AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

4.24/5 (sur 21 notes)

Nationalité : France
Né(e) le : 19/11/1944
Mort(e) le : 20/07/1998
Biographie :

Jean-Michel Palmier est un philosophe et historien de l'art français.

Il a notamment enseigné à l’université de Paris VIII et a été Chargé du cours d'agrégation d'esthétique à l'Université de Paris I.

Spécialiste des courants artistiques de la république de Weimar, il a également rédigé des études de références sur Martin Heidegger, Herbert Marcuse, Walter Benjamin ou Ernst Jünger.

Il a également été un collaborateur régulier du Monde des livres, du Magazine Littéraire et du Monde diplomatique.

Il a consacré ses derniers travaux à Walter Benjamin.

Source : Wikipédia
Ajouter des informations
Bibliographie de Jean-Michel Palmier   (31)Voir plus

étiquettes
Videos et interviews (10) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de
Pour quoi vous levez-vous le matin ? Se construire et construire Pour la première fois, une centaine de personnalités - astronaute, philosophe, biologiste, chef cuisinier, artiste, pilote de ligne, astrophysicien, mathématicien... - dévoilent leur moteur intime. La motivation qui les pousse à agir, créer, travailler, espérer, vivre au mieux chaque jour et à donner du sens à leur existence. Leurs réponses poétique, amusantes, profondes, tragiques ou ludiques sont autant de témoignages de vie. Ces textes courts, illustrés par Hélène Crochemore, offrent tout à la fois connivence, réconfort, plaisir et inspiration. https://www.belin-editeur.com/pour-quoi-vous-levez-vous-le-matin Pour laisser votre propre témoignage : Site de l'ouvrage : https://whygetup.org/fr/ Les auteurs par ordre d'apparition : Cédric VillaniJacques Arnould • Jean-Louis Israël • Monique Atlan • Jean Audouze • Nicholas AyacheJean-Paul DelahayeGérard Berry • Catherine Bréchignac • Alexandre Fleurentin • Edgardo D. Carosella • Thibault Damour • Jean Botti • Enki BilalAnne ChengMaxime Abolgassemi • Catherine Maunoury • Rémy Camus • Gérald BronnerLaurent de Wilde • Mercedes Erra • Roger-Pol Droit • Étienne Klein • Yohann Thenaisie • Alexei GrinbaumMarc DugainDavid ElbazXavier Emmanuelli • Hervé Fischer • Marc Fontecave • Maud Fontenoy • Jean-Gabriel Ganascia • Claire Gibault • Pascal Pujol • Olivier GechterAnatole LécuyerYves GingrasGabrielle HalpernHartmut RosaMarcel HibertJean-Jacques Hublin • Patrick Iglesias Zemmour • Marc Lachièze-ReyGilles Macagno • Virginie Martin • William Marx • Jean-Michel Othoniel • Patrick Pissis • Cyril Rigaud • Aldo NaouriEmmanuelle PouydebatFrédéric ThomasAdrien Rivierre • Thomas Sterner • Étienne Vernaz • Matthieu Ricard • Stuart Vyse • Sylvie CafardyJean-Pierre Sauvage • Norbert Gautrin • Claire MathieuJacques-Alain Miller • Jean- Philippe Uzan • Miroslav RadmanGeneviève Héry-ArnaudGiancarlo FainiJean-Louis Étienne • Jean-Pierre LuminetGuillaume NéryAlain BernardGuillau
+ Lire la suite

Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
Roseau
Typha latifolia

Dans la mythologie grecque, la nymphe Syrinx se métamorphosa en roseau pour échapper aux avances du dieu Pan. Désespéré par cette disparition, Pan coupa quelques roseaux, les assembla avec de la cire d’abeille et créa ainsi la première flûte afin d’exprimer sa complainte. La flûte de Pan est parfois aussi appelée « syrinx ». Le roseau est une plante qui symbolise la résistance et la souplesse.
Commenter  J’apprécie          170
Chrysanthème
Chrysanthemum

Le chrysanthème est originaire de Corée. Considéré comme la plus ancienne fleur du monde, il fut très apprécié dans les jardins de Chine avant d’arriver au Japon où l’empereur l’adopta et où il devint rapidement la plus noble des fleurs pour lui et pour son peuple. Sa présence iconographique est très importante dans l’art de ces trois pays.
En Corée, c’est la fleur de la joie, de la gaieté et du plaisir. C’est un symbole d’éternité heureuse. (..)
La France est le seul pays à lui avoir conféré un aspect funeste.
Commenter  J’apprécie          110
Sous son règne, la danse est sortie de la salle de bal pour se montrer sur la scène. Elle est devenue plus spectaculaire, plus aérienne. Les premiers danseurs professionnels ont fait leur apparition. On parle de "la belle danse", qui inflence toutes les cours en Europe. Le roi, qui aime la comédie-ballet plus que tout, a fait de Lully son compositeur préféré.
C'est à ce roi danseur que je pense en imaginant mes fontaines. Je les appelerai Les Belles Danses.
Commenter  J’apprécie          60
Il apparaît, il est présent, sans qu'on le voit tout à fait. C'est ainsi que je travaille depuis des années. Je ramène àa la présence des corps qu'on ne voit pas.
Commenter  J’apprécie          70
« L’ étendue de l’intérêt que le gouvernement de la nouvelle Allemagne porte aux questions d’art est extraordinaire. Ce sont ces esprits de premier ordre qui discutent le point de savoir si, en peinture, Barlach et Nolde peuvent être considérés comme des maîtres allemands, s’il peut et doit y avoir, en poésie, une littérature héroïque, ce sont eux qui surveillent les répertoires et fixent les programmes des concerts, qui, en un mot, mettent presque quotidiennement l’art à la portée du public comme une affaire d’Etat de tout premier ordre. »

Gottfried BENN, Expressionnisme (1933)

Ces phrases de Gottfried Benn, extraites de sa « défense »d’un expressionnisme si violemment attaqué, dès 1933, par Rosenberg et ses partisans, témoignent non seulement des illusions de certains intellectuels, mais aussi de la censure précoce qui s’exerça sur la création artistique. La lecture de Mein Kampf montrait pourtant clairement ce que serait la politique culturelle du IIIè Reich : une barbarie planifiée. Sans doute, les autodafés du 10 mai 1933, où disparut tout ce que la culture allemande avait produit de progressiste dans le sillage des fondateurs de l’Aufklärung, ont-ils révélés au monde le vrai visage du nazisme. Faute de pouvoir brûler les auteurs, les nazis anéantirent leurs livres. Ces bûchers de l’intelligence, comme l’ont souligné Ernst Bloch, Alfred Döblin, Thomas et Heinrich Mann, sont demeurés l’un des symboles les plus marquants du IIIè Reich. Aujourd’hui, la réintégration dans la culture allemande de l’héritage de ceux qui, en 1933, choisirent l’exil ou y furent contraints est un fait acquis. Il est peu de livres brûlés par les nazis qui ne soient réédités. Le destin des poètes bannis est devenu un thème de recherches, de romans, de spectacles…

Ce que fut la répression dans les arts plastiques est moins connu, tout comme le destin de ceux qu’elle frappa, et cela pour plusieurs raisons. Les écrivains qui quittèrent l’Allemagne en 1933 le firent pour des raisons politiques ou éthiques. Beaucoup d’entre eux, menacés en tant qu’adversaires du régime, continuèrent d’écrire et participèrent activement à la lutte contre le nazisme. En dehors de figures comme John Heartfield et de quelques autres, les peintres exilés se tinrent souvent à l’écart des actions politiques. En Allemagne, ils étaient persécutés moins pour leurs idées que pour leur style. Si les sympathies d’un Nolde à l’égard du national-socialisme sont connues, comment restituer la complexité de la vision politique d’un Schmidt-Rottluff, d’un Kirchner ou d’un Kokoschka? Peu d’écrivains demeurés en Allemagne parvinrent à ne pas se compromettre avec le régime. Certains peintres créèrent en secret ou furent condamnés aux paysages et aux natures mortes. Sans doute les écrivains et les poètes ont-ils parfois évolués dans leur style, mais aucune évolution littéraire n’est comparable à celle d’un Grosz exilé en Amérique ou d’anciens peintres proches de l’expressionnisme demeurés dans le Reich. Enfin, à la différence des livres, une toile existe comme exemplaire unique, même à travers ses reproductions. Des oeuvres plastiques détruites par les nazis, il ne reste souvent que des images. Lorsqu’il s’agit d’artistes peu connus, contraints à l’exil, il n’est même plus possible de reconstituer leur vie après 1933,et, de leurs oeuvres, il ne reste souvent aucune trace.

Le destin des peintres d’avant-garde reste à écrire. De leur histoire, il n’est souvent resté que les symboles les plus monstrueux, comme cette exposition Art dégénéré, organisée à Munich en 1937, où toutes les formes plastiques des années 20-30 étaient proposées aux sarcasmes du public. Qu’on ait eu le courage, l’intelligence de la remonter en 1992 à Los Angeles et à Berlin est un acte dont l’importance n’échappera à personne, à une époque où certains sont prêts à réintégrer dans l’histoire de la culture ce qui fut la barbarie la plus absolue. Les auteurs de ce volume, venus d’horizons théoriques différents, concernés à plus d’un titre par le destin de la culture allemande sous le national-socialisme, n’ont pas la prétention d’ajouter au volumineux et remarquable catalogue de l’exposition, de nouvelles analyses. Leur intention est plus modeste et plus pédagogique : permettre au public français de prendre conscience de l’importance d’une telle exposition et de ce qu’elle apporte tant sur le plan de l’histoire des arts en Allemagne que sur la pratique culturelle du nazisme;

Depuis 1945, un certain nombre de tentatives ont été effectuées pour minimiser la répression des arts d’avant-garde en Allemagne par les nazis, en la réduisant à des aberrations imputables à des subalternes, comme si cette répression systématique n’était pas inhérente du programme de la NSDAP. La mise en avant des goûts Kitsch et petit-bourgeois de Hitler, de la sensibilité « racial populaire » (völkisch) de Rosenberg, l’un des principaux adversaires de l’art moderne, chantre de l’imagerie paysanne (Blut-und-Boden) et des nus aryens, ne suffit pas non plus à rendre compte de la haine des nazis. Sans doute existera-t-il, principalement au début, des contradictions et des hésitations. L’admiration que Goebbels portait à certains, comme Munch, Nolde, Van Gogh, son désir de revendiquer une part de l’expressionnisme comme art « germanique » étaient certes en contradiction flagrante avec les idées de Hitler et de Rosenberg. Mais, l’attitude qui prévalut fut très rapidement celle qu’exposait Mein Kampf.

Cette répression est donc l’expression même de tout ce qui opposait l’art au national-socialisme. Alors que les nazis souhaitaient le réduire à une production de slogans, à un instrument de propagande au service de l’esthétisation de la politique, au sens où l’entend Walter Benjamin, les courants artistiques de la République de Weimar rendaient impossible une telle confiscation. Berlin, mais aussi Munich avaient permis une rencontre à peu prêt unique entre artistes allemands et influences étrangères. L’expressionnisme, avec l’éclatement de ses formes, la violence de ses couleurs, ses élans visionnaires, ses pressentiments d’apocalypse et son pacifisme, étaient à l’opposé des idylles champêtres exaltant la femme blonde allaitant un bébé blond dans les champs de blé, monotones allégories de la fécondité, de la race, du sang et du sol natal. L’idéal de beauté nordique semblait à l’avance ridiculisé par les toiles de la Brücke, influencée par l’art africain et océanien, gravant sur le bois ou faisant surgir, sur des toiles, des images violentes de corps, de profils taillés à la hache, poussant à l’extrême le pathétisme de l’expression humaine. Dada ne respectait rien, insultait l’armée, la bourgeoisie, l’Allemagne, tournait en dérision l’art lui-même, faisait du détritus un moyen d’expression artistique (K. Schwitters) et ne cachait pas sa sympathie pour la Révolution spartakiste. Les caricatures au vitriol du « nouveau visage de la classe régnante », exécutées par Grosz, faisaient rire Lénine. Elles constituent, aujourd’hui encore, avec les textes de Tucholsky, la satire sociale la plus féroce de l’époque. Marqué par les courants modernistes de toute l’Europe, que les galeries berlinoises comme le Sturmexposeront si souvent, l’art allemand unissait, dans sa diversité, la violence, la beauté, la force d’expression et souvent l’abstraction la plus audacieuse. Si l’on ajoute que nombre de ces artistes étaient d’origine juive, l’accusation de » cosmopolitisme » et de « judéo-bolchevisme » se comprend aisément. Le slogan célèbre de l’écrivain Wolff : « L’art est une arme » caractérise assez bien un grand nombre de tentatives artistiques de la République de Weimar. Cette conscience critique à l’égard de l’état de la société se développa non seulement dans le théâtre, la littérature, le cabaret, le « chanson prolétarienne » mais aussi dans les mouvements comme le Groupe de Novembre ou même la Nouvelle Objectivité. Si l’on ajoute que ces artistes furent marqués par le cubisme français, qu’ils admiraient les avant-gardes soviétiques et rêvaient d’une union entre l’art moderne et le prolétariat, on imagine facilement la haine des nazis. Lorsqu’il était impossible de dénoncer dans ces oeuvres une quelconque idéologie politique, dans leurs auteurs des « judéo-bolchéviques « , la nouveauté des formes, la violence des couleurs, l’audace des représentations suffisaient pour stigmatiser en eux des « fossoyeurs de l’art allemand « . Même des expressionnistes sympathisants du régime comme Nolde et Benn n’ont pas échappé à l’interdiction d’écrire et de peindre. Si la « critique » nazie dénonça, aussi bien dans la musique de Kurt Weill que dans les toiles et sculptures de la Brücke, l’élément typiquement « judéo-négroïde », Klee et Kandinsky se virent reprocher d’avoir réduit l’art allemand à un « alphabet morse ». Politisé ou simplement moderne, militant ou abstrait, il n’est aucun mouvement artistique, sinon le pire kitsch de l’époque, qui échappa à la vindicte de l’immense stupidité des nationaux-socialistes.

Beaucoup ont donné rétrospectivement une image très idéalisée de la vie artistique sous Weimar. En fait, dès l’époque de Guillaume II, l’at moderne -- de l’impressionnisme à Munch -- fut sévèrement attaqué. L’accusation de blasphème qui figurait dans l’arsenal juridique de la République sociale-démocrate, les multiples lois répressives votées dans les années 20-30 permettaient d’exercer la censure la plus vigilante sur la vie culturelle. d’en extirper non seulement les éléments révolutionnaires, mais d’émousser toute critique. En dehors des peintres dadaïstes, ce furent les écrivains qui en firent l’expérience la plus cruelle. Mais cette censure visait des idées, non des styles. Les nazis ne firent souvent que perfectionner l’arsenal répressif de la République, avec efficacité et cruauté.

La politique culturelle du nazisme ne fut pas créée ex nihilo, en 1933. La lecture de Mein Kampf et des articles publiés par un certain nombre
Commenter  J’apprécie          20
En 1709, le conseiller du roi, Dézalier d'Argenville, vante les fontaines dans son livre Théorie et pratique des jardins : "Ce sont elles qui en sont le principal ornement, qui animent et réveillent les jardins, et pour ainsi dire les font revivre." Mes sculptures seront donc des fontaines que je ferai installer au milieu des bassins.
Commenter  J’apprécie          50
Ses jardins lui ressemblent : ils sont une école du monde, dans laquelle on se promène en bavardant.
Commenter  J’apprécie          60
En la relisant, on tombe sous le charme de ces paysages de rêve. ''Crépuscule de l'humanité'' n'est pas seulement la première et la plus célèbre anthologie expressionniste, c'est le dernier regard sur les convulsions d'un monde en train de s'effondrer.
Commenter  J’apprécie          50
Critique et philosophie : le concept de critique littéraire comme genre



Toute interrogation sur les fondements théoriques du concept de critique littéraire chez Benjamin nécessite la mise en question du genre auquel appartiennent ses principaux écrits. Son sauvetage comme « théoricien matérialiste » ou « philosophe » tendant vers l’hégélianisme a entraîné une simplification considérable de sa problématique. La thèse opposée qui ne voit en lui qu’un « critique littéraire », même singulier, est tout aussi réductrice, la difficulté étant de saisir l’entrecroisement permanent de la philosophie du langage, de la théorie de la critique et de l’œuvre d’art et de la philosophie de l’histoire. L’accusation si souvent portée par Adorno contre Benjamin d’en demeurer aux contenus pragmatiques, de ne pas assez dialectiser les phénomènes qu’il étudie pour les ramener au processus d’ensemble (Gesamtprozess) se fonde sur son propre enracinement dans la dialectique hégélienne. Le style de critique allégorique de Benjamin, sa recherche des « contenus de vérité », son attachement au « sauvetage » des œuvres impliquait une démarche essentiellement différente. L’extraterritorialité qu’on lui reconnaît volontiers quant à la tradition philosophique ne doit pas faire oublier que s’il utilise des objets sensibles comme concepts, des images, des figures littéraires, c’est en leur donnant une dimension philosophique irréductible à la sphère littéraire. Loin de témoigner d’un quelconque éclectisme, il s’agit là d’une des dimensions les plus fécondes de son œuvre. Pour insolite qu’elle paraisse, sa démarche ne l’est pas si on la réfère à son modèle : l’Athenaeum des frères Schlegel. Refusant lui aussi la distinction rigoureuse entre la critique et la philosophie, ne pouvant concevoir la première sans fondements philosophiques, intégrant à la seconde des concepts et des intuitions esthétiques, Benjamin chercha toujours à lui donner la dignité d’un genre philosophique.
Ce qui fonde originellement sa démarche n’est pas étranger aux positions de Schelling et de Schlegel. Empruntant à Kant le concept de critique, les romantiques y incluaient tout aussi bien l’art que la philosophie de l’histoire. La philosophie de l’art, pour Schelling, implique à la fois l’intuition intellectuelle des œuvres et le jugement porté sur elles. Par la beauté de sa forme, la critique doit être aussi œuvre d’art et les frères Schlegel l’assimileront aussi bien à la philosophie — dont elle n’est distincte chez Schelling que par sa forme — qu’à la poésie. Schlegel considère que « le vrai critique est auteur à la seconde puissance ». Son essai sur « L’essence de la critique » y voit « le support commun de tout l’édifice de la connaissance et de la langue », le « mariage le plus intime de l’histoire et de la philosophie. »
Comme Lukács, dans ses premiers essais — L’Ame et les Formes notamment —, Benjamin a voulu refonder la critique littéraire comme genre. Loin de ne voir en elle qu’un lointain dérivé de la philosophie, il l’interroge comme une cristallisation de sa problématique. C’est à travers l’analyse des œuvres qu’il ne cessera de se confronter à la métaphysique, opérant d’abord une étrange fusion entre des intuitions d’inspiration kantienne et une philosophie du langage héritée du judaïsme et du romantisme. L’art demeurera toujours pour lui l’une des formes du langage les plus élevées, comme si survivait dans sa praxis quelque chose du pouvoir adamique de nommer, au sens où Hölderlin affirme que « ce qui demeure, les poètes le fondent. » Il faudra attendre les essais tardifs pour qu’une conception politique du rôle de l’œuvre se substitue à la philosophie du langage initiale.
Définie comme genre à part entière, la critique ne saurait être la simple servante de l’œuvre ou du public. Par sa profondeur et sa beauté elle peut rivaliser avec la création, comme condition de son rayonnement et de sa survie. L’Athenaeum des frères Schlegel, plus que les Blätter de S. George, demeurera l’horizon permanent vers lequel tendront les projets de revue de Benjamin, en particulier Angelus Novus. Dans le romantisme, il a trouvé non seulement la dimension messianique — la fusion de la religion et de l’histoire — qui manquait chez Kant mais aussi la valorisation de l’autonomie de l’œuvre d’art. Pour la première fois s’y affirmait le lien entre la critique et la théorie de la connaissance. La critique, loin de se limiter au jugement porté sur l’œuvre ou à son analyse, elle en révèle les possibilités cachées, l’achève en même temps qu’elle rend possible sa survie. Elle n’est en rien inférieure à la poésie.

Romantisme, judaïsme et kantisme : sur quelques présupposés de la notion de critique



Dans ses principaux essais — en particulier sa thèse sur la Kunstkritik, son étude sur les Affinités électives, la préface au Trauerspiel et les lettres qui évoquent la genèse du Passagenwerk —, Benjamin n’a cessé de souligner que toute approche critique présuppose une théorie de la connaissance. Sa dissertation sur la critique romantique vise avant tout à en élucider les fondements philosophiques. Quant à la détermination schlegelienne de l’œuvre d’art comme forme rapportée au continuum de l’art comme Idée, elle demeure la clef de voûte de l’interprétation qu’il donne du drame baroque et de son sauvetage.
Il est par contre difficile de ramener à une quelconque théorie les analyses si diverses qu’il tentera d’œuvres littéraires, et surtout la masse de ses recensions des années 1920-1930. Non seulement chez Benjamin l’angle d’approche est toujours déterminé par une intention particulière, un souci d’efficacité, mais la méthode épouse à chaque fois les contours de l’œuvre, son contenu, qu’il s’agisse de Kafka, Proust, Keller, Brecht ou Baudelaire. L’idée centrale qui a guidé sa recherche sur la critique romantique — à savoir qu’elle présupposait la métaphysique de Kant — a été peu exploitée dans sa thèse : ce sont les rapports complexes entre Schlegel et Fichte qui constituent le cœur de son interprétation. Benjamin, dès sa jeunesse, n’a cessé de confronter ses propres idées à celles de Kant, véritable socle granitique sur lequel il envisageait d’édifier sa philosophie. La rencontre avec le néo-kantisme et les réflexions de Hermann Cohen sur l’origine ne l’ont guère retenu. Il y déplore la même sécheresse, la même pauvreté du concept d’expérience. La lecture de L’esprit de l’utopie de Bloch, puis son approfondissement du premier romantisme (Schlegel, Novalis) furent par contre déterminants dans l’élaboration de sa méthodologie. Héritiers de la dignité que Kant a donnée à la critique, ils parvinrent à travers la notion de « Kunstkritik » à dépasser la limitation kantienne de la critique comme instrument de la connaissance pour en faire une méthode positive en la transposant dans le domaine de l’art. Cette transposition, comme celle qu’effectuera Benjamin dans la préface au Trauerspiel, n’est possible qu’à partir d’un platonisme sous-jacent qui identifie la forme à l’Idée et postule un lien entre l’œuvre singulière et le continuum de l’art. La reprise d’éléments fondamentaux de la critique schlegelienne est évidente dans de larges extraits de l’exposé qu’il en donne et qui caractérisent ses propres écrits. Mais au-delà de l’obscurité des formules des romantiques, il est conscient de l’impossibilité de répéter simplement leurs intuitions. Benjamin est sévère à l’égard du dernier Schlegel qui projette dans l’art son cosmos religieux et rend ses déterminations intrinsèques insaisissables. La critique romantique a pu grâce à Schlegel s’édifier en genre philosophique et dégager l’œuvre de la gangue des préjugés normatifs ou subjectifs, mais elle a échoué à en penser l’historicité. Aussi le médium de la réflexion que les romantiques ont repris de Fichte fera place chez Benjamin à une orientation, héritée du romantisme, mais qui puise à bien d’autres sources.
L’essai de 1916 sur l’origine du langage effectue la jonction la plus visible des idées de Benjamin avec le judaïsme. L’origine sacrée du langage, dont il trouve la trace mais pensée de manière très différente chez Hölderlin marquera sa théorie de la critique et de la traduction. C’est dans un renouveau de la théorie du langage que Benjamin crut d’abord possible l’intégration à la philosophie de motifs théologiques, le dépassement de l’opposition sujet/objet et un enrichissement de la critique. S’inscrivant dans l’horizon de la philosophie allemande du début du siècle, cette réappropriation de concepts théologiques l’unit à Hermann Cohen, Ernst Bloch, F. Rosenzweig et même G. Lukács. En rupture avec le rationalisme et l’optimisme de l’Aufklärung, mais aussi le positivisme de son époque, Benjamin fut tenté comme beaucoup d’auteurs de sa génération par ce retour à la théologie et à l’idéalisme allemand. A travers des visages multiples, il répondait à des exigences communes. La revalorisation du romantisme, évidente chez Benjamin, Landauer, Bloch et Buber — jusque dans son interprétation du hassidisme — est souvent inséparable d’un intérêt pour la mystique juive et chrétienne. C’est en relation étroite avec le romantisme, le rapport établi entre l’histoire et le Royaume de Dieu que Benjamin et Bloch, mais aussi Landauer et Rosenzweig développeront leur théorie du messianisme. Quant au dépassement des limites kantiennes de la connaissance, déjà tenté par le romantisme, il est au cœur de L’esprit de l’utopie de Bloch. Si on ne saurait rattacher trop étroitement la formation de la notion de critique chez Benjamin à la complexité des éléments qui constituent sa théorie de la connaissance, elle est inséparable de cette volonté sans cesse réaffirmée de présenter l’expérience religieuse et esthétique à travers l’histoire, tâche déjà exposée dans l’essai sur Kant. Conscient des apories inévitables qu’une lecture moderne ne peut manquer de déceler dans les fondements de la critique romantique, il en reprend néanmoins des éléments essen
Commenter  J’apprécie          10
La lecture des Passages montre qu’il n’y a pratiquement aucune liasse de notes où des fragments de textes de Baudelaire n’apparaissent. C’est à partir de son essai sur L’Art romantique, de sa correspondance, de ses poèmes qu’il évoque aussi bien les courants artistiques du Second Empire, le style des vitrines, le luxe des Passages que les figures qui les hantent, dandys, flâneurs ou prostituées. Comme Benjamin croit retrouver derrière Baudelaire le rictus désespéré de Blanqui, et de ses astres qui s’entredévorent, le visage de Baudelaire, sa révolte impuissante et sa tristesse, son émerveillement d’enfant face à la ville, son angoisse devant ses transformations planent sur toute l’architecture des passages. Qu’importe si Baudelaire n’en a jamais réellement parlé. Dans la forme de ses poèmes, affirme Benjamin, le lecteur avance comme dans une galerie bordée de vitrines. Il y rêve. Et c’est toujours avec les yeux de Baudelaire qu’il les regarde, qu’il suit le mouvement des foules, visite les grands magasins, comme si ce regard inoubliable et bouleversant, immortalisé par Nadar, était le cœur vivant de son époque, son ultime allégorie.

Commenter  J’apprécie          30

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jean-Michel Palmier (61)Voir plus

Quiz Voir plus

Scarlett et Novak

Qu'est-ce qu'est Scarlett ?

un téléphone
un brightphone
un biphone
un sonephone

10 questions
21 lecteurs ont répondu
Thème : Scarlett et Novak de Alain DamasioCréer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *} .._..