[extrait de la préface]
Moi, pour mon compte, et je prétends vous convertir à mon système, je ne lis que les préfaces et les tables, les dictionnaires et les catalogues. C’est une précieuse économie de temps et de fatigue : tout est là, les mots et les idées. [ ] Aussi, depuis deux ans que j’ai fait cette précieuse découverte, je suis devenu d’une érudition effroyable. [ ] Citez-moi quelque chose que je ne sache pas, je vous en défie ; et, pour peu que vous usiez de ma méthode, vous arriverez au même résultat que moi.
Il en est de livres comme de femmes : les uns ont des préfaces, les autres n’en ont pas ; les unes se rendent tout de suite, les autres font une longue résistance ; mais tout finit toujours de même … par la fin. Cela est triste et banal ; cependant que diriez-vous d’une femme qui irait se jeter tout d’abord à votre tête ? Vous lui diriez comme le More de Venise à Desdemona :
….. à bas, prostituée !
Cette femme serait une catin sans vergogne : pourquoi voulez-vous donc qu’un livre soit plus effronté qu’une femme, et qu’il se livre à vous sans préliminaire ?
Il faut faire un livre. Je l'ai fait, mais sans prétention aucune, je vous prie de le croire, comme une chose qui ne mérite pas la peine qu'on s'en défende, comme on demande la croix d'honneur pour ne pas être ridicule, pour être comme tout le monde. Il est indécent aujourd'hui de ne pas avoir fait un livre, un livre de contes tout au moins: j'aimerais autant me présenter dans un salon sans culotte que sans livre.
Moi, jusqu'à ce jour, je m'étais conservé vierge de toute abomination écrite ou imprimée, et chacun était libre de me croire autant de talent qu'il lui plaisait. Je jouissais dans un certain monde d'une assez honnête gloire inédite. J'étais célèbre depuis la cheminée jusqu'au paravent; je faisais un grand bruit dans quelques pieds carrés.
Seulement je profite de l'occasion pour causer avec vous; je fais comme ces bavards impitoyables qui vous prennent par un bouton de votre habit, monsieur; par le bout de votre gant blanc, madame, et vous acculent dans un coin du salon pour se dégorger de toutes les balivernes qu'ils ont amassées pendant un quart d'heure de silence.
Deux ou trois de mes camarades […] se sont emparés de moi et se sont mis à me former : ils ont fait de moi un Jeune-France accompli. J’ai un pseudonyme très-long et une moustache fort courte ; j’ai une raie dans les cheveux […]. Mon tailleur m’a fait un gilet… délirant. Je parle art pendant beaucoup de temps sans ravaler ma salive, et j’appelle bourgeois tous ceux qui ont un col de chemise. […] Comme je suis naturellement olivâtre et fort pâle, les dames me trouvent d’un satanique et d’un désillusionné adorable ; les petites filles se disent entre elles que je dois avoir beaucoup souffert du cœur : du cœur, peu, mais de l’estomac, passablement.
En 1834, Balzac imagine et commande une canne somptueuse à l'orfèvre parisien le Cointe.
La « pomme » en or, finement ciselée des armoiries des Balzac d'Entraigues, qui n'ont aucun lien avec l'écrivain, est ornée d'une constellation de turquoises, offertes par sa bien-aimée Mme Hanska.
Cette canne est excessive en tout, et très vite, elle fait sensation parmi journalistes et caricaturistes. C'est la signature excentrique de l'écrivain, la preuve visible et provocante de son énergie et de sa liberté, imposant sa prestance au milieu de la société des écrivains. Pour Charlotte Constant et Delphine de Girardin, amies De Balzac, la canne est investie d'un pouvoir magique…
Pour en savoir plus, rdv sur le site Les Essentiels de la BnF : https://c.bnf.fr/TRC
Crédits de la vidéo :
Direction éditoriale
Armelle Pasco, cheffe du service des Éditions multimédias, BnF
Direction scientifique
Jean-Didier Wagneur
Scénario, recherche iconographique et suivi de production
Sophie Guindon, chargée d'édition multimédia, BnF
Réalisation
Vagabondir
Enregistrement, musique et sound design
Mathias Bourre et Andrea Perugini, Opixido
Voix
Geert van Herwijnen
Crédits iconographiques
Collections de la BnF
© Bibliothèque nationale de France
Images extérieures :
Projet d'éventail : l'apothéose De Balzac
Grandville, dessinateur, entre 1835 et 1836
Maison de Balzac, BAL 1990.1
CCØ Paris Musées / Maison de Balzac
La canne De Balzac
Orfèvre le Cointe, 1834
Maison de Balzac, BAL 186
CCØ Paris Musées / Maison de Balzac
Sortie des ouvrières de la maison Paquin, rue de la Paix
Béraud Jean (1849-1936)
Localisation : Paris, musée Carnavalet, P1662
Photo © RMN-Grand Palais / Agence Bulloz
La pâtisserie Gloppe, avenue des Champs-Elysées
Béraud Jean (1849-1936)
Localisation : Paris, musée Carnavalet, P1733
Photo © RMN-Grand Palais / Agence Bulloz
Balzac à la canne
Illustration pour Courtine, Balzac à table, Paris, Robert Laffont, 1976
Maison de Balzac, B2290
CCØ Paris Musées / Maison de Balzac
Balzac, croquis d'après nature
Théophile Gautier, 1830
Maison de Balzac, BAL 333
CCØ Paris Musées / Maison de Balzac
Portrait-charge de Balzac
Jean Pierre Dantan, sculpteur, 1835
Maison de Balzac, BAL 972
CCØ Paris Musées / Maison de Balzac
Honoré de Balzac
Jean-Théodore Maurisset, graveur, 1839
Maison de Balzac, BAL 252
CCØ Paris Musées / Maison de Balzac
Balzac en canne
Jean-Théodore Maurisset, graveur, 1839
Maison de Balzac, BAL 253
CCØ Paris Musées / Maison de Balzac
Comtesse Charlotte von Hardenberg
Johann Heinrich Schroeder (Boris Wilnitsky)
Droits réservés
Delphine Gay (Portrait de Delphine de Girardin)
Louis Hersent, 1824
Musée de l'Histoire de France
© Palais de Versailles, RF 481
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