Charlotte. Lotte, pour les intimes. Toute une génération de jeunes filles se sont appelées ainsi après que
Goethe en ait fait l'héroïne de son roman
Les souffrances du jeune Werther. Mais cette Charlotte n'était pas seulement un personnage de fiction, eh non : le grand auteur allemand s'est inspiré d'une jeune femme de sa connaissance, Charlotte Buff, dont le charme laissera une marque profonde. Et un roman populaire ! Malheureusement, la demoiselle épousera un certain Kestner et s'installera avec lui dans une autre région de l'empire. Quelques années plus tard, en 1816, Charlotte reviendra dans sa ville natale et rencontrera
Goethe une ultime fois.
C'est ce dernier épisode, la rencontre entre une Charlotte et
Goethe, vielillis tous les deux, qu'un autre grand auteur,
Thomas Mann, réinvente un peu plus de 100 ans plus tard dans son roman
Lotte à Weimar. L'idée était originale et très intéressante. Bel hommage ! Charlotte, une femme un peu sur le déclin, appauvrie, qui sait qui a inspiré une passion violente à un jeune homme devenu une légende vivante. En visite dans sa ville natale, celle où l'écrivain réside, elle auant qu'elle espère autant qu'elle appréhende cette rencontre inévitable. Comment se passera-t-elle ?
Goethe rencontre Mann, deux piliers de la littérature allemande. Ça ne pouvait que mener à une oeuvre remarquable !
Malheuresement, je ne suis complètement convaincu du résultat. le style de Mann, que j'ai adoré partout ailleurs, je le trouvais ici un peu ampoulé. Et les descriptions qui n'en finissaient plus de finir alourdissaient l'intrigue.
Mais le pire étaient les personnages. Charlotte me paraissait trop légère, presque comme une de ces précieuses ridicules, qui reçoit visiteur après visiteur et traite avec eux sur un ton badin. En effet, dès l'arrivée en ville de LA Charlotte, celle qui a servi de modèle à
Goethe, une foule se bouscule au portillon, à l'hôtel où elle est descendue, pour croquer son portrait, lui connaître sa version, lui raconter mille et une histoire supposément d'importance capitale pour elle. Tous ces invités surprise, sans oublier le serviteur de l'hôtel, me semblaient trop caricaturaux. Quand vient enfin la fameuse rencontre avec le grand auteur, vers la fin du roman, l'intérêt n'y était plus. Et heureusement, sinon j'aurais été déçu : transformé en bourgeois, «Charlotte le reconnut et ne le reconnut pas […]» (p. 330) Les effets dévastateurs du temps n'épargnent personne. C'est sans doute assez près de la réalité (qui déçoit plus qu'autre chose) mais, malgré cela, je m'attendais à davantage.
Dommage, j'aurais tant souhaité aimer
Lotte à Weimar…