Une somme épatante. Une fois de plus, Jodorowsky montre et donne beaucoup de ce qu'il est, de ce qu'il a à nous donner. Qu'est-ce que c'est riche, qu'est-ce que c'est foisonnant, qu'est-ce que c'est inventif, vif, énergique... Un vécu incroyable et une recherche personnelle sans fin, avec faim qui nous est offerte dans ce livre.
Quelques redites et redondances toutefois (surtout si vous avez déjà lu les autres ouvrages "théoriques" de l'artiste), mais woaw, y a énormément à prendre-comprendre et appliquer ici.
Même si l'aspect tarot vous rebute, vous y trouverez votre compte. La métagénéalogie, le psychochamanisme, psychomagie, tous ces concepts "inventés" par Jodorowsky sont mis en scène, expliqués, décortiqués avec full exemples.
L'arbre, source de mort(ifications), source de vies, comprendre, pour pardonner, dépasser les traumatismes si lointains. Un vrai travail de fourmi, de chercheur et ensuite avoir des cojones pour agir. Car seule l'acte "guérit". L'inconscient acceptant de bon coeur les métaphores, toute mise en scène, rejeu des situations traumatiques ou de scènes réparatrices peuvent fonctionner. Avec comme préalable indispensable et prérequis, non pas un diplôme, mais Jodorowsky insiste fort sur la formation, le vécu personnel de ces techniques, de ces méthodes, d'en comprendre parfaitement l'esprit et l'avoir ressenti, palpé... sans quoi les catastrophes, l'arnaque, l'échec peut survenir, au risque de plus de décrédibiliser ce qui pourtant fonctionne ! Les liens entre artiste et thérapeute sont clairs pour Jodorowsky. Et si beaucoup peuvent être des artisans de bonne qualité, peu ou moins, sont artistes et thérapeutes de génie...
Le corps est extrêmement et longuement sujet dans ce livre, à travers entre autres les massages (chamaniques ou plus classiques). Notre véhicule sacré...
Je n'en dirai pas long, mais l'aspect "plus que soi", transpersonnel comme J. le nomme est fondamental pour transcender son parcours, ceci est sous-jacent à tout le livre et est quelque chose à quoi il faut pouvoir adhérer pour justement adhérer à l'ouvrage.
Bon, je pourrais tout tout décrire et expliciter mais ce livre de plus de 800 pages est une somme, une Bible, et personne n'aura jamais la capacité de la résumer. J'espère simplement exprimer l'enthousiasme qu'un tel livre peut susciter. Tout en restant modeste car nul n'est parfait. Moi pas, Jodorowsky non plus. Reste juste à tracer son chemin (respectif) unique, original, tissé, construit à travers le passé, les bases, l'arbre duquel on survient, et dans une optique transpersonnelle, vers un but puissant, moteur de tout.
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Un gros pavé. Sur un sujet qui en fait rire beaucoup.
Pour ma part, j'ai eu un certain nombre de révélations, que je ne citerai pas, pour ne pas dévoiler aux futurs lecteurs, lesdites révélations. Car certaines m'ont fouettée, balançant certains a priori sur certains sujets.
Le plus marquant étant son explication du "pourquoi l'homme ne DOIT PAS couper le cordon ombilical de son enfant à la naissance, mais laisser la mère le faire (dans la mesure où celle-ci est en état de le faire bien entendu).
Bref, un gros pavé qui remet en cause notre héritage familial et la façon dont nous l'exploitons, sans nous en rendre compte.
Un livre extrêmement puissant qui ouvre des questionnements sur la façon dont nous élevons nos propres enfants, et ce qui pourrait être fait pour ne pas "recommencer" le mal que nous traînons de générations en générations.
En revanche, je n'ai pas forcément adhéré aux scènes décrites de psycho magie, dont le but est de se délivrer de ces fantômes du passé et de régler les comptes. Mais cela reste enrichissant tout de même.
Je résumerai ce livre avec le titre de la dernière partie : "La guérison de l'arbre, où l'héritier rebelle devient le rédempteur de la lignée."
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Ouf quel livre !
C'est à la fois passionnant et lourd : beaucoup d'idées (analyse de l'arbre généalogique, les problème transgénérationnels), mais aussi beaucoup de détails (psychomagie, massage) qui sont à la fois utiles pour comprendre, mais aussi difficiles et dangereux pour utiliser.
Globalement, c'est passionnant. J'y ai trouvé des choses qui m'ont interpellé. Ma femme aussi pour ses propres besoins.
Peut-être faut-il le lire par tranche, faire les exercices et reprendre la suite un mois plus tard.
En tout cas, on n'en sort pas indemne.
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L'acceptation de soi-même est héroïque car elle signifie l'effondrement des limitations intérieures crées par la famille,la société et la culture.Notre identité acquise est toujours insuffisante et défectueuse : elle est le contenant et non le contenu.Mais l'effondrement de cette carcasse ou le fendillement de ce masque nous terrifie,et nous avons tendance à le refuser.Notre grandeur,notre capacité de briller,d'aimer sans limites,de triompher,nous fait bien plus peur que notre petitesse.Surmonter cette peur suppose d'avoir un but plus élevé.Nous pourrions l'appeler amour de soi,amour de l'oeuvre que nous sommes en train d'accomplir,amour de tous ceux à qui cette oeuvre peut être bénéfique.C'est alors que des sentiments sublimes entrent en jeu : dés lors que nous acceptons l'effondrement du moi limité,nous entrons en contact avec la gratitude et la grâce.Ce remerciement essentiel ouvre le chemin vers nos propres qualités.
Exemple n°2 [de cas d'abus sexuel] : Il s'agit d'un homme qui a été abusé sexuellement par son cousin, plus âgé que lui de sept ans, sous le regard pratiquement complice du père. Celui-ci l'obligeait en effet à dormir avec son cousin chaque fois qu'il venait leur rendre visite. Le consultant a acheté un saucisson, dans lequel il a pratiqué un trou (une sorte de canal qui court sur toute la longueur), ainsi que deux testicules de boeuf. Il donne rendez-vous à son père pour une confrontation, mais au moment d'évoquer la réparation, il lui substitue une sorte de happening psychomagique : il pose sur la table le saucisson dont le centre a été rempli de lait concentré, ainsi que les testicules de boeuf, et écrase le tout à coups de marteau. Puis il sort en laissant son père face à la signification indéniable de l'objet posé devant lui : le père devra jeter ou enterrer ce phallus métaphorique qu'il a voulu ignorer à l'époque.
La solution de nombreuses névroses consisterait à rompre la relation avec les parents, mais peu de gens sont capables de s'y décider. S'ils sont conscients du mal qu'on leur a fait, ils continuent de subir à la fois leurs propres projections et la poursuite d'une relation basée sur la non-reconnaissance des abus : une partie d'eux persiste dans l'enfance. Ils attendent sans se l'avouer la mort de leurs parents pour devenir adultes tant il leur paraît impensable de couper les ponts avec eux.
La solution de nombreuses névroses consisterait à rompre la relation avec les parents, mais peu de gens sont capables de s'y décider. S'ils sont conscients du mal qu'on leur a fait, ils continuent de subir à la fois leurs propres projections et la poursuite d'une relation basée sur la non-reconnaissance des abus : une partie d'eux persiste dans l'enfance. Ils attendent sans se l'avouer la mort de leurs parents pour devenir adultes tant il leur paraît impensable de couper les ponts avec eux.
[Couple mère-enfant] Exemple n°4 : Quand c'est une fille qui se retrouve orpheline de père, elle souffrira de son absence, et, au moment de devenir femme, elle n'aura jamais entendu les phrases tendres et aimantes grâce auxquelles un père peut encourager sa fille à construire sa féminité : "Tu est belle", "Tu es naturellement gracieuse", "Quelle jolie voix tu as"...Lorsque le père disparaît, la fille peut avoir tendance à se tourner vers "l'autre vie", le royaume des morts, pour le rechercher. Au lieu de son père elle aimera un fantôme. Adulte, elle risque d'engager des relations avec des hommes qui ont du mal à s'incarner, idéalisés, absents ou malades.
Une femme qui ne cessait d'avoir des accidents l'obligeant à faire des séjours à l'hôpital se souvient que lorsqu'elle était enfant, son père, alcoolique, l'emmenait se promener et s'arrêtait dans tous les bistrots du quartier pour boire un verre au comptoir. Il rentrait à la maison sous la conduite de sa fille, ivre et joyeux. La petite, devenue son guide, l'adorait et ne sonrait pas à le critiquer. Mais son père tomba gravement malade et dut entrer à l'hôpital où il finit par mourir. L'entrée de cet établissement était interdite aux enfants. N'ayant plus jamais vu son père, elle sentait que l'hôpital le lui avait volé et le gardait prisonnier. Devenue adulte, elle provoqué inconsciemment des accidents pour pouvoir entrer à l'hôpital où elle cherchait la trace de son père chéri.