Pourquoi commenter cette monographie sur
Eugène Delacroix et non une autre ? Probablement, parce qu'en 1998, année du bicentenaire de la naissance de l'artiste, elle apportait un regard nouveau sur l'oeuvre de ce superbe romantique. de premier abord, nous pourrions nous demander ce qui a pris à l'auteur,
Peter Rautmann, un chercheur allemand, de s'atteler à la tâche tout en prenant l'ampleur de la difficulté de son entreprise. Qu'apporter de nouveau à l'imposante « hagiographie » de celui que les historiens d'art ont consacré comme étant LE peintre de ce début de XIXe siècle, aux dépens de son éternel rival,
Jean-Auguste-Dominique Ingres ? Ce superbe ouvrage de très grande qualité (ce qui est rare parmi toutes les publications qui lui sont consacrées) nous apporte les éléments d'une nouvelle réflexion. En premier, l'iconographie est … époustouflante. Evidemment, rien de nouveau : chaque oeuvre est archiconnue mais vue générale et détail alternent, ce qui renouvelle notre regard sur … la peinture. Oui, voilà, LA qualité de cette monographie, de ses illustrations, de ses textes : un retour à la peinture, presque au détriment de la biographie, de la littérature, bref, de l'anecdotique. Immédiatement, l'intérêt se recentre sur l'oeuvre. Et de toile en fresque, de dessin en gravure,
Peter Rautmann rédige le récit de l'art de
Delacroix, mais sans aucun formalisme pour autant. L'auteur convoque, seulement quand c'est nécessaire, l'histoire contemporaine, la science, la politique, la musique ou la photographie, et, évidemment, la peinture d'artistes contemporains (l'Anglais John Constable, l'Allemand
Caspar David Friedrich). Ainsi il insère
Eugène Delacroix au sein de cette communauté exaltée et exaltante : le romantisme. Par ailleurs, il ne fait guère allusion à
Charles Baudelaire (le Salon de 1846) ou aux théories de la couleur du chimiste français, Michel-Eugène Chevreul. Si bien que le père de la modernité en art, pour certains, sort donc de ce milieu strictement français, si ce n'est parisien