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Olivier Mannoni (Traducteur)
EAN : 9782348080272
180 pages
La Découverte (07/09/2023)
4.04/5   58 notes
Résumé :
Dominer le monde, exploiter ses ressources, en planifier le cours… Le projet culturel de notre modernité semble parvenu à son point d’aboutissement : la science, la technique, l’économie, l’organisation sociale et politique ont rendu les êtres et les choses disponibles de manière permanente et illimitée.
Mais alors que toutes les expériences et les richesses potentielles de l’existence gisent à notre portée, elles se dérobent soudain à nous. Le monde se refer... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Hartmut Rosa alterne le développement de concepts autour d'une idée maîtresse - accélération, résonance - dans des études volumineuses et ardues, et leur substance clarifiée dans des ouvrages courts, enrichis d'illustrations concrètes puisées dans la vie quotidienne. Ici, il nous parle de l'impasse à vouloir rendre le monde prévisible et maîtrisable. Autrement dit à le rendre disponible le plus largement possible. Or la vitalité, le contact et l'expérience réelle naissent de la rencontre avec l'indisponible. Les amateurs de football ou de tennis, par exemple, assistent à un match parce que le résultat est incertain, même en cas de forces disproportionnées en présence. Si tout est prédictible, comme on essaie de nous le vendre, alors la vie n'a plus de sel.
À force de vouloir paramétrer le moindre de nos gestes, de nos actes, de nos contacts, nous transposons un désir de relation fondamental chez l'être humain en un désir d'objet. Et nous ne sommes pas plus avancés quand des paramètres physiques (pulsations, glycémie, nombre de pas) entrent en contradiction avec des paramètres nutritifs. En fait connaître, dominer, conquérir, rendre utilisable un max de disponible, nous coupe de notre corps, de nos sensations. Nous oublions de nous laisser aller à la résonance, phénomène qui ne peut être obtenu, ni empêché de manière certaine. La résonance, c'est être touché, être atteint intérieurement par il ou elle. Un émotion, un frisson, un regard, une voix vous animent par surprise. Rendre le monde indisponible, c'est amener du vivant, au lieu d'agresser la nature en la malmenant au nom de la croissance indispensable à l'élargissement de la disponibilité du monde.
Nous ne pouvons pas attraper un flocon de neige, il fond dans la main. Les averses de flocons sont imprévisibles, c'est pour cela que nous avons envie de voir la neige tomber, surtout à Noël.
Le sociologue allemand est un des grands penseurs critiques de la modernité. Sa conclusion pessimiste incite à mettre les bouchées doubles afin de laisser une place incontrôlée à l'incertitude de la rencontre.
Lien : http://cinemoitheque.eklablo..
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L'auteur élabore sur son précédent ouvrage, Résonance, beaucoup plus riche et élaboré. Il pointe la contradiction entre une société tendue vers la maîtrise la plus complète possible du monde, et les conditions d'une « vie bonne », qui passe par l'ouverture à ce qu'on ne maîtrise pas. Il invite logiquement à repenser notre relation au monde... sans aller guère plus loin qu'énoncer cette intention.
Court, ce livre qui stimule la réflexion peut fournir un moyen d'aborder la pensée de l'auteur. Mais au risque d'un survol qui en rend bien moins le fond et la portée que les précédents. Et, au vu de la promesse de quatrième de couverture, d'un petit goût d'inachevé.
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Ce court essai philosophique est une porte d'entrée accessible et enthousiasmante à la pensée de Hartmut Rosa.
Dans notre monde moderne, les savoirs sont disponibles sur Internet à toute heure du jour et de la nuit, les régions les plus reculées du monde sont accessibles en safari à tout voyageur et les phénomènes physiques sont mesurés et disséqués jusqu'à complète maîtrise par l'Homme.
Paradoxalement, nous ne sommes pas plus heureux de ce contrôle.
Le monde ne résonne plus en nous ; nous ne sommes plus ni touchés ni transformés par lui. Sauf peut-être lorsque l'inattendu se produit, par exemple lors d'un match de football ou lorsque la neige nous surprend...
Comment pourrions-nous réinventer cette relation au monde ?
Le caractère philosophique de cet ouvrage pourrait effrayer les lecteurs qui, comme moi, n'ont plus beaucoup côtoyé le terme « phénoménologique » depuis la Terminale. A tort, car le propos est clair, progressif et bien illustré.
Ce texte donne vraiment envie d'approfondir la critique de la modernité de Hartmut Rosa, en découvrant ses essais antérieurs, autour des notions d'aliénation et d'accélération.
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Rendre le monde indisponible est le premier livre que je lis d'Harmut Rosa.
Il n'est pas très épais, mais je prends mon temps pour bien-être dans la pensée de l'auteur.
Idée intéressante celle de la disponibilité et l'indisponibilité du monde. Très bon ouvrage.
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Un livre original d'une auteure que j'ai decouvert par la même occcasion.Le style classique est bien adapte aux reflexions philosophique qui font le coeur de cette oeuvre.Un livre a part,tres riche avec beaucoup de concepts evoques,a decouvrir d'urgence.
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critiques presse (1)
Telerama
16 octobre 2023
Le sociologue et philosophe allemand bâtit […] une puissante critique de la modernité capitaliste. En particulier de ses pathologies, comme ce manque de temps qui nous aliène
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Vous rappelez-vous encore cette fin d'automne ou cet hiver de votre enfance où vous avez vu pour la première fois la neige tomber ? C'était comme l'irruption d’une autre réalité. Quelque chose de farouche, de rare, qui vient nous visiter, qui ploie et transforme le monde autour de nous, sans que nous y soyons pour quoi que ce soit, comme un cadeau inattendu. La neige est littéralement la forme pure de la manifestation de l'indisponible : nous ne pouvons pas entraîner sa chute ou dicter sa venue, pas même la planifier à l'avance avec certitude, du moins pas sur la longue durée. Et plus encore : nous ne pouvons pas nous rendre maîtres de la neige, nous l’approprier. Quand nous la prenons en main, elle nous glisse entre les doigts, quand nous la rapportons à la maison, elle fond et, si nous la plaçons dans le congélateur, elle cesse d'être de la neige. C'est peut-être pour cette raison que tant de personnes éprouvent l'ardent désir de la voir tomber, en particulier à Noël.
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Vous rappelez-vous encore cette fin d’automne ou cet hiver de votre enfance où vous avez vu pour la première fois la neige tomber ? C’était comme l’irruption d’une autre réalité. Quelque chose de farouche, de rare, qui vient nous visiter, qui ploie et transforme le monde autour de nous, sans que nous y soyons pour quoi que ce soit, comme un cadeau inattendu. La neige est littéralement la forme pure de la manifestation de l’indisponible : nous ne pouvons pas entraîner sa chute ou dicter sa venue, pas même la planifier à l’avance avec certitude, du moins pas sur la longue durée. Et plus encore : nous ne pouvons pas nous rendre maîtres de la neige, nous l’approprier. Quand nous la prenons en main, elle nous glisse entre les doigts, quand nous la rapportons à la maison, elle fond et, si nous la plaçons dans le congélateur, elle cesse d’être de la neige. C’est peut-être pour cette raison que tant de personnes – pas seulement les enfants – éprouvent l’ardent désir de la voir tomber, en particulier à Noël. De nombreuses semaines à l’avance, on harcèle les météorologues jusqu’à ce qu’ils nous répondent : y aura-t-il des flocons cette année ? Quelle en est la probabilité ? Et, bien entendu, les tentatives de rendre la neige disponible ne manquent pas : les stations de sports d’hiver font leur publicité en promettant des pistes blanches et certifient leur domaine « enneigement garanti ». Elles y contribuent à l’aide de canons à neige et mettent au point de la neige artificielle qui tient encore à 15 °C au-dessus de zéro.
Le drame du rapport moderne au monde se reflète dans notre rapport à la neige comme dans une boule de cristal : l’élément culturel moteur de cette forme de vie que nous qualifions de moderne est l’idée, le vœu et le désir de rendre le monde disponible. Mais la vitalité, le contact et l’expérience réelle naissent de la rencontre avec l’indisponible. Un monde qui serait complètement connu, planifié et dominé serait un monde mort. Ce n’est pas une découverte métaphysique, mais une expérience quotidienne : la vie s’accomplit dans l’interaction entre ce qui est disponible et ce qui, tout en restant indisponible pour nous, nous « regarde » pourtant. Elle se produit en quelque sorte sur cette ligne frontière.
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Et une première thèse directrice que je voudrais déployer dans cet essai pose que, pour les sujets de la modernité tardive, le monde est purement et simplement devenu le point d’agression. Tout ce qui apparaît doit être connu, dominé, conquis, rendu utilisable. Formulé abstraitement, cela paraît de prime abord banal. Mais ça ne l’est pas. Derrière ce constat se dissimule une refonte insidieuse de notre rapport au monde qui remonte loin sur le plan historico-culturel et économico-institutionnel, mais accède à une nouvelle radicalité au XXIe siècle, notamment avec les possibilités techniques offertes par la numérisation et par les contraintes politico-économiques d’extension et d’optimisation du capitalisme financier et de la compétition débridée.
J’exposerai cette thèse plus en détail dans les pages qui suivent, mais j’aimerais l’illustrer dès à présent à travers quelques exemples. Prenons le rapport à notre propre corps. Tout ce que nous en percevons a tendance à être placé sous la pression de l’optimisation. Nous montons sur la balance : il faudrait perdre du poids. Nous nous regardons dans un miroir : il faut faire disparaître ce bouton, effacer cette ride. Nous prenons notre tension : il faudrait la faire baisser. Le nombre de pas dans la journée : il faudrait l’augmenter. Le niveau de glycémie, le tour de poitrine, etc. ; tout cela, nous le rencontrons toujours sous forme d’une injonction d’amélioration, même si nous pouvons ignorer ou refuser l’injonction en question. Nous devrions par ailleurs aussi être plus sereins, plus détendus, plus attentifs et plus conscients de notre environnement, etc. Et ce que nous rencontrons en dehors de nous-même revêt également ce caractère d’exhortation : il faut escalader des montagnes, réussir des examens, progresser dans sa carrière, faire des conquêtes amoureuses, visiter et photographier des lieux (« Il faut avoir vu ça »), lire des livres, voir des films, etc. Même là où nous ne donnons pas du tout l’impression d’être animés d’un esprit de « conquête », on distingue cette attitude de manière non seulement latente, mais également manifeste : au club Ballermann 6 de Palma de Majorque, il faut « anéantir » ou « liquider » les rangées de verres ou les seaux d’alcool, et, dans le chœur, il s’agit par exemple de « maîtriser » (sans erreur) « ce compositeur difficile qu’est Mendelssohn ». La vie quotidienne des sujets moyens de la modernité tardive dans les zones que l’on attribue au monde dit « occidental et développé » se concentre et s’épuise de plus en plus dans le traitement de to-do lists exponentielles et les mentions que l’on porte sur ces listes définissent les points d’agression sous la forme desquels nous rencontrons le monde : les courses, le coup de téléphone à la tante dépendante, la visite chez le médecin, le travail, la fête d’anniversaire, le cours de yoga : régler, approvisionner, évacuer, maîtriser, résoudre, accomplir.
Arrivés à ce point, nous sommes certes enclins à poser cette question : n’est-ce pas ordinaire ? N’en a-t-il pas toujours été ainsi ? Le monde et la réalité ne nous apparaissent-ils pas toujours, à nous, humains, comme une résistance ? Cette normalisation et cette naturalisation d’un rapport agressif au monde constituent, telle est ma thèse, le résultat d’une formation sociale qui se fonde, structurellement, sur le principe d’une stabilisation dynamique et, culturellement, sur celui d’une augmentation continuelle de sa portée. Cette formulation paraît compliquée, et pourtant les réflexions qui la sous-tendent sont tout à fait simples.
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Ce petit livre et en particulier sa fin pessimiste ne constituent certainement pas un verdict définitif ni le dernier mot pour déterminer où passe la limite entre le disponible et l’indisponible, ou pour définir la bonne manière d’aborder l’indisponible du point de vue social. Ce n’est qu’une première tentative d’appréhender quelque chose que je crois pouvoir identifier comme une contradiction fondamentale de la modernité ; c’est une étape dans la réflexion sur le rapport entre la résonance et la disponibilité, étape peut-être susceptible d’éclairer les problèmes aussi bien politiques que personnels de notre quotidien, de même que les combats intérieurs et extérieurs que nous menons chaque jour. Il est possible qu’il contribue à expliquer d’où proviennent la frustration et la colère qui s’expriment contre la vie et la société, ainsi que le désespoir que nous inspire un monde qui, pourtant, nous est ouvert et disponible dans une mesure qui n’a pas de précédent historique. Tous ces phénomènes ne tiennent pas à ce qui nous est toujours refusé, mais à ce que nous avons perdu parce que nous en disposons et que nous le dominons.
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Nous sommes contraints structurellement (de l'extérieur), et poussés culturellement (de l'intérieur), à faire du monde le point d'agression ; il nous apparaît comme ce qu'il convient de savoir, d'explorer, d'atteindre, de s'approprier, de maîtriser et de contrôler. Souvent il ne s'agit pas de rendre des choses -des fragments du monde- atteignables en général, mais de les avoir à disposition plus facilement, à moindre coût, sans grande résistance et de manière plus sûre.

(...)ma thèse est que ce programme de mise à disposition du monde, imposé structurellement, et fonctionnant culturellement, comme une promesse, non seulement ne « fonctionne » pas, mais bascule littéralement en son contraire. Le monde rendu disponible sur les plans scientifique et technique, économique et politique, semble se dérober et se fermer à nous d'une manière mystérieuse ; il se retire, devient illisible et muet et plus encore, il se révèle à la fois menacé et menaçant et donc au bout du compte constitutivement indisponible.
p21 et 26
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Vidéo de Hartmut Rosa
L'urgence d'agir bouleverse notre rapport au temps et nous précipite dans un avenir, promesse de catastrophes et de pénuries. Comment alors dépasser le sentiment d'urgence qui nous écrase ? Comment dépasser notre état de sidération ? le philosophe et sociologue allemand Hartmut Rosa, auteur notamment de "Accélération. Une critique sociale du temps et de Rendre le monde indisponible" (La Découverte, 2020) refuse l'idée que nous serions déjà en retard et nous invite à ralentir pour agir.
#urgence #philosophie #etmaintenant _____________
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