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Critiques de Serge Rezvani (47)
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Moi, Artemisia !

Une pièce de théâtre est faite avant tout pour être vue, et je pense que cette lecture m'a moins enthousiasmée que si j'étais allée voir un spectacle.

C'est le sujet qui m'a intéressée au premier abord : Artemisia Gentileschi, peintre italienne, connue pour son tableau de Judith tranchant la tête d'Holopherne, où elle s'est elle-même mise en scène.

Ici, un dispositif quasi fantastique nous la fait sortir du tableau pour entamer un dialogue avec un peintre de notre époque. La remise en contexte de la peinture, le viol d'Artemisia Gentileschi et le procès qui s'ensuivit, m'ont intéressée dans la première partie de la pièce. Le peintre explique ensuite à quel point les rapports hommes-femmes ont changé depuis cette époque, et que tous les hommes ne sont pas à mettre dans le même panier... tout en essayant insidieusement de se rapprocher d'Artémisia, de soulever son jupon...

Et pourtant, la deuxième moitié de la pièce me laisse un peu perplexe, quand l'auteur se dévoile et se met "lui-même" en scène. Le propos manque de clarté, certains passages frisent le burlesque mais l'ensemble manque d'unité, de fil directeur. Il n'est pas évident de lire du théâtre, mais j'irai volontiers voir la pièce si elle est jouée.

Merci à babelio et aux Belles Lettres pour cet ouvrage reçu lors de la dernière masse critique.
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Moi, Artemisia !

Dans le silence d'un musée, un tableau s’anime. Le personnage féminin central, interpelé par un peintre d’aujourd’hui, prend alors la parole et débute entre eux une longue conversation. Car, Artemisia Gentileschi, artiste de la Renaissance à qui l’on doit cette version particulièrement crue de la décapitation d’Holopherne par Judith, s’est représentée elle-même sous les traits de celle qui tient le glaive sanglant, pour se venger de celui qui l’a violé, lui donnant son vrai visage.

Elle explique vouloir s’exprimer au nom de toutes « les femmes de l’infinie lignée des violentées », de celles que les mythologies mettent en scène pour être la proie de Dieux descendus de l’Olympe ou du Ciel, telle « la sainte Marie […], restée vierge malgré l’épée de chair divine, et donc sanctifiée pour cela ». Elle dénonce leur condition commune de potentielles victimes : « Que La Femme soit en permanente conscience que votre main masculine peut à tout moment soulever par-derrière cette pudique et trop souple barrière ! Cette conscience, imposée à toutes les femmes et de tout les temps, ne les a jamais quittées, à aucun moment… Bien qu'apparemment couvertes il a toujours fallu qu'elles se sachent constamment offertes… » La discrimination est constante et à tous niveaux : « Et oui, il y a le sang honteux des femmes… Et le sang noble des hommes ! »

Elle dénonce les « tendresses » de son père, l’ignominie de l’élève de celui-ci à qui il la « prêta », la fourberie de son oncle qui l’accusa de lui avoir fait des avances depuis le berceau.



Son interlocuteur n’a de cesse d’apaiser sa colère, de l’assurer que tout a changé désormais, « en ce siècle de [son] futur », de l’inviter à descendre de son tableau pour « mettre le pied sur la terre promise de notre repentir ». Mais il accompagne chacune de ses flatteries, de tentatives d’approches et d’esquisses de caresses, preuves de sa duplicité et que rien ne changera jamais : « Jeunes ou vieux, tous les hommes sont fourbes, forcément, avec nous autres qui ne sommes rien d'autre que des femmes pour eux, des femmes et rien que des femmes. »



À lire à haute voix, pour apprécier pleinement la beauté de la langue.



Article à retrouver sur le blog de la Bibliothèque Fahrenheit 451 :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Moi, Artemisia !



Je ressors de cette lecture, avec une impression d'inachevé. Et j'aurai du mal à réellement expliquer ce qui me laisse ce goût sur la langue. Est-ce le fait que ce soit du théâtre, et qu'il mériterait évidemment, d'être vu joué pour être plein de toutes ses intentions ? Pour toutes les dévoilées ? Où est-ce que j'ai manqué quelque chose, quelque part ?





Quelque chose me semble m'a échappé pour, pouvoir entrer entièrement dedans. Certains contextes, enjeux, une morale, un sens.



Ici, on nous met en scène, Artemisia, la femme qui a peint le tableau de la couverture de la pièce, se représentant elle-même en figure mythique. Tableau sublime au passage, que j'adore et qui m'a évidemment donné envie de lire la pièce. Autant pour lui, que pour son peintre, et voir où cela pouvait nous mener. Je trouvais l'idée de mettre en scène la peintre, dans un dialogue moderne, sur la condition de la femme et bien plus encore, génial !





J'ai évidemment saisi qu'on parle ici de féminisme, d'émancipation de la femme, des enjeux, que met en scène le dialogue d' une femme d'un autre siècle avec des concepts plus avancés, plus futuriste. Mais j'ai été parfois perdu dans les intentions de l'auteur, qui met en scène et en dialogue, a son personnage masculin, tantôt des paroles sensées, tantôt de l'absurde, du ridicule. Qui suivre ? J'entends que cela permet des jeux de dialogue intéressants, peut-être résolument absurde, mais comme cela n'est pas une absurdité en continuité, j'ai eu du mal à savoir qui entendre, qu'es qu'on essaye de nous transmettre ? Je ne sais plus très bien.







Comme je l'ai déjà évoqué donner une voix à la peintre ( peintresse dirait le personnage masculin) est une superbe idée, au début, c'est presque un cours de l'histoire de l'art, en commentant elle-même une certaine interprétation sociale de son tableau. J'ai vraiment aimé cette partie, elle enrichit le contexte et nous donne envie d'aller regarder le tableau en question pendant des heures, et d' étudier les moindres détails.





Une autre chose m'a frustrée, c'est la manière dont l'italien est traduit. Parfois pas, parfois oui, mais tellement aléatoirement dans la pièce qu'on n'en est jamais vraiment sûr, comme la manière dont cela est présenté est peu clair. Malgré ça, le reste de l'ouvrage est très beau, comme aux habitudes des éditions des belles lettres. Que je remercie d'ailleurs pour cet envoi.





Je pense que je n'étais pas tout à fait le public, et que c'était peut-être trop perché pour moi ? Comme le personnage féminin en haut de son tableau, ou que je manquais de contextes et de références







J'ai tout de même passé un agréable moment, ça aura eu le mérite de me questionner, de me rendre curieuse et d'avoir envie de le voir sur scène
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Vers les confins

Voilà des contes tirés des mille et une dunes d’un désert sans fin, illimité

Comme dit la 4° de couverture : « depuis l’aube de l’intelligence humaine, ne faisons-nous pas que délirer…poétiquement, dites-vous, pourquoi pas ? », reprise d’une remarque de la mathématicienne Adema, page 168

Évidemment, l’écrivain de langue française, d’origine russe et perse, de nulle part, muet dans La Traversée des Monts Noirs, est amené à se dévoiler comme écrivain, donc à parler d’écriture donc de lecture; puisque est énoncé le lieu commun bien éculé (pratiqué par qui ?) du lecteur faisant la moitié du chemin.



Lecteur, je vais tenter de faire la moitié du chemin emprunté par l’auteur se parodiant dans le personnage de l’écrivain de langue française.



Les lieux :

- les Monts Noirs, gelés, glacés, un tunnel sous les Monts qu’il faut deux nuits, un jour pour les traverser avec arrêt dans une gare de triage, de réapprovisionnement, de contrôles… Chemins de fer = trains de la mort de masse, des déportations de masse. Monts Noirs = métaphore = réalité des territoires immenses sous la coupe de tyrans et dictateurs, se prétendant porteurs d’un monde nouveau, d’un homme nouveau.

- Les Confins, du sable encore du sable, des dunes encore des dunes ; et des surprises, des carcasses d’engins indescriptibles, innommables, innommés car rien ne doit être nommé de ce qui est vu. Un cratère géant dû à la chute d’un météorite. Des Esséniens de la lointaine époque de la langue araméenne, des Sages, tous fous merveilleux, le Sage des poules, le Sage des tombes et peut-être le Sage des sages qui a la Réponse. La Déesse des sables, descendante de Lilith, préférée à Ève. S’il est trop curieux, s’il veut aller plus loin que la Montagne Rouge, l’écrivain de langue française est prévenu, il n’en reviendra pas.



Les personnages :

- ceux de la mission sous la responsabilité de l’enquêteur du district, la doctoresse Déborah, la mathématicienne Adema, le criminologue, le chercheur en philosophies oubliés, l’écrivain de langue française

- les personnages rencontrés : l’Arpenteur sans arpents, le Sage des poules, Sarah, le Sage des tombes, le Christ errant éternellement ressuscité, la Déesse des sables

- Les personnages évoqués : l’anthropologue, Math, Sterne, l’ornithologue des Fauvettes



Les styles :

- Très peu de descriptions, alors même que l’écrivain de langue française y est invité mais attention, seulement pour lui et eux, pas à diffuser, d’ailleurs, pas de prises de notes ou si, destruction des notes

- Très peu de narrations, sauf confidences de l’écrivain de langue française évoquant la maladie de son aimée de 50 ans ou certains de ses écrits antérieurs dont les paroles d’une neuve marseillaise

- Essentiellement des discussions entre les personnages avec insistance sur la nomination de l’émetteur de chaque réplique, et sa façon de dire, ironique, agacée, énervée, colérique, railleuse, câline, ce qui produit beaucoup de comique



Le sujet :



c’est quoi cette espèce tueuse douée d’intelligence et qui en est arrivée à rendre invivable son milieu de vie et à être au bord de la disparition collective ? Comment comprendre cette propension, cette pulsion archaïque à tuer, d’abord les siens, pères et frères assassinés, enfants égorgés, femmes lapidées, ensuite les autres, mis en esclavage et exterminés

est interrogée, questionnée la Bible; sont cités des épisodes et des recommandations à se demander comment expliquer la fascination exercée par ce Livre et par son symétrique, le Coran, tous deux engendrant des fous de Dieu, Yavhé, Allah depuis des millénaires

Comment est-on passé de la Bible, de son Dieu irascible, en colère au Nouveau Testament, au Fils du Père, mourant pour tous sur la croix, par amour de l’homme. Comment est-on passé de la colère divine à l’amour divin, sans pour autant renoncer aux meurtres de masse, aux inquisitions, aux bûchers pour sorcières, aux tortures les plus abominables, aux évangélisations forcées, aux missions colonisatrices … et comment s’est opéré le glissement vers les messianismes terrestres, eux-mêmes porteurs d’exterminations de masse



Ce livre n’épargne rien, aborde tous les aspects liés à trois questions : d’où venons-nous ? Où allons-nous ? Qui sommes-nous ?



D’où venons-nous ?





de la première femme, d’un utérus originel, d’entre les cuisses de la Mère, et donc d’incestes à répétition ?

de l’homme insufflé par le souffle divin, la femme étant tirée de la cuisse de l’homme ?

Genèse utérine = ire es tu - égal en grand écart

(Ève rêve)



Où allons-nous ?



Fin du monde, fin de l’humanité sont des métaphores; le temps de l’extinction sera peut-être le temps de la métamorphose (rire de Kafka se lisant), le temps de l’adaptation aux pires conditions de survie, comme les monstres animaux engendrés par la vie sous terre dans les confins; nous nous acheminons vers une métamorphose de monstres humains en monstres insectes

(rions noirs)



Qui sommes-nous ?



Des monstres originels, des monstres de tout temps, d’avant, de maintenant, d’après, d’ici, d’ailleurs, de nulle part, des monstres éternels
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Le Testament amoureux

Comment ça il n'y a qu'une critique sur Babelio sur ce bouquin '' Mémoires '' de l'incroyable Serge Rezvani ?



Allez, je vais essayer de vous donner envie de lire ce bouquin vraiment intéressant sur deux personnes, Serge Rezvani et Lula, deux grandes personnes pas très intéressées par le conformisme ni l'âge adulte, deux artistes qui vont réussir à vivre comme ils l'entendent ensemble dans un vingtième siècle déjà bien consumériste.





Vous avez toutes, tous entendu la chanson '' Le tourbillon de la vie '' non ? Par Jeanne Moreau,ou Vanessa Paradis ?

Oui?



Bon, et bien cette chanson et bien d'autres sont de lui.

D'abord sous le pseudonyme de Bassiak puis en son nom .



Serge Rezvani qui est toujours en vie et a donné un joli concert à Avignon lors du dernier festival ( que j'ai pour ma part juste dégusté à la radio merci radio France !) n'a pas immédiatement été compositeur interprète.



Il fut peintre avant tout.



Avant cela il nous raconte ici son incroyable enfance entre une maman russe juive immigrée et un père magicien iranien, il est né lui-même en Iran.



Ses parents ne s'entendent pas et son enfance ne sera pas douce

Serge Rezvani est de toutes façons un grand sensible,un écorché vif et il absorbe tout comme une éponge.



Il devient donc en France où il grandit un jeune homme plutôt torturé mais intelligent.



Dans ce livre il veut tout raconter, ce qui est impossible, mais il souhaite nous faire comprendre à la fois d'où il vient, et aussi, ce qui est son essentiel, combien avant sa rencontre avec Lula (son grand amour) il aura erré, cherché mais que ce n'est qu'avec elle qu'il aura pu être lui-même et petit à petit trouver un endroit où vivre et créer lui comme elle.



En effet ils vont quitter Paris et par la grâce de certaines rencontres, pouvoir jouir d'une maison dans les terres au dessus de Nice, eux qui étaient sans le sou.



À partir de là, leur légende va se créer : leur couple va attirer des visiteurs du monde de la culture, étonnés de les voir vivre dans cette maison isolée,loin de Paris, mais ils tiendront bon, et finalement en feront une sorte d'Ile terrienne pour vivre simplement mais bien.



C'est ainsi que Serge Rezvani deviendra sans y penser au début compositeur de chansons, c'est Ici aussi qu'il arrêtera la peinture, c'est là qu'ils recevront Jeanne Moreau et son mari, des tas d'autres artistes du monde du cinéma,de la peinture de la musique, ou de la haute couture,

Nous comprendrons pourquoi il voudra arrêter la peinture et préférera écrire à la fois des romans et des chansons.



Chacun d'eux tiendra des carnets également et Lula peindra mais elle ne cherchera pas à diffuser ses créations.



Le grand sujet est leur amour fort, leur soif de liberté, leur vie choisie.



J'ai trouvé ça très intéressant et touchant c'est assez rare pour vouloir en profiter, ces témoignages de vie d'humains chercheurs de liberté, emplis de lumière et d'ombre, s'isolant sans pour autant être indifférents au reste du Monde puisque ils se sont aussi engagés plusieurs fois.



C'est un livre qui peut être inspirant, je vais dans la foulée sans me presser lire '' Les carnets de Lula '' dont plusieurs extraits sont cités dans ce livre.



Lula a malheureusement été atteinte de la maladie d'Alzheimer très jeune, et au terme d'une vie commune de 50 années décédera sans que Serge ne l'ait quittée.



C'est un livre à lire pour avoir envie de liberté, de création, d'amour et encore d'amour, de mélange des cultures, de vies simples proche de la nature en lien fort avec les formes d'art qui nous sont je crois aussi essentielles que les jardins, l'eau l'air et l'eau.



Si vous n'êtes pas convaincu.e écoutez les entretiens avec Serge Rezvani sur France culture ou France Inter, je suis sûre que d'une manière ou d'une autre, vous finirez par ressentir un intérêt, une amitié, une inspiration.



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Le Testament amoureux

Le testament amoureux - Serge Rezvani



Serge Rezvani a été peintre puis écrivain sans parler des nombreuses chansons composées, notamment « Le tourbillon de la vie » chantée par Jeanne Moreau.



Serge Rezvani a entretenu une solitude et s’en est nourri refusant même l’image du père. Cela dit, dans le testament amoureux il témoigne de la pérennité de son amour pour Danièle, son épouse, et sa complicité absolue pendant 50 ans.



Jamais ils ne sont engagés l’un pour l’autre, vivant le jour le jour, s’appuyant sur la fragilité suspendue pour aiguiser l’angoisse et les plaisirs.



A travers des lignes mélancoliques de son enfance, nostalgiques sur ses origines, des lignes tourmentées de son engagement peureux, sa bibliographie est une transmission voulue de l’indicible. Il y écrit parfois dans un désordre sentimental qui a pris sur l’ordre de la tête, mais son naturel est touchant !
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Beauté j'écris ton nom

note de lecture sur Beauté j'écris ton nom de Serge Rezvani achevée à 00 H 00 ce 25 juin 2022

- voilà un récit polyphonique par la diversité des tons au gré de la plume avec pauses, distanciation quand le vieil homme se relit avec un sourire amusé

(lire donc aussi avec sourire amusé, le récit amusé du vieil homme, ce qui veut dire ne pas le prendre au pied des mots, il y a de la pose, de la posture et nécessairement de l'imposture; dans mon esprit, ce terme n'est nullement péjoratif ni dépréciatif; dès qu'on se met en mots ou en image, on se pose, s'impose, se fige; la vie va ailleurs)

- voilà un récit à strates, à boucles (on ne peut rajouter l'adjectif quantique, Rezvani voyant, nous voyant, se voyant comme biologie, évolution génétique, matérialiste, déterministe ; il ne semble pas savoir, pouvoir aller jusqu'à une approche quantique, indéterministe de l'Émergence)

- un récit où on peut lire

des pages de Lula,

des pages-sédiments du Rezvani des années d'avant 50 à Paris quand il se marie avec Eva la suicidaire,

puis des années 50 avec Lula (venue à lui par sa peinture - le tableau fétiche de Lula L'oiseau du Mexique - et qui vécurent leur amour-fusion pendant 50 ans à La Béate)

puis des pages de 2007 dans la maison bleue de l'actrice adulée, en fin de carrière, et malade, sur la falaise de Bonifacio

et des pages de 2020 dans la maison-jardin en contre-bas qu'ils (lui le vieil homme amoureux et l'actrice amoureuse tentant d'approcher l'indicible de Lula, de s'approprier Lula) ont bâti à l'image de La Béate dans les Maures et où l'actrice retrouve sa nature de paysanne corse à même la terre,

- où sans arrêt Rezvani passe du jeune-peintre-de-16-ans au vieil homme-tout-en-un de 93 ans, avec son sourire amusé, sa mélancolie, sa tristesse, sa nostalgie

- ce récit constitue une contre-histoire personnelle de l'histoire de l'art dit contemporain parce que pour Rezvani et dès ses débuts l'acte de peindre est l'oeuvre des libertés de la main du peintre.

Oui, vraiment, avec Rezvani, on est ailleurs, du côté de l'absolu (mot qu'il n'emploie pas), quand c'est le tableau peint par la main des libertés du peintre (venues de très loin, de très profond, à la fois de l'inconscient, du subconscient personnel, de l'inconscient collectif et d'une histoire de l'art pluri-millénaire) qui regarde le peintre.

- Voilà un récit particulièrement riche, iconoclaste, à se prendre plein de claques remettant en cause, en ce qui me concerne, certaines références, "connaissances".

- Rezvani décrit de façon impitoyable le monde des marchands d'art, annonce clairement, non notre effondrement mais notre transformation en bio-masse où comme dans les fourmilières, termitières, il n'y a que la fonction qui compte, rendant indestructible la colonie, unicité et singularité étant éliminées.

- Même s'il ne veut pas être anecdotique, les rencontres qu'il fait du Diable collectionneur d'Anvers ou de Charles Michelson sont particulièrement évocatrices et on comprend qu'avec Duchamp et compagnie, on a rompu comme il dit la chaîne dont parlait Cézanne, la chaîne de la vraie-réelle histoire de la peinture, non déconstruite, non abstraite, non moderne parce que portée par une tension, l'art comme tension annonciatrice de Beauté, dépassement de l'homme du meurtre (le récit de son meurtre de la raie pastenague au cap Lardier alors miné par les mines allemandes est comme un exorcisme) par l'Homme (Nietzsche ?)

- Mais l'essentiel de ce récit en méandres lents (rien du tourbillon de la vie ou de la mémoire qui flanche, sauf le temps d'une chanson, le temps d'un rire prolongé et partagé) c'est l'émergence des significations profondes de ce qu'il a vécu, de ce que l'attendu lui a réservé (ou pas) comme de ce que l'inattendu lui a offert, à l'image de ce que dit la coryphée à la fin de la Médée d'Euripide :

LA CORYPHÉE



De maints événements Zeus est le dispensateur dans l'Olympe. Maintes choses contre notre espérance sont accomplies par les dieux. Celles que nous attendions ne se réalisent pas; celles que nous n'attendions pas, un dieu leur fraye la voie. Tel a été le dénouement de ce drame.



- pour comprendre le geste inouï de son abandon par sa mère juive russe pour le confier, circoncis à 9 ans à une institution juive américaine ce qui le sauve du camp quand sa mère, cancéreuse, charcutée y mourra, il lui faudra sa vie entière

et donc vivre sa vie dans ce sentiment d'abandon avec tous les effets en lui, dans son corps, dans sa sauvagerie, sa sexualité, sa solitude extrême, sa timidité, son refus de se mettre en avant, sa confiance instinctive dans l'intelligence du coeur

- une vie aussi pour saisir l'empreinte ineffaçable de celle qui lui a donné l'amour de la vie et du féminin par ce que j'appellerai son amour inconditionnel (mot qu'il n'emploie pas non plus mais qui parle aujourd'hui à nombre de gens) pour lui, pour le monde qu'ils se sont créés, se mettant au centre de l'univers, centrés égoïstement (mot à prendre en très bons termes, pas comme dénigrement, jugement moral dépréciateur) sur leur bonheur où tout est mis à sa place, apprécié, où sont aimés, soignés oiseux, plantes... la Femme-toutes-en-une, Lula, Lula qui avait le don d'être l'artiste originale d'elle-même, eux deux-un faisant de la vie, de leur vie une-à-deux une oeuvre d'art, vivante, ludique avec chansons en particulier, chansons de l'instant, pour l'instant, ceci, paradoxe, n'ayant été possible que dans et par leur dèche, leur acceptation débrouillarde de la vie au jour le jour sans trop d'appréhension du lendemain

- mais hors de ces présents (aux deux sens du mot) de félicité chantée, rieuse, joyeuse, dans l'atelier derrière la maison, Serge redevenait peintre, peintre de peintures cauchemardesques comme en contre-point de l'idylle sans cesse renouvelée, de félicités en félicités, contre-point nécessaire, hérité du passé détraqué qui l'avait détraqué et de l'époque de Nagasaki, de la guerre du VietNam...

- mais comme un dieu (mot non employé par Rezvani) ouvre la voie à l'inattendu, l'inattendu sait réserver, proposer des surprises, des coïncidences,

- c'est l'ultime amour qui permet de voir enfin le dessin qui s'est dessiné dans le tapis de la vie avec la création de ce jardin en bas de la falaise où les deux vieux amants sous l'influence fantômatique de la morte sans cadavre que fut Lula en fin de vie redoublent avec des nuances, des différences mais dans les mêmes couleurs les années Lula

- ainsi Serge peindra quatre toiles de l'actrice dans sa nudité divine, pour exalter sa fascination du féminin face au levant sur la mer, face au midi sur la mer, face au couchant sur la mer et face à la nuit sur la mer, la vie en boucles, la vie en cycles, la vie en saisons, la vie en peintures, en écritures, en chansons pour l'actrice à la si belle voix.


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Beauté j'écris ton nom

Infatigable, Serge Rezvani publie, à 94 ans, un nouvel épisode de son carnet d’aventures intimes, commencé en 1967 avec « Les Années-lumière ».
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Venise

Commentaire de dommar56 sur Rakuten



Ce ''guide intime'' de Venise ne vaut que par le très court texte d'introduction de Rezvani. Un observateur amoureux et critique de la Sérénissime. Toute la partie guide, shopping, cafés, bars, restaurants et autres bonnes adresses est on ne peut plus datée (1986). Quand on lit: ''prix modérés'', ''bon marché'', et quand on connaît la ville telle qu'elle est devenue (2016), on sait que cela n'existe pas... du moins, plus du tout dans la Venise d'aujourd'hui. Trente ans sont passés par-dessus ce guide qui reste quand même une curiosité, un très joli petit livre à collectionner. Pour les amoureux de la Dominante, uniquement.
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Le Canard du doute

Je n'ai pas accroché… Les nouvelles semblent renvoyer à la jeunesse (ses parents par exemple) et à la vie de Serge Rezvani, mais bien qu'ayant lu plusieurs de ses (auto)biographies, je n'arrive pas à me sentir impliqué, même indirectement. Un style très narratif, presque cinématographique, décrivant des situations qui laissent un peu le lecteur à distance.
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Divagations sentimentales dans les Maures

Ce petit livre illustré de dessins est à la fois un cri d'amour et un cri de colère pour le massif des Maures. En 1947 Serge Rezvani et sa compagne s'installe dans une maison nommée La Béate à la Garde Freinet, il tombe amoureux du pays, il en décrit la beauté, la nature sauvage, la végétation, la faune, la flore, le ciel, la mer, les habitants. Mais au fur et à mesure qu'il y vit, que les années passent, il pousse un cri de colère pêle-mêle contre le bétonnage de la côte, les touristes et leurs détritus, contre les nudistes, la percée des routes qui détruisent la végétation ou les forestiers sont remplacés par des agents immobiliers ou les terres cultivables ont été partagées en parcelles pour construire des villas de luxe. L'écriture est poétique lorsqu'elle décrit le pays d'autrefois et efficace, directe lorsqu'elle le décrit défiguré. Merci à ma fille de me l'avoir offert !
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Ce qu'ils font est juste

Ce recueil commence avec des dessins de Enki Bilal et comprend 27 nouvelles, toutes d’auteurs différents et très variées que ce soit dans le style ou le thème mais elles ont toutes un point commun et mettent en avant : l’étranger, la solidarité et l’hospitalité.

Quelques-unes peuvent déconcertées par le style, d’autres vous happées mais aucune ne m’a laissée indifférente. De plus, cela m’a permis de découvrir des auteurs.

Ma préférée : Laissez passer les loups de Serge Quadruppani.

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Divagations sentimentales dans les Maures

C'est en 1979 que Serge Rezvani a publié ce beau livre sur la forêt des Maures, magnifique poumon du Var, en collaboration avec Hans Silvester dont les photographies illustrent parfaitement le texte poétique de Rezvani.



L'adjectif "sentimentale" inclus dans le titre est tout à fait approprié pour qualifier cette "divagation" de l'auteur qui livre le coeur de ses perceptions et sentiments devant les beautés de la nature sauvage et la végétation si riche des montagnes des Maures. En effet, c'est toute une poésie des sentiers, des sources, des fleurs, des arbres, des pierres que récite Rezvani dans une écriture mélancolique qui entraîne le lecteur dans sa méditation sur la relation de l'homme avec la nature et aussi de l'homme avec l'homme.



Cette mélancolie qui fait cheminer à travers les sous-bois, sur les crêtes et des fois plus rares vers le bord de mer déjà abîmé à cette époque, se transforme en nostalgie lorsqu'il évoque les souvenirs du temps heureux, temps immobile, qu'il a vécu dans sa maison, à l'écart de "la foule dense et barbare".



C'est un vrai plaisir de l'accompagner à pied vers la Chartreuse de la Verne ou en voiture à Notre-Dame des Anges et de se laisser envahir par la plénitude de ces sites où la pierre sauvage côtoie le vert de la végétation et le bleu du ciel ou de la mer, le regard porté vers les îles d'or de Port-Cros ou Porquerolles.



Une très belle divagation à prolonger si possible sur place où demeurent quand même quelques endroits préservés.
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Ce qu'ils font est juste

Lu pour Carole Martinez dont j’avais lu le cœur cousu
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L'éclipse

La lecture de cet ouvrage m'a laissé une impression mitigée. L'auteur ne manque ni de talent ni d'intelligence, mais alors que je m'attendais à être bouleversée ou dérangée par son témoignage — il relate comment la maladie d'Alzheimer a eu raison du grand amour de sa vie —, je suis restée très "en dehors" du livre. J'ai été gênée par le côté très théorique de son ouvrage. Rezvani est un auteur qui analyse et conceptualise plus qu'il ne donne à voir.

On peut comprendre que l'auteur ait tenu à protéger son intimité et n'ait pas voulu donner trop de détails. Mais ce roman très pudique finit à mon sens par manquer de chair.
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Les Années Lula

J'ai toujours aimé les histoires d'amour dans et de Paris, et celle là est particulièrement enflammée. L'écriture de Rezvani rend le quotidien amoureux passionnant, sans qu'il ne se passe quoi que ce soit d'extraordinaire. Je ne ferai que paraphraser les critiques existantes : un hymne à l'amour ! J'ai lu ce livre adolescent et je rêvais de rencontrer une Lula !
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Les années-lumière

j'ai lu ce livre après les années Lula, alors qu'il s'agit de son autobiographie avant l'age adulte, enfant et adolescent balloté par des évènements qui le dépassent, et j'ai le souvenir d'une écriture lumineuse, amoureuse, servant une histoire dramatique, voire sordide.

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Histoire masquée

Si ce roman n'avait pas été proposé lors d'une Masse Critique Babelio, je ne me serais sans doute jamais penchée dessus. C'est son résumé qui m'avait beaucoup intriguée et je ne me suis pas trompée : j'ai passé un très bon moment avec ce texte.



Serge Rezvani se pose ici comme nègre du narrateur, un prêtre venant d'une famille renommée en France qui ne sera jamais citée. Le thème principal de ce roman est le secret des origines et la famille, suite à la fameuse demande : prouver que l'on est français. Les autres grands thèmes traités dans ce roman seront ceux liés aux superstitions, à la perte de la foi chrétienne et aux croyances africaines : soit à toute forme de croyances et au combat entre le bien et le mal.



Ce roman se veut être une chronique de la vie du grand-oncle du narrateur, prêtre à l'égo surdimensionné, aimant la vie de château. De plus, il ne semble pas se gêner pour traiter avec des d'autres prêtres corrompus, la mafia sicilienne et possédant des idées bien à lui. Ce texte est une très bonne critique de la chrétienté au travers de l'image de cet homme cynique ayant perdu foi en Dieu.



On peut aussi voir que la famille dans son ensemble n'est pas toute blanche ; entre Blondine qui devient folle, Angélique qui ne sait pas parler et François qui se trouve enfermé dans un rôle qu'il n'a jamais voulu obtenir. Autrement dit, nous sommes ici face à la déchéance d'une famille de renom.



Concernant le style d'écriture, je n'ai rien à redire. Serge Rezvani sait manier la langue française et on ne peut que savourer sa maîtrise de la langue française au travers de sa très belle plume.



Histoire Masquée a été pour moi une belle découverte, bien que mon intérêt soit un peu retombé au fil des chapitres. Il propose néanmoins une très bonne critique des sociétés et des croyances, quelles qu'elles soient.
Lien : https://reveuseeveillee.blog..
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L'Origine du monde

Grand amateur des reproductions de chefs- d'oeuvre, le conservateur du Grand Musée Gerbraun ne semble pas se méfier du faussaire Bergamme. Ou peut-être agit-il en connaissance de cause? Le commissaire Quévédo parviendra-il à sauver quelque chose?

Cet épais roman contient tous les thèmes qui alimentent l'écriture de Rezvani.
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Histoire masquée

Reçu dans le cadre de masse critique, "Histoire masquée" ne tient pas vraiment ses promesses. Le résumé nous annonce l'histoire palpitante d'une famille française, descendant de Gilles de Rais dans ce qu'elle aura de sombre et de cruelle. Impression renforcée par une citation de ce bon vieux Marquis de Sade.

Sauf que au lieu de ça nous assistons à un récit familial assez classique d'une famille qui se délite dans les jeux (secrets) de pouvoir (y compris religieux). De Gilles de Rais ou de Sade pas de traces, par contre des pages fumeuses sur les auteurs russes, l'héritage de Rousseau et "la race" des puissants européens. J'ajoute aussi que le prologue tellement XVIIIe du récit confié via via où l'on masque les noms et lieux, franchement la littérature française en a déjà trop bouffé.

Globalement, je me suis perdue dans ce roman qui toutefois demeure bien écrit et plaira sans doute aux amateurs d'un clacissisme renouvelé.
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