Le 19eme sicle continue et les idées ne faiblissent pas bien au contraire. Toujours à la pointe de l'actualité, les familles que l'on suit depuis le premier tome continue d’œuvrer à la grandeur de leur pays... ou à celle de leur fortune personnelle. On espère, on pleure de chagrin, on hait, on est parfois déçu mais aucun personnage ne nous laisse indifférent, ce qui fait la grande force de ce livre.
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C’était le temps où l’on se partageait avec avidité les dépouilles de la République. On avait besoin d’argent, on voulait des fêtes, des bals, des parures, des femmes, le pouvoir ! On avait fait le coup d’État pour ça, et l’on s’était répété, entre soi, en préparant l’assassinat de la IIe République, qu’on était couvert de dettes et qu’on préférerait « tomber dans le sang plutôt que dans la merde ».
Nous sirotons notre absinthe comme eux, mais nous voulons nous distinguer, nous opposer, alors nous pensons, nous parlons comme des fous. Mieux vaudrait suivre le mouvement du progrès. Avez-vous lu le dernier livre de Proudhon, Le Manuel du spéculateur à la Bourse ? Et celui que Vallès a écrit pour le banquier Mirès, L’Argent ? Ces deux-là que l’on croyait à l’abri de la contagion se laissent tenter, même s’ils avalent la liqueur avec des grimaces. Si nous sommes fous, on nous internera, Messieurs, et personne ne viendra nous tirer de l’asile.
Ils nous ont confié cette guerre, ce pays, ce gouvernement, parce qu’ils ont pensé que tout était perdu. Ils étaient prêts à enfouir dans la fosse d’une défaite, d’une capitulation, comme en 1871, nos centaines de milliers de morts ! Cela fait plus de trois ans qu’on tue… Alors ils m’ont appelé, pour que je plonge les mains dans la boue, dans le sang. Ils se sont dit : Clemenceau, il a soixante-seize ans, autant que ce soit lui qui paye à notre place, qui envoie les jeunes hommes mourir !
Il y a dans toute société, une boue qui habituellement demeure au fond et ne trouble pas les mœurs. Et puis parfois, c’est cela une révolution, la société se met à bouillonner, et une écume noirâtre apparaît, venue du fond précisément. On croise des visages dont on n’imaginait pas qu’ils pouvaient exister, des figures patibulaires. C’est toute la sauvagerie, madame la comtesse a raison, la bestialité qui vient à la surface. Si l’on n’agit pas vite, elle submerge tout.
Vous verrez, la peau d’un nouveau-né, c’est de la soie. Ça a une odeur particulière, ça sent le lait, c’est doux comme un pétale de rose, velouté. Quand on a senti cela, on sait qu’il n’existe rien de plus grand que la naissance et que la vie. C’est le médecin qui vous parle. Allez, filez chez vous, et respirez, respirez cette odeur. Il faut en avoir les poumons pleins pour pouvoir vivre ici, au milieu des fauves !
Cléa - Des livres qu'on n'oublie pas