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Aloys Becker (Traducteur)Gérard Granel (Traducteur)
EAN : 9782130446354
272 pages
Presses Universitaires de France (01/03/1999)
4/5   21 notes
Résumé :
Cet ouvrage est traduit de l'allemand par Aloys Becker et Gérard Granel. Il présente le texte de deux cours tenus à l'Université de Fribourg durant le semestre d'hiver 1951-1952 et le semestre d'été 1952. Apprendre à penser, tel était le but du philosophe et cet apprentissage passe par des détours insolites, nous rapproche de la poésie, nous invite à « revenir à l'aurore de la pensée occidentale », en particulier au célèbre fragment VI du Poème de Parménide. « Il ne... >Voir plus
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Aucun penseur n'est jamais entré dans la solitude d'un autre.
Pourtant, toute pensée n'adresse jamais que du sein de sa solitude
sa parole, d'une façon cachée, à la pensée qui la suit ou qui la précède.
Ce que nous nous représentons comme les marques de l'influence
d'une pensée, ce sont seulement les marques de la méconnaissance dans laquelle elle est inévitablement tombée. Ces fruits de la
méconnaissance, passant pour le prétendu contenu de la pensée,
sont seuls à parvenir dans la forme de l'exposé et à faire vivre ceux-là
qui ne pensent pas.
Répondre à la question« Qu'appelle-t-on penser? » cela même
n'est toujours que questionner, c'est toujours rester en chemin. Cela
paraît plus facile que de se proposer d'occuper une position stable.
On vagabonde en s'enfonçant dans l'inconnu. Mais, pour continuer
à être en chemin, il faut que nous soyons d'abord et constamment
attentifs au chemin. Ce cheminement, pas à pas, voilà ce qui est ici
essentiel. La pensée ne trace son chemin que dans une marche faite
de questions. Mais c'est là une étrange façon de tracer les chemins.
Ce qui est construit ne reste pas là derrière nous et n'est pas acquis,
mais il se construit dans le passage au pas suivant, qui s'en fait même
précéder.
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Arrêtons-nous seulement un instant et disons la phrase:« l'arbre
est» à partir de son dit; alors nous avons dit de l'arbre :«est». C'est
à nous maintenant, d'une façon certes maladroite, mais pourtant
décisive, que s'adresse la question : Qu'en est-il de ce « est » grâce
auquel il n'est pas que l'arbre ne soit pas? Où ce que désigne le« est>>
se cache-t-il, auprès de l'arbre, ou bien dans l'arbre, ou bien derrière
l'arbre? Certes, nous disons ce« est» cent fois le jour; même si nous
ne le prononçons pas, notre comportement à l'égard de tout ce qui est
continue à passer par cet auxiliaire. Mais le fait que nous prenions
tellement à la légère ce « est » peut-il déjà être une preuve que ce mot
n'a aucun poids? Qui pourrait s'enhardir à carrément nier, sans plus,
que ce verbe auxiliaire finisse même par désigner ce qui reste de plus
lourd et de plus difficile à dire ?
Rayons pour un instant le « est » et la phrase « l'arbre est ».
Supposons qu'elle ne soit pas encore dite. Essayons donc maintenant
de dire : l'arbre est d'une belle taille, l'arbre est un pommier, l'arbre
est peu riche de fruits. Sans ce « est» dans la phrase« l'arbre est»,
ces prédications, y comprise la science botanique tout entière,
tomberaient dans le vide. Ce n'est pas tout. Chaque comportement
humain envers quelque chose, tout séjour humain au milieu de tel
et tel domaine de l'étant, disparaîtrait irrésistiblement dans le vide
si le « est » ne parlait pas. L'être humain ne pourrait même pas
disparaître dans le vide, car il faudrait pour cela qu'il eût déjà été
dans le « là »
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Notre langue d'aujourd'hui est encore celle que parlent Platon et
Aristote. Notre mode de représentation aussi est encore celui dans
lequel pensent Héraclite et Parménide. Seule la référence à la conscience historique moderne voudrait nous faire croire que ce sont des
personnages qui appartiennent au Musée de l'Histoire de l'Esprit et
dont on peut, si besoin est, et avec l'aide de l'érudition, faire de
nouveau une « exposition ». Parce que nous savons à peine en quoi ·
repose l'essence de la langue, nous croyons naturellement que notre
motocyclette, par exemple, qui se trouve dehors dans le parking de
l'Université, est plus réelle qu'une pensée de Platon sur l'idea ou
d'Aristote sur l'energeia, pensées qui pourtant s'adressent à nous et
nous requièrent dans chaque concept de la science actuelle - et non
là seulement - sans que nous prêtions véritablement attention à une
relation que l'on prend à peine en considération. On continue toujours à croire que la tradition est passée et qu'elle n'est plus qu'un
objet de la conscience historique. On continue toujours à croire
qu'elle est ce que nous avons proprement derrière nous, quand elle
vient au contraire vers nous parce que nous sommes exposés à elle et
qu'elle est notre destin. L'aspect purement historique de la tradition
et du cours de l'histoire appartient à ces illusions lourdes de conséquences dans lesquelles il faut que nous demeurions pris aussi longtemps que nous ne pensons pas encore véritablement. Cette illusion
sur l'histoire nous empêche d'entendre la langue des penseurs. Nous
entendons mal parce que nous prenons cette langue seulement
comme expression - expression dans laquelle les philosophes
proposeraient leurs vues. Mais la langue des penseurs dit ce qui est.
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Nous accédons à ce que l'on appelle penser si nous-mêmes
pensons. Pour qu'une telle tentative réussisse nous devons être prêts
à apprendre la pensée.
Aussitôt que nous nous engageons dans cet apprentissage, nous
avons déjà avoué par là que nous ne sommes pas encore en pouvoir
de penser.
Mais l'homme s'appelle pourtant celui qui peut penser, et à bon
droit. Car il est l'animal raisonnable. La raison, la« ratio» se déploie
dans la pensée. En tant qu'il est l'animal raisonnable, l'homme doit
pouvoir penser, si seulement il le veut. Toutefois, l'homme veut
peut-être penser et ne le peut pourtant pas. En fin de compte, il veut
trop, dans cette volonté de penser, et c'est pourquoi il peut trop peu.
L'homme peut penser, en ce sens qu'il en a la possibilité. Mais cette
possibilité ne nous garantit encore pas que la chose est en notre
· pouvoir. Car cela seulement est en notre pouvoir, que nous désirons.

Mais d'autre part nous désirons en vérité seulement Cela, qui de son
côté nous désire nous-mêmes, c'est-à-dire nous dans notre être, en se
révélant à notre être comme ce qui nous tient dans notre être. Tenir
veut dire proprement garder, faire paitre sur le pâturage. Ce qui nous
tient dans notre être ne nous tient cependant qu'aussi longtemps que
de notre côté nous aussi re-tenons ce qui nous tient. Nous le re-tenons
lorsque nous ne permettons pas qu'il sorte de la mémoire. La mémoire
est le rassemblement de la pensée. Rassemblement sur quoi ? Sur ce
qui nous tient dans la mesure où il est gardé dans notre pensée
- gardé parce qu'il continue à être ce qu'il faut garder dans la
pensée. Ce qui est gardé dans la pensée est ce qui fut doté d'une
souvenance, et cela parce que nous le désirons. Ce n'est que lorsque
nous désirons ce qui en soi exige d'être gardé dans la pensée que la
pensée est en notre pouvoir.
Pour que la pensée soit en notre pouvoir, nous devons
l'apprendre. Qu'est-ce qu'apprendre? C'est faire que ce que nous faisons et ne faisons pas soit l'écho de la révélation chaque fois de
l'essentiel. Nous apprenons la pensée en prêtant attention à ce qui
exige d'être gardé dans la pensée.
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La réponse à la question « Qu'appelle-t-on
penser?» est certes une parole, mais cette parole est à l'origine écho.
Elle suit l'Appel et maintient ce qui a été mis en question dans sa
di~nité de faire question. Si nous suivons l'Appel, nous ne serons pas
quittes de ce qui a été mis en question.
Ce n'est pas maintenant que la question ne se laisse pas régler,
c'est jamais. La question ne fera jamais que devenir plus digne de
question si nous allons à la rencontre de ce qui est ici mis en question
-c'est-à-dire l'Appel. Si c'est à partir de cette façon de faire question
que nous posons nos questions, alors nous pensons.
La pensée même est un chemin. Nous ne rendons justice à ce
chemin qu'à la condition que nous continuions à être en chemin.
:Ëtre en chemin sur le chemin, pour tracer ce chemin, c'est une chose.
Mais c'en est une autre que de se placer au bord du chemin, venant
de n'importe où, et de s'entretenir de la question de savoir si et dans
quelle mesure les portions de chemin plus ou moins anciennes
diffèrent entre elles et sont peut-être même inconciliables dans leur
diversité, inconciliables pour tous ceux qui ne font jamais le chemin,
qui ne s'apprêtent jamais non plus à le faire, mais qui se postent à
l'extérieur du chemin pour ne rien faire jamais que se représenter le
chemin et en discourir.
Pour parvenir à être en chemin, il faut bien nous y mettre. Ceci
en un double sens : d'une part de telle façon que nous nous ouvrions
nous-mêmes aux perspectives et aux directions qui s'ouvrent sur le
chemin, et d'autre part de telle sorte que nous nous mettions en
chemin, c'est-à-dire que nous fassions les pas qui seuls font du chemin
un chemin.
Le chemin de pensée ne se déroule pas, venu de n'importe où,
comme une route si rebattue qu'on n'y avance plus -et, du reste,
il n'existe pas quelque part en soi. Ce n'est que la marche et rien que la
marche, ici la mise en question qui pense véritablement, qui constitue
le cheminement. Le cheminement est l'acte de laisser surgir le chemin.
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Vidéo de Martin Heidegger
POÉSIE-PENSÉE – La Philosophie face à la Poésie selon HEIDEGGER (France Culture, 1964) Un extrait d’un hommage radiophonique au philosophe, par René Farabet, diffusé le 25 septembre 1964 sur France Culture. Interventions : Beda Allemann, Michel Deguy et René Char. Lecteurs : Henri Rollan et Jean Topart. Mise en ligne par Arthur Yasmine, poète vivant, dans l’unique objet de perpétuer la Poésie sur tous les fronts.
Dans la catégorie : L'espritVoir plus
>Epistémologie, causalité, genre humain>Le genre humain>L'esprit (8)
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