William Malcolm Openshaw, un homme à bout de souffle, un homme en fin de course.
Un homme qui a quitté la meute:
« Je suis un loup des villes et je possède les instincts du loup des villes. »
Isolé et acculé dans les bidonvilles de Lisbonne, un homme lui tend la main...
Rencontre programmée ou fortuite?
Henry Richardson, agent au service de l'Ambassade britannique, semble ne plus vouloir le lâcher: d'un rendez-vous à l'autre Richardson, intrusif, pousse William à affronter son passé et réveille ses démons, ses souffrances.
Si William a choisi la fuite, l'exil, il a ses raisons: la douleur, il crève de chagrin.
Le peu qu'il a eu, il l'a perdu.
Reste le souffle du passé, le souffle asphyxiant, oppressant de la peur.
Mais au terme de sa cavale, de ses tours de cache cache, il écrase le souffle vacillant du bonheur (la sauterelle) et perd l'odeur des coquelicots qui longtemps l'accompagne...
« Les ailes du condor ne peuvent rien pour sa volonté.
le condor celui qui vole, a le regard triste. »
Chez les parias africains ou dans les bidonvilles de Benfica, William s'interroge:
« Y-a-t-il quelque chose de bon dans ma vie en ce moment? Je m'arrête, ferme les yeux quelques secondes. L'odeur des coquelicots est tout ce que j'ai. »
Stig Holmas nous propose avec
le condor un voyage au bout de l'enfer.
Il nous livre les pensées de son anti-héros, un poète, et un activiste des années 70.
Grâce à une construction étonnante, les parties s'intercalent, se chevauchent ou glissent de l'une à l'autre.
En effet, William aime écrire, surtout des poèmes:
« - Oui, j'écris. Mais cette fois-ci, c'est une sorte de journal fictif, les notes rédigées par un homme qui vit chez une pute et se souvient. »
Et c'est bien ses souvenirs, grâce au talent de
Stig Holmas, qui glissent l'un sur l'autre quand on tourne les pages, que ce soit ses rêves ou ses cauchemars, ses moments de grâce ou de violence.
J'ai adoré ce roman, découvrir, au gré des vagues de souvenirs qui submergent William, sa vie, son enfance, son adolescence, son grand amour, ses passions alors que nous le savons reclus dans l'ombre, du côté des damnés de la terre, des opprimés.
Belle et cruelle histoire que celle de William Openshaw, poète maudit, fils d'un marin écossais et d'une mère originaire de l'Algarve:
à Birmingham avec Sandra, sa mère
à Moscou avec Elena, à Londres et San Francisco avec Monica
à Lisbonne avec Ana Maria Lisbela et à Calcutta avec Indira
Toutes ces femmes balisent sa vie.
A travers elles, le parcours et le destin de Williams se dessinent.
Qui pourra saisir
le condor avant son dernier vol?
Je n'oublierai pas de si tôt la poésie qui se dégage de l'écriture de l'auteur, ni les champs de haricots,
les champs de haricots sont remplis de coquelicots...
Un coup de coeur .