En relisant ce roman paru en 1981, je me rends compte à quel point
Frédéric Dard était bien informé, ou très clairvoyant, sur le monde politique et ses turpitudes. Certes sa vision des choses est bien souvent localisée dans les alcôves et les slips kangourous des messieurs qui nous dirigent mais, tout en restant fidèle à sa réputation d'auteur populaire, il nous fait découvrir des secrets qui n'en sont plus et qui encombrent aussi bien les placards que les rédactions de journaux people. Depuis sa parution ce livre a vu s'épaissir le mille-feuille faisandé des scandales politiques : affaire Benalla, affaire Clairstream, affaire Cahuzac, affaire Uramin, affaire Fillion, j'en passe et des meilleures, autant d'histoires sulfureuses, autant de chapitres supplémentaires à ce roman drôle et grave à la fois. Au passage
Frédéric Dard règle ses comptes avec une droite qu'il trouve trop malhonnête et une gauche qu'il trouve trop sage. Sa description d'un journal qui ressemble beaucoup à Libération vaut son pesant de cacahuètes : “Un quotidien: le Réveil. Journal destiné à des intelligences blasées. L'aristocratie d'une gauche non arracheuse de pavés. Ecrit par des gens d'esprit pour des gens qui pensent en avoir. Ironie mordante; scepticisme fervent. Vérités toujours bonnes à dire. Profession de foi : la Justice avec un J majuscule. Monture de rechange : la liberté avec un l qui s'accommode d'être minuscule. Mise en page aérée, articles de fond clairs et percutants. Des talents ! Des idées, mais journalistiques. Mieux qu'un journal : une habitude. Pour une forte tranche de la population, le Réveil correspond à une nécessité : celle d'y être abonné . “Le” quotidien qui donne à beaucoup l'impression d'être aventureux et d'aimer la hardiesse” Les passages comme celui-ci sont légion et je vous laisse imaginer le régal du lecteur. Petite précision : les scènes de sexe sont absolument extraordinaires, d'une lubricité inouïe, si les coucheries adolescentes du dernier Prix Goncourt vous paraissent sulfureuses il vaut mieux passer votre chemin, ce livre n'est pas pour vous.