances d'une vie si difficile... Ultime injustice: cette mort si jeune, à trente-cinq ans. (p.21-22)
Toute chose humaine doit être vécue en enthousiasme, il faut se mouvoir au monde comme un enragé, et aimer ses amis par- dessus toute chose vivante.(p.46)
Bruno Vercier à la fête du livre à Toulon.