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EAN : 9782070746712
160 pages
Gallimard (09/06/2005)
3.4/5   5 notes
Résumé :

" Ni d'ici, ni de là-bas, tu es Une hâte par où passent l'étrange et le connu Quand de douces rafales agitent la voiture, Prennent le cœur à l'improviste, le font éclater. " Poèmes 1966-1984, publié aux Éditions Gallimard en 1988, réunit des poèmes extraits de six recueils : Death of a Naturalist (1966), Door into the Dark (1969), Wintering Out (1972), North (1979), Field Work (1979) et Station I... >Voir plus
Que lire après L'étrange et le connu : Edition bilingue français-anglaisVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Les hasards de mes lectures font qu'au moment de la proclamation du prix Nobel de littérature, attribué à une poétesse américaine même pas traduite en français ailleurs que dans des revue, je viens de finir le recueil de poèmes d'un autre lauréat du même prix, qui même si partiellement traduit maintenant, n'a pas pour autant connu la célébrité ailleurs que dans son pays d'origine, l'Irlande. La poésie est certes difficile à traduire, mais j'ai surtout la sensation que pas grand monde n'en lit, quelle que soit la langue dans laquelle elle a été composée.

Seamus Heaney est donc Irlandais, et visiblement très enraciné dans sa terre et son histoire au combien compliquée. C'est une oeuvre qui visiblement place l'individu dans une perspective, dans la succession des générations. L'auteur évoque ainsi dans un des poèmes l'homme de Tollund, un cadavre momifié qui daterait du IVe siècle d'avant notre ère ou un sarcophage étrusque conservé au Louvre. C'est que la mort est très importante dans ces textes. Pas forcément effrayante ni terrible, elle est là comme une évidence, et d'une certaine manière, elle n'est pas définitive : l'homme s'inscrit dans une succession, et le passé existe toujours d'une certaine manière pour la génération présentement en vie, comme elle survivra, laissera trace dans celles qui vont suivre.

Il y a une forme de spiritualité qui existe dans les gestes du quotidien, se relier au passé, mais aussi au monde dans son aspect charnel permet à l'homme d'accéder à une forme de transcendance, à gagner sa part d'immortalité. L'essentiel est le geste juste, une forme d'harmonie. Ce qui n'exclut pas la violence, qui rôde, les tourments du monde, la lutte, les souffrances.

C'est une poésie très complexe, très cérébrale, même si elle a son rythme, son souffle. A lire et relire à petites doses pour en saisir un peu l'essence.
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Dresse le bâton de pluie : survient alors
Pour ton oreille une musique
Insoupçonnée. Dans la tige de cactus

Averse, écluse ouverte, remous et cascades
Se déversent. Tu deviens cette flûte
Où soufflerait de l'eau, tu l'agites encore

Et c'est le diapason d'un diminuendo,
Un filet d'eau mourant dans la rigole. Et voici
Le goutte-à-goutte des feuilles rafraîchies,

La petite pluie de l'herbe et des pâquerettes,
Et le scintillement du crachin, presque une haleine.
Redresse le bâton. Ce qui survient alors

N'est pas moins fort d'être advenu une fois,
Deux fois, dix mille fois déjà.
Qu'importe si la musique qui transperce le bois

Est glissement de sable ou graines dans le cactus ?
Tu es pareil au riche qui entre au paradis
Par l'oreille d'une goutte de pluie. Ecoute encore.
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Post-scriptum
Prends un beau jour le temps d'aller à l'ouest
Jusqu'au comté de Clare, le long du Flaggy Shore,
En septembre, en octobre, quand le vent
E la lumière se définissent l'un l'autre
Si bien que l'océan d'un côté se déchaîne
Sous l'écume scintillante et qu'à l'intérieur des terres
Parmi les pierres la surface du lac d'ardoise s'éclaire
De la foudre atterrée d'un troupeau de cygnes,
Plumes rêches hérissées, blanc sur blanc,
Têtes amplement déployées, obstinées,
Enfouies ou dressées, s'affairant sous l'eau.
Il est vain de penser te garer pour saisir cela
Plus pleinement. Ni d'ici, de de là-bas, tu es
Une hâte par où passent l'étrange et le connu
Quand de douces rafales agitent la voiture,
Prennent le coeur à l'improviste, le font éclater.
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Menthe

Bouquet de petites orties poussiéreuses,
Herbes folles au flanc de la maison,
Elle poussait derrière les déchets et les bouteilles vides,
Jamais verdoyante, presque invisible.

Disons-le : elle était aussi une promesse,
Une fraîcheur dans l'arrière-cour de notre vie,
Quelque chose d'inachevé mais de tenace
Qui flânait parmi les allées vertes.

Petits coups de ciseaux, lumière du dimanche
Matin où l'on coupait la menthe avec amour :
Restera cela même qui m'échappe aujourd'hui,
Donnez leur liberté aux choses qui survivent.

Que les odeurs de menthe se fassent capiteuses, démunies,
Prisonnières qu'on libère de cette cour,
Victimes de notre indifférence que nous condamnons
Pour les avoir trahies par notre indifférence.
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Sans cesse couler, racler, gâcher,
Passer et repasser la truelle, étaler
Les assises du mortier mat. Puis les briques :
Enfoncer, recaser, tapoter, aligner.
J'aimais surtout l'éclat de la truelle,
Son tranchant, sa pointe toujours propre
Et brillante à chaque nouveau passage.
D'apparence légère, elle était lourde comme une arme
Mais lui la soulevait sans effort :
Jointoyer, aplatir, lisser jusqu'au brillant.
Puis il la nettoyait et la serrait dans un tissu
Comme une lame rituelle que l'on dérobe aux regards.
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Disciple

Mon père travaillait avec une charrue à cheval,
Ses épaules se globulaient comme une voile pleine tendue
Entre les arbres et le sillon.
Le cheval se tendit à sa langue cliquetante.

Un expert. Il mettrait l'aile
et enfilerait la chaussette brillante à pointe d'acier.
Le gazon s'est retourné sans se casser.
Au headrig, avec une seule pincée

de rênes, l'équipe transpirante se retourna
et retourna dans la terre. Son œil se
rétrécit et inclina le sol,
cartographiant exactement le sillon.

Je trébuchais dans son sillage cloué,
tombait parfois sur le gazon poli;
Parfois, il me chevauchait sur le dos,
plongeant et montant à son tour.

Je voulais grandir et labourer,
Pour fermer un œil, raidissez mon bras.
Tout ce que j'ai fait, c'est de suivre
sa grande ombre autour de la ferme.

J'étais une nuisance, trébuchant, tombant,
jappant toujours. Mais aujourd'hui,
c'est mon père qui n'arrête pas de trébucher
derrière moi, et ne partira pas.
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Video de Seamus Heaney (1) Voir plusAjouter une vidéo

Prix Nobel /Décoration
LITTERATURE, le ministre de la Culture, PHILIPPE DOUSTE-BLAZY a remis les insignes des Arts et Lettres (?) au prix Nobel de Litterature, l'Irlandais SEAMUS HEANEY .
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