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3.8/5 (sur 456 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Paris , 1967
Biographie :

Sibylle Grimbert est une romancière et éditrice française.

Son premier roman, "Birth days", à mi-chemin du conte fantastique et de l'introspection, paraît en 2000. Il a suffi de trente pages à son éditeur, Jean-Marc Roberts, pour décider de le publier. "Le Centre de gravité" paraît deux ans plus tard.

En 2004, Les Inrockuptibles écrivent : "C'est avec son troisième roman, "Il n'y a pas de secret", que Sibylle Grimbert prend de l'ampleur, passe à un autre niveau d'écriture."

En 2006, Sibylle Grimbert quitte les Éditions Stock pour les Éditions du Seuil, qui publient "Une absence totale d'instinct".
"Toute une affaire", qui paraît trois ans plus tard aux Éditions Léo Scheer, lui permet de renouer avec le succès critique.
Son sixième livre, "Le vent tourne", paraît en janvier 2011.

Les livres se suivent désormais sur un rythme accéléré. Un septième roman paraît en janvier 2012 : "La Conquête du monde".

Nouveau changement d'éditeur en 2013, avec la publication du "Fils de Sam Green" aux Éditions Anne Carrière, qui éditent ensuite, en janvier 2016, "Avant les singes", le neuvième roman de Sibylle Grimbert.

Lors de la rentrée littéraire d'hiver 2018 paraît "La Horde", toujours chez Anne Carrière, roman racontant du point de vue d'un démon la possession d'une fillette âgée de 10 ans.

En 2013, Sibylle Grimbert a fondé les éditions Plein Jour avec Florent Georgesco.
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Bibliographie de Sibylle Grimbert   (13)Voir plus


Entretien avec Sibylle Grimbert, à propos de son ouvrage La Horde


16/02/2018


Dans votre dernier roman, vous abordez de manière frontale le thème de la possession démoniaque à travers Ganaël, démon débutant qui investit le corps et l’esprit de Laure, 10 ans. Comment vous est venue cette idée, et surtout la manière de l’investir via le monologue (doublement) intérieur de Ganaël ?

J’ai toujours aimé les films d’horreur, de possession, j’ai toujours aimé avoir peur quand je lisais ou voyais des histoires, mais depuis très longtemps je ne regarde plus de films de ce genre parce que ça m’empêche de dormir pendant des semaines. J’avais envie de retrouver ce sentiment merveilleux d’effroi devant ce qui nous est étranger, face à une force mystérieuse qui progresse. Quand j’ai commencé à y travailler je me suis aperçue que la partie inconnue de l’histoire était celle du démon, sa voix, ce qu’il pensait, pourquoi il agissait. Le faire parler était excitant, et m’a permis d’avoir un regard extérieur sur les hommes, qui pouvaient l’émouvoir, l’énerver, et surtout qu’il pouvait aimer. Cela permettait aussi un regard sur l’enfance à travers Laure qu’il envahissait, et qu’il « sentait » de l’intérieur, puisqu’il habite ce corps.



Vous faites parfois référence à « ce que les humains attendent de nous », et aux clichés liés à la possession et aux créatures maléfiques dans la culture occidentale. Quels sont les travers de représentation que vous souhaitiez à tout prix éviter en vous lançant dans l’écriture de La Horde ?

Pas les clichés, justement, ou du moins pas les étapes classique du genre ! Je voulais au contraire les respecter, ne surtout pas les évincer ou, pire, les édulcorer. Mais en même temps, adopter le point de vue du démon, en en faisant un personnage qui nous parle, m’obligeait à sortir de l’idée qu’on se fait des démons en général : une masse de mal brute, sans intériorité, juste mue par la méchanceté. Ganaël, lui, veut jouir de la vie humaine, sans écarter la cruauté pour y parvenir. Il ne cherche pas à attraper une âme, il cherche à réaliser tous ses rêves, il pense que le monde est une jungle où on écrase qui on veut, il trouve tout d’abord l’humanité stupide de ne pas vouloir l’admettre. C’est peut-être ce qui sort le plus du lieu commun : il parle, il a une histoire personnelle (un passé, des envies, des sentiments), des nuances, et par là il peut changer d’avis, et s’humaniser. Mais trop tard pour lui, je le crains…



Ganaël est au fond un être sensible, parfois agacé mais souvent touché par les habitudes des êtres humains qu’il décortique et analyse sans cesse pour mieux les imiter ou les déjouer. Si bien que parfois, l’humanité apparaît plus violente que lui, plus imprévisible, ce qui le sidère…

Lui et Laure se contaminent. Ils se met à aimer l’humanité, et elle… elle devient de plus en plus dangereuse… Dans sa position d’observateur (pour réussir sa possession), Ganaël commence à nous comprendre, il voit nos mouvements, notre sauvagerie et notre douceur parfois. Son opinion évolue, il perçoit la beauté humaine, la fragilité de Laure, de ses parents, de tous les êtres qu’il croise. Il découvre une richesse – en bien, en mal – qu’il n’avait pas soupçonnée.



Dans certains passages, vous parvenez à instiller le doute sur des comportements qu’on peut observer au quotidien, notamment chez les enfants. Si bien qu’on a tendance à réinvestir le réel en y voyant des signes de possession, du moins des actions suspectes. Comment travaillez-vous cette contamination de la réalité par la fiction ?

Quand Laure fait des bêtises – plus ou moins graves –, ou quand elle joue avec ses copines, tout ce qui se passe dans la réalité se met à glisser du côté de l’étrange et de l’angoissant. En fait c’est une question de regard : si vous décidez de voir le diable partout, chaque chose devient diabolique. Il faut jouer avec d’un côté l’extrême réalisme des situations et de l’autre cette connaissance d’un élément magique. En fait je ne refuse aucune interprétation de ce que l’on voit dans la vie quotidienne, je n’ai pas de religion sur le sujet si vous voulez. Une petite fille parle seule : elle peut s’ennuyer et chercher à s’occuper, ou elle peut avoir un ami imaginaire, ou elle peut être possédée par un démon. Si on est rationnel, on ne peut pas refuser a priori l’irrationnel, ce qu’on ne connaît pas. Plus précisément, l’enfance est le temps des possibles ou des prodiges. Tout peut exister. On découvre chaque jour quelque chose, alors pourquoi, puisque tout est miraculeux, ne découvrirait-on pas des choses étranges, que vos parents auraient oublié de vous expliquer ?



On pense souvent qu’on entre dans la tête d’un auteur en le lisant, mais la lecture n’est-elle pas plutôt une forme de possession passagère : un narrateur et un auteur qui s’invitent dans l’esprit du lecteur ?

En tout cas, c’est le but.





Sibylle Grimbert à propos de ses lectures




Quel est le livre qui vous a donné envie d`écrire ?

Tous, et ce n’est pas une défausse ou une pose. C’est la diversité des auteurs, des livres, des styles, des propos qui m’a précisément donné envie d’écrire.



Quel est le livre que vous auriez aimé écrire ?

En ce moment, La Lettre écarlate de Nathaniel Hawthorne.



Quelle est votre première grande découverte littéraire ?

Très classique : Marcel Proust. J’ai été à 14 ans stupéfaite qu’un livre aussi merveilleux et qui ne ressemblait à aucun autre puisse exister. Ensuite, Henry James et Vladimir Nabokov ont beaucoup compté.



Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

Pas un livre, mais un auteur : Fiodor Dostoïevski.



Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?

Moby Dick de Herman Melville.



Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?

Comment construire une cathédrale de Mark Greene. Un petit chef-d’œuvre, que je suis très fière d’avoir édité dans la maison dont je m’occupe par ailleurs, Plein Jour.



Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?

Le Marquis de Sade, en fait j’ai fini par le trouver un peu puéril.



Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?

Non, je me sers de phrases selon les circonstances. Aucune ne suffit à tout, sauf peut-être « Car ce snark était un boojum, voyez-vous », le dernier vers de La Chasse au Snark de Lewis Carroll.



Et en ce moment que lisez-vous ?

Je suis plongée dans un énorme livre d’art d’un genre un peu particulier : Le Gazouillis des éléphants de Bruno Montpied, aux Éditions du Sandre. Le sous-titre complet est : "Tentative d’inventaire général des environnements spontanés et chimériques créés en France par des autodidactes populaires, bruts, naïfs, excentriques, loufoques, brindezingues, ou tout simplement inventifs, passés, présents et en devenir, en plein air ou sous terre (quelquefois en intérieur), pour le plaisir de leurs auteurs et de quelques amateurs de passage." Je crois qu’il dit tout.

Découvrez La Horde de Sibylle Grimbert aux éditions Anne Carrière :



Entretien réalisé par Nicolas Hecht.


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Effractions : le podcast #17. Valérie Chansigaud parle du Dernier des siens de Sibylle Grimbert Dans cet épisode d’Effractions : le podcast, Valérie Chansigaud, historienne des sciences et de l’environnement, évoque les thématiques abordées dans le livre de Sibylle Grimbert, Le Dernier des siens (2022). Dans ce roman, l’autrice raconte la rencontre entre un jeune scientifique et son grand pingouin pour interroger l’extinction de cette espèce au 19ᵉ siècle.


Citations et extraits (120) Voir plus Ajouter une citation
Gus se demandait qui de lui ou de Prosp voyait le monde tel qu'il était.
En vérité, chacun le voyait à sa manière tel qu'il était ...
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Il ne s’agissait pas de ce que Gus avait fait, et pourtant il était responsable, puisqu’il était humain. Comment le dire ? Gus aurait mieux surmonté la disparition du grand pingouin s’il avait pu accuser un volcan, ou les orques, ou des ours blancs. Mais cet oiseau mourrait d’avoir été la matière première de ragoûts, de steaks noirs, d’huile qui n’était même pas meilleure que celle des baleines.
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Mais non, le dodo a été une exception, un accident ; les animaux ne disparaissent pas, pensa-t-il aussitôt. La terre n'est que profusion. Certes, jadis, les mammouths, les mégalonyx-cet énorme paresseux, de la taille du mastodonte- s'étaient éteints. Certes, les bêtes se transforment sans doute, les catastrophes les tuent ou, parfois, parce que les conditions autour d'elle changent, une espèce devient plus adroite et prolifère quand une autre s'amenuise. Mais la nature, si bien huilée, si équilibrée, empêche la fin de ce qui n'est pas nuisible à l'homme. Et d'ailleurs la terre est si vaste que, peut-être, quelque part au milieu du Pacifique, ou dans les pôles gelés, sont cachées les espèces que l'on pensait mortes.
(p.94)
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Comme toujours quand quelque chose d'inhabituel se passe, les oiseaux, ceux qui volaient, ceux qui n'avaient pas des ailes nanifiées par des siècles de bonheur, de tranquillité, tournaient en criant autour de la falaise.
(p.12)
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Pendant les premiers temps de cette existence, il arriva à Gus de se demander qui, de lui ou de Prosp était l'être humain ou le pingouin, il voulait dire : c'était comme si, à force d'être en tête-à-tête et d'avoir des habitudes communes, ils avaient créé une espèce hybride, une chimère d'oiseau marin et d'homme. D'ailleurs, lorsqu'il se regardait dans son miroir, Gus ne se reconnaissait plus tout à fait : sa barbe et ses cheveux avaient poussé et, à part son front, ses oreilles, ses mains et le haut de ses joues, quand il était habillé, plus aucune peau humaine n'apparaissait. Prosp, quant à lui, ne se reconnaissait pas dans un miroir et, faute de semblables, devait ignorer son aspect extérieur.
(p.160)
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J’ai vu au Canada des choses merveilleuses et affreuses. Merveilleuses : les bisons ; moi à qui vous avez fait découvrir la girafe, j’ai découvert près de moi un animal énorme, trois fois un bœuf peut-être, avec ce que j’appellerais un manteau, ou une étole de fourrure derrière la tête, sur les épaules, comme une vieille femme à l’opéra. Affreuses : j’ai vu un troupeau entier de ces bêtes fabuleuses traverser une rivière et nager, oui, nager et lutter contre le courant avec difficulté, elles qui sont si puissantes à terre ; et pour finir je les ai vues, à peine sauvées ou encore secouées par leur périple, se faire égorger par les trappeurs avec lesquels j’étais.
Il paraît que c’est courant. Mais je ne pensais pas que la vue de tout ce sang, la douleur et l’incompréhension de ces animaux que les hommes achevaient juste parce qu’il était en leur pouvoir de le faire m’atteindraient autant. Naturellement, à cet instant, j’ai pensé à Prosp. De là est venue cette idée saugrenue d’Islande où il serait heureux avec quelques-uns de ses semblables, que vous pourriez protéger, puisqu’en protéger un ou dix revient sans doute à la même chose, vous ne croyez pas ?
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 Ces cons, en fait ils étaient pires qu'il ne l'avait cru. Ils vivaient ensemble, ne regardaient que ceux qui leur ressemblaient, dès qu'on sortait du lot, bousculait leur contentement d'eux-même, leur certitude d'avoir raison et d'être bons, ils devenaient aveugles, comme son père dont ils étaient des répliques presque exacte.
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Tout ce qu’ils voyaient était mû par un mécanisme interne, avec ses causes et ses conséquences, qui créaient d’autres causes et d’autres conséquences, et ainsi de suite, comme la science le montrait, sans pouvoir l’expliquer; un monde avec ses propres règles, des règles presque chimiques, aussi logiques que l’eau qui se change en vapeur quand elle bout, que l’objet qui tombe à terre quand on le lâche, un ordre autonome ayant trait à la présence d’espèces, de plantes protéiformes, quelque chose qui vivait seul de lui-même, soumis à des influences incessantes. Sauf qu’eux en ignoraient les modalités, et parfois ils se demandaient combien d’années avaient été nécessaires pour que les ancêtres de Prosp se réveillent un jour amputés d’ailes capables de les faire voler.
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Cet animal est buté, pensa Gus, il manque d'intelligence, de sens du futur, cet animal est stupide, voilà, il préfère mourir de faim que rester dans une cage.

[p19]
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Soudain l’être humain n’avait plus d’importance dans ce monde qui respirait seul, de lui-même, de cet univers indifférent à sa présence, qui existait avant qu’un être humain ne le regarde et qui continuerait après. Ni plus ni moins important qu’un copeau de bois parmi des milliards de copeaux, il n’était plus rien qui eût un nom, une corpulence, une odeur, des habitudes, des goûts, une individualité changeante.
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