Critiquer les volumes successifs du journal de
Renaud Camus expose au risque de se répéter. Après tout, la structure annalistique de l'oeuvre autobiographique, et les contours désormais assez bien fixés de la vie de l'auteur, pourraient être monotones. Qu'est-ce qui fait qu'on ne se lasse pas de lire ce Journal, année après année ? D'abord, certaines nouveautés apportées par les circonstances, l'histoire, les médias (dont l'auteur est un observateur attentif). Puis le plaisir de retrouver un certain ton unique, une langue inimitable, ironique
et claire : ironique, car elle n'est pas dupe de ses effets,
et claire, puisqu'il s'agit de dire la vérité le plus droitement possible. Pour
Renaud Camus, le style n'est pas seulement une affaire d'esthétique, ni seulement une stratégie de séduction : le style est affaire de moralité, d'honnêteté envers soi-même et envers la langue qui nous a été transmise et qu'il nous incombe de transmettre. Enfin la lecture de ce journal expose aussi à la traversée de ce qu'il appelle lui-même des "tunnels" : les découverts bancaires, la santé, la politique du petit parti que l'auteur a créé et les violentes polémiques proportionnelles à sa taille,
etc ... Mais ces passages nous rappellent l'objectif du journal : rendre compte de ce que c'est que de vivre. Une vie n'est pas faite que de sommets. Septembre 2011, en revanche, en est un : il résume en lui les thèmes majeurs de l'oeuvre et des fidélités de l'auteur à ce qui va disparaître.