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EAN : 9782072753527
816 pages
Gallimard (06/09/2018)
4.67/5   3 notes
Résumé :
Ce volume contient : Les Barbares, La Barbarie.
Dans le monde des Contrées, la ville de Terrèbre se retrouve subitement occupée par les troupes barbares d’un mystérieux Prince venu des steppes. La population s’accommode comme elle peut de ces nouvelles conditions de vie. Un modeste professeur d’université, linguiste et seul habitant à connaître la langue des envahisseurs, est un jour enlevé par des cavaliers et conduit auprès du Prince. Celui-ci propose au sa... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Deux très beaux romans de longueur inégale, "Les barbares" et "La barbarie", sont réunis dans ce gros Folio SF de huit cents pages. De "SF" ils n'ont que le nom donné par l'éditeur, vu qu'il n'y a pas d'éléments surnaturels (sauf les Jardins Statuaires) ou futuristes dans l'univers fictif que crée l'auteur. Le lecteur pour qui la SF se résume à Becky Chambers ou à "Seul sur Mars" évitera ce livre, qui le décevrait dans ses attentes et ses habitudes.

Des critiques négatives lues sur Amazon permettent de se faire une idée assez juste de la beauté de ces romans. L'auteur ne se contente pas de saupoudrer d'un riche lexique une syntaxe ou un récit parfois pauvres, à la manière de Stefan Platteau ou Jean-Philippe Jaworski : il joue de toutes les ressources de la syntaxe la plus littéraire, de tous les temps de notre langue, et de toute la palette de la langue descriptive. Le sens n'est jamais occulté ni difficile à cerner, mais il s'accorde à une grande jouissance de la langue et de la pensée. Les auteurs qui produisent aujourd'hui, nous ont habitués à des phrases sans verbe, ou au présent et au passé continu, à une syntaxe pauvre, donc à une pensée pauvre. Leur idéologie de ressentiment rend leurs oeuvres impropres au plaisir. La prose de Jacques Abeille est généreuse, exubérante, pleine de fruits et de parfums comme un jardin fertile. Aussi irrite-t-elle plus d'un lecteur ignorant qui, perdu dans une langue dont il ne soupçonnait pas les possibilités, ira accuser l'auteur d'emphase, de complaisance, de mépris même, puisque tel est le sort de l'écrit littéraire en nos temps à journalistes.

Ces deux romans se résument malaisément. On risque de tomber dans la banalité, qui attirera des lecteurs innocents et bien-pensants, que la prose de Jacques Abeille irritera. Disons pour faire bref qu'il faut imaginer une suite au "Rivage des Syrtes" ou au "Désert des Tartares" : le narrateur citoyen d'une cité civilisée envahie par les barbares se joint à eux et les suit dans leurs aventures, pour revenir chez lui à la fin. On sait depuis Tacite et Montaigne que les barbares ne sont pas ceux que l'on croit, etc ... Ce ne serait pas rendre justice à ces romans que de les rabattre sur des poncifs scolaires devenus "citoyens" aujourd'hui. Il faut dire seulement que leur lecture est en soi une aventure, un long voyage qui ne fait pas seulement parcourir des Contrées imaginaires, mais qui conduit aussi assez loin dans l'homme.
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Les Barbares, p 13 à 670
La Barbarie, p 673 à 813
3e volume du cycle des contrées

Ce roman de plus de 800 p est composé de deux romans qui s'enchainent directement, l'un de près de 660 p, l'autre de 140.
Dans ces deux volumes, nous retrouvons la ville de Terrèbre ( voir le veilleur de jour ) et le voyageur des Jardins statuaires.

Terrèbre vient d'être envahie par des hordes de barbares, qui cantonnent dans et à proximité de la ville. Les deux populations ne se mêlent pas, ne cherchent pas à se connaitre, mais des échauffourées ont lieu. La ville se vide d'une partie de ses habitants qui ne parviennent pas à se nourrir dans ce contexte d'occupation. Quelques irréductibles restent, dont un obscur professeur d'université, spécialistes de langues très peu parlées, dont celle des Barbares et celle des Jardins statuaires.
Mais son savoir est purement livresque, sans rechercher le contact des locuteurs.
Pourtant, une occasion se présente, qui va bouleverser sa vie pour les années à venir.
Il est ''convié'' à rencontrer le prince des barbares, puis à l'accompagner dans une expédition de longue haleine, en quête...d'un individu qui est au coeur de l'ouvrage dont il est le traducteur.
Mais en quête d'autre chose aussi, que le lecteur et le professeur vont découvrir au cours du périple.
Ce professeur, homme de livre et de bureau, n'est pas un homme d'exercice ouvert aux autres. Plutôt un ermite.
Mais au contact de ces hommes et femmes des steppes, il va s'ouvrir, vivre comme eux, une expédition qui va le transformer à jamais.
Par le biais de ce personnage et de ce parcours, en entrant de plus en plus dans l'intimité des personnages, on s'interroge sur la notion de ''barbares''.
Comme dans la Grêce antique, le barbare est l'étranger, l'autre, le différent, et ce terme ici est donné par rapport au point de vue Terrébrins. Mais le périple remet cette idée en cause.

Et la Barbarie, état de ce qui est barbare? c'est à voir...Le périple du professeur aura duré quelques années et à son retour, il est confronté aux règles, aux lois de Terrèbre, pour retrouver son statut...

Ce roman se lit lentement, pour bien se plonger dans le texte et dans la plume de Jacques Abeille
Ce n'est pas un page turner estival, mais j'aime entrer en immersion dans l'univers de l'auteur.
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J'ai lu avant "Un homme plein de misère", "Les jardins statuaires" et "Le veilleur de jour". J'avais été totalement renversée par "Les Jardins Statuaires" et beaucoup plus déçue par "Le veilleur de jour". Ma déception était principalement due à un changement de style, beaucoup plus chargé et pesant dans le second livre à mon goût. Cela se justifiait probablement par un changement radical de décor et d'atmosphère. La ville chargée à bloc de ses vies et de ses vices, de son érudition. Grouillante.
De sublimes morceaux de philosophie concrète et d'évocation de beauté persistaient néanmoins et je n'en ai pas regretté la lecture.
Dans "Un homme plein de misère" et en particulier dans la partie correspondant au livre "Les barbares" j'ai retrouvé ce style à la fois simple et élégant, ces réflexions profondes et ces descriptions quasi anthropologiques. J'y ai également ressenti une plus grande présence des personnages et une dimension plus épique (toute proportion gardée). Bref un bonheur de lecture. "La barbarie" m'a également beaucoup plu, même si elle aurait peut-être mérité un plus grand développement dans la description de ce nouveau monde, et l'éviction progressive du narrateur comme érudit puis comme Homme.
J'en arrive où le bas blesse... Je suis loin d'être obsédée par la thématique mais ça a pour la coup vraiment heurté ma lecture. Les personnages féminins et leur traitement m'a semblé franchement pénible. le "problème" était déjà présent dans les textes précédent, mais moins répétitif.
Les femmes sont constamment enrubannées de propos sur la beauté, la liberté, dans une absolue admiration barbouillée de poésie, mais sont toutes finalement dans un sacrifice constant pour les hommes qui peuplent le récit. Soumission "choisie" don de leur corps par goût du soin ou de la "liberté" dont elle ne font en réalité aucun bénéfice, jusqu'à être "volontaires" pour le viol qui prend des atours variés selon les situations. Si pour certain personnages féminins l'issue est plus nuancée, la persistance de remarques, de scènes et de description de cet ordre m'a franchement agacé au fil du récit. Pourtant celui-ci montre beaucoup de finesses et de beautés de tous ordres. Cela n'est pas du tout rédhibitoire mais m'a quelque peu gâché le plaisir.
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Le Hibook a lu « Un homme plein de misère » de Jacques Abeille.Certains auteurs (ceux que j'aime le plus) ont le pouvoir de créer des mondes personnels où ils vous entraînent irrésistiblement ,je pense (entre autres) à Volodine , à Charles Duits.Abeille est de ceux-là . Je retrouve donc avec volupté le monde des « Jardins statuaires » et la ville de Terrebre du « Veilleur du jour ». Celle-ci est submergée par une invasion de cavaliers « barbares » menée par une énigmatique Prince. Celui-ci abandonnant ses conquêtes, son empire , ses cavaliers entreprend un pèlerinage vers ses origines .Il emmène avec lui ,outre une minuscule troupe , un universitaire spécialisé dans la langue du peuple des Jardins et un petit voyou des rues de la ville. Leur pérégrination leur fera traverser paysages et peuples que l'auteur décrit minutieusement ainsi que l'évolution de chaque personnage. Un inclassable roman qui mêle érotisme et philosophie ,aborde une multitude de thèmes (le désir, l'écriture , la mémoire ) dans une langue qui est un régal .
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Combien de temps survit un mythe, sa mise en récit est-elle son meilleur effacement, la barbarie est-elle dans l'ailleurs ou dans la dévastation de nos cités policées ? Jacques Abeille poursuit ici son cycle des Contrées en nous offrant un envers des Jardins Statuaires et surtout poursuit son interrogation sur la parole littéraire. Un homme plein de misère, grand roman d'aventure et réflexion sur le langage, ses rêves et ses mythes.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
- Nombre de cavaliers savent lire et écrire, répondis-je - j'ai même été étonné de l'apprendre - toutefois ils se servent des mêmes signes que ceux des Terrébrins.
- Des signes qui transcrivent des sons et qui ne ressemblent à rien. On pourrait craindre que, pour pratique qu'elle paraisse, une telle écriture ne soit dangereuse ou scandaleuse.
- J'aimerais bien savoir, m'exclamai-je, de quel danger ou de quel scandale je puis être tenu pour coupable quand, par exemple, je prends des notes sur notre voyage.
- La forme même de votre écriture, dont le dessin n'évoque rien, vous contraint d'accepter l'absence des choses. Par chaque mot que vous tracez vous renoncez à la présence de ce que vous nommez. Vos notes anticipent, si elles ne le préparent pas, sur le moment où vous serez séparé de vos compagnons de voyage. Et que reste-t-il de moi auprès de vous quand vous tracez mon nom ?"
(...)
"Mais enfin, Félix, si vous étiez en quelque sorte présent dans l'inscription de votre nom, vous seriez pour ainsi dire en mon pouvoir !"
Il rit.
"Cela est bien vrai, Professeur, et il me faudrait vivre en espérant de votre part une constante bienveillance."
La nuance d'ironie - une ironie aussi exempte de malice qu'il était possible - était trop sensible pour que je lui remontrasse plus avant combien dangereuse, à son tour, pouvait être l'écriture symbolique et, pour le dire clairement, magique dont il prônait l'usage. Sans le moindre doute, aux yeux de Félix, je venais d'un monde exposé à une menace d'anéantissement généralisé - menace indéfiniment suspendue, mais pour combien de temps ?- tandis que lui, au moins quant à l'objet de notre discussion, participait d'un autre monde où chacun devait faire face au danger comme à la joie incarnés par l'autre. Fallait-il donc croire qu'en des temps très reculés les hommes s'étaient trouvés sommés de faire un choix entre l'un ou l'autre de ces deux mondes ? Peut-être étais-je ce jour-là en train d'atteindre à l'ultime enjeu de mon voyage et j'en fus à ce point émerveillé que je dus un moment interrompre notre conversation.

p. 568-569
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Peut-être qu'un professeur répugne à se figurer la joie sombre et noble que l'on éprouve à jeter bas tout ce qui a été édifié petitement au fil d'un temps uniforme, tout ce qui, dans la vanité des choses humaines, s'est durci de présomption et où s'éteint peu à peu l'inspiration des origines. Tout cela nous l'avons éventré, nous l'avons renversé sous le sabot de nos chevaux. Voilà ce qu'on appelle la barbarie -- cette joie grandiose -- et je sais bien que vous n'êtes pas prêts, vous, les victimes, d'avouer finalement que c'est vous qui avez appelé les barbares et que nous sommes venus vers vous parce que le vent portait sur nos steppes désolées et lointaines l'écho de votre lassitude. Trop longue, une agonie cesse d'être pathétique pour n'être plus qu'ennuyeuse.

pp. 204-205
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Enivré de la chaude et pénétrante senteur de l'humus que ma monture égratignait du sabot, je ne me lassais pas d'admirer le jaillissement des troncs et la lente, la patiente exubérance des ramures. Je chevauchais dans une forêt enchantée où les esprits de la terre montés de la nuit féconde fleurissaient en chants d'oiseaux. Dès l'aube le feuillage s'animait de leur effervescence et leur silence à la tombée de la nuit refermait sur nous une protectrice voûte d'ombre.

p. 443
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Et puis, malgré une vivacité d'esprit intacte et l'enjouement qu'il pouvait encore montrer dans les débats d'idées les plus abstrus, c'était un homme en qui la source de la vie avait été tarie moins par l'âge que par l'un de ces malheurs secrets auxquels on ne fait plus que survivre en improvisant au jour le jour des tâches qui, pour méritantes qu'elles puissent paraître, ne sont plus pour celui qui les accomplit que des divertissements de désespéré.

p.58
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Il est certain qu'une fois de plus elle avait donné aux graves jeux charnels auxquels elle me conviait de temps à autre l'éclat et la profondeur d'une illumination, la dernière sans doute, si intense et féconde que dans cet éclairement chacune de nos rencontres nocturnes pouvait désormais m'apparaître comme les étapes d'une initiation graduée par une exceptionnelle subtilité de coeur. En dépit du leurre que nous tendait la nature, l'anatomie, la virginité était peut-être un drame en son essence masculin et son dépassement pouvait constituer la quête de toute une vie, car les hommes ne savent pas d'abord comment porter leur mémoire et trop longtemps demeurent pesants des hantises de leur passé. Leurs gestes sont habités de chagrins.

p. 277
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Videos de Jacques Abeille (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jacques Abeille
Maison de la poésie (10 nov 2017) - Texte et Lecture de Jean-Philippe Domecq, extrait du Dictionnaire des mots en trop (dirigé par Belinda Cannone et Christian Doumet, éd. Thierry Marchaisse, parution novembre 2017).
Le Dictionnaire des mots en trop :
Comment ? s?entend-on déjà reprocher, des mots en trop ? Mais les mots, on en manquerait plutôt.
Et pourtant. Ame, artiste, coach, communauté? ils sont légion ceux qui éveillent notre résistance intime à tout ce qu?ils charrient d?affects, d?idéologie, de pseudo-concepts ? notre résistance mais pas celle du voisin ! ? Quarante-quatre écrivains explorent ici les raisons pour lesquelles ils renâclent devant certains mots, et leurs réflexions critiques témoignent autant d?un état de la langue que des poétiques et des enjeux de notre temps.
Une expérience littéraire qui vient compléter, en l?inversant, celle du Dictionnaire des mots manquants.
Auteurs : Malek Abbou, Jacques Abeille, Mohamed Aïssaoui, Jacques Ancet, Marie-Louise Audiberti, Michèle Audin, Olivier Barbarant, Marcel Bénabou, Jean Blot, Jean-Claude Bologne, François Bordes, Lucile Bordes, Mathieu Brosseau, Belinda Cannone, Béatrice Commengé, Thibault Ulysse Comte, Seyhmus Dagtekin, Louis-Philippe Dalembert, Remi David, Erwan Desplanques, Jean-Philippe Domecq, Christian Doumet, Renaud Ego, Eric Faye, Caryl Férey, Michaël Ferrier, Philippe Garnier, Simonetta Greggio, Cécile Guilbert, Hubert Haddad, Isabelle Jarry, Cécile Ladjali, , Marie-Hélène Lafon, Sylvie Lainé, Frank Lanot, Fabrice Lardreau, Mathieu Larnaudie, Linda Lê, Guy le Gaufey, Jérôme Meizoz, Christine Montalbetti, Christophe Pradeau, Marlène Soreda, Abdourahman A. Waberi.
http://www.editions-marchaisse.fr/catalogue-dictionnaire-des-mots-en-trop
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