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EAN : 9782072988585
Gallimard (05/10/2023)
4.2/5   210 notes
Résumé :
Alors que la menace de Tchernobyl plane sur l’Europe, la vie londonienne de l’aspirant poète Roland Baines se fissure soudainement. Peu après la naissance de leur fils, son épouse l’abandonne pour se consacrer à l’écriture de son roman, plutôt qu’à son rôle de mère. Commence alors pour Roland une trépidante exploration de son passé afin de remonter aux prémices d’un tel échec. Par bribes se dévoilent ses premières années vécues en Libye auprès d’un père tyrannique. ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (36) Voir plus Ajouter une critique
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Le léopard ne change pas ses taches.
Ce n'est pas de l'ODP31 après une insomnie passée en compagnie d'un reportage animalier au milieu de la Savane à attendre le trépas d'un gnou, innocent mais un peu trop lent, ce n'est pas davantage une pub pour de la lessive, mais la citation d'un petit auteur confidentiel inspiré mais expiré, Shakespeare. Il y a pire.
Les deux principales leçons retenues du pavé de 650 pages de Ian McEwan c'est primo, que l'individu ne change pas malgré les épreuves, que les traumas de l'enfance sont plus tenaces qu'un tatouage raté avec le prénom d'une ex, et deuxio, que le destin n'est pas qu'une affaire de volonté. Autant dire que le célèbre auteur britannique ne va pas abandonner la littérature pour se lancer dans une carrière de coach de vie.
Roland Baines, pas dénué de talent mais souffrant d'une grosse carence en combativité, est quitté sans préavis par son épouse après la naissance de leur fils car elle veut consacrer sa vie entière à la littérature. Cette rupture, qui intervient au moment du passage du nuage de Tchernobyl, gentil petit amas de vapeur condensée d'iode et de césium parti faire de la Tyrolienne jusqu'à nos thyroïdes, va faire refluer un destin abimé. Celui d'une enfance en carence d'affection avec un père militaire et autoritaire, une mère en expiation. Celui d'une adolescence abandonnée sans petits cailloux dans un pensionnat austère et d'une innocence abusée par une prof de piano, qui ne jouait pas que du piano debout, mais couchée sur son élève. Tout était écrit.
Ian McEwan vient donc de publier son « homme sans qualité », il fait muMusil avec le destin d'un antihéros qui traverse l'histoire, sa vie et les grands évènements de ce monde comme un chroniqueur désabusé par lui-même. Plus spectateur de sa vie que supporter de ses rêves. Etudes ratées, petits boulots, pianiste de bar, poète de slogans publicitaires, amant quitté, le lecteur a tantôt envie de sortir Roland Baines de ses eaux stagnantes pour l'aider, tantôt le désir de l'y noyer.
Le planté de drapeau se mérite à la dernière page mais j'ai apprécié la construction du roman qui joue avec la chronologie de souvenirs désordonnés.
L'auteur entremêle biographie et fiction puisqu'il partage avec son personnage les mêmes années et lieu de naissance et ses parents lui avaient également caché certaines boutures généalogiques.
Comme Jonathan Coe, Ian McEwan excelle également dans la rencontre de ses personnages avec l'histoire récente. Les passages consacrés à la chute du Mur de Berlin son parmi les plus réussis du livre. La petite histoire dans la grande histoire sans faire trop d'histoires.
Je ne rangerai pas ce titre dans les classiques de Macaniche McEwan car un petit régime minceur aurait pu l'alléger d'une bonne centaine de pages sans nuire à son IMC (Indice à mots couverts) mais « Leçons » fait bien ses devoirs avec des personnages aussi complexes que tordus. Les suivre toute une vie permet de voir comment chacun s'arrange avec sa conscience, quitte à réécrire l'histoire.
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Qu'est-ce qui fait une vie ? Tous les destins sont le produit de circonstances, « événements et accidents, personnels et mondiaux, minuscules et capitaux » , qui nous lancent sur un chemin plutôt qu'un autre. « le monde se divise à chaque instant concevable en une infinitude de possibilités invisibles. » Et si, « tous ces itinéraires qui n'[ont] pas été empruntés », l'on jouait le temps d'un livre à les imaginer « encore présents et praticables » ?


C'est un peu l'aventure dans laquelle, avec génie et humour, Ian McEwan s'est lancé en imaginant une sorte d'envers, à la fois à sa propre histoire et au point de vue habituel de la société, au travers des mémoires d'un homme, non seulement passé à côté de sa vocation artistique, mais aussi abusé par une femme pendant l'adolescence, puis abandonné avec un bébé sur les bras par une autre, prête à tous les sacrifices pour le bien de sa carrière littéraire. Et toujours, infléchissant le destin de ses doubles de fiction, le poids de l'Histoire, avec ses hauts et ses bas plus ou moins visibles sur l'instant, mais qui n'en tissent pas moins l'inextricable toile d'araignée dans laquelle tous tentent avec plus ou moins de bonheur de tracer leur chemin.


Lorsque s'ouvre le récit, Roland Baines, trente-sept ans et vivotant de ses petits métiers, se retrouve seul avec Lawrence, son fils âgé de six mois. Alissa vient de les abandonner tous deux, avec pour seule explication qu'elle s'était trompée de vie. Pour Roland commence une longue rumination de ses échecs, lui dont l'existence, sautée brutalement, comme celle de l'auteur, de Tripoli où son père, officier écossais de l'armée britannique, était en poste, à un pensionnat britannique, fut comme « reprogrammée » à partir de ses onze ans par l'influence d'un professeur. Si, dans la vie réelle, ce « professeur extraordinaire » transmit à Ian McEwan le feu sacré de la littérature, geste essentiel dans le parcours du futur écrivain, le rôle est tenu dans le roman par une professeur de piano, autoritaire et possessive, qui, éprise de l'adolescent plus encore que de ses réels talents musicaux, le tiendra sous son emprise sexuelle entre ses quatorze et seize ans. Une expérience – en ces années 1970 où d'aucuns défendaient la pédophilie au nom de la liberté sexuelle – qui devait secrètement, mais irrémédiablement, bouleverser sa future vie sentimentale, lui interdisant longtemps le bonheur, mais aussi mettre un terme à ses études et gâcher son avenir artistique. Ainsi réduit à la précarité, seul et sans formation, c'est lui qui, plus tard, se retrouvera empêché, comme les filles-mères autrefois, par une paternité célibataire dans des conditions économiques difficiles.


On le voit, l'ironie n'est pas exempte de ce récit d'une réalité parallèle, produit d'événements aussi fortuits que celle vécue en vrai par l'auteur, que la narration s'emploie à malaxer avec les mêmes ingrédients historiques. Fait des mille riens – et pourtant – d'une existence anonyme, ce récit de toute une vie est aussi, avec un naturel incroyable d'aisance, de précision et de clairvoyance, une fresque, ample et ambitieuse, retraçant cent ans d'évolution de la société britannique en particulier, du monde en général. Des étudiants antinazis de la Rose Blanche éliminés par le régime hitlérien au temps du père allemand d'Alissa à la chute du mur de Berlin en passant par la crise des missiles à Cuba ou encore par le nuage de Tchernobyl, des excès du libéralisme thatchérien au Brexit mais aussi, plus largement, à la prise de conscience de la vulnérabilité de la planète, tous les baby-boomers retrouveront en ces pages l'écrin historique de leur propre parcours de vie.


S'il est ici question de leçons, ce n'est sûrement pas de vie, alors que, balle dans le flipper de la vie, chacun pourra, comme l'auteur et ses personnages, entre ironie, tendresse et nostalgie, calquer son propre itinéraire sur la vitre de l'Histoire, mais, sans conteste, de génie littéraire, confirmant, s'il en était besoin, la place de choix occupée par Ian McEwan dans le paysage littéraire britannique et mondial. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Nous ne serions pas seuls maîtres à bord ?
J'ai peine à vous croire.

Leçons, roman de l'auteur britannique Ian McEwan, reprend beaucoup d'éléments autobiographiques : père officier sorti du rang, enfance aux colonies, pensionnat anglais et une situation familiale comportant de lourds secrets. Toutefois, Il a rajouté un élément majeur, l'abus sexuel, pour mettre ce qui aurait pu être un récit autobiographique sur un toute autre trajectoire. C'est que Roland, le personnage principal, est loin d'être un auteur à succès.

Roland fait partie de ces gens qui ne trouvent jamais leur voie. Il est assez doué pour pas mal de choses, mais ne se sent pas capable de choisir, de concrétiser, de s'engager. Sans doute l'abus dont il a été l'objet a-t-il mis en marche une réaction en chaîne qui l'empêche de terminer ses études secondaires, d'avoir une relation satisfaisante avec une partenaire ou de vivre autrement qu'en collectionnant les petits boulots qui lui permettent tout juste d'élever son fils. Un fils qui pourrait être la seule constante dans la vie du père, son succès, mais qui, bien que matheux surdoué, répète dès l'adolescence le schéma paternel : sortie prématurée de l'école , petits métiers, errances…Même si l'espoir reste permis : il poursuit une Maîtrise en sciences climatiques malgré l'absence de Bac. Pour Roland aussi il reste une lueur d'espoir : en vieillissant, il commence à s'interroger, et ce qui a été une existence au jour le jour pourrait prendre sens, devenir une vie…

McEwan s'est posé la question de savoir ce qui nous mène. Les choix personnels ? Ce que notre environnement direct attend de nous ou nous impose ? Ou bien sommes-nous emportés par de grands mouvements collectifs, tels que les guerres, les crises économiques ou les changements à la direction de l'État ? Quelle est la part du hasard ou de la chance dans ce qui nous arrive ? Dans quelle mesure sommes-nous des acteurs délibérés ? Sommes-nous même prisonniers des choix faits ou subis par nos parents ou grands-parents ? Leçons montre tous ces facteurs en interaction dans le cadre d'un roman et des personnages principaux qui le peuplent. Il semble favoriser l'hypothèse que un ou plusieurs de ces facteurs peuvent être à l'oeuvre pour pousser le cours d'une vie dans une direction donnée, nous mettant alors sur un chemin qu'il est très difficile de quitter.

J'ai été très intéressé par les thèmes de Leçons, mais je n'ai pas accroché ni au style ni à la structure qui - au moins dans la première partie- m'a semblé aussi chaotique que le parcours de Roland. Certainement un effet voulu par l'auteur, mais je ne l'ai pas apprécié. Et ça m'a semblé long, très long. Aussi long qu'une existence faite de bric et de broc qui ne semble pas rimer à grand'chose. Six cents pages pour montrer la vulnérabilité d'une vie humaine : était-il bien nécessaire d'enfoncer ainsi une porte ouverte ? Je ne le pense pas.




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Il approche, mais pas de la même façon selon qu 'on soit Allemand,Français ou Britannique. le nuage de Tchernobyl va croiser la vie de Roland Baines dans une période compliquée : Tout juste papa, sa femme l'a plaqué, essaimant derrière elle quelques cartes postales la menant en Allemagne.

C'est le point de départ de ce magnifique roman qui va nous faire traverser l'existence de Roland de sa naissance à la fin des années 40 jusqu'au début des années 2020.
Bien sur on croise L Histoire britannique , miss Maggie, Gordon Brown ou John Major, les excités du Brexit mais aussi celle de l'Allemagne où se passe une bonne partie du roman. Et l'on peut se demander , comme le fait Roland inconsciemment si la politique , le nuage , le mur qui tombe influencent notre vie ? Oui, non , peut être ? sans doute.

On va tenir la main de Roland , que ce soit lors de sa rencontre avec la folle du cul qui lui apprend le piano , avec ses conquêtes , en papa touchant, en mari aimant après la soixantaine, en homme avec ses fragilités , ses certitudes, on va le regarder travailler en free lance , un peu de piano , quelques poèmes . Et on va s'attacher, on a le temps en 650 pages.
On va naviguer entre les époques , mais Ian McEwan est un formidable capitaine , il ne nous perd pas et nous pousse à nous questionner sur l'existence et particulièrement sur ce qu'est une existence réussie.
Il nous livre ici deux chemins qu s'éloignent, recueillant postérité ou bonheur familial.
Tous les personnages sont travaillés, tout est magnifiquement amené et développé.
Ce livre est à l'image de son auteur , brillantissime .
Un gars qui a pu me captiver sur la plage de Chesil où il ne s'est rien passé ne pouvait pas me décevoir dans le roman d'une vie , sans doute , un peu la sienne , en tous les cas celle qu'il aurait eu s'il n'avait pas écrit, comme il le répète dans ses interviews.
J'ai oublié de vous parler de tellement de choses que je ne vais même pas chercher , d'autres l'auront sans doute fait pour moi.
Putain , ça fait du bien de lire de tels romans.
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Comme Jonathan Coe dans le royaume désuni , ce récit mêle habilement petite histoire et grande histoire. La petite histoire, c'est celle de Roland Baines, poète, pianiste, professeur de tennis, touche à tout désinvolte et perpétuel rêveur. La grande histoire, c'est bien sûr celle de la Grande Bretagne, pays natif de Roland, double fictionnel de Ian McEwan, mais également celle de l'Allemagne de ces 80 dernières années, avec quelques épisodes incontournables : la rose blanche, la RFA et la RDA, la chute du mur de Berlin.
Quelques faits marquent la vie de Roland et façonnent son caractère : un père rigide, une agression enfant, un secret de famille, le départ de sa femme pour se réaliser en tant qu'écrivaine. Des faits qui vont le construire, et construire ses relations avec les autres. Et qui font de ce anti-héros un personnage attachant et émouvant, presque un ami, que l'on quitte avec regrets.
Enfin, comme toujours avec Ian McEwan, c'est écrit brillamment et comme l'évoque le titre de ce roman passionnant, c'est une belle leçon sur la complexité du monde, des êtres et le sens de la vie. le bilan doucement mélancolique d'une existence…
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critiques presse (6)
LeJournaldeQuebec
22 février 2024
Chaque roman du Britannique Ian McEwan est une véritable expérience en soi. Parce qu’il va se faire bouleversant, parce qu’il va déboucher sur ce que l’humain peut accomplir de pire, parce qu’il va réussir à nous ébranler d’une manière ou d’une autre. Et Leçon n’échappe pas à la règle.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
LaCroix
07 novembre 2023
En brossant le portrait d’un homme désarmé par la dureté du monde, Ian McEwan met son existence en miroir. L’écrivain britannique signe un roman ample et sensible, traversé par l’histoire, hanté par la perte.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LeMonde
26 octobre 2023
En [...] offrant la ma­gnifique construction de "Leçons" [à Roland], en transformant ce destin en un roman vaste et absorbant, Ian McEwan montre à quel point son héros se trompe.
Lire la critique sur le site : LeMonde
SudOuestPresse
23 octobre 2023
Voix essentielle du roman britannique contemporain, Ian McEwan revient avec un antihéros au charme touchant et aux rêves perdus.
Lire la critique sur le site : SudOuestPresse
LaLibreBelgique
20 octobre 2023
Ian McEwan a donné quelques-uns de ses propres traits biographiques à l'attachant Roland.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LeFigaro
16 octobre 2023
L’un des plus célèbres romanciers britanniques actuels peint le portrait de Roland Baines, héros contemporain, dont la vie lui a peu à peu filé entre les doigts. Touchant et brillant.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (41) Voir plus Ajouter une citation
La tentation des vieillards, nés au beau milieu des événements, était de voir dans leur mort la fin de tout, la fin des temps. De cette façon leur mort aurait plus de sens. Il acceptait de voir le pessimisme comme un bon compagnon de la réflexion et de l’étude, et l’optimisme comme l’affaire des hommes politiques, que personne ne croyait. Il connaissait les raisons de se réjouir et avait parfois cité les indicateurs, les taux d’alphabétisation et ainsi de suite. Mais c’était par comparaison avec un passé épouvantable. Impossible de le nier, de nouvelles horreurs nous entouraient. Des nations gouvernées par des gangs criminels en cols blancs ne cherchant que leur enrichissement personnel, maintenus en place par des services de sécurité, par la réécriture de l’Histoire et un nationalisme passionné. La Russie n’était qu’un exemple parmi d’autres. Les États-Unis en proie à un délire colérique, conspirationniste et suprémaciste pouvaient en devenir un autre. La Chine faisait mentir l’affirmation selon laquelle le commerce avec le monde extérieur ouvrait les esprits et les sociétés. Avec les technologies à sa disposition, elle pouvait perfectionner l’État totalitaire et offrir un nouveau modèle d’organisation sociale pour concurrencer ou remplacer les démocraties libérales – une dictature reposant sur une circulation fiable des biens de consommation et un certain degré de génocides ciblés. Le cauchemar de Roland était que la liberté d’expression, un privilège en recul, ne disparaisse pendant mille ans. L’Europe chrétienne du Moyen Âge s’en était passée tout aussi longtemps. L’islam n’y avait jamais attaché beaucoup d’importance.
Mais chacun de ces problèmes était local, limité à la modeste échelle du temps humain. Ils se réduisaient à un noyau amer contenu dans la coque d’un problème plus vaste, le réchauffement de la planète, la disparition des animaux et des plantes, la perturbation des systèmes interdépendants que sont les océans, la terre, l’atmosphère et la vie, magnifiques équilibres nourriciers que nous forcions à changer sans bien les comprendre.
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Je n'avais jamais profité de notre vie ensemble. J'en étais incapable parce que je pensais avoir été trahie par l'existence. C'est le mot qu'elle a employé . Betrogen . J'étais incapable de me laisser aller, d'être joyeuse et d'aimer la vie que j'avais avec ma fille. Et parce qu'elle même m'aimait, parce qu'elle était si proche, elle non plus ne s'était jamais autorisée à être heureuse. C'aurait été une seconde trahison. Au lieu de quoi elle m'emboîtait le pas, m'imitait, devenait moi. Elle aussi était aigrie dans l'existence. Impossible de trouver un éditeur pour ses deux livres. Elle aussi avait échoué à devenir écrivaine. Elle aussi ..."
Jane s'arrêta et se frotta le front avec son index.
"J'ignore si j'ai le droit de vous en parler...
- Allez-y.
- Très bien. Elle aussi s'est trompée en se mariant. Elle vous prenait pour quelqu'un de génial et de bohême. Votre talent de pianiste la séduisait. De la même façon que j'avais pensé qu'Heinrich avait été un héros de la résistance et continuerait à l'être. Vous l'aviez trompé sur la marchandise. " C'est un dilettante, Mutti, il ne se tient à rien. Il y a dans son passé des problèmes qu'il ne veut même pas affronter. Il n'arrive à rien. Et moi non plus. Ensemble on sombrait. Puis il y a eu le bébé et on a sombré plus vite."

(p.299)
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Les accords sinistres qui avaient clos la Seconde Guerre mondiale prenaient fin. Une Allemagne pacifiste serait réunifiée. L'empire russe se délitait sans qu'aucune goutte de sang ne soit versée. Une nouvelle Europe devait émerger. La Russie suivrait la Hongrie, la Pologne et les autres sur la voie de la démocratie. Elle prendrait peut-être même la tête du mouvement. Il n'était pas si surréaliste d'imaginer aller un jour en voiture de Calais au détroit de Béring sans jamais montrer son passeport. La menace nucléaire de la Guerre froide n'existait plus. Le désarmement à grande échelle pouvait commencer. Les livres d'histoire se refermeraient là-dessus : une masse de gens enthousiastes fêtant un tournant pour la civilisation européenne. Le nouveau siècle serait fondamentalement différent, fondamentalement meilleur et plus sage.

(p.308)
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D'accord. Alors quoi? Alors...Dès qu'il atteignait ce stade, sur son avenir planait tel un brouillard le combat quotidien contre la fatique de la parentalité. Il ne pouvait y avoir aucun projet concevable, aucun élan, puisqu'il ne pouvait que rester les pieds sur terre, que continuer, aider Lawrence à continuer, continuer à s'occuper de lui, à jouer avec lui et à recevoir les allocations de l'Etat, sans oublier le ménage,la cuisine, les courses. Le lot commun étroitement contraint des mères célibataires était le sien.

(p.145)

Roland essaya de se voir vivant dans le luxe. Dans une maison quatre fois grande comme celle-ci, avec une femme tendre qui ne vous quittait pas, la gloire littéraire, deux ou trois enfants souriants et une employée de maison comme celle de Peter et Daphné qui faisaient un saut deux fois par semaine.

(p.147)
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Mais quand il pensait à ses propres erreurs durant sa vie, rétrospectivement, il avait l'impression qu'il lui manquait cette faculté innée de prendre du recul et ce sens pragmatique de la marche à suivre.

(p.591)

La relecture de ses carnets depuis 1986 ne lui apporta pas une meilleure compréhension de sa vie. Il n'y avait aucun thème saillant, aucun courant souterrain qu'il n'avait pas remarqué à l'époque, rien qu'il n'ait appris. Il ne trouva qu'une imposante masse de détails et d'événements, de conversations, et même de gens qu'il avait oubliés. Il lui semblait découvrir le passé de quelqu'un d'autre. (...) Ennuyeux, aucune lucidité, et cette passivité. Il avait lu beaucoup de livres. Ses résumés, rédigés à la hâte, étaient sans intérêt.

(p.634)
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Vidéo de Ian McEwan
Rencontre avec Ian McEwan à l'occasion de la parution de son roman Leçons aux éditions Gallimard.


Ian McEwan a passé une grande partie de sa jeunesse en Extrême-Orient, en Afrique du Nord (en Libye), et en Allemagne, où son père, officier dans l'armée britannique, était envoyé. Il a fait ses études à l'université du Sussex et l'université d'East Anglia, où il a été le premier diplômé du cours d'écriture créative créé par Malcolm Bradbury. Insolite et insolente, provocatrice, hautement originale, l'oeuvre de Ian McEwan surprend par ses tours de force de concision et d'humour. L'auteur joue avec les énigmes qui sont l'essence de la narration. Tous ses romans affichent une parenté lointaine, sous forme de simulacre, avec l'énigme policière. Il a publié plusieurs nouvelles et romans pour adultes et, en 1994, le Rêveur, un recueil de nouvelles pour la jeunesse.
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13/03/2024 - Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
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