Née le 27 janvier 1805, Sophie de Wittelsbach, princesse bavaroise, épouse l'archiduc
François-Charles d'Autriche le 4 novembre 1824. C'est un mariage de raison et notre princesse est fort déçue lors de la première rencontre entre les deux jeunes gens. Son futur époux lui déplaît tant physiquement qu'intellectuellement.
Dans un premier chapitre passionnant
Jean-Paul Bled nous présente une analyse claire et précise de l'Europe après la chute de l'empire napoléonien.
Nous constatons que derrière l'unité de façade des Coalisés au Congrès de Vienne, chacune des parties joue son jeu…
La pression de la Prusse pour parvenir à l'unité des Etats allemands crée de la tension avec l'Autriche.
Les différentes nationalités composant l'empire autrichien commencent à avoir des sentiments nationaux exacerbés.
L'Autriche qui tenait le rôle de "gendarme de l'Europe" après le Congrès de Vienne se fragilise.
Sophie de Wittelsbach entre dans la famille des Habsbourg et y trouve un lien familial très fort. C'est une qualité primordiale dans cette famille à l'image de l'impératrice
Marie-Thérèse et de son époux
François-Etienne de Lorraine qui avaient inculqué à leurs enfants un très vif amour de la famille.
Sophie de Habsbourg possède une vaste culture artistique. Cela sera très perceptible lors de ses voyages à travers les différents Etats composant l'empire autrichien, et plus particulièrement en Italie.
Etant son aînée de six an, Sophie éprouve pour le duc de Reichstadt une amitié comparable à celle d'une soeur. Ce lien est un pur bonheur pour le fils de Napoléon, retenu à Vienne depuis la chute de son père.
Au fil du temps, l'Aiglon éprouvera pour elle une amitié amoureuse.
Les sentiments de ces deux jeunes gens sont loin des turpitudes imaginées et colportées par les ragots et les potins de la cour...
Sophie de Habsbourg met au monde :
François-Joseph, Ferdinand-Maximilien, Charles-Louis,
Marie-Anne et Louis-Victor.
Son beau-père, l'empereur Joseph meurt le 2 mars 1835. Elle est accablée de chagrin. En 1841, elle perd sa mère.
Le nouvel empereur, Ferdinand, n'est pas à la hauteur. L'année 1848 est marquée en Europe par de grands troubles, notamment à Vienne et dans les Etats de l'empire (Hongrie et Italie).
Sophie de Habsbourg met tout son talent à organiser l'abdication de l'empereur Ferdinand. Elle convainc son mari,
François-Charles, de renoncer au trône auquel il peut prétendre en raison de sa position dans l'ordre de succession. Il accepte d'autant plus aisément qu'il aime sa tranquillité. Il vit dans l'ombre de son épouse.
Son fils
François-Joseph accède donc au trône. Il donne à
Sophie de Habsbourg la deuxième place dans la hiérarchie de la cour en tant que mère de l'empereur. Tout dans le système de pensée du nouvel empereur résulte de l'éducation donnée par Sophie.
François-Joseph aura tout au long de sa vie un grand amour filial, comparable à celui de
Napoléon III pour sa mère, l'inoubliable Reine Hortense.
Il écoutera toujours ses conseils avec attention. Elle sera toujours son soutien face aux responsabilités du pouvoir. Sophie lui a inculqué un sens élevé de la fonction impériale.
Elle a été traumatisée par la révolution à Vienne de mars à octobre 1848. La famille impériale a du quitter la capitale.
L'accession au trône de
François-Joseph marque le retour de l'absolutisme.
Félix Schwarzenberg, son principal conseiller et ami décède le 5 avril 1852, le laissant dans une extrême douleur. Sa mère devient donc la seule personne en qui il a une confiance absolue.
La guerre de Crimée met en péril la politique extérieure autrichienne.
François-Joseph ne rejoint pas l'alliance franco-britannique et doit s'éloigner du tsar Nicolas 1er qui l'avait pourtant aidé pour le retour à l'ordre lors de la révolution de 1848 dans les Etats autrichiens.
Très pieuse,
Sophie de Habsbourg défend les intérêts de l'Eglise dans un sens très conservateur.
Elle sera toujours proches des Bourbons en exil. Depuis le mariage de
Louis XVI avec
Marie-Antoinette, il y a des liens de famille. Elle fréquente d'ailleurs la duchesse d'Angoulême, fille de ces deux souverains.
Par contre elle éprouvera toujours de l'aversion pour les Orléans. Aversion adoucie à partir de la révolution de février 1848 et de l'exil du roi Louis-Philippe.
Il en est de même pour
Napoléon III qu'elle exècre, lui imputant notamment la mort de son fils Ferdinand au Mexique, suite à cette expédition mise au point par l'empereur français et qui a tourné au fiasco. Sophie a été brisée par la mort de ce fils qu'elle adorait. Elle plaint néanmoins
Napoléon III après sa chute.
Sophie a pour principal loisir les activités artistiques. Elle assiste très souvent à des représentations théâtrales et à des opéras.
Elle collectionne des tableaux. La lecture tient une place importante dans sa vie. Ses goûts la portent vers les correspondances et les Mémoires de personnalités. Elle apprécie notamment les Mémoires de la Reine Hortense, tant elle est touchée par sa fibre maternelle à l'égard de son fils le futur
Napoléon III.
Le 24 avril 1854
François-Joseph se marie avec Elisabeth,, une princesse allemande, qui est connue sous le nom de Sissi.
Si les premières années les rapports sont bons entre Sophie et Sissi, ils finiront par se dégrader. Elles ont en effet une vision diamétralement opposée de la fonction impériale.
En 1859, l'Autriche est battue à Magenta et Solférino par l'armée française et quitte peu à peu la péninsule italienne. En 1866, les Prussiens écrasent les Autrichiens à la bataille de Sadowa.
Les années 1860 sont pour
Sophie de Habsbourg décevantes : libéralisation du régime, perte d'influence de l'Eglise, Hongrie et Italie qui luttent contre Vienne.
Nouvelle inquiétude en 1871 : la proclamation de l'empire allemand, le 18 janvier 1871, dans la galerie des Glaces du château de Versailles.
Sophie de Habsbourg s'éteint le 28 mai 1872.
Bien qu'en désaccord avec sa vision du pouvoir absolutiste, impossible de ne pas admirer sa force de caractère et son esprit maternel poussé à l'extrême.
Le "mythe" de Sissi à porté ombrage à ce personnage.
Jean-Paul Bled a donc eu le mérite de la sortir de l'oubli et de nous présenter tous les aspects de sa personnalité. Et ce dans un style clair et plaisant.
Une très belle biographie.