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EAN : 9782707306951
145 pages
Editions de Minuit (01/09/1984)
3.77/5   6171 notes
Résumé :
Roman autobiographique mis en image par Jean-Jacques Annaud, "L'amant" est l'un des récits d'initiation amoureuse parmi les plus troublants qui soit. Dans une langue pure comme son sourire de jeune fille, Marguerite Duras confie sa rencontre et sa relation avec un rentier chinois de Saigon.
Dans l'Indochine coloniale de l'entre deux-guerres, la relation amoureuse entre cette jeune bachelière et cet homme déjà mûr est sublimée par un environnement extraordinai... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (362) Voir plus Ajouter une critique
3,77

sur 6171 notes
Marguerite Duras nous ressert le couvert d'Un Barrage Contre Le Pacifique en écrivant cette sorte d'addendum trente-cinq ans plus tard, où elle redore le blason de celui qu'elle appelait alors Monsieur Jo et qu'elle ne nomme désormais plus dans L'Amant que "l'homme de Cholen", nous offrant, ce faisant, un genre de pendant à la Lolita de Nabokov, mais raconté du point de vue de la jeune fille.
Avec l'âge, la reconnaissance et la maturité, Marguerite Duras n'éprouve plus le besoin de romancer ou d'aménager ses souvenirs autobiographiques comme dans le Barrage. Ici, elle laisse couler ses souvenirs et ses sensations à la façon du cours paisible du Mékong et nous les livre, non pas bruts, car l'âge aidant, ils sont largement passés au tamis des omissions, des hypertrophies et des embellissements divers mais donnent un réel sentiment d'authenticité, car on sent bien qu'elle ne cherche plus à plaire.
On dirait plutôt un addendum, un testament littéraire sur sa vie à Sadec en Indochine, destiné à ses proches pour quand elle ne sera plus. Aussi, je conseille au lecteur de lire préalablement Un Barrage Contre Le Pacifique, qui est en quelque sorte la pièce maîtresse à laquelle l'auteur souhaite apporter des éclaircissements ou des modifications (notamment le fait qu'à l'époque où elle écrit le Barrage, sa mère et son frère aîné ne sont pas encore morts et elle ne peut donc pas avouer dans le livre ce qu'elle leur a caché durant toute sa vie, d'où le rôle tronqué de Monsieur Jo, qui retrouve ses lettres de noblesse dans L'Amant tandis que son frère Joseph subit, lui, plutôt une rétrogradation et devient moins attachant).
Néanmoins, il faut prévenir le lecteur qu'à aucun moment on ne retrouve la construction et la linéarité d'Un barrage Contre Le Pacifique. L'Amant est une somme de souvenirs souvent pêle-mêle comme notre cerveau les emmêle parfois en oubliant de les classer.
Stylistiquement, ces discontinuités et cette manière de ne pas nommer les personnages principaux engendrent un certain mystère et possèdent un potentiel lyrique et nostalgique indéniable, mais ce n'est là que mon avis, autant dire, pas grand-chose.
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J'ai adoré...refermer ce bouquin et passer à autre chose...
Un point commun cependant avec l'auteur , la lassitude profonde suscitée par la vision cinématographique d'Annaud à l'esthétisme outrancier et ennuyeux .
Point de discorde , enfin j'imagine , concernant le style Durassien qui m'a profondément déplu .
D'aucuns argueront que je manque cruellement de sensibilité ! Ça me ferait mal , j'ai adoré la quadrilogie des Rambo , argument imparable s'il en est...

S'il n'avait pas été autobiographique et rendu bien moins lisse par la présence de ce frere ainé traumatisant et de cette mere aux sentiments ambivalents , il est fort possible que je sois passé de l'ennui au coma le plus profond ! Les mots glissaient sur moi tels Balasko sur la poudreuse virginale dans " Les bronzés font du ski " ! Et là , je vous entends déjà me rétorquer : peut-etre que sur un malentendu , c'eut pu plaire ? Que nénni , point d'équivoque à l'horizon...Le constat est là , implacable avec cette impression d'avoir tourner les pages dans le brouillard le plus total...
J'aurais aimé , tel Gabin dans " Quai des brumes " , déclamer en le refermant : t'as de beaux yeux tu sais...Seulement voilà , ces premiers émois amoureux , dans un contexte familial et societal foncierement hostiles , m'ont laissé sur le bas coté . Aucune empathie , aucune adhésion à l'histoire...Malgré des themes interessants , ce livre ne me donna jamais l'impression de passer à coté de quelque chose d'intangible , prix Goncourt ou pas...
Foin de tergiversations , inutile d'en rajouter , ce livre n'était tout simplement pas fait pour moi mais saura certainement , vues les nombreuses ondes positives ressenties à sa lecture par le plus grand nombre , toucher en plein coeur le ou la romantique qui sommeille en vous !
Quant à moi , il ne me reste plus qu'à aller martyriser une nouvelle boite de kleenex devant ce poeme visuel et lyrique qu'était " Rambo 4 " ! J'suis trop sensible tiens..Beuaaaaahhh , Colonel...

L'Amant , histoire d'un rendez-vous manqué...
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« L'amant », livre écrit par Marguerite Duras en 1984 a reçu cette même année le prix Goncourt. Édité aux Éditions de Minuit en Juillet 2011, l'ouvrage est très court (137 pages) et se lit d'une traite bien qu'il fasse partie de ces livres qui présente plusieurs facettes.

Première facette, celle d'un amour impossible entre un Chinois richissime qui découvre le corps de Marguerite mais ne peut exprimer ses sentiments qu'à travers la parodie (page 61), Marguerite qui n'est alors qu'une enfant de quinze ans, avec un corps en pleine transformation. Ce Chinois, « l'homme de Cholen », n'aura pas la force de l'aimer, elle, contre son père, ce père Chinois qui obligea son fils à quitter la France alors qu'il y achevait ses études universitaires.

Deuxième facette, celle de la découverte par Marguerite de sa sexualité. Cette initiation amoureuse, Marguerite la vit comme une soif de savoir, une soif d'émotions, un jeu subtil où tout est permis, sans tabous : « c'est à elle de savoir » (page 46). Elle découvre le corps de l'homme de Cholen, mais aussi celui d'Hélène Lagonelle, un corps lourd, innocent, avec des seins à dévorer (page 88).

Troisième facette, celle de l'émancipation. Marguerite a quinze ans. Elle veut aller à la découverte du monde et couper le cordon ombilical avec sa famille. Adolescente, elle agit avec conviction, pleine de certitudes, voulant se mettre à l'écart de sa famille, pour la première fois et pour toujours (page 46). Cette démarche la projette dans le monde des adultes, loin des rêveries enfantines ; elle s'immerge dans une réalité nouvelle, pleine de surprises : se prostitue-t-elle vraiment quand elle couche avec son Chinois ? Elle n'en est pas convaincue, et puis elle ne peut échapper à certaines obligations envers elle-même, à commencer par l'obligation de tracer sa propre route.

Quatrième facette, celle d'une famille pas ordinaire. le père est absent, la mère est accablée, seule avec ses enfants, à savoir un fils ainé, un jeune frère et Marguerite. Cette famille, c'est une histoire commune de ruine et de mort (page 33). La mère hurle dans le désert de sa vie (page 55). le fils ainé est chéri par la mère (« mon fils, c'est mon enfant ») et haï par Marguerite car il dilapide la fortune familiale, vole sa propre mère, viole la domestique et menace son jeune frère. Ignorant Marguerite, il semble souffrir de ne pas pouvoir faire le mal librement (page 72). Marguerite lui préfère son frère cadet, d'ailleurs elle aime danser avec lui (page 66), avec cet attrait qu'exerce le rapprochement des corps. Elle lui portera un amour insensé (page 125). La mère est clairement folle (page 32) ; elle achète des couveuses électriques, y place 600 poussins qu'elle fait griller suite à une fausse manoeuvre ; en hiver, elle fait monter des moutons dans sa chambre. Folle et violente de surcroit : Marguerite, toute petite déjà, était nue et frappée, longtemps, jusqu'au danger, obscur et terrifiant (page 72), car les deux autres enfants ne sont jamais que « les plus jeunes » : le rejet est total, et cette mère -qui sait être intelligente, vive, gaie et d'un naturel incomparable (page 72)- porte en elle beaucoup d'amour et beaucoup de haine.

Cinquième facette, celle d'une Indochine de l'entre deux guerres avec ces Français qui vivent de chasse, de réceptions, de jeux et d'alcool au coeur de Saigon, avec ce pensionnat et ses règles strictes, ces grandes voies à l'américaine, sillonnées par les tramways, ces pousse-pousse, ces cars, ces terrasses qui donnent sur le Mékong, ces plantes vertes, comme mortes de chaleur sous la fournaise (page 54). Les blancs y vivent dans l'opulence et l'indifférence (pour ne pas dire le mépris) envers la population indigène. Ils résident dans des maisons bâties sur des terre-plein, isolées des serpents, des fourmis rouges et des inondations. L'après-midi, on y joue du piano en dégustant le thé apporté par les boys. Chez Marguerite, l'argent manque et les frères ne font rien pour y remédier : coucher avec l'homme de Cholen, c'est le moyen pour Marguerite d'obtenir des diamants, de l'or, du jade, de « sauver les apparences », d'affirmer leur statut de famille française en pleine Indochine, par fierté, par orgueil. L'argent, c'est le moyen de réaliser un rêve : retourner en France.

« L'amant », roman largement autobiographique de Marguerite Duras, plonge le lecteur dans des souvenirs jetés pêlemêle, au fil des pages, avec ce mouvement perpétuel d'allers-retours entre le passé, le présent et le futur. L'atmosphère est riche d'émotions, de mystère et de nostalgie. L'ouvrage, écrit avec sincérité, sans pudeur, avec mélancolie, dans un style, avec une syntaxe et une ponctuation si peu classiques (cf. ma citation), sur un ton lent et décousu, avec une grande économie de mots et des non-dits, laisse pointer, parfois à l'excès, le tragique, le pathos. de l'ennui ? Non point. Sur le ton de la confidence, Marguerite s'observe et dissèque ses émotions, de l'extérieur, résignée, avec calme et persévérance : laissant derrière elle le principal de sa vie, la misère (page 73), elle entrevoit son destin, écrire des livres (page 122). Belle recherche de soi, et bel aboutissement. Je recommande et mets quatre étoiles.
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L'amant, un classique de la bibliographie de Marguerite Duras, reste pour moi un merveilleux souvenir de lecture.
Marguerite Duras raconte, toujours avec une écriture fluide et directe, l'amour passionnel qu'elle a eu pour ce chinois, rencontré par hasard dans un bac sur le Mékong. L'histoire se passe dans l'Indochine des années 30, époque encore coloniale, où la différence culturelle et raciale se fait encore sentir.
C'est finalement une rencontre entre deux personnes que tout semble séparer: la classe sociale, les origines et la culture. Pourtant, Marguerite Duras connaitra avec ce chinois un amour passionnel et irraisonné, au vu de la société indochinoise, notamment de sa famille. En effet, cette relation sera très mal perçue par sa mère et son frère et des rapports conflictuels naîtront entre elle et sa famille.
J'ai beaucoup apprécié la façon dont Marguerite Duras raconte ses souvenirs, on ressent beaucoup d'émotion, de romantisme, de poésie et de sensualité dans ses écrits. Elle nous raconte cet amour avec beaucoup de sincérité et sans tabou.
Une passion dévorante qui restera longtemps dans le coeur de Marguerite Duras.
Un roman qui m'a émue et profondément marquée.
Une magnifique rencontre entre ces deux amants et entre Marguerite Duras et moi.
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Intensément présent à sa blancheur diaphane,
Intensément aligné à ses courbes frémissantes,
Intensément sarclé à ses hanches mouvantes
D'une jeune fille de 15 ans…
sur les rives du Mékong !

Métissage de peau en Indochine en 1930.
La garçonnière!

Elle est là ,
Dans le froissement des draps
Qui plient,
Qui ploient sous la tiédeur des rues de Saigon
Qui rugissent la voilure de l'envie,
Il estime, espère, respire son corps allègrement
pour y nicher son besoin vital d'elle.

L'amant chinois,
Qui contrôle, décale ,s'insinue dans ses chaires,
D'une jeunesse qui s'offre,
S'arrime à sa douceur,
Serpente dans ses sens en éveille,

Elle y dépose son cri,
Déesse exotique d'un instant ,
dans ce corps à corps fusionnel .

Etrange partance pour l'étroite
Prison de ces sentiments sans avenir.

Un richissime chinois déjà promis à une autre !

Juste la possibilité pour elle de cueillir l'instant présent !
Elle devra se détacher,
Briser les liens de ces anneaux d'amour ,
Partir sans se retourner
Sans chaine,
S'envoler,
Disparaitre
Vers cet ailleurs à quai…
Un bateau pour horizon !
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critiques presse (2)
LeFigaro
24 août 2022
C'est le grand livre d'une de nos plus grandes romancières qui, fouillant une fois de plus son passé et son présent, parvient à mettre en mots ses jeunes heures, sa souffrance, son urgence d'écrire, sa sagesse et sa déraison.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeMonde
27 juillet 2018
Pygmalion peut aller se rhabiller : l’homme adulte n’a pas l’ascendant logique sur la fillette vierge. Le désir flotte sur le fil du rasoir. Et le texte n’a pas pris une ride.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (408) Voir plus Ajouter une citation
Des années après la guerre, après les mariages, les enfants, les divorces, les livres, il était venu à Paris avec sa femme. Il lui avait téléphoné. C'est moi. Elle l'avait reconnu dès la voix. Il avait dit: je voulais seulement entendre votre voix. Elle avait dit: c'est moi, bonjour. Il était intimidé, il avait peur comme avant. Sa voix tremblait tout à coup. Et avec le tremblement, tout à coup, elle avait retrouvé l'accent de la Chine. Il savait qu'elle avait commencé à écrire des livres, il l'avait su par la mère qu'il avait revue à Saigon. Et aussi pour le petit frère, qu'il avait été triste pour elle. Et puis il n'avait plus su quoi lui dire. Et puis il le lui avait dit. Il lui avait dit que c'était comme avant, qu'il l'aimait encore, qu'il ne pourrait jamais cesser de l'aimer, qu'il l'aimerait jusqu'à sa mort.
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De temps en temps ma mère décrète : demain on va chez le photographe. Elle se plaint du prix mais elle fait quand même les frais des photos de famille. Les photos, on les regarde, on ne se regarde pas mais on regarde les photographies, chacun séparément, sans un mot de commen­taire, mais on les regarde, on se voit. On voit les autres membres de la famille un par un ou rassemblés. On se re­voit quand on était très petit sur les anciennes photos et on se regarde sur les photos récentes. La séparation a encore grandi entre nous. Une fois regardées, les photos sont rangées, avec le linge dans les armoires. Ma mère nous fait photographier pour pouvoir nous voir, voir si nous grandis­sons normalement. Elle nous regarde longuement comme d'autres mères, d'autres enfants. Elle compare les photos entre elles, elle parle de la croissance de chacun. Personne ne lui répond.
Ma mère ne fait photographier que ses enfants. Jamais rien d'autre. Je n'ai pas de photographie de Vinhlong, aucune, du jardin, du fleuve, des avenues droites bordées des tamariniers de la conquête française, aucune, de la mai­son, de nos chambres. [...]
Elle ne faisait jamais de photos de lieux, de paysages,. rien que de nous, ses enfants, et la plupart du temps elle nous groupait pour que la photo coûte moins cher. Les quelques photos d'amateur qui ont été prises de nous l'ont été par des amis de ma mère, des collègues nouveaux arri­vants à la colonie qui prenaient des vues du paysage équatorial, cocotiers et coolies, pour envoyer à leur famille.
Mystérieusement ma mère montre les photographies de ses enfants à sa famille pendant ses congés. Nous ne voulons pas aller dans cette famille. Mes frères ne l'ont jamais con­nue. Moi, la plus petite, d'abord elle m'y tramait. Et puis ensuite je n'y suis plus allée, parce que mes tantes, à cause de ma conduite scandaleuse, ne voulaient plus que leurs filles me voient. Alors il ne reste à ma mère que les photogra­phies à montrer, alors ma mère les montre, logiquement, raisonnablement, elle montre à ses cousines germaines les enfants qu'elle a. Elle se doit de le faire, alors elle le fait, ses cousines c'est ce qui reste de la famille, alors elle leur montre les photos de la famille. [...] C'est dans cette vaillance de l'espèce, absurde, que moi je retrouve la grâce profonde.
Quand elle a été vieille, les cheveux blancs, elle est allée aussi chez le photographe, elle y est allée seule, elle s'est fait photographier avec sa belle robe rouge sombre et ses deux bijoux, son sautoir et sa broche en or et jade, un petit tron­çon de jade embouti d'or. Sur la photo elle est bien coiffée, pas un pli, une image. Les indigènes aisés allaient eux aussi au photographe, une fois par existence, quand ils voyaient que la mort approchait. Les photos étaient grandes, elles étaient toutes de même format, elles étaient encadrées dans des beaux cadres dorés et accrochées près de l'autel des an­cêtres. Tous les gens photographiés, j'en ai vus beaucoup, donnaient presque la même photo, leur ressemblance était hallucinante. Ce n'est pas seulement que la vieillesse se res­semble, c'est que les portraits étaient retouchés, toujours, et de telle façon que les particularités du visage, s'il en restait encore, étaient atténuées. Les visages étaient apprêtés de la même façon pour affronter l'éternité, ils étaient gommés, uniformément rajeunis. C'était ce que voulaient les gens. [...] Et cet air qu'avait ma mère dans la photographie de la robe rouge était le leur, c'était celui-là, noble, diraient certains, et certains autres, effacé.
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page 108 [...] Ma mère a dit à la directrice de la pension : ça ne fait rien, tout ça c'est sans importance, vous avez vu ? ces petites robes usées, ce chapeau rose et ces souliers en or, comme cela lui va bien ? La mère est ivre de joie quand elle parle de ses enfants et alors son charme est encore plus grand. Les jeunes surveillantes de la pension écoutent la mère passionnément.Tous, dit la mère, ils tournent autour d'elle, tous les hommes du poste, mariés ou non, ils tournent autour de ça, ils veulent de cette petite, de cette chose-là, pas tellement définie encore, regardez, encore une enfant. Déshonorée disent les gens ? et moi je dis : comment ferait l'innocence pour se déshonorer ?
La mère parle, parle. Elle parle de la prostitution éclatante et elle rit, du scandale, de cette pitrerie, de ce chapeau déplacé, de cette élégance sublime de l'enfant de la traversée du fleuve, et elle rit de cette chose irrésistible ici dans les colonies française, je parle, dit-elle, de cette peau de blanche, de cette jeune enfant qui était jusque-là cachée dans les poste de brousse et qui tout à coup arrive au grand jour et se commet dans la ville au su et à la vue de tous, avec la grande racaille milliardaire chinoise, diamant au doigt comme une jeune banquière, et elle pleure. [...]
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Je lui dis que (..) je suis dans une tristesse que j'attendais et qui ne vient que de moi. Que toujours j'ai été triste. Que je vois cette tristesse aussi sur les photos où je suis toute petite. Qu'aujourd'hui cette tristesse, tout en la reconnaissant comme étant celle que j'ai toujours eue, je pourrais presque lui donner mon nom tellement elle me ressemble.
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Il n'y avait pas un souffle de vent et la musique s'était répandue partout dans le paquebot noir, comme une injonction du ciel dont on ne savait pas à quoi elle avait trait, comme un ordre de Dieu dont on ignorait la teneur.
Et la jeune fille s'était dressée comme pour aller à son tour se tuer, se jeter dans la mer et après elle avait pleuré parce qu'elle avait pensé à cet homme et elle n'avait pas été sûre tout à coup de ne pas l'avoir aimé d'un amour qu'elle n'avait pas vu parce qu'il s'était perdu dans l'histoire comme l'eau dans le sable et qu'elle le retrouvait seulement maintenant à cet instant de la musique jetée à travers la mer...
[...] Des années après la guerre, après les mariages, les enfants, les divorces, les livres, il était venu à Paris avec sa femme. Il lui avait téléphoné...
Et puis il le lui avait dit. Il lui avait dit que c'était comme avant, qu'il l'aimait encore, qu'il ne pourrait jamais cesser de l'aimer, qu'il l'aimerait jusqu'à sa mort...
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