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Jean Tailleur (Traducteur)
EAN : 9782851811721
116 pages
L'Arche (13/06/1997)
4.13/5   19 notes
Résumé :

Il faut que les reproductions s effacent devant ce qui a été reproduit, la vie en commun des hommes, et le plaisir procuré par leur perfection doit être porté au plaisir plus élevé de voir traitées comme provisoires et imparfaites les règles mises en évidence dans cette vie en commun. C est en cela que le théâtre laisse le spectateur productif, par-delà le regard porté sur le spectacle. Dans son théâtre, puisse le spectateur jouir comme d un divertisseme... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Vade-mecum des artistes et des amateurs de théâtre, ce petit ouvrage constitue une remarquable synthèse de l'esthétique théâtrale de Bertolt Brecht et, en même temps, un guide pratique : il ne sépare pas la théorie de la pratique. Il permet de mieux comprendre la vision brechtienne du théâtre, et en particulier la notion de distanciation (qui remet en cause l'identification et la catharsis aristotéliciennes). Il insiste certes sur les aspects politiques du théâtre, mais n'oublie pas qu'il s'agit aussi d'un divertissement.
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Citations et extraits (63) Voir plus Ajouter une citation
Ce qui est resté longtemps inchangé paraît en effet inchangeable. Partout nous rencontrons des choses qui se comprennent trop bien toutes seules pour que nous soyons obligés de prendre la peine de les comprendre. Ce dont ils font l'expérience ensemble paraît être aux hommes l'expérience donnée de l'humanité. L'enfant, vivant dans le monde des vieillards, apprend comment les choses s'y passent. Tel est précisément le cours des choses qu'elles lui deviennent courantes. Quelqu'un est assez hardi pour désirer quelque chose de plus, il ne le désirerait qu'à titre d'exception. Même s'il reconnaissait ce que la « Providence » fait peser sur lui pour ce que la société a prévu pour lui, la société, ce puissant rassemblement d'êtres pareils à lui, devrait nécessairement, tel un tout qui est plus grand que la somme de ses parties, lui paraître absolument non-influençable, – et pourtant ce non-influençable lui serait familier, et qui se méfie de ce qui lui est familier ? Pour que toutes ces choses données puissent lui apparaître comme autant de choses douteuses, il lui faudrait développer ce regard étranger avec lequel le grand Galilée observa un lustre qui s'était mis à osciller. Lui, ces oscillations l'étonnèrent, comme s'il ne se les était pas imaginées ainsi et ne pouvait se les expliquer, ce qui lui fit comprendre leurs lois. C'est ce regard aussi difficile que productif que le théâtre doit provoquer par ses reproductions de la vie en commun des hommes. Il doit amener son public à s'étonner, et cela se fait à l'aide d'une technique de distanciation du familier.
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Nous prenons possession des œuvres anciennes au moyen d'une procédure relativement nouvelle, à savoir l'identification, à laquelle elles ne se prêtent guère. Ainsi la plus grande partie de notre jouissance se nourrit à d'autres sources qu'à celles qui doivent nécessairement s'être si puissamment ouvertes à nos devanciers. Nous nous rabattons alors sur des beautés de langue, sur l'élégance avec laquelle la fable est construite, sur des passages qui nous arrachent des idées indépendantes du texte, bref, sur ce qui dans les œuvres anciennes est hors-d'œuvre. Ce sont là précisément les moyens poétiques et théâtraux qui cachent les discordances de l'histoire. Nos théâtres n'ont absolument plus la capacité ou l'envie de raconter encore clairement ces histoires, mêmes celles, pas si anciennes, du grand Shakespeare, c'est-à-dire de rendre croyable l'enchaînement des événements. Or la fable est, selon Aristote – et sur ce point nous pensons de même –, l'âme du drame. De plus en plus nous sommes gênés par la grossièreté et le négligé des reproductions de la vie en commun des hommes, et cela non seulement dans les œuvres anciennes, mais aussi dans des œuvres contemporaines, lorsqu'elles sont faites selon des recettes anciennes. Toute notre manière de jouir commence à devenir anachronique.
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Ce fut comme si l'humanité se mettait enfin, consciemment et unanimement, à rendre habitable la planète sur laquelle elle demeurait. Nombre des éléments de cette planète, tels le charbon, l'eau, le pétrole, se métamorphosèrent en trésors. La vapeur d'eau reçut l'ordre d'actionner des véhicules ; quelques petites étincelles et le tressaillement de cuisses de grenouilles révélèrent l'existence d'une force naturelle qui engendra la lumière, porta le son par-dessus les continents, etc. D'un regard neuf l'homme examina partout comment employer pour son confort ce qu'il avait vu depuis longtemps mais jamais mis à profit. Son environnement se métamorphosa toujours plus, de décennie en décennie, puis d'année en année, puis presque de jour en jour. Moi-même qui écris cela, je l'écris avec une machine qu'à l'époque de ma naissance, on ne connaissait pas. Je me déplace dans les nouveaux véhicules à une vitesse que mon grand-père ne pouvait imaginer ; rien ne se déplaçait alors aussi vite. Et je m'élève dans les airs, ce que mon père ne pouvait faire. Avec mon père, j'ai déjà parlé du bout d'un continent à l'autre, mais c'est seulement avec mon fils que j'ai vu les images en mouvement de l'explosion d'Hiroshima.
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Mais cela met alors le théâtre plus facilement à même de se rapprocher, aussi près qu'il le peut, des lieux d'enseignement et de diffusion. Car bien que l'on ne puisse l'accabler de n'importe quel matériau didactique qui ne lui permet pas de donner du plaisir, il n'en garde pas moins toute latitude de prendre plaisir à l'enseignement ou à la recherche. Il fait ses reproductions praticables de la société, qui sont en mesure d'influer sur elle, entièrement comme un jeu : aux constructeurs de la société il expose les expériences vécues par la société, celles du passé comme celles du présent, et cela de manière à faire une jouissance des sensations, aperçus et impulsions que les plus passionnés, les plus sages et actifs d'entre nous tirent des événements du jour et du siècle. Que les divertissent la sagesse qui naît de la solution des problèmes, la colère en laquelle la compassion pour les opprimés peut utilement se métamorphoser, le respect pour le respect de ce qui est humain, c'est-à-dire de ce qui est amical à l'homme, bref, tout ce dont se délectent ceux qui produisent.
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Si nos personnages sur la scène sont mus par des moteurs sociaux, et par des moteurs différents, selon les époques, nous faisons qu'il est alors plus difficile à notre spectateur de s'identifier. Il ne peut pas tout simplement sentir : « Moi aussi, j'agirais ainsi », tout au plus peut-il dire : « Si j'avais vécu dans de telles circonstances... » ; et si nous jouons des pièces tirées de nos propre temps comme des pièces historiques, il se peut que les circonstances dans lesquelles il agit lui apparaissent également particulières, et c'est là le commencement de la critique.
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Videos de Bertolt Brecht (21) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Bertolt Brecht
Engagé à gauche, mais critique du régime d'Allemagne de l'Est, le dramaturge allemand Bertolt Brecht, traverse un demi-siècle d'histoire allemande et propose un théâtre marxiste qui fait réfléchir le spectateur sur sa condition.
Pour comprendre l'influence qu'a eue la Première Guerre Mondiale sur Bertold Brecht, Tiphaine de Rocquigny reçoit Irène Bonnaud, metteuse en scène et traductrice, et Hélène Camarade, professeure en études germaniques à l'Université Bordeaux-Montaigne, spécialiste de la résistance allemande et de la mémoire du national-socialisme.
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