« La beauté sauvera le monde. » (
Dostoïevski)
Si vous ne connaissez pas encore cette auteure québécoise, qui a écrit
Encabanée (2018),
Sauvagines (2019) et
Bivouac (2021), ce recueil est un excellent moyen de la découvrir. Mais ce recueil, donnant les " clés " pour comprendre ses oeuvres antérieures, clôt à merveille ces 3 livres, qui peuvent être vus comme un triptyque.
L'auteur avait quitté l'agitation de la ville pour s'isoler dans une cabane délabrée près d'une rivière, perdue au milieu de la forêt de Kamouraska. Comme elle le raconte dans son premier roman, Encabannée, elle reste éveillée la nuit, pendant les heures les plus froides où les températures descendent à -20°C, -40°C, pour alimenter le poêle. C'est au cours de ces nuits qu'elle commence à écrire sur des bouts de papier les poèmes qui composent ce recueil. Ces poèmes sont classés par saison plutôt que par année et couvrent les huit années pendant lesquelles elle a vécu dans cette cabane.
« j'essaie de faire ma forte en même temps j'ai peur à l'infini » - cartouches
L'automne est la période d'acclimatation, marquée par la crainte des bruits inconnus et du braconnage.
« tu fais diablement froid Kamouraska survivre est un art sous-estime » - Kamouraska
En hiver, elle réapprend des techniques ancestrales telles que la fabrication du feu et la médecine douce, et devenue une louve solitaire, elle s'est endurcie et ne tremble plus.
« je lui ai avoué que j'étais certaine comme la lune pleine » - habitée
Le printemps représente l'espoir (les stalactites suspendues comme des barreaux autour de sa cabane fondent, la libérant de sa prison) et les prémices de la maternité.
« il faut être junkie d'espoir pour refaire forêt et ne pas perdre le moral » - force
Enfin, l'été marque la naissance de sa fille et son militantisme pour mère nature.
Les barbelés de cette forêt sont les déchets métalliques qu'elle ramasse dans la forêt, mais c'est aussi le symbole de la palissade dont elle a voulu entourer son habitat pour "sanctuariser" cette nature, sans oublier le côté plus végétal porteur d'espoir. Si au fil des années, la forêt est dégradée et rétrécie, créant une véritable atmosphère anxiogène autour de sa cabane, elle repousse sous forme de ronces et d'épines, comme pour se protéger des agressions.
Grande lectrice de romans, je lis peu de poésie en comparaison, mais j'ai rarement été aussi conquise, touchée et sensibilisée par un recueil. Un grand coup de coeur ! Je vous invite à vous précipiter dans votre librairie locale pour mettre la main sur ce livre !