Je poursuis mon installation et achève le déballage et classement de livres. Je redécouvre ce premier texte découvert d'
Alexandre Romanes, grâce à l'excellente initiative d'un ami, qui me l'avait offert en 2005. du pur Bonheur !
Je relis les passages soulignés, et ils sont aussi nombreux que l'autre volume , lu ultérieurement avec autant de plaisir, "Un peuple de promeneurs" (pour lequel j'ai rédigé une "critique"), il y a quelque temps.
Des petits proses poétiques, philosophiques, qui disent l'amour des siens, de sa grande famille du cirque, l'amour de la vie, de son épouse , Délia, de ses enfants, de ses colères contre les mots usés, l'indifférence, les injustices, la bêtise, tout ce qui amoindrit l'existence et l'Humain, etc.
« Depuis longtemps déjà
Je vois des choses terribles.
Des fois, pour comprendre
Je prends ma tête à deux mains.
Malgré tout, chaque matin,
Je redécouvre le ciel » (p. 79)
Une jolie préface de Jean Grosjean accompagne ce recueil : « Alexandre fait partie d'un peuple chez qui les paroles ont plus de poids que les écrits. Il nous en prévient : l'écriture n'est pas une tradition gitane. Pourtant le voici entré comme par violence dans l'univers des lettres. Il a quelque chose à dire aux gens qui lisent. Il a, plus que nous autres autochtones, conscience de vivre sous le ciel : Comment – être sous le ciel et ne pas voir le ciel ?-« (p.13)
Des textes brefs remplis de sagesse, de poésie …à lire doucement et à méditer…au fil des jours et du miracle du « Vivre quotidien » :
« Ils portent le fer dans le ciel,
Ils construisent des murs partout,
Pour chaque mouvement du bras, une loi.
S'ils pouvaient faire des parcelles
Avec le ciel, ils le feraient.
Assis dans l'herbe
Entre les fleurs et les reflets du ciel,
Je les regarde courir dans tous les sens.
Ils n'avancent pas.
Pire : ils reculent » (p.50)
Je lis, relis… suis vraiment inconditionnelle du ton, de l'art de vivre et de penser de ce grand Monsieur … des mots et du monde du voyage….
Je comprends que
Christian Bobin et
Alexandre Romanes se soient rencontrés et reconnus… car il existe une vraie famille de pensée et un regard très proche sur la poésie, le miracle des choses les plus modestes qui nous entourent, nous accompagnent sans que parfois nous n'y prenions garde.
Un beau regard, qui embellit les éléments les plus insignifiants, au demeurant !!-----Il existe une différence toutefois : une douleur vive, profonde d'
Alexandre Romanes vis-à-vis du mépris et de l'exclusion vécus par son peuple, le peuple des « gitans »… tous confondus
« La main qui se laisse prendre
Est la plus belle,
Et tous ceux qui ne voient pas
D'abord le ciel s'enterrent.
Moi, j'ai toujours été vers les autres,
Mais eux, il faut croire
qu'ils avaient mieux à faire » (p. 72)
« Je voulais garder Dieu pour moi
Et j'en parle à toutes les pages » (p.94)
Ces mini-proses élégantes qui expriment si bien la beauté de la différence, de toutes les différences…qui nous nourrissent, nous construisent…si on refuse toutes les sortes d'exclusions…comme des injustices intolérables et indignes de notre condition d' « Humain » !!..je cesse là mes « papotages », Je ne voudrais pas sombrer dans le verbiage « beni-oui-oui », moralisateur…indigeste !!! que je suis entrain de frôler !….