voici le crabe…
voici le crabe dans sa camisole minérale. Ses yeux sont presque invisibles. Ses pinces énormes ont des délicatesses de diamantaire, de joaillier. Ses antennes sont des herbes durcies. Il marche obliquement, comme il est nécessaire de le faire quand on courtise la grande mer qui est inapprochable directement, tous les chercheurs et les adorateurs de son Être le savent. Le crabe fait partie de ces adorateurs, sa rudesse apparente cache un feu liquide qui l'attire sans fin vers les eaux infinies
deviens sans forme…
deviens sans forme, mon enfant...ne sommes-nous pas, en ce monde, cloué à la forme comme à une croix ? Tout nous est forme. Cette table, cette chaise, cet ordinateur, ces caractères, ce verre, cette clé ..., tout crie, hurle la forme, et sur son chevalet nous sommes étendus et ligotés, comme des suppliciés...
il y a dans mon âme un trou…
il y a dans mon âme un trou
par où glissent infiniment
les vents de l'incertitude.
je veux le combler.
je m'y acharne. J'y dépose des pierres, des cristaux,
des hirondelles de mer, des arbres à la tendre
chevelure. Rien n'y fait.
le trou est toujours là.
il bâille avec effronterie.
il est petit, presque indiscernable.
par lui pourtant la plaine de mon être
– à l'origine douce et fertile –
est vouée à un desséchant chaos
les êtres les plus divers…
les êtres les plus divers s'agglutinant forment un miel
sombre où le dieu plonge sa main avide