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EAN : 9782020006019
188 pages
Seuil (01/09/1971)
4.09/5   214 notes
Résumé :
La décolonisation faite, cet essai de compréhension du rapport Noir-Blanc garde toute sa valeur prophétique : car le racisme, malgré les horreurs dont il a comblé le monde, reste un problème d'avenir. Il est ici abordé et combattu de front, avec toutes les ressources des sciences de l'homme et avec la passion de celui qui allait devenir un maître à penser par beaucoup d'intellectuels du Tiers Monde.
Critiques, Analyses et Avis (27) Voir plus Ajouter une critique
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BLACK LIVES MATTER!
La statue de l'impératrice Joséphine de Beauharnais déboulonnée et jetée, à terre, par des activistes anti-colonialistes, à Fort de France en Martinique. "Le Parisien.fr le 26/07/2020.
Statue déjà décapitée en 1991...


Le livre " Peau noire, masques blancs" parlait du rapport ambigu du noir Martiniquais envers le blanc de la métropole, en 1952.
Une antillaise "de la société " se refusera à épouser un noir, en prétextant son manque d'éducation ou son machisme, mais in-fine, c'est surtout à cause de sa couleur de peau...


"Dussé je encourir le ressentiment de mes frères de couleur, je dirai que le Noir n'est pas un homme." Ose Frantz Fanon, écrivain, docteur et psychiatre et... Martiniquais.
"Le Noir veut être Blanc, Le Blanc est enfermé dans sa blancheur. le Noir dans sa noirceur."
Car, les Blancs s'estiment supérieurs aux Noirs, et les Noirs veulent démontrer le contraire."
Comment s'en sortir?
(Nous sommes en 1952. Mais, les mentalités changent difficilement et lentement, voir les actualités sur les crimes racistes.)


Frantz Fanon parle simplement, clairement (pardon!) et avec humour (c'est un psy!) du rapport entre Noir Martiniquais et Blanc. Car "le Noir se comporte différemment avec un Blanc et un autre Noir."
- Dans le langage:
on interdit l'usage du créole dans certaines familles, ("il faut parler le français de France, le français du Français ")
L'indigène, celui-qui-n'est-jamais-sorti-de-son-trou étant le "Bitaco", le pauvre nègre...


Et "parler comme un livre déchiré", c'est parler comme un blanc".
"Comme un livre déchiré", en créole: c'est parler à tort et à travers :-) le Noir qui débarque, en France, ne parle que français et ne comprend plus le créole.
Mais... Et l'auteur rapporte des anecdotes "comiques" :
Un prêtre a remarqué, parmi ses pèlerins catholiques, un bronzé et lui demande, doucereux:
"Toi, quitté grande Savane, pourquoi et venir avec nous?"
On en rit, mais Frantz Fanon nous éclaire sur le quiproquo et ce parler petit-nègre condescendant, d'un curé... enfariné.


C'est une lecture amusante et instructive, qui peut faire réfléchir sur le racisme et sur les préjugés. L'auteur y convoque Cheik Anta Diop, JP Sartre et d'autres dont Aimé Césaire (député et maire de Fort de France)


"Je parle à des millions d'hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d'infériorité... le larbinisme." Aimé Cesaire, Poète, écrivain et Député Martiniquais.
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Peau noire, masques blancs" Frantz Fanon

Peau Noire, masques blancs est une analyse psychologique comme l'auteur le précise dès le début de l'ouvrage. Écrit en 1952, le livre s'inscrit dans le contexte de la négritude, « ce romantisme malheureux », comme ironise Fanon. Alors que des poètes et des romanciers, pour rendre à l'homme noir sa liberté et sa dignité, le chantaient et s'acharnaient à montrer au Blanc qu'il possède bel et bien un passé très riche, le jeune psychiatre martiniquais de 27 ans adopte un chemin tout à fait différent en se donnant pour but de comprendre l'homme noir de l'intérieur afin de le guérir de sa névrose qui est l'aliénation. Si à cette époque la plupart des pays africains luttaient pour obtenir leur indépendance, Fanon était bien conscient que celle-ci ne serait totale et complète qu'accompagnée d'une délivrance du complexe d'infériorité, corollaire de tout processus de colonisation. Cette double libération était nécessaire et indispensable pour créer des rapports sains entre Blancs et Noirs. « Notre but est de rendre possible pour le Noir et le Blanc une saine rencontre », souligne-t-il. Et pour favoriser une telle rencontre, il faudra libérer le « Blanc enfermé dans sa blancheur » et le « Noir dans sa noirceur ».

Il faudra aussi les libérer de l'histoire, du passé. « Seront désaliénés Nègres et Blancs qui auront refusé de se laisser enfermer dans la tour substantialisée du passé ». Ainsi se refuse-t-il, en tant que Noir, le droit « de souhaiter la cristallisation chez le Blanc d'une culpabilité envers le passé de ma race. » Homme, « c'est tout le passé du monde » que le Noir a à reprendre, à s'approprier. Il n'est pas seulement responsable de la guerre de Saint-Domingue qui a provoqué la naissance d'Haïti. Mais aussi de la découverte de la boussole. Alors seulement naîtra l'homme libre et désaliéné. C'est-à-dire celui qui a retrouvé toute son humanité et s'assume sans complexe.

La fougue de Fanon ou un homme en colère

Frantz Fanon est un jeune révolté, plein de fougue, qui fustige jusqu'à l'approche des grands intellectuels blancs qui soutenaient la lutte des Noirs. La préface Orphée noire rédigée par Sartre subit par exemple sa réprobation. Il refuse en effet qu'il incombe à la conscience noire de « rechercher l'universel » comme le voudrait bien le philosophe français qui qualifie la négritude de « racisme antiraciste » qui se doit de « préparer la synthèse ou réalisation de l'humain dans une société sans races ».

L'actualité de l'oeuvre

Peau noire, masques blancs est tout simplement une ode à la liberté de l'homme. Prônant dans le même mouvement l'égalité entre toutes les races, le livre dépasse la cause des Noirs et embrasse l'universel.

Aujourd'hui, les luttes pour les indépendances sont presque achevées dans le monde à part quelques pays qui restent encore sous domination : la Palestine, le Sahara occidental… Mais de nouvelles négations de la liberté de l'homme ne cessent d'affleurer, comme dernièrement le mythe de l'étranger-profiteur ou le mythe du musulman-terroriste. Dans certains pays, les étrangers sont vus en effet comme les profiteurs d'un système généreux avant d'être perçus comme des hommes qui ont droit au bonheur. Dans la même foulée, depuis le 11 septembre 2001, la population musulmane est considérée comme une sous-humanité car assimilée à des terroristes ou terroristes en puissance. Un terreau fertile pour les partis extrémistes, autres fossoyeurs de la liberté.

Et tant qu'il subsistera ne fût-ce qu'une seule poche d'étouffement de la liberté de l'humain par l'humain, l'oeuvre de Frantz Fanon restera d'actualité. Comme il affirme : « L'homme [est] un oui… Oui à la vie. Oui à l'amour. Oui à la générosité. »

Chez Fanon, la liberté dépasse la liberté du corps et se confond à l'amour et à la générosité. Cette liberté est aussi psychologique et ne sera effective et totale que quand il ne restera plus même dans l'inconscient collectif des peuples anciennement dominés un complexe d'infériorité. Il rêve ainsi d'un monde sain avec des rapports sains entre toutes les races. Et là son oeuvre atteint l'universel de plein fouet.

On apprécie au passage la poésie et les phrases lapidaires du livre.

Extraits :

« Un jour, un bon maître blanc qui avait de l'influence a dit à ses copains :

Soyons gentils avec les nègres…

Alors les maîtres blancs, en rouspétant, car c'était quand même dur, ont décidé d'élever des hommes-machines-bêtes au rang suprême d'hommes. »



« L'homme n'est humain que dans la mesure où il veut s'imposer à un autre homme, afin de se faire reconnaître par lui. Tant qu'il n'est pas effectivement reconnu par l'autre, c'est cet autre qui demeure le thème de son action. C'est de cet autre, c'est de la reconnaissance par cet autre, que dépendent sa valeur et sa réalité humaines. C'est dans cet autre que se condense le sens de sa vie. »


Lien : http://jazzbari.wordpress.co..
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En 2007, lors de son discours à Dakar, Nicolas Sarkozy nous rappelais que : « l'homme africain n'était pas assez entré dans L Histoire, qu'il vivait trop dans le présent et dans la nostalgie du paradis perdu et de l'enfance, dans un imaginaire où tout recommence toujours, ou il n'y a de place ni pour l'aventure humaine ni pour l'idée de progrès » . . .
A une époque ou nos chefs d'état tiennent encore ce genre de propos, la lecture de cet essai me parait indispensable pour comprendre la profondeur des cicatrices psychologiques que cause le préjugé et la domination raciale sur l'humanité entière. Avant-hier les juifs, hier les nègres ou les bolcheviques, aujourd'hui les islamistes, un bouc émissaire est toujours indispensable pour se libérer de nos frustrations, et pour que certains puissent s'engraisser librement sur le dos de la bête, car diviser pour mieux régner !
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Je lis rarement des essais, étant plutôt adepte des romans et de la fiction en général. Pourtant j'ai dévoré cet ouvrage. L'auteur Frantz Fanon était un grand psychiatre mais également un grand écrivain qui à force d'exemples et de réflexion nous fait entrer dans la problématique raciale sous un angle totalement inusité.
On comprend comment une société peut formater nos esprits sans même qu'on s'en rende compte et que la seule manière de se libérer de cette emprise invisible et d'autant plus forte est de réfléchir à chacune des vérités que l'on croit établies et de les relativiser.
Ce qui s'applique ici à la perception du noir dans une société blanche peut s'appliquer à tous les rapports sociaux, le rôle de la femme, les dominations sociales.
On voit bien le mécanisme d'aliénation qui est en cause et qui est responsable de tant d'exclusion, d'incompréhension et de souffrance.
En plus, malgré le thème et un traitement du sujet très sérieux , l'auteur arrive à être drôle.
A lire absolument pour son universalisme même si le thème ne vous intéresse pas à priori.
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Frantz Fanon est un psychiatre français qui a passé une bonne partie de sa vie à étudier les conséquences psychologiques de la colonisation sur les peuples colonisés.
Ce livre est le fruit de longues années de recherches menées sur des populations africaines, européennes, et antillaises.
Ce livre amène le lecteur concerné à s'interroger sur son passé, son identité, et sur sa place dans une société qui n'est pas la sienne.
Comment exister lorsqu'on est le fruit d'un long et lent processus de déculturation.
On ne prend conscience de sa différence que lorsque l'on quitte son milieu d'origine.
Le contact avec l'autre (sous entendu l'homme blanc ou la culture occidentale) fait naître
en soi des questions existentielles : dois-je l'imiter à la perfection ou alors rester moi-même ?
La différence ne doit pas être synonyme de division. Elle est plutôt l'intelligence de la ressemblance.
Etre étranger ne signifie pas être étrange mais être seulement différent...
En Afrique noire il reste encore beaucoup à faire...
Le plus malheureux est que peu d'initiatives vraiment sérieuses (et durables) ont été prises depuis les indépendances pour freiner les effets néfastes de ce traumatisme psychologique dû à la colonisation. Les erreurs du passé sont répétées avec une passivité déconcertante et le résultat est là.
Lorsque l'on éduque un peuple (sur des générations) en lui enseignant que sa survie dépend de sa capacité à copier l'autre, il ne faut pas s'étonner de produire des êtres peu fiers de leurs identités et de leurs cultures.
Ils refusent d'en être les ambassadeurs, mais acceptent d'endosser le rôle de ces hannihilateurs.
« Celui qui copit aura toujours un temps de retard sur celui qu'il copit ».
Tout est dit.
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Citations et extraits (64) Voir plus Ajouter une citation
Entre le monde et moi s’établît un rapport de ci-existence. J’avais retrouver l’un primordial.
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Les negres en face d’un blanc constituent en quelque sorte l’assurance sur l’humanité
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Oui, en un sens le nègre aujourd’hui est plus riche de dons que d’œuvre.
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J’épouse le monde, je suis le monde
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L’essence du monde était mon bien
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Vidéo de Frantz Fanon
Présentation des livres de Frantz Fanon par Thomas Sibille de la Librairie al-aux Editions La Découverte.
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