Le sourire du scorpion ou comment aborder un sujet gravissime au travers d'une tragique histoire familiale, c'est ce qu'a tenté et réussi
Patrice Gain, pour son quatrième roman.
Ce roman faisait partie de la sélection des vingt-et-un livres en course pour le Prix Orange 2020. Je remercie Lecteurs.com pour m'avoir permis la découverte de ce titre. S'il n'a pas été retenu parmi les cinq finalistes, je le comprends car, tout au long de ma lecture, je suis souvent resté sur ma faim malgré l'excellence de l'écriture.
Le début de l'histoire, avec cette descente en raft d'un canyon, en 2006, au Monténégro m'a fait croire à un récit apocalyptique dont personne ou presque ne sortirait vivant. Alex et Emilie, avec Luna et Tom, leurs enfants, deux jumeaux âgés de quinze ans, mènent une vie en dehors des sentiers battus. Ils vivent dans un camion aménagé et font les saisons pour gagner de quoi vivre. Tom est le narrateur de leur histoire mais je n'ai pas toujours aimé le ton qu'il emploie, parfois trop recherché, parfois simpliste, sans jamais aller au fond des choses.
La petite famille possède un chien, Dobby, femelle rottweiler aimante et protectrice. Celui qui leur sert de guide pour l'
aventure sur la rivière Tara, se nomme Goran. Il a un peu plus de quarante ans mais on sait juste qu'il est originaire des Balkans. Très dévoué, il prend tout en charge, toujours avec un sourire un peu figé.
Je n'en dis pas plus sur cette aventure pour ne rien divulgâcher mais j'ai pensé un peu à
Délivrance, le livre de
James Dickey, adapté brillamment au cinéma par
John Boorman. D'ailleurs, revenu en France, Tom se plonge dans la lecture de ce roman si oppressant.
Oui, ils vont revenir en France mais j'ai trouvé un peu courte la partie descente du torrent. C'était un point de départ car le principal se passe sur le causse, tout près des Gorges du Tarn. L'auteur, par l'intermédiaire de Tom, s'attache à décrire soigneusement la nature et les éléments qui la composent et qui évoluent suivant la saison. Un vocabulaire riche et des passages très soignés témoignent d'une recherche approfondie de la part de l'auteur ainsi que d'une connaissance remarquable du milieu naturel.
Monténégro, Serbie, Bosnie… je ne peux passer sous silence ce qui constitue la base du roman de
Patrice Gain : ces années terribles de massacres entre populations qui vivaient jusque-là en parfaite harmonie. À la fin du livre, l'auteur précise le nom de l'homme qui l'a inspiré.
Le sourire du scorpion prouve que, lorsque les hommes veulent chercher et trouver les criminels de guerre, ils réussissent à ne pas les laisser vieillir tranquilles. Cette guerre, honteuse pour l'Europe et notre espèce humaine, c'est bien de ne pas l'oublier mais c'est impossible de ne pas vibrer d'émotion en pensant à tous ces destins brisés, à toutes ces immenses souffrances infligées à des familles qui vivaient en paix.
Patrice Gain, en quelques lignes, le fait très bien dire à Sule qui explique tout à Tom dont la jeune existence a commencé dans des circonstances très, très difficiles.
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