Il y a pour tout organisme une limite au-delà de laquelle tout est déterminé
par la génétique. Les planaires ne peuvent sans doute pas dépasser
l'Apprentissage I. Les mammifères à l'exception de l 'homme peuvent
probablement acquérir l'Apprentissage II, mais difficilement l'Apprentissage III.
L'homme peut, lui, parvenir parfois à l'Apprentissage III.
La limite supérieure est (logiquement et probablement), pour tout
organisme, fixée par des phénomènes génétiques: peut-être pas par des gènes
isolés ou des combinaisons de gènes, mais par tous les facteurs qui contrôlent le
développement des caractéristiques fondamentales du phylum.
A tout changement dont un organisme est capable correspond le fait de
cette capacité. Ce fait peut être déterminé génétiquement ou sinon être le résultat
d'un apprentissage. Dans ce dernier cas, c'est toujours la génétique qui doit avoir
déterminé la capacité d'acquérir cette capacité, etc.
Cela est généralement vrai de tous les changements somatiques ainsi que
des changements du comportement que nous appelons apprentissage. Par
exemple, notre peau bronze au soleil. Quel est ici le rôle de la génétique ? La
génétique détermine-t-elle entièrement la capacité de bronzer ? Ou bien certains
peuvent-ils augmenter cette capacité ? Dans ce dernier cas, les facteurs
génétiques interviennent évidemment à un niveau logique supérieur.
La question relative à tout comportement n'est évidemment pas: «Est-il
appris ou inné ?», mais plutôt: «Jusqu'à quel niveau logique supérieur
l'apprentissage agit-il ?, et, en sens inverse, jusqu'à quel niveau la génétique
peut-elle jouer un rôle déterminant ou partiellement efficace ?»
Dans cette perspective, l'histoire générale de l'évolution de l'apprentissage
paraît avoir lentement repoussé le déterminisme génétique vers des niveaux de
type logique supérieur.
Gregory Bateson et l'épistémologie du vivant.