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EAN : 9782081286696
137 pages
Flammarion (12/09/2012)
3.4/5   5 notes
Résumé :
L'enseignement, ce sont des vigilances, un sens du rythme, des pauses, des paris, des obsessions.
C'est une forme de ténacité et d'acharnement.
C'est un bricolage savant.
C'est exactement le contraire des dix compétences de l'enseignant édictées par le Ministère.
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Ecrit dans une langue simple émaillée de quelques termes familiers, ou inventés, et de quelques termes soutenus, ou experts, dans un équilibre subtil, ce livre nous offre les états d'âme et les réflexions avisées sur son métier de Mara Goyet, professeur d'histoire-géographie en collège.


Mara Goyet s'interroge ici sur les raisons de l'échec du collège à instruire (peut-être aussi un peu à éduquer) les adolescents qui constituent l'avenir de notre pays (si, si, n'en doutez pas).
Tout y passe : la société, les parents, les profs, le modernisme, le système, l'existence du linoléum dans les salles de classe…
En général, on retrouve toujours une envie de comprendre, une absence de jugement, sauf en ce qui concerne le ministère et ses lubies idiotes.

Au travers de ces réflexions, elle parle de l'évolution récente du métier d'enseignant. Avec ses quinze ans d'expérience, elle sait avoir beaucoup changé, dans sa posture, dans son point de vue, être devenue une bonne prof, de ceux qui ont conscience de leurs forces mais aussi de leurs manques et de leur incapacité face à certains élèves.

Mais, elle déplore que la question des difficultés des élèves disparaisse maintenant complètement des discussions lors des réunions.

« La vraie question est celle-ci : nombre d'élèves ne sont ni malades, ni limités intellectuellement. Ils sont tragiquement nuls. Parfois très mal élevés. Très énervés. Et l'on fait quoi ?
Cela ne concerne pas un élève par niveau. Mais plusieurs par classe. Rien n'a été prévu. Tout se passe comme si les difficultés scolaires étaient une mauvaise surprise, un accident, face auquel il faut improviser. »



Par contre, pour l'enseignant, inutile de se demander qui est bon devant les élèves ou qui est mauvais, ce n'est plus vraiment cela qui compte aujourd'hui. Et en effet, les procédures d'évaluation et de validation se multiplient.
Mara Goyet évoque, rapidement – il y aurait tant à dire, le livret personnel de compétence, par lequel il faut assurer qu'un élève maîtrise bien une attitude, n'oublions pas la date et la signature.


Mais aujourd'hui dans l'éducation nationale, il faut un contrat ou un rapport pour tout type de problème. Pour les élèves en difficulté scolaire : des PPRE. Pour les élèves ayant un souci de santé : un PAI. Pour ceux qui sont un peu entre les deux : un PASTA. Alors on leur colle une AVS (personne souvent elle-même en difficulté pour retrouver un emploi, non formée, à qui l'on n'a pas expliqué sa mission, mais qui doit aider un élève ayant d'importantes difficultés).

Pour être bien vu de sa hiérarchie, du système « éducation nationale », un prof de collège doit avoir des projets (comme si réussir à enseigner sa matière n'était pas déjà un projet suffisant…). Il faut participer à l'histoire des arts, penser à la liaison école-collège, penser à la liaison collège-lycée, utiliser les nouvelles technologies, avoir des projets transversaux (c'est-à-dire travailler avec les profs des autres matières), avoir des projets disciplinaires (c'est-à-dire travailler avec les collègues de sa matière), penser au parcours de formation, penser à l'histoire des arts, organiser des sorties, des voyages, participer au conseil pédagogique, participer au conseil d'administration, avoir des projets sur la santé et la citoyenneté, avoir des projets sur le développement durable…

J'ajoute des choses qui ne sont pas dans le livre sur ces deux derniers paragraphes, mais je reste dans l'esprit du bouquin.


C'est rassérénant de lire quelque chose qui ne soit pas réducteur sur les profs. Par exemple, il y a plusieurs façons d'être un bon prof, pas seulement en faisant preuve de cette fameuse autorité naturelle dont on parle si souvent.

« Entre profs, nous nous reniflons. Nous savons parfaitement pour qui cela marche, pour qui cela ne marche pas. Quand ça fonctionne, il y a des centaines de manière de l'expliquer : l'amour de la matière, l'autorité naturelle, l'implication, l'hystérie communicative, la capacité à faire peur, la gentillesse, la sympathie, la drôlerie, la régularité apaisante, le sérieux, la monotonie sans scrupule. »


Bref, en résumé, ce livre est une pépite pour les gens que ça intéresse.





Et en ambiance musicale, immanquable :

« […]
Le programme de cette année
En français faudrait arriver à lire
tout un livre en entier
Mais même Dan Brown et Marc Lévy
y a plus d'cent mots d'vocabulaire
On sera toujours à lire la préface
même après l'hiver

Et mon voisin en me voyant me dira
"Bandes de fainéants, alors vous êtes déjà rentré, vous savez pas c'que c'est d'bosser,
avec vos semaines de 20h,
vous bossez bien moins qu'un facteur, et dire que je paye pour vos congés,
et pis vous êtes même pas bronzé !"
Cent copies à corriger, 2/3 Prozac, 8 cafés,
Mais j'l'entends quand même dire d'en bas
"Et j'compte même pas la sécurité d'L emploi".
[…]
Et vu leur investissement,
l'année prochaine ira pas en s'arrangeant
Faudra p't'être songer à les adopter
V'nir les lever l' matin, le soir les coucher
Et p't'être dormir à leur place pour qu'ils restent éveillés en classe

La prof de gym n'est pas venue,
s'est faite agresser dans la rue,
mais bon ils l'avaient avertie,
ils veulent pas d'sport avant midi,
ils peuvent d'jà pas fumer en classe,
et ça déjà c'est dégueulasse,
Entre chaque cours une bière et un joint,
c'est quand même pas de gros besoins...

Cette fois-ci c'est décidé,
mes gosses iront dans le privé,
j'ai beau r'garder à deux fois,
j'la vois pas tant qu'ça, la sécurité d'L emploi. »

Extrait de « la sécurité de l'emploi » des Fatals Picards :
https://www.youtube.com/watch?v=w1RwibJHe-c
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Le regard et les considérations d'une professeure d'histoire-géographie sur le système éducatif et son évolution de l'intérieur. Qui rappelle une idée essentielle : l'élève doit être – et rester - au centre du système.
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critiques presse (1)
LeMonde
26 septembre 2012
Un vague à l'âme et beaucoup d'amour du métier suintent entre ces mots que Mara Goyet manie si bien. Et sous les critiques sympathiques de ses collègues affleure une vraie charge contre l'institution à qui elle enfile le bonnet d'âne sans barguigner.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
[…] il est bien plus simple de mettre l’élève au centre du système.
Cela ne le rendra ni con, ni criminel, ni confit dans son ego. Cela ne le rendra pas acteur de sa propre scolarité ni producteur de son savoir (foutaises, il faudrait pour ce faire rendre l’école obligatoire jusqu’à trente-cinq ans tant cela prendrait du temps). Cela l’aidera sans vous transformer pour autant en larbin ancillaire pédophile pédagogue gâteux.
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Vous ne savez plus, par exemple, si la modernité est une bonne ou une mauvaise chose et vous vous demandez si cette question a le moindre sens. Vous vous demandez aussi si vous devez fatalement enseigner en rempart, faire cours contre. Contre quoi d’ailleurs ? Le racisme. La bêtise. L’éphémère. La barbarie. L’ignorance. Notre époque. Rihanna.
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Videos de Mara Goyet (11) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Mara Goyet
Dans le cadre de la Semaine PhiloMonaco 2023
Présenté par Raphael Zagury-Orly Avec Mara Goyet, écrivaine Cécile Ladjali, enseignante Judith Revel, philosophe
«Apprendre est une expérience: tout le reste n'est qu'information», disait Albert Einstein. Expérience complexe, en vérité, au sens où elle met en jeu les facultés de chacun(e), les savoirs et la volonté, les besoins et les désirs, les émotions, tantôt propulsives (curiosité, satisfaction, joie de la découverte) tantôt répulsives (fatigue, ennui, désintérêt, sentiment d'échec), sinon la personnalité entière de ceux et celles qui sont là pour apprendre, et qui d'une manière ou d'une autre transmettront à d'autres les connaissances dont ils acquièrent la maîtrise, et ceux et celles qui sont là pour enseigner, et qui d'une manière certaine continuent, en le faisant, à apprendre. Ce qui est certain, c'est qu'apprendre ne s'accomplit jamais sous la contrainte, la peine ou la punition, et ne peut être que «philosophie», amour du savoir – car on n'apprend rien s'il n'est aucune appétence, aucun goût pour savoir, si l'on n'éprouve aucune joie à élargir le champ de ce qu'on sait. Arriverait-on à inculquer de force quelques connaissances chez l'enfant ou l'élève, qu'elles disparaitraient progressivement si elles n'étaient alimentées, ensuite, et toute la vie durant, par le goût, l'envie, le désir, le plaisir, la volonté de continuer à apprendre. Mais comment créer cette faste «prédisposition» si elle n'existe pas, si elle est enterrée sous l'ennui, la distraction, la démotivation, des sollicitations autres, sources d'inattention? de quels atouts disposent parents et éducateurs pour faire naître l'envie d'apprendre?
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