Qu'est que
l'historiographie ? Nous pouvons résumer par "l'histoire de l'histoire" ou plus précisément : l'étude de la méthodologie utilisée par les historiens depuis
Hérodote, communément accepté comme le père de l'histoire. Depuis l'antiquité, les hommes se sont penchés sur leur passé. Nous verrons dans ce livre que ce passé n'est pas une donnée fixe.
Pour commencer, l'auteur nous entraine dans une rétrospective des différents courants historiques depuis l'antiquité avec une part importante pour le XIXe et XXe siècle. Ce n'est vraiment qu'à ce moment que l'histoire prend le sens moderne que nous lui connaissons, à savoir la critique de sources et la création de codes communs de travail. Depuis le XIXe, ces codes ne sont pas homogènes, entrainant la création de nombreuses écoles, souvent contradictoires, comme par exemple le "Méthodisme" ou le "Scientisme". L'histoire doit elle être associée à une science dure, au même titre que les mathématiques ou s'inspirer des connaissances et de l'expérience, comme une science de l'esprit ? C'est également au XIXe siècle que l'histoire devient vraiment une discipline à part entière. Jusqu'à présent, elle été attachée aux Belles-Lettres. Mais de plus en plus, les amateurs sont écartés (pour enseigner l'histoire, parfois, juste un baccalauréat suffisait), laissant place aux savants. Ce n'est qu'en 1907 que l'histoire devient une devient une discipline autonome. Avant de parler du XXe siècle, je souhaiterais ouvrir une parenthèse pour citer un mouvement qui a marqué le XIXe. Ce que l'on a nommé le "roman national" : la création, par les historiens et encouragée par le gouvernement, de faits ou de personnages marquants qui servent de héros, exacerbant le sentiment d'appartenance à une nation. Ce mouvement a peut être son utilité (diffusion de la connaissance historique via l'école ?) mais son revers est le nationalisme et les conséquences que nous connaissons. Bien, sûr, cela fait longtemps que les historiens ont modifié leur méthodologie. Cela n'empêche que la formule "nos ancêtres les gaulois" est ancrée dans notre mémoire, notre inconscient, devrais je dire ! Et au vu des faits présents, je me demande souvent quelles peuvent en être les conséquences ? Fin de la digression. Revenons à
l'historiographie du XXe siècle ! L'histoire est enfin acceptée comme discipline mais aussi comme science. Non pas une science dure, mais sociale. L'étude se détache de la chronologie pour se concentrer sur l'homme (influence du Marxisme). L'autre point important est celui du mélange des disciplines (économie, anthropologie, archéologie, sociologie….) Elle accepte même de revenir aux sources orales concernant des faits récents (ex, la décolonisation de l'Afrique). le mouvement le plus connu du XXe sont les Annales. Ce mouvement reprend le mélange des disciplines, se détache de l'histoire politique mais s'intéresse à la conjecture du présent. Les Annales ont permis de faire de l'Histoire une science sociale de premier plan. Pour conclure, nous abordons la "global hystory" ou comment "provincialiser l'Europe". A ne pas confondre avec l'histoire mondiale qui décrit le monde via les occidentaux. Pour cela les historiens s'inspirent des travaux des sociologues et des anthropologues. Plus que jamais, les historiens ne s'isolent pas dans leur discipline mais s'appuient sur les autres sciences sociales pour aborder leur étude.
La deuxième partie de ce livre traite de la base même du travail de l'historien, à savoir les sources. de nouveau nous remontons le temps mais l'auteur s'attarde encore une fois sur le XIX et XX siècles. Il nous fait découvrir la variété infinie des sources, comment les aborder, comment les conserver, etc.…. Une source n'est pas seulement un vieux parchemin. Plus le champ d'étude historique s'élargie, plus les sources se diversifient. C'est encore vers les autres disciplines, essentiellement la sociologie (étude entre individus) que l'
histoire se tourne et s'empare de ses méthodes de travail (la socio-histoire). L'historien est un homme de son temps. Même le plus impartial sera soumis au contexte politique et religieux de son époque. Ainsi, les écrits des historiens précédents deviennent à leur tour des sources à étudier. Mais qu'en est-il précisément de cette écriture ? Nous l'avons vu précédemment, l'histoire n'est devenue science qu'au XIXe siècle. Auparavant, elle était associée à la littérature ou à la philosophie. Et là se pose un débat important : l'historien, pour transcrire ses travaux doit-il se contenter d'établir des faits scientifiques ou doit-il rendre la lecture agréable ? le cas le plus emblématique est celui de
Jules Michelet, qui enseigna l'histoire et la philosophie. Directeur des archives et écrivain. Chercheur et romancier. L'histoire a besoin d'une ligne conductrice, d'acteurs, de sources documentées, du point de vue de l'historien. le tout être homogène et cohérent. Pour rendre lisible des sources qui ne le sont pas forcement, l'historien peut avoir recours à l'imagination qui servira d'articulation entre des faits qui ne s'imposent pas obligatoirement. On peut alors se poser la question sur la part de la vérité historique et la partie romancée, ce qui discrédita longtemps l'histoire en tant que science. Nous finissons ce livre par un sujet actuel qu'est la loi mémorielle ou comment un gouvernement s'immisce dans l'histoire (enseignement et recherche). Mais une question se pose : comment gérer la mémoire ? Y a-t-il une mémoire plus légitime qu'une autre ? le danger est de vouloir créer une mémoire universelle qui mettrait au même niveau victime et bourreau.
L'historiographie était ma matière préférée mais à la lecture de ce livre, je me suis aperçue que je n'avais fais que survoler cette discipline. Elle a également beaucoup évoluée au point de devenir un mouvement à part entière. Je peux regretter le survol de la partie allant de l'antiquité au XIXe siècle (pourquoi, par exemple,
Hérodote est considéré comme le père de l'histoire). D'un autre côté, la partie XIX et XXe est tellement dense que parfois il est difficile de suivre son raisonnement entre tous les mouvements contradictoires. L'auteur explique l'importance de la clarté de l'écriture et j'ai pu constater qu'il mettait en pratique ce qu'il décrit : le texte est fluide, explicite, je ne dis pas toujours facile d'accès mais toujours agréable à lire. Une bonne introduction à
l'historiographie à conseiller aux passionnés d'histoire et pas seulement aux étudiants.