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Critiques de Georges Simenon (2923)
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Les fiançailles de M. Hire

Chronique de la méchanceté ordinaire.

Mr Hire est le genre d’homme qui suscite gêne, méfiance et curiosité. La société adore détester ce type de personnage tout petit, tout rond, tout seul… trop seul et enveloppé de mystères. C’est celui qui provoque les pires commérages. C’est aussi la victime idéale, le coupable rêvé. Surtout quand un crime vient de se dérouler dans le quartier.

Non que Mr Hire soit exempt de tout reproche, mais on le plaint, on a mal pour lui quand il voit les autres ricaner ou fuir à son approche. Il aurait pu ainsi continuer sa petite vie de réprouvé si l’inconscient n’était pas tomber amoureux d’Alice, rousse plantureuse qui n’a pas froid aux yeux. Il l’aime à sa manière, un peu bizarre et malsaine, je le reconnais… Mais pour elle, il irait décrocher la lune ; et il le ferait avec humilité. Il faut le voir faire preuve d’audace, prendre tous les risques pour l’amour de sa belle, et s’imaginer, l’espace d’une nuit, d’une nuit seulement, qu’elle irait le rejoindre. Pauvre naïf qui n’a rien compris à la veulerie et à la cruauté des Hommes !

Simenon n’a pas son pareil pour se faufiler dans ce monde gris et froid de banlieue, où les concierges qui existaient encore cancanaient avec des flics obtus et fatigués ; il n’a pas son pareil pour décrire sans emphase et avec des mots simples la détresse d’un homme, la lâcheté d’un autre, un regard qui brille de perversité ou un cœur qui se prend à espérer.

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Le charretier de la providence

Un livre poignant et d'une tristesse infinie.

Une femme retrouvée étranglée par deux charretiers, hâtivement dissimulée sous la paille dans une écurie près d'une écluse, à Dizy.

Comment est-elle arrivée là, cette femme si jolie, si gracieuse, du genre pétillant ?

Maigret est persuadé qu'il trouvera la réponse parmi le peuple du canal de la Marne. Eclusiers, conducteurs de péniches, charretiers : tout un monde lent, lourd et laborieux qui évolue dans une odeur permanente de crottin, de goudron, de café chaud ou de gros rouge bu à la galopade dans l'aube grise…

Quel lien peut-il y avoir entre le commandant du « Southern Comfort », ivrogne flamboyant et pathétique, et Jean, le charretier taciturne, taiseux de la « Providence », espèce de sauvage bâti comme un ours ?

Maigret, imprégné par la tristesse des lieux et le rythme de vie lent du canal, mènera une enquête immobile, faite de maigres intuitions et de suppositions évanescentes, serrant dans la poche de son manteau ses deux uniques indices : un bouton de manchette en or et un béret américain.

Et c'est presque en s'excusant, en détournant son regard apitoyé, qu'il finira par dévoiler deux pauvres vies avec ses lâchetés, ses rêves impossibles à jamais enfuis, ses compromissions. Deux âmes seules et désemparées.

Un récit terriblement humain et bouleversant.

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Pietr-le-Letton

Pour sa toute première irruption dans le monde romanesque, Maigret apparaît tel qu’il est désormais ancré dans notre imaginaire.

L’homme est déjà lourd et épais. Sa silhouette énorme remplit toutes les pièces dans lesquelles elle se trouve. Rien ne peut en venir à bout, rien ne peut la digérer. Elle détonne, elle surprend, elle dérange, que ce soit dans un hall de gare bondé, dans un hôtel grand luxe, ou dans le plus sordide des bouges parisiens.

Tout se rapetisse et perd de sa consistance au contact de ce géant débonnaire.

Maigret est d’un seul bloc. Son calme anormal inquiète et rend mal à l’aise. Son entêtement, son opiniâtreté est capable de déstabiliser, d’ébranler les adversaires les plus forts, les plus malins, les plus retors, les plus tortueux.

Maigret est ce genre d’homme à rester une nuit entière dissimulé sous un porche, son éternel pipe au bec, à attendre patiemment celui qu’il veut confondre.

Ils ont tué un de ses collègues. Presque un ami. Maigret, la rage au cœur, n’aura de cesse de poursuivre ses assassins : des hommes de l’est, aussi frêles, souples et sveltes que lui est épais, lourd et lent.

Maigret les traquera sans relâche et sans haine, avec une détermination farouche, dans l’aube grise, dans les rues hachurées par la pluie, sous les ors des grands hôtels de luxe, ou dans des ruelles boueuses ; il les traquera jusqu’à ce qu’ils demandent grâce.

Il y a dans le regard fatigué de Maigret, dans son silence bourru, dans sa lenteur de gros mammifère repus, une humanité, une bonté et une bienveillance qui vous saisit et vous touche.

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Les fiançailles de M. Hire

Georges Simenon - Les Fiançailles de M. Hire -1933 : Monsieur Hire c'est le juif, l'étranger, le migrant honnis qui vient dans notre pays pour dévoyer les jeunes femmes françaises. Monsieur Hire c'est aussi toute la médiocrité d'une beauferie qui dévore l'hexagone comme un cancer depuis de bien trop longues années et qui pratique sans complexe le délit de sale gueule et la chasse aux sorcières. Cette chasse en meute retombe toujours sur les mêmes, les pas tout a fait claires comme on peut entendre à droite et à gauche pour justifier cette violence primaire. C'est vrai, monsieur Hire observe sa voisine d'en face quand elle se déshabille, il la suit aussi dans la rue, rentre dans les bars ou elle s'arrête mais ce qui le guide ce n'est pas le besoin perverse de la voir mais l'amour timide d'un homme disgracieux pour une femme beaucoup trop belle. Quoiqu'il fasse de toute façon il paraît louche avec sa gueule de métèque, son embonpoint adipeux et ses succès aux bowling qui insultent tous ceux qui se croient supérieurs à lui. L'homme c'est vrai n'est pas tout blanc non plus, il gagne même sa vie en commettant des petites escroqueries mais rien ne peut justifier les soupçons et les accusations proférées contre lui quand une prostituée est découverte égorgée dans un terrain vague du quartier. Vous comprenez bonnes gens, un homme qui offre des bonbons aux petites filles de son escalier ne peut être qu'un dangereux violeur et un criminel. Monsieur Hire est surtout un homme naïf que la belle Alice soutenu par son demi-sel de fiancé séduit en espérant tirer quelques sous de la situation. La rumeur elle de son côté continue à gonfler au point que la population excitée par le sang et la bêtise se livre au véritable lynchage en règle de son bouc émissaire. Simenon dans ce livre décrivait parfaitement le paysage délétère qui se dessinait dans les années 30 à la suite de la montée en puissance des nazis et des intolérances de toute sorte. Ce qu'on pressentait là c'était la nuit de cristal, les pogroms dans les villes bientôt transformées en ghetto, les dénonciations, une police au service des dictateurs, un cataclysme final que le grand écrivain et sa perception pessimiste de la société anticipait dans son roman comme le hors-d'oeuvre du pire. "Les fiançailles de monsieur Hire" dérangeait le lecteur qui s'enfonçait au fur et a mesure de sa lecture dans le monde nauséeux et profondément immoral d'un populisme de masse qui condamnait sans aucun autre procès un innocent pour son image... un insondable malaise
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L'ombre chinoise

Le weekend, quand la météo hivernale promet rafales de vent puis chutes de neige, l’heure est venue de sortir le cruchon de Mirabelle cher au Commissaire Maigret et d’ouvrir un Simenon.



Paru en 1932, « L’ombre chinoise » se déroule Place des Vosges, à l’époque où un modeste fonctionnaire pouvait y louer un appartement, et nous plonge dans les arcanes d’une famille recomposée avec ses haines cuites et recuites et ses conflits d’intérêts.



D’une cruelle finesse psychologique cette intrigue se joue dans des décors dont l’auteur décrit le moindre détail, hume la moindre odeur et va jusqu’à dévoiler les bretelles pendantes de notre rond de cuir.



Mais si nous faisons abstraction de ces détails, aussi datés que savoureux, nous découvrons une scène de crime intemporelle et donc très actuelle car l’attraction pour les liasses de billets est éternelle.



Un Maigret, parfumé à la mirabelle, qui est l’un de mes préférés.
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Tout Maigret - Omnibus 01 : Pietr le Letton..

J'ai une grande amitié pour certains personnages de romans. Et j'ai aussi mes préférés dans les romans policiers. Je crois que Maigret fait partie de mes premières lectures avec Poirot.



Ce premier tome de cette intégrale regroupe de façon chronologique 8 histoires de Maigret

- Pietr-le-Letton

- Le charretier de "La Providence"

- Monsieur Gallet, décédé

- Le Pendu de Saint-Pholien

- La Tête d'un homme

- Le chien jaune

- La nuit du carrefour

- Un crime en Hollande



Je ne donnerais pas mon avis sur chaque roman ici.



J'ai beaucoup apprécié la qualité du travail d'édition. En général dans les intégrales on se retrouve avec des pavés écrits tout petit et des feuilles a papier à cigarette tellement fine qu'on a peut de tourner les pages. J'ai apprécié la qualité du papier et l'écriture reste tout a fait lisible sans loupe. Grâce a ces deux éléments le lecteur peut retrouver les aventures de Maigret avec plaisir.



En ce qui concerne la qualité des romans, l'écriture de Simenon est incroyable, envoutante et addictive. Mais il faut dire que pour cela il est aidé par un des flics les plus charismatique de France. Ce n'est pas chez Simenon que l'on trouve le plus d'action, mais il arrive a créer une atmosphère si particulière que c'est ce qui fait la force de ses romans.



Le seul petit bémol pour moi est le rabat de la couverture qui peut éventuellement servir de marque page. J'ai bien dit éventuellement , car amoureuse des livres comme je le suis il me faut les garder en bon état, sans corner, ni abimer les pages, ni annotations. Du coup au début de ma lecture je me suis servie de ce rabat , grand mal m'a pris puisque ça a légèrement marqué les pages. (je dois reconnaitre que je suis extrêmement pointilleuse sur le sujet). Du coup j'ai repris un marque page normal.



En dehors de ça , j'apprécie la couverture. J'apprécie également l'ordre chronologique qui permet de voir l'évolution du personnage et de l'auteur. Le prix est également très abordable (28 euros) pour une intégrale.

Du coup, je sais déjà ce que le père Noel va déposer au pied du sapin. :)



Je tenais a remercier Babelio et les édition Omnibus pour cette masse critique.





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Monsieur Gallet, décédé

« Un héros » de Félicité Herzog évoquant l’aventure du Général Boulanger qui couta le tiers de sa fortune à la duchesse d’Uzés, j’ai hésité à relire La Varende et « Les manants du Roi » , plus précisément le chapitre « Fidélité (1850) » qui narre les malheurs de Mathilde de La Haye abusée par un prétendu héritier du trône de France, et me suis fixé sur Simenon et son « M. Gallet décédé » qui nous ramène vers 1930 au milieu des légitimistes, cercle aussi vulnérable que naïf quand il s’agit de donner de l’argent pour « la bonne cause » …



Savoureux roman, l’un des premiers Simenon, qui ressuscite une France rurale, aux inhumations solennelles et immuables avec un corbillard tiré par des chevaux, une province paisible, ensoleillée, avec des omnibus qui étaient à l’heure.



Merveilleux polar avec une intrigue complexe en apparence mais un dénouement élémentaire.



Un régal à lire et relire.
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La Pipe de Maigret

Rien ne va plus !

On a volé la pipe préférée de Maigret ! Derrière une apparente banalité se cache parfois les vérités les plus graves. Un poil cynique, toujours lucide, Maigret dévoile les faux-semblants et démasque le voleur de fétiche. Un régal de nouvelle !



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Nouvelles exotiques

Petites nouvelles au long cours.

Sous le charme un peu désuet de ces cinq textes se cachent toujours une plume bien trempée. Un peu d'humour, quelques sarcasmes, une pincée de cynisme, vous obtenez une diatribe irrésistible de nos lâchetés et de nos faiblesses. Simenon en contempteur exceptionnel de la médiocrité



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Le chien jaune

J'explore en ce moment les classiques "policiers", Agatha Christie, Arthur Conan Doyle ou encore Edgar Allan Poe dernièrement.

Alors j'ai eu envie de découvrir Simenon et Maigret histoire de comparer, je n'avais lu de lui que "l'affaire saint Fiacre" il y a bien longtemps.

Amusant de voir que le Hercule Poirot d'Agatha est belge et distingué alors que le Maigret de Simenon (qui est belge) est français et bourru.

C'est peut-être parce que j'ai été influencé par les nombreux épisodes télé et le jeu d'acteur de Bruno Cremer que je m'attendais à trouver cette atmosphère sombre et pesante, ce rythme lent et une histoire qui prend son temps. J'ai beaucoup apprécié le contexte et le port de Concarneau raconté par Simenon, sa ville close, sa bourgeoisie des années 1930, apprécié l'intrigue aussi même si elle ne s'est pas révélée très originale finalement.

Une fin soit dit en passant qui fait penser ici aux scènes finales d'Agatha ou de l'inspecteur Colombo avec la confrontation des suspects et la désignation du coupable.

Il me reste à dire que j'ai aimé le style sobre et sans effets superflus, je lirai d'autres enquêtes avec plaisir.
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Maigret hésite

Georges Simenon - Maigret hésite - 1968 : Simenon toujours aussi acerbe quand il s'agissait de décrire le monde de la bourgeoisie trouvait le subterfuge du crime pas encore commis pour pénétrer de l'intérieur ce milieu qu'il semblait détester plus que tout autre. Quand une lettre anonyme prévenait le commissaire Maigret d'un assassinat prochain au domicile de maitre Parendon avocat à la cour, celui-ci s'empressait de se rendre sur place pour juger du caractère véridique de la menace. Ce genre de lettre il en arrivait tous les jours au quai des orfèvres mais l'instinct du policier, l'écriture et la tournure des phrases lui donnaient envie d'en savoir un peu plus sur la situation. Le commissaire bien sur tombait sur un vrai panier de crabes. Le mari, la femme, la maitresse, les enfants désinvoltes, les domestiques anciens repris de justice tout concourait à rendre l'ambiance tendue et le drame prêt à éclater. Malgré sa présence le meurtre était commis quand même et ses soupçons confirmés. L'enquête en demi-teinte se déroulait alors derrière des portes capitonnées à l'affut des confidences des membres d'une famille qui semblait autant se confier que mentir au célèbre policier. Maigret lui profitait de cette affaire en périphérie de son bureau pour visiter les petits bars et les petits restaurants ou il était reçu comme un coq en pâte par des tenanciers avides de garder de bonnes relations avec la police. Plus que jamais Simenon faisait vibrer une humanité simple dans ce roman de tous les jours qui faisait tant de bien à nos esprits fatigués par l'action souvent vaine des thrillers modernes... gouleyant et confortable comme un petit beaujolais servi sur le zinc
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Faubourg

« Mon nom, je le commence, et vous finissez le vôtre. » lançait Voltaire au chevalier de Rohan-Chabot en janvier 1726. Réplique à un noble affichant son mépris pour un bourgeois « qui n’a même pas un nom. ». Une lettre de cachet envoie Voltaire (né François-Marie Arouet) méditer sur ce qu’il en coûte à un roturier de répondre à un gentilhomme !



De tout temps, certains tentent de se faire un nom, et c’est ainsi que René Chevalier se fait appeler René de Ritter, espérant ainsi s’élever aux yeux de ses concitoyens. Mais il en faut un peu plus pour qu’un magouilleur soit anobli …



Au milieu du XX siècle, époque où le jupon était encore indispensable, en province, René erre dans les faubourgs de sa ville natale en préparant un coup fumant, ballade qui offre à Simenon le loisir de peindre le milieu local mesquin, misogyne, moisi, mais finalement redoutable et notre chevalier finira désarçonné. Le faubourg prime sur l’intrigue mais vaut assurément le détour.



La morale de ce roman est aussi triviale que bien connue : « il est vain de péter plus haut que son cul ».
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La Chambre bleue

Alors que vos désirs tournent rouge et que vous vous demandez si l’herbe est plus verte ailleurs, je vous invite à lire La chambre bleue, vous vous éviterez bien des nuits blanches ainsi qu’un avenir noir… Un manuel à mettre entre les mains de tous jeunes couples, à placer dans toutes tables de chevet des hôtels en lieu et place de la Bible, c’est plus radical pour ne pas pêcher…

Car oui, ne vous fiez ni au titre, ni à la couverture bleutée de ce livre de Georges Simenon, ce livre délicieusement désuet, est noir, aussi noir que la chambre de ces amants frénétiques est bleue.



Nous voilà à Saint-Justin-du-Loup, au début des années 60, un petit village français, où tout le monde se connait et où les ragots sont légion et vont bon train. Nous sommes directement dans l’interrogatoire que subit Tony Falcone, interrogatoire au cours duquel, au fil des questions, se mêlent les souvenirs de cet homme qui trompait sa discrète femme Gisèle, avec la vibrante Andrée, grande femme statuaire connue à l’école primaire.

Tous les jeudis ils se retrouvent à l’hôtel du frère de Tony, dans cette chambre bleue, parenthèse hors du temps n’appartenant qu’à eux. Des mots doux murmurés, des corps à corps passionnés, des promesses tels des mots n’ayant de valeur qu’entre les quatre murs lavande…Dans la chambre bleue, rien n’est vraiment réel, du moins d’une réalité différente.

Nous nous doutons qu’il n’est pas accusé pour cet adultère mais jusqu’à la fin du livre le mystère reste entier sur ce qui s’est passé et l’angoisse enfle au fur et à mesure des pages. Tony raconte, raconte de nouveau, connait les mots par cœur les ressassant ad nauseum.



« Combien la vie est différente quand on la vit et quand on l’épluche après coup ! Il finissait par se laisser troubler par les sentiments qu’on lui supposait, par ne plus reconnaître le vrai du faux, par se demander où finissait le bien et où commençait le mal ».



J’ai profondément aimé ce livre que j’ai dévoré d’une traite. C’est un policier de facture classique très réussi qui nous tient en haleine jusqu’au bout. C’est une description d’une époque passée, celle des années 60 au sein des petits bourgs français où les hommes commettent facilement quelques écarts sans que cela porte à conséquence, où « le lundi est jour de lessive, mardi ou le mercredi, selon le temps, selon que le linge est sec ou non, celui du repassage », ce sont les senteurs de lieux campagnards, celles du vin et des alcools, des ragouts qui mijotent…

C’est un roman d’ambiance dans lequel on plonge dans l’intimité d’une famille marquée par le non-dit de l’adultère qui entache le couple, ayant l’intelligence et la pudeur de le tenir à distance, rongé par le remord. J’ai été très touchée par cette façon qu’a Tony, alors qu’il sent le danger rôder, se raccrocher à sa fille, à sa femme aussi d’une manière silencieuse et désespérée.



« Gisèle souriait, d’un sourire bien à elle, très mince, qui étirait à peine ses lèvres, comme si elle s’efforçait de le garder à l’intérieur ».



Au fur et à mesure du récit, on se rend compte à quel point la routine, les traditions au sein du couple, sont rassurantes…Vouloir les pimenter peut couter cher, très cher. Car ne jamais oublier cela : « On ne passe pas sa vie sur un lit, dans une chambre vibrante de soleil, à subir la fureur de deux corps nus »…



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Un crime en Hollande

La police doit elle maintenir l’ordre ou aider la justice ?



Eternelle question, posée par « un crime en Hollande », et que Simenon tranche dans un port de notables confinés en dévotions, bonnes oeuvres et respectabilité bourgeoise, au début des années 30.



Un roman d’une grande finesse psychologique, d’une rare cruauté sociale, qui se conclut en déroute policière hollandaise.



D’une poignante actualité dans notre époque qui fustige les harcèlements avec le mouvement MeToo, ces pages rappellent aussi que les séductrices en sont parfois la cause et les séducteurs les dépouilles sanglantes.
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La Colère de Maigret

J'ai mis cinq jours pour lire ce Maigret de seulement 186 pages. Pourquoi ?

Parce qu'un Maigret ça se savoure, ça se déguste

C'est pas du canard c'est du poulet, n'empêche



C'est une récréation après deux heures de Sciences Physiques

C'est une balade sur la plage après le départ des touristes

C'est un bon petit plat arrosé d'un bon petit vin en terrasse

C'est "La première gorgée de bière" de Delerm



Ça sent la pluie grise de Paris

Ça sent le pavé cent fois martelé

Ça sent l'air vicié de la Seine

Ça sent l'humain, l'humain moyen



Celui qui se lève tôt pour gagner moins

Celui qui tue pour quelques sous

Celui qui effraie, qui triche et qui ment

Celui qui traverse la rue pour... s'asseoir sur un banc



C'est du garanti sans déception

Ça sent le quotidien, le banal,

Celui qui est tout simplement bon



Merci M. Simenon
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Le Chat

Qu’est-ce qu’on peut être bête, quand même, à bouder des jours, des mois, et même des années dans ce cas-ci, alors que la vie est si courte !

Des années, oui, vous avez bien lu !

Emile et Marguerite sont des mariés de fraiche date, malgré leur soixantaine bien entamée. Ce qui signifie qu’ils ont dû s’habituer l’un à l’autre alors qu’ils l’avaient déjà fait avant pour leur premier conjoint, s’adapter aux petites manies, accepter leur amour pour un animal domestique.

Ici, c’est le chat l’animal par lequel tout va arriver : le chat Joseph, compagnon fidèle qu’Emile a amené avec lui dans la maison de Marguerite. Celle-ci le déteste, et n’a d’yeux que pour son perroquet.

Et un jour, elle l’empoisonne…



Ce roman se construit autour d’une vie quotidienne bien organisée mais monotone et sans rêve. Il nous transporte très souvent dans le passé – récent ou plus lointain – ainsi que dans les pensées d’Emile, qui n’est pas un mauvais bougre.

Ah, l’atmosphère de Simenon ! Désuète, intime, nostalgique, avec la cuisine où rissolent des steaks et des pommes de terre, la chambre aux lits bordés de lourds édredons, le café où l’on sert encore des plats du jour bon marché et fleurant bon la simplicité d’antan, les guinguettes du bord de Marne et leurs terrasses où se serrent les couples d’amoureux…



J’ai beaucoup aimé découvrir la psychologie de ces deux vieux lestés d’une vie complètement opposée, à coups de petites actions quotidiennes, de souvenirs empreints de morosité ou de douceur.

Vraiment, c’était un délice de les accompagner, même si pour rien au monde je ne voudrais les imiter !

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Maigret se défend

Il reste trois ans à tirer, pour le célébrissime commissaire Maigret...

Les nouveaux flics, issus des grandes écoles et hautes études, investissent les instances supérieures de la police. Le préfet de police, jeune moderne, sportif et médiatique, veut nettoyer Paris avec de nouvelles méthodes... Autant dire que Maigret, de la vieille garde, apparaît comme "has been"!

L'occasion de mettre le célèbre commissaire en retraite anticipée et de l'envoyer taquiner le goujon à Meung-sur-Loire est trop belle: Une gamine, nièce d'un conseiller d' état, accuse Maigert d'avoir tenté d'abuser d'elle!

Mais qui manipule cette morveuse, avec une intelligence hors du commun?

Il va falloir que le commissaire trouve vite, alors qu'il a l'interdiction de rencontrer Nicole Prieur et de s'occuper de son affaire.

Alors, Maigret va tout de même se débrouiller seul, avec quelques collègues sûrs, discrets et fidèles...

Un très bon Maigret, avec une solution finale à la fois simple et étonnante.

Un Excellent Maigret aux arômes de pipes culottées, de bistrots à zinc d'antan et des plats de Madame Maigret.
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Le chien jaune

Le roman a été écrit en 1931 dans les premiers de la série des "Maigret".

Le commissaire qui ne semble pas encore célèbre est envoyé à Brest. Non loin de là, à Concarneau, se produisent des faits étranges.

Des notables qui jouaient tranquillement aux cartes vont être passablement secoués.

L'un d'entre eux, joyeusement ivre, sort de l'hôtel de l'Amiral et reçoit une balle dans le ventre. Le lendemain, c'est le journaliste Servières qui disparaît. Le docteur Michoux tremble de peur.

De la strychnine flotte dans les verres de Pernod.

Un chien jaune maigre traîne autour d'Emma, la serveuse de l'hôtel. Il sème la peur.

Des pas de grande pointure sont repérés.

Maigret est assisté de son jeune collègue Leroy.

Le premier travaille par intuition, par déduction et le jeune essaie avec les moyens du bord d'effectuer des moulages, de relever des empreintes.

Finalement, le mystère sera levé à partir d'Emma et de son amoureux , un marin, qui avait de quoi en vouloir aux notables de Concarneau. Une sombre affaire qui se termine bien.

Le roman est structuré à merveille, très bien écrit, nous révèle la vie et les habitudes de 1930 avec cette obéissance que les femmes montraient aux hommes. Une pitié !

Un récit d'un autre temps.

Je ne les ai pas lus tous au contraire de mon père né en 1922.

Mes préférés sont " Le pendu de Saint-Pholien"et "L'affaire Saint Fiacre" .

J'apprécie beaucoup la présentation "collector" de celui-ci et pour un prix très modique.

Simenon et son "Maigret" méritent quand même de belles présentations.





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Le Bourgmestre de Furnes



Sinistre et intransigeant. Tel apparaît ce Joris Terlinck, le baas, bourgmestre de Furnes.



Et pourtant, à y bien regarder, il y a deux niveaux de lecture possibles à ce livre de Georges Simenon écrit dans les années 1930 : d’abord, l’histoire en elle-même de cet homme implacable, imbuvable avec ses employés, incorruptible, désagréable avec sa femme et son ancienne servante-maîtresse dont il a un fils illégitime mais exemplaire avec sa fille handicapée mentale. Puis, il serait certainement intéressant de décrypter ce bourgmestre sous l’angle de la psychologie. Je n’ai pourtant pas l’impression que c’est ce que recherche l’auteur que je lis pour la première fois. Ce n’est pas un roman policier.



Qu’est-ce donc qui rend ce livre intéressant ? D’abord, Furnes, petite ville à deux pas de la mer du Nord. Furnes avec sa Grand-Place aux milliers de pavés ronds, aux adorables maisons de brique à pignons en gradins de la Renaissance, son Hôtel de ville et l’église Sainte-Walburge, son beffroi qui égrène les heures. Furnes-la-jolie qui fait la joie des peintres depuis des siècles.



Et, bien sûr, ce Joris Terlinck, première personnalité de la ville, propriétaire d’une usine de cigares, qui dirige Furnes d’une main de fer. Lui qui refuse une avance vitale à l’un de ses employés qui se suicide, qui s’oppose à la gourmandise des promoteurs immobiliers, qui impose son avis à son conseil communal, lui ne dit jamais un mot de trop. Il doit bien avoir des failles puisqu’il est un être humain.



Sa première faille est sa fille, Emilia, qu'il exclut de placer dans une institution pour malades mentaux et qui vit dans une chambre de la maison familiale. Il s’en occupe seul, lui achète des mets délicats, la lave et nettoie son lieu d’existence avec la plus grande abnégation.



Sa deuxième faiblesse est sa mère, ancienne éplucheuse de crevettes, qui vit à Coxyde. Elle lui en veut d’être devenu riche et ne manque pas de lui faire tous les reproches possibles.



Sa troisième faille est la fille de son adversaire politique, enceinte sans être mariée de l’employé rabroué et suicidé. Le père déshonoré a exilé Lina à Ostende où elle mène une vie libre et joyeuse avant et après son accouchement. Pour on ne sait quelles raisons, Terlinck veut suivre l’évolution de la jeune femme et découvre un tout autre mode de vie à Ostende-la-mondaine qu’à Furnes. Il s’y rend chaque jour, apporte le champagne, les chocolats, toutes sortes de cadeaux à Lina et sa colocataire sans attente d’aucune sorte.



Son attitude distante et ses allers-retours secrets empiètent sur ses responsabilités locales, font jaser et auront finalement raison de son maïorat.



En fait, ces trois villes sont chacune une part de la vie de Terlinck. Coxyde représente ses racines, Furnes est son présent rigide et morne, et Ostende est, non pas son futur, mais la possibilité d’une autre dimension, d’une autre vie. Dans chacune, il y a une femme. Dans chacune, il est un homme différent. Même s’il sait qu’il est proche de la déconfiture.



Univers étrange, sombre, triste, sans développements, sans explications, sans justifications. C’est ce qui m’a fait penser qu’une étude psychologique du personnage principal pourrait le faire mieux comprendre aux lecteurs de Simenon. Apparemment, dans les années ’30, cela ne faisait pas partie de ses priorités. Je n’ai pas été comblée par cette lecture mais, au moins, j’aurai lu un Simenon dans ma vie.

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Maigret et le voleur paresseux

Maigret mène deux enquêtes, dont l'une ne lui est pas dévolue... Celle qui, pour autant, la touche le plus!

En "concurrence", une affaire spectaculaire de braquages et une autre du meurtre d'un obscur et tranquille cambrioleur.... Cette affaire que les supérieurs du célèbre commissaire voudraient vite enterrer comme "règlement de compte".

Maigret a froid, Maigret manque de sommeil, et Maigret ne renonce pas!

C'est pour cela, ce côté tellement (trop?) humain, que l'on s'attache à ce grand flic et à ses "petites mains" tellement importantes: Ces inspecteurs trop souvent oubliés par la promotion! Ceux qui planquent, rédigent les rapports et dépositions, qui connaissent Paris mieux que leur poche!

Mais chez les flics, la lessive est en route!: On veut rendre la police plus propre, plus aseptisée, sous le contrôle accru de la magistrature.

Maigret serre les dents et semble faire le dos rond. Il est à deux ans de la retraite. Son équipe de collaborateurs fidèles et dévoués se dépeuple: Il va falloir passer la main aux jeunes, diplômés avec plans de carrière.

On sent, chez Maigret, cette amertume qui accompagne la fin d'une vie professionnelle.

Mais Maigret mettra autant de pugnacité pour élucider les deux affaires...

Un très bon Maigret, par un Simenon au sommet de son art romancier.

À lire... Mais il y a tellement de Maigret à lire!
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