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EAN : 9782743603106
251 pages
Payot et Rivages (01/02/1998)
3.87/5   27 notes
Résumé :
Un paisible facteur abat froidement un de ses concitoyens lors d'une partie de chasse, faisant croire à un accident. Sur les pentes abruptes des monts d'Ardèche se dresse une ferme solitaire, forteresse d'un temps aboli. Un père et sa fille y tracent les gestes ancestraux de la survie. En bas au village, les langues vont bon train, surtout quand Cédric, jeune et séduisant étranger, débarque sur sa moto rouge pour se retrouver au cœur d'une tragédie dont il sera l'un... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Ils vivent dans ce bout d'Ardèche sauvage pas loin de Privas depuis la nuit des temps, les Pielou, les Bleyrieux et les autres, des bestiasses, des frustes, éleveurs-contrebandiers-chasseurs. Des haines dont ils ont oublié l'origine les opposent, pour un bout de terre mal foutue, stérile, inexploitable, répertoriée au cadastre moins fiable que la mémoire collective. C'est un terroir de brutes qui tueraient père et mère – mais pas que – pour maintenir leurs traditions arriérées dont les femmes sont évidemment les premières victimes. La prétendue sagesse populaire prévient que passé sainte Catherine, elles déclinent... Cette communauté repliée sur elle-même, a fait une place contrôlée au facteur qui porte les mauvaises nouvelles et au zollandais qui a su se faire accepter des indigènes. Chacun sait tout sur chacun et ce que l'on ne sait pas on l'invente ; chacun possède des jumelles pour épier l'autre.

Ils acceptent des touristes entichés d'une certaine campagne idéalisée pour qui ils ont astiqué étables vides, éliminé meubles vermoulus et chaises bancales balancés dans des goufres profonds, certains bouseux ayant même poussé l'opportunisme financier jusqu'à racheter fort cher au broc du coin ce qu'ils lui avaient vendu une bouchée de pain racorni. Par un effet de mode verdissant tout, ils sont devenus les anges gardiens de l'espace naturel, les nettoyeurs du paysage, les défenseurs du patrimoine rural. On ne parle plus fenaison ou agnelage mais serpillère et récurant. Ils se croient invincibles face à la maréchaussée ridiculisée quand elle s'arsouille avec le produit de l'alambic interdit, en boit un dernier pour la route, et part bourrée, non sans avoir tiré à bras raccourcis dans les branches d'un tilleul innocent.

Cédric, chevauchant sa moto rouge arrive dans le nid de vipères pour effectuer un stage financé par l'Administration, Pôle emploi, peu importe, il représente pour les autochtones l'opportunité d'une main-d'oeuvre gratuite et exploitable. Mais Cédric, même s'il est un enfant des villes moqué par tous, un bon a rien et prêt à tout selon les soiffards de l'estaminet, même pas un garçon de ferme mais juste un chômeur engraissé par les impôts, ne se laisse pas impressionner. Il revendique sa qualité de stagiaire différente de celle d'ouvrier agricole. Cédric est un jeune homme touchant, cultivé, civilisé, éduqué ; il représente le chaînon manquant qui permet au lecteur de comprendre la chronologie des faits, de lier les personnages, de mettre à nu les secrets de famille.

Quel prix faut-il payer pour le maintien des rituels ancestraux  ? Et surtout qui va devoir payer l'addition salée ? Quel roman ! Quel style, quelle connaissance intime du terroir, de ses traditions, de son langage, de ses silences, quelles splendides descriptions de l'omniprésente nature ou de la méteo. Jean-Paul Demure – écrivain du niveau de Pierre Magnan - écrit en 1998 un roman rural noir qui atteint la perfection dans son réalisme, sa construction, sa portée et son épilogue, alors que ce courant littéraire balbutie encore. Tous les amateurs du genre devraient le lire !

Quand les princes réveillent les endormies, l'histoire s'arrête-t-elle ?
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Boire la vie jusqu'à l'hallali
Le facteur Vidal, taiseux et mélancolique, invisible jusqu'à se fondre dans le paysage, attend depuis longtemps l'instant propice pour éliminer Bleyrieux. Une grosse chasse au sanglier est organisée pour les messieurs de Privas, d'Aubenas et de Valence. Raby a dressé son plan de chasse et posté les hommes aux emplacements stratégiques. le moment idéal se profile pour Vidal. Il doit s'arranger pour faire passer le meurtre comme un simple accident de chasse : « Vidal, certain que les chasseurs présents avaient les yeux fixés sur les sangliers, se dressa, le fusil exactement pointé sur Bleyrieux. Il lança un coup de sifflet suraigu… L'instinct du berger fit que Bleyrieux se tourna d'un bloc et put, comme le souhaitait Vidal, regarder, le temps d'un éclair, venir sa mort ». le premier chapitre du roman de terroir bien frappé au noir de Jean-Paul Demure se pose comme le dénouement d'une histoire qui reste à venir. Les chapitres suivants vont narrer par le menu le pourquoi et le comment. Cédric Costaro vient de Marseille. Il est stagiaire mais pas journalier. Pour les fermiers qui acceptent sa venue, la différence n'est pas forcément admise entre le bon à rien des villes et l'homme à tout faire mais Cédric, tout jeune homme relativement inexpérimenté, une maîtrise de sociologie en poche, ne se laisse pas faire et apprend très vite. Glandeur des villes, il devient bosseur des champs et il y prend goût. Malheureusement, à son insu, il va réveiller des querelles ancestrales dans ces hautes terres ardéchoises où il a atterri, lui et sa moto rouge. Comme le dit Vidal à Costero : « Il y a le cadastre, clair, net… et il y a avant le cadastre. C'est que là-bas, ils ont les papiers. Mais chez nous, il y a la mémoire. »
Le roman de Jean-Paul Demure est une vraie découverte particulièrement enthousiasmante, un de ces récits âpre à ingérer mais irradiant, fortifiant et lumineux. Pourtant, le monde rural et les hommes qui le composent n'apparaissent pas sous un grand jour. Retors, rancunier, lâche, fanfaron, jouisseur, profiteur, la liste n'est pas close pour décrire les comportements d'une microsociété quasi autarcique. La construction du roman est habile. Les descriptions des personnages, nuancées, affinées, s'approchent d'une vérité universelle. Les dialogues brefs et incisifs tombent toujours justes. Afin de parfaire cette pépite noire, de splendides annotations sur les paysages cévenols montrent d'évidentes qualités d'écrivain, voire de poète car Jean-Paul Demure à l'oeil ouvert sur le monde et l'alambic de ses phrases en restitue la quintessence : « le paysage était splendide. On dominait de vastes croupes jaunes, roussies de fougères passées, teintées du rose-violet des bruyères, du vert dense des touffes de genêt qui écrasaient de leur masse les vallées profondes. Il y avait sur tout une immense part de ciel d'un bleu dur dans lequel l'oeil s'absorbait sans trouver d'issue ». L'auteur aujourd'hui âgé de 79 ans (en 2020) est édité depuis 1971. Autant dire qu'il y a encore vingt-deux romans à découvrir, dont le dernier paru en 2014, « le Chant des morts », une élégie pour notre temps.
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« On n'avait jamais ici, d'une manière ou d'une autre, laissé un crime impuni. Quand il n'y a plus de loi arrivent les loups. »

Dès le départ on sait qui est le meurtrier, on sait qui est la victime. Ce que l'on ne sait pas c'est pourquoi ? Qu'est-ce qui a bien pu pousser l'inoffensif facteur Vidal a assassiner Bleyrieux lors d'une partie de chasse?

Jean-Paul Demure nous offre un roman rural très noir au coeur d'une Ardèche retirée, sauvage et dangereuse. Ici les secrets restent secrets, les saletés se font derrière les volets des maisons en pierre, les rancoeurs résistent au temps qui passe et les problèmes se règlent sans la gendarmerie.

Malgré la nature environnante, l'ambiance est aussi oppressante que si l'on était entre des barres d'immeuble. Il y a la lourdeur d'un soir d'été à la campagne : l'orage menace et on sait que tout ou tard, ça va éclater.

J'ai adoré !
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VENDETTA SAUCE GRAND VENEUR
L'histoire débute par une partie de chasse qui tourne au drame : un chasseur en tue un autre. L'acte est prémédité. Pas de témoins, pas d'indices. Les circonstances accréditent la thèse d'une balle perdue.
Comment en est-on arrivé là, sachant que l'assassin n'appartient à aucune des deux familles, représentées à la chasse, qui se vouent une haine recuite et s'étripent depuis la nuit des temps dans le petit village de Saint-Blaise ? C'est ce que retrace le roman, pas à pas, battant bruyères et halliers le long des chemins creux de la campagne ardéchoise... La vie rurale est merveilleusement contée tant dans sa rudesse que dans sa malice (les relations avec la maréchaussée, les touristes,...). Un régal.
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Envie d'un roman de terroir pour changer ? de gens rudes, proches de la terre, bourrelés de secrets et plus attentifs aux regards et aux silences qu'aux propos ? D'un bout perdu de vallée agité par les rancunes et les médisances ? Alors lisez le roman de Jean-Paul Demure Fin de Chasse.

La plume est alerte, les personnages bien campés, l'ambiance lourde à souhait comme quand l'orage assombrit le ciel et menace la montagne.

Dès les premières lignes vous vous retrouverez dans ce village, au milieu des intrigues et des silhouettes bien vite familières. Et vous irez de découvertes en découvertes.

Un roman plaisant, à la structure originale.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Dans ces campagnes vertigineuses où les distances ne se comptaient pas en kilomètres mais en demi-heures, où les communes étaient des réunions de dizaines de hameaux perdus dans des pentes, le rôle du facteur était d'entretenir le moral des populations, de faire circuler les nouvelles, de rendre de menus services, monter le pain, le sel et les médicaments, sans distinction de rang, du plus humble retraité à notre distinguée marquise.
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Les menaces de la municipalité restaient sans effet … (…) Le maire essaya bien un peu sournoisement de faire donner les gendarmes, mais ils avaient chez Piélou leurs habitudes.
(...) Ils passaient « pour voir » de temps en temps. «Pour boire », ricanait Piélou. Il redoutait ces visites. Il aimait bien les gendarmes, leur uniforme, leur aplomb, puissance qu'il convenait d'apprivoiser. Il ne craignait pas pour son commerce clandestin. Les gendarmes causaient de choses et d'autres et surtout des touristes. (…) Ils se souciaient beaucoup des drogués. (…) Quand le soleil passait derrière la montagne – il faisait vite sombre dans ce fond de vallée –, ils s'essuyaient sous le képi, en manière de signal.
Piélou posait la bouteille sur la petite table rafistolée, sous la treille : « Vous en prendrez bien un, pour la route? ». Ils n'en prenaient pas un, mais quatre, mais six, autant qu'ils pouvaient en tenir sans se croiser les pieds. Ils préféraient de loin la fabrication de Piélou – pas tant à cause du goût fort en marc que du titrage imbattable : 50,60 degrés. Ils devenaient vite violets et desserraient leur col. Tandis qu'il s'excitaient, renchérissaient sur des exploits arrangés, la Piélouse poussait à grands cris les brebis et les chèvres vers l'étable. Elle y disparaissait pour soigner les bêtes.
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Maigre ou grasse, la terre était ici la terre. Bleyrieux en avait, et beaucoup. (...) Vidal avait entendu dire qu'à une époque, il y avait eu pas mal de rôdeurs du côté de Peyrol. Certains essayaient d'amadouer le père, d'autres la fille. Le tabac-journaux-souvenirs de St-Blaise-Échant débitait du colifichet plus qu'à la saison du touriste: bagues, colliers, foulards, pendentifs. Les prétendants approchaient le père aussi prudemment que son molosse. Pour la fille, c'était plutôt l'affût et difficile.
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On n’avait jamais ici, d’une manière ou d’une autre, laissé un crime impuni. Quand il n’y a plus de loi arrivent les loups.
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Le touriste, je dis pas, concéda Sugères. Mais le client, jamais ! D'ailleurs, la bonne viande, ça le rend malade, le touriste. Il est trop habitué à l'éponge de supermarché. Je le fournis à son goût.
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