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Bernard Banoun (Traducteur)
EAN : 9782864323280
197 pages
Verdier (04/10/2000)
4/5   5 notes
Résumé :
Dans Cimetière des oranges amères, Josef Winkler partait pour l'Italie, non sans emporter avec lui les souvenirs de son pays natal, la Carinthie.
C'est là, dans le village en forme de croix déjà familier des lecteurs du Serf, qu'il revient pour ce récit. Les paysans carinthiens avaient coutume, pour éloigner les insectes, de badigeonner leurs chevaux d'un liquide à l'odeur nauséabonde fabriqué à partir d'ossements d'animaux. Maximilien, le narrateur, s'inspir... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Afin de se remonter le moral, quoi de mieux que ce macabre et funèbre oratorio ?
Cette heure qui vient, c'est bien celle de votre mort, inévitable et commune, donnant lieu à un empilement façon ossuaire, éternelle répétition de notre inamovible destin…
Chouette, hein ?

Non, désolé, je cabotine alors qu'il faut rendre hommage à ce livre, qui du sombre fait naitre la beauté, émouvant témoignage d'un auteur, marqué au plus profond de son être par la naturelle cruauté de sa contrée d'enfance, la rude et rurale Carinthie, région-frontière entre le monde slave et germanophone, encore peuplée d'une minorité slovène ayant refusé le projet yougoslave ; terreau de l'extrême-droite autrichienne, dont la présence historique, infection jamais traitée depuis la fin de la guerre, plane sur ce livre de manière affirmée.

C'est aussi de cette Carinthie que sont originaires Peter Handke, Robert Musil, et Thomas Bernhard, géants de la littérature européenne, alors que ce dernier y est particulèrement détesté…

Viscéralement autobiographique, tentative d'exorcisme de cet événement fondateur de son écriture, ce suicide de deux adolescents amoureux, dont il nous laisse en déduire la cause, se concentrant uniquement, comme pour le reste du livre, sur leurs deux cadavres suspendus puis décrochés, leurs érections et leurs yeux qu'il a fallu fermer.

Charges à peine dissimulées contre cette chrétienté, la catholique comme la réformée, ce calvaire des enfers érigé comme noeud psycho-géographique d'un village bâti en forme de croix.
Litanie affirmée du ramasseur d'ossements, discret historien de la banalité de ces drames, du dérisoire de nos vies :

« Dans la jarre où se préparait à partir des ossements d'animaux abattus le brouet d'os à l'odeur putride dont on badigeonnait le pourtour des yeux, des oreilles, les naseaux et le ventre des chevaux pour les protéger des mouches, des taons et des moustiques, reposent, tout au fond, les os des bras, arrachés dans une tranchée sur un champ de bataille… »
… se répétant à mesure des disparitions, escortée à l'occasion par les vers de Baudelaire, tirés de ses Litanies de Satan.

Une bien belle épreuve ; un deuil renouvelé plutôt qu'une catharsis envoyant tout balader.
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Un vrai choc de lecture, un roman à la fois lyrique, violent, sombre et ...magnifique.
Joseph Winkler est un écrivain de la même lignée que Thomas Bernhard, natif d'un village de Carinthie région rurale, catholique et repliée sur elle-même.
Cette chronique que l'on devine autobiographique est un condensé de la mémoire collective d'un village. C'est par les récits de son père qu'on accède aux histoires du villages, un père tout puissant incarnant l'ordre, l'autorité, le respect des traditions, l'obéissance aveugle à la religion et aux diktats de l'Eglise.

Entrons, et parcourons les rues de ce village en forme de croix et allons à la rencontre des habitants qui l'ont peuplés pendant les trente dernières années.
Le narrateur va tout à tour nous présenter 36 habitants de ce pays, 36 destinées frappées du sceau du pêché.
Il entrecoupe ses histoires d'une tradition locale qui veut que les paysans fabrique un brouet d'os qui en été « a la propriété repousser les insectes qui, les jours de canicule surtout, harcelaient les chevaux de trait dans les champs ».
Cette jarre va servir à accueillir métaphoriquement tout le non dit, toutes les actions nauséabondes des villageois et sa présence revient comme un leitmotiv accompagnée par les Litanies de Satan de Baudelaire « Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! »
Et les 36 récits nous livrent les haines, les peurs irrationnelles, les accidents, les maladies, les suicides, les crimes du villages.
Une jeune fille affolée par ses premières règles au point de se jeter dans le torrent, une femme attendant le retour de son fils mort depuis 15 ans, Léopold et Jonathan dix sept ans et tué par leur amour illicite.
Le silence qui s'abat sur tous. Les traditions étouffant toute révolte, la vie rythmée par les messes, les baptêmes, les enterrements.
Le temps passe mais il reste au coeur des villageois le regret du temps de la guerre, de la toute puissance, du temps où l'on pouvait maudire l'étranger, le juif, le réprouvé.

Disons le, c'est un livre difficile, terrible mais un livre saisissant, d'une beauté puissante et funèbre.
Si vous aimez la littérature de langue allemande faites connaissance avec Joseph Winkler dont on comprend bien à la lecture de ce livre, pourquoi ses concitoyen le déteste à l'égal de Thomas Bernhard.
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Comment ne pas songer à Thomas Bernhard (lu voilà bien longtemps désormais) ? Lorsque l'on considère qu'une lecture a pour fonction (entre autres, heureusement !) de poser des questions - sans forcément y répondre -, de nous faire prendre conscience de certains aspects de notre vie que le quotidien enfouit, voilà un ouvrage important.
L'auteur égrène ses souvenirs d'enfance de cette Haute Autriche, au passé parfois compromis ; l'auteur égrène les différentes morts des habitants de son village d'enfance et de ses environs, les rites mortuaires, les conditions de vie de cette époque, les relations intra-familiales, les dissimulations et les non-dits tabous ; c'est tout un monde disparu aujourd'hui (quoique). Mais cette relation (réelle ou complétée, inventée, c'est le privilège de l'auteur) suscite beaucoup d'écho chez le lecteur.
Et ce brouet nauséabond, qui revient comme une ritournelle, dont on entoure les yeux des chevaux afin d'en chasser les mouches comme pour éloigner également la mort.
Revenir à cet auteur.
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« Quand l'heure viendra » de Joseph Winkler (2000, Verdier, 208 p). le livre part d'une coutume qu'avaient les paysans carinthiens pour éloigner les insectes « Dans la jarre où se préparait à partir d'ossements d'animaux le pandapigl dont on badigeonnait les yeux, les naseaux et le ventre des chevaux pour les protéger des moustiques et des taons qui les harcèlent,de badigeonner leurs chevaux d'un liquide à l'odeur nauséabonde fabriqué à partir d'ossements d'animaux ». le narrateur, Maximilien reprend cette coutume et ramasse les ossements des morts que le village voudrait oublier pour rendre justice à leurs vies sacrifiées. C'est ainsi que l'histoire de Ludmilla Felfernig, quinze ans, qui découvrant ses premières règles, « barbouilla de sang son visage, le mur chaulé du calvaire et le crâne cornu du Diable » puis va se jeter dans la rivière.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Dans la jarre où se préparait à partir des ossements d'animaux abattus le brouet d'os à l'odeur putride dont on badigeonnait le pourtour des yeux, des oreilles, les naseaux et le ventre des chevaux pour les protéger des mouches, des taons et des moustiques, reposent, tout au fond, les os des bras, arrachés dans une tranchée sur un champ de bataille
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Dans la jarre où se préparait à partir d’ossements d’animaux le pandapigl dont on badigeonnait les yeux, les naseaux et le ventre des chevaux pour les protéger des moustiques et des taons qui les harcèlent,de badigeonner leurs chevaux d’un liquide à l’odeur nauséabonde fabriqué à partir d’ossements d’animaux
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Video de Josef Winkler (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Josef Winkler
En 1981, Josef Winkler loue une chambre dans une ferme de montagne de Carinthie, non loin de son village natal, afin d'y terminer son roman Langue maternelle (trad. Bernard Banoun, Verdier, 2008, prix de traduction Gérard de Nerval de la SGDL 2009). Ce dernier achevé, sa logeuse entreprend de lui raconter son histoire, qu'il enregistre au magnétophone. Comme d'autres, en 1943, elle et sa soeur furent arrachées à leur famille ukrainienne et amenées de force par l'armée allemande dans la campagne autrichienne, pour y travailler dans une exploitation agricole et ainsi compenser le manque de main-d'oeuvre. Josef Winkler découvre alors cette réalité occultée par l'histoire officielle autrichienne. Avec L'Ukrainienne, il donne la parole à cette femme, dont il livre une autobiographie bouleversante.
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