Ce nouvel ouvrage de
Xavier Hanotte est aussi envoûtant que possible. L'auteur nous promène habilement dans un mélange subtil et fragmenté entre un réalisme bouleversant et une magie onirique et poétique.
Ce savant amalgame opère un contraste captivant.
Ce jeune et grand poète anglais Keith Douglas, sur lequel repose le roman, est tué par un éclat de mortier quelques jours seulement après le débarquement de Normandie.
Le sergent Frédéric Dutrieux, lui, disparaît alors que sa brigade belge est en train de libérer Deauville.
C'est quarante ans plus tard que l'on retrouve un autre Frédéric Dutrieux, sur le point d'effectuer son service militaire, encore obligatoire en cette année 1984.
Les scènes se déroulant durant son incorporation à l'armée ont été pour moi les plus marquantes. Cette parenthèse aux accents satiriques prononcés, apparaît comme une bulle au milieu du roman.
La mort tient une place prépondérante dès les toutes premières pages. Les poèmes de Keith Douglas dans le chapitre initial en sont une remarquable introduction.
La perception du temps joue également un rôle important tout au long du récit. Les limites temporelles se dévoilent de manière floue, nous troublent le regard et laissent un brouillard de doute quant à notre repère au temps et à l'identité.
Deux Frédéric Dutrieux, deux destins, deux militaires, ce poète, Keith Douglas qui les lie…
Xavier Hanotte nous balade à travers les époques, les souvenirs, les rêves, la destinée ; et jongle à merveille avec ces « firefly » mortifères et ces lucioles qui illuminent les nuits à chaque instant crucial.
À travers Keith Douglas, qui hante l'ouvrage de bout en bout, l'écrivain transforme ses personnages eux-mêmes en fantômes, errant en quête de sens et d'identité ; et c'est saisissant.