Les Coquillages de monsieur Chabre

Les Coquillages de Monsieur Chabre ou l'érotisme à demi-mot. Monsieur Chabre est un bon gros bourgeois parisien vaguement ridicule. Il a épousé une ravissante jeune femme de 20 ans sa cadette , jolie et pleine de vie. Enfin, pleine de vie, non justement puisque au bout de 4 ans de mariage, le couple est toujours stérile ce qui désespère le pauvre M. CHABRE. Sur les conseils d'un médecin original qui prétend que la consommation de coquillages favorise la fécondité masculine, le couple prend des vacances à Piriac près de Saint-Nazaire. Là-bas, il rencontre un beau jeune homme ravi d'accompagner Madame dans ses bains de mer, de l'initier à la pêche à la crevette et d'aller se faire coincer dans une grotte. Bref, les sous-entendus sont très lourds, bien plus que ceux De Maupassant dans Une partie de campagne mais c'est plaisant, amusant et agréable à lire.

Décidemment, j'en apprends chaque jour davantage sur l'imagination créatrice d'Emile Zola. Dans cette nouvelle, écrite pendant son séjour estival avec Alexandrine à Piriac en 1876, il nous présente un vaudeville conjugal des plus burlesques…

M. et Mme Chabre n'arrivent pas avoir d'enfants et décident de partir en villégiature en Loire-Atlantique sur les conseils d'un médecin. Ce dernier préconise un changement d'air bénéfique pour madame et un remède infaillible pour la fertilité de monsieur : il ne doit manger que des coquillages à chaque repas. le couple est à peine installé à Piriac, qu'un jeune et bel éphèbe dénommé Hector de Plougastel fait irruption dans leur vie, se liant d'amitié avec le mari pour mieux séduire Estelle, la jeune et ravissante épouse.

Quand les pensées de Zola se font badines et prennent le large sur l'océan dans un récit amusant, ce sont des bouffées de rire, dignes des pièces de théâtre de Georges Feydeau, qui agitent la surface de l'eau. Entre une épouse futée, un ami séduisant et un mari naïf, le trio de comédiens est réuni pour nous faire assister à des sketchs hilarants. Dans cette histoire vaudevillesque, où Estelle et Hector se jouent de M. Chabre, l'épisode de la grotte à Madame où les amants se réfugient participe au dénouement heureux du récit.
Durant ses nombreux séjours au bord de la mer, Emile Zola adorait se baigner et déguster des coquillages ; l'été 1876 à Piriac, lui fut particulièrement bénéfique, puisque c'est dans une humeur joyeuse qu'il laissa divaguer sa plume sur le papier, dans l'épanouissement de ses pensées fertiles, pour accoucher d'une nouvelle plaisante et divertissante.

Une nouvelle sympathique qui ressemble à un vaudeville digne de Feydeau, avec un vieux mari parisien ridicule qui a peur de l'eau, sa jeune et jolie femme de vingt ans de moins, et un jeune provincial hardi. Si l'intrigue est prévisible et le rapprochement entre la vie campagnarde et la fécondité n'est pas très original, l'intérêt du texte vient de la description du "désir du rivage" pour reprendre une expression de l'historien Alain Corbin. le tourisme balnéaire arrive, non plus dans la Normandie déjà touristique de Trouville avec ses hôtels et ses divertissements, mais dans une Bretagne encore un peu sauvage, avec ses falaises, ses sardines et ses grottes de rochers. Cependant, la belle Estelle n'hésite pas à nager, et Zola livre quelques belles lignes sur la parade sensuelle dans les flots marins, avec plus d'érotisme que dans un bal puisque les corps sont plus découverts.

Un court texte qu'Émile Zola aura peut-être écrit pendant ses propres vacances sur la Côte d'amour ? Une petite histoire de séduction, un grand bol d'air marin, des baignades et des coquillages, une campagne crottée et des parisiens en goguette, pour une histoire plaisante, mais dont le dénouement arrive à coups de gros sabots...