Elle était une mère comblée. C’était du moins ce qu’elle se répétait tous les jours, comme pour juguler la pensée qui depuis trois ans s’insinuait continuellement en elle. Insidieusement, une petite voix lui susurrait : « Tu te mens ! Tu ne seras jamais vraiment heureuse sans tes deux enfants. »
Elle détestait ce rappel du passé. Pourtant, elle ne pouvait y échapper. Elle avait vraiment cru que son premier-né, qu’elle avait abandonné, retrouvé douze ans plus tard et finalement offert de son plein gré, ne lui manquerait pas. Elle avait cru se convaincre que de le savoir heureux dans une famille aussi aimante que celle de Louise et Julien suffirait à effacer les remords qui, de jour en jour, s’enracinaient davantage dans son cœur. Que le sacrifice librement accepté ne lui coûterait pas, puisque ce serait pour le bien de son fils.
Les deux amies ne restaient guère plus de trois jours sans se voir. Deux sœurs n’auraient pu s’aimer davantage. La calèche venait les chercher et, pour Iris, c’était une véritable fête. Elle savait qu’elle pourrait jouer avec les deux chiens adoptés par Julien, cet homme mystérieux qui la contemplait longuement sans parler, puis qui la prenait dans ses bras, la faisait sauter en l’air et l’embrassait. Elle sentait confusément que d’étranges choses planaient autour d’elle, mais elle ne s’en souciait guère.
Tout naturellement, la petite Iris, qui lui vouait une admiration sans bornes, avait elle aussi pris une place particulière dans son cœur. Il saisit le cadre dans ses mains et, pour la énième fois, examina les personnages un à un. Chacun semblait le regarder, mais c’était dans les yeux des deux femmes qu’il percevait la même lumière, le même bonheur.
Chaque soir, il distribue aux prisonniers de la nourriture tellement mauvaise que ton chien n’en voudrait pas. Mais, s’ils peuvent payer, ils ont droit à du bien meilleur. Surtout, il les surveille de près de crainte que l’un d’eux ne se pende avant d’être exécuté, motivé par sa peur bleue de la guillotine !
Plusieurs laboratoires se créaient et se lançaient dans la course aux couleurs, surtout pour en assurer la qualité et la stabilité sur la soie. S’il ne voulait pas laisser péricliter ses entreprises, l’homme d’affaires devait impérieusement se tourner vers d’autres débouchés plus prometteurs.
Interview de Nicole Provence, auteure de romans noirs sur TLM, le 21 février 2008. Présentation de son nouveau livre : le gourou des terres froides