AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Trilogie de Tora tome 1 sur 3

Éric Eydoux (Traducteur)Élisabeth Eydoux (Traducteur)
EAN : 9782742725274
288 pages
Actes Sud (03/01/2000)
4.01/5   150 notes
Résumé :
Si récente qu'elle soit, la trilogie de Herbjorg Wassmo est déjà considérée en Norvège comme un des grands classiques de la littérature. Le public, dans ce pays de quatre millions d'habitants, a fait monter les ventes à près de cent cinquante mille exemplaires. Les autorités littéraires ont décerné au premier volume, La Véranda aveugle, l'année même de sa parution (1981), le très envié prix du Conseil nordique.

Voici donc l'histoire de Tora, l'adolesc... >Voir plus
Que lire après La Véranda aveugleVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (18) Voir plus Ajouter une critique
4,01

sur 150 notes
5
8 avis
4
9 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
0 avis
C'est un dur monde dans lequel Herbjorg Wassmo nous plonge. Un monde de misère, violent. Mais un monde très intéressant. Dans tous les cas, moi, je l'ai aimé. Davantage que celui que l'auteur nous présentait dans « le livre de Dina », que je trouvais trop polissé et romancé. Dans « La véranda aveugle », nous avons droit à un autre visage de la Norvège. Celui des petits villages de pêche du nord. Où il fait froid. Où des hommes et des femmes qui travaillent durement pour gagner leur pain quotidien. Où les enfants qui doivent apprendre tôt à grandir, à trouver leur voie. Et ils y parviennent en décodant tout ce qui les entoure.

C'est le cas de la petite Tora. Enfin, plus si petite puisqu'elle a onze ans. Alors qu'elle entre dans l'adolescence, elle doit se faire une tête de tous les ragots qui circulent sur son compte. de toutes les insultes que les enfants du village lui lancent. Elle serait née des amours de sa mère et d'un officier allemand pendant l'occupation nazie. Qu'est-ce que cela implique ? Surtout, elle doit surtout repousser les ardeurs de son beau-père Henryk quand il rentre saoul… Dans une autre critique, on compare la jeune fille à un chat écorché et je n'aurais pu mieux trouver.

Heureusement, elle peut compter sur des femmes fortes. D'abord, sa mère Ingrid, travailleuse, et sa tante Rakel, ingénieuse. Cette dernière n'est pas étrangère à la prospérité de son époux. D'ailleurs, quand un feu ravagera les installations de Simon, c'est elle qui le poussera à se reprendre en main. Grâce à ces deux modèles, et celui d'autres femmes du village (dont son institutrice Gunn et son amie Soleil), Tora saura grandir.

Toutefois, commec'était le cas dans « le livre de Dina », les personnages masculins sont plutôt faibles. "Les hommes, on les emmerde", clame Rakel. On retrouve surtout Henryk, un chômeur estropié, éprouve de la difficulté à retenir ses ardeurs. Simon est plutôt docile, c'est son épouse Rakel qui « porte le pantalon ». Les camarades de classe de Tora son méchants, essentiellement des brutes. le seul qui lui tienne lieu d'ami, Frits, est sourd et muet. Cela est un peu décevant.

Mais cette légère déception est largement compensée par la plume particulièrement évocatrice de Herbjorg Wassmo. Au-delà des personnages, il y a le village et la communauté. Je ne sais s'il existe pour vrai mais j'avais l'impression d'y être. À chacune des pages que je tournais, je « sentais » la Norvège. Cette communauté de pêcheurs, austère, où chaque famille cache ses problèmes derrière de portes closes. Les quelques descriptions de lieux, minimalistes mais efficaces, accentuent cette misère sociale mais, en même temps, la rend sympathique. La pluie déprimante, l'obscurité oppressante, le froid envahissant, les maisons à la peinture tellement écaillée qu'elles paraissent grises, les quais et les imposants baraquements des pêcheurs qui occupent la moitié des villageois… toute cette austérité semble naturelle, presque bienvenue. Dans tous les cas, elle fait partie de ces êtres qui craignent surtout le chômage. Ils acceptent cette vie qui est la leur, ils n'en connaissent pas d'autre.

Ceci dit, tout n'est pas que noirceur et misère. Herbjorg Wassmo trouve le moyen d'éclairer de quelques rayons la vie de ses personnages. Et sa plume est tellement douce, fine, délicate. Aborder des sujets aussi difficile (l'éveil à la puberté, les abus) dans un tel décor, c'est tout un tour de force. Partout, il y a cet équilibre. Ces personnages parfois durs, qui s'expriment dans un langage assez cru, sont aussi capables de tendresse. Décidément, « La véranda aveugle » est un grand roman d'apprentissage, une oeuvre à découvrir.
Commenter  J’apprécie          400
La condition féminine après la guerre, en Norvège.

Celle des familles pauvres de pêcheurs, d'ouvriers, celle de la misère et de la précarité.

Celle d'êtres frustres et durs, où, il n'y a aucune alternative qu'un peu d'espoir, qui se faufile au travers des courants d'air, des portes de chambre qui ne ferment pas à clé.

Cette histoire racontée par Tora, petite fille, puis adolescente ; fille aux cheveux de feu, fille du péché, fille de l'amour entre Ingrid et un soldat allemand, fille qui brûle de vivre, coeur blessé, corps meurtri et dévasté par 'l'Ogre" qui recouvre son âme d'enfant d'un manteau de nuit.

La maison des Mille, tristement nommée, est un monde à elle toute seule sur trois étages et autant de familles désespérées.
La violence côtoie la dureté de la vie, et les pensées intimes y demeurent silencieuses, mais, sont incrustées en chacun de ses habitants.

Premier d'une trilogie plein de justesse et de retenue.

Noir, plombant !


Commenter  J’apprécie          360
Pauvre petite Tora d'une douzaine d'années à peine. Quelle vie sur cette île norvégienne dans les années 60, entre une mère triste et un beau-père ignoble !
Et ce péril qui pèse sur ses épaules, sournois, obsédant, indéfinissable.
Est-il du aux conditions inavouables de sa naissance ? à la menace de son beau-père ?
Je me suis laissée emportée dans cette tragédie.
C'est sombre, c'est triste, on se sent impuissant mais c'est superbement écrit.
J'étais complètement absorbée par les lieux, par l'époque, par le mode de vie, par les personnages……
Pour faire bref, j'ai beaucoup aimé ce livre que je voulais lire depuis longtemps.
Commenter  J’apprécie          270
Dans ce premier volet de la trilogie nous faisons connaissance avec Tora,son cadre de vie,sa famille. Si j'ai tout d'abord trouvé un peu long la mise en place "du décor" j'ai ensuite pris toute la mesure de la finesse d'écriture d'Herbjorg Wassmo qui nous permet de nous imprégner tout autant du monde intérieur de la jeune Tora que du contexte dans lequel elle vit. Son existence douloureuse est partagée entre la peur " du péril" engendré par son beau-père dont l'infirmité est bien moins son bras paralysé que sa cruauté, sa mère,femme soumise incapable de la protéger, et sa honte d'être l'enfant d'un " boche"...Mais elle a tout de même un peu de lumière et d'espoir de connaître un monde moins dur grâce à la tendresse de sa tante Rakel et son oncle Simon auprès desquels elle trouve un réconfort. Et puis, il y a Frits,jeune garçon muet et qui pourtant lui communique une conivance qui l'a trouble. Tora va aussi trouver une sorte de résilience en s'inventant une grand mère allemande, chaleureuse,aimante. Nous quittons Tora après l'incendie de l'entrepôt de son oncle et un conflit intérieur cornélien : soulagement et sentiment de libération en voyant son beau père emmené par la police et parallèlement souffrance de constater que sa mère semble ne plus la voir , emportée elle même mentalement par cet homme. L'univers de ce petit monde de pêcheurs, la rudesse du climat norvégien, la pauvreté ambiante contribue à alourdir encore le calvaire de cette toute jeune fille. C'est avec plaisir que je vais retrouver Tora dans le deuxième tome de cette histoire.
Commenter  J’apprécie          150
Il y a dans "La véranda aveugle" une sorte de tour de passe-passe que j'ai encore du mal à m'expliquer, je crois. Voilà un texte qui prend un peu à froid par son aspect vaguement décousu, qui paraît même au départ un peu maladroit, jusqu'à ce que l'on comprenne que l'auteure nous place ainsi à hauteur de son héroïne et instille à son texte une forme de spontanéité qui finalement renforce sa véracité et son intensité.
Quand j'évoque la "hauteur" de l'héroïne, il est important de préciser qu'elle n'est guère élevée… Tora oscille entre la fin de l'enfance et le début de l'adolescence. Elle vit sur une petite île norvégienne au nord du cercle polaire, perdue au milieu du froid et de l'obscurité. La vie y est rude et austère, rythmée par les saisons de pêche, soumise aux calamités naturelles. On y mange peu de viande, et certaines familles nombreuses en sont réduites à envoyer leurs enfants à l'école par roulement, faute de pouvoir offrir une paire de chaussures à chacun. Nous sommes à une époque d'avant les réseaux sociaux et les téléphones portables, l'île semble à l'autre bout du monde, et tout y arrive avec cinq ans de retard.

Tora habite avec sa mère Ingrid et son beau-père Henrik dans la maison des Mille, orgueilleux bâtiment de trois étages en bois construit au début du siècle, désormais décrépit et plein de courants d'air, qui "abrite en grand nombre vermines humaines et détritus". C'est Ingrid qui assure le maigre revenu du foyer, s'échinant à l'atelier frigorique jusqu'à des heures indues, s'y imprégnant d'une odeur de poisson qui ne la quitte pas. Hendrik, tirant prétexte de son épaule invalide -"bousillée" à la guerre-, passe plus de temps à boire qu'à travailler, rentrant parfois tellement saoul que Tora doit l'aider à se mettre au lit.

Tora, donc, est petite. C'est du moins ainsi qu'elle se ressent, ayant l'impression de vivre au ras du sol, environnée d'adultes grands et menaçants, qui ne l'entendent pas, et la considèrent comme quantité négligeable. Elle a pris l'habitude de se faire encore plus petite, espérant ne pas se faire remarquer, et faire oublier qu'elle est une "fille de boche", ainsi que certains de ses camarades ne manquent pas de lui rappeler. Elle ne sait d'ailleurs pas vraiment ce que cela signifie, n'ayant pas connu son père, sujet hautement tabou parmi ses proches, comme l'est celui de la guerre, les deux semblant inextricablement liés.

Et puis, Tora vit dans l'idée permanente du péril, attentive à tous les signes qui l'annoncent : une humeur, une manière de rire, le poids d'un pas dans l'escalier… le péril, comme une entité malveillante et dominatrice, se rappelle à elle dans les moindres détails du quotidien -voir les vêtements de son beau-père côtoyer les siens sur la patère, ou leurs deux assiettes posées l'une sur l'autre après le repas-, détermine la couleur de ses journées, la posture de son corps, son état mental. Car c'est bien Henrik qui en est à l'origine, de ce péril, Henrik et sa brutalité envahissante dont la manifestation est pourtant à peine évoquée, l'auteure, plutôt que de la mettre en scène, exprimant le traumatisme que les souvenirs (des coups et du reste), ont ancré dans le corps et l'esprit. Elle nous place dans l'angoisse permanente de l'expectative, en détaille les effets physiologiques : sensations de dilatation, battements de coeur… Bien qu'écrit à la troisième personne, les émotions et les réflexions de Tora sont livrées comme une matière brute, sous forme de fragments.

Cassée de l'intérieur, pétrie de honte, de crainte et de culpabilité, elle doit par ailleurs affronter les incompréhensibles transformations de son corps aux odeurs nouvellement puissantes, de ses seins qui poussent. Tout cela en ménageant sa mère, fatiguée en permanence, qui ne sait plus trouver des raisons d'être fière d'elle-même. Il faut dire que si la vie est rude en général pour les habitants de cette île perdue, elle est particulièrement éprouvante pour les femmes, qui souvent cumulent travail à l'extérieur et corvées à la maison, s'occupant des enfants, dont on estime que "c'est leur affaire", maintenant au prix de leur santé et de leur bonheur, la cohérence et l'ordre de la cellule familiale.

Les petites filles intègrent précocement cet ordre des choses. Ainsi Soleil -prénom qui sonne comme une dérision- l'amie de Tora, aînée d'une nombreuse fratrie vivant dans la maison des Mille, qui assume la tenue du foyer depuis que sa mère dépressive ne peut plus se lever, déjà prisonnière, à quatorze ans, d'un système dont elle a très peu de chances de sortir.

Une autre manière de vivre, et surtout de considérer l'existence, semble pourtant possible, comme le démontrent quelques figures lumineuses auxquelles Tora se raccroche : sa tante Rakel, débordante de vie, d'amour et d'optimisme, la jolie institutrice Gunn, qui a quitté la douceur de son sud natal pour se perdre dans ces contrées hostiles où elle affiche une inaltérable gaité, ou encore la gentille mère de Frits, le garçon muet dont Tora devient l'amie, et qui habite un foyer d'où tout péril est absent…

Sans doute n'est-ce finalement pas quelque magie, mais une extraordinaire habileté associée à une grande puissance d'évocation, qui permettent à Herbjørg Wassmo, avec ce texte que l'on dirait spontanément jailli de sa plume, de traduire avec autant de justesse le calvaire intérieur de son héroïne, mais aussi la force, discrète mais bien présente, qui lui permettra, peut-être, de se révolter…

Et sans doute est-ce aussi parce que "La véranda aveugle" est fortement inspiré de sa propre expérience…

Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
Commenter  J’apprécie          42

Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Ceux qui assistèrent Elisif cette nuit-là racontèrent ensuite qu'ayant eu à souffrir des heures durant [son accouchement], elle n'avait cessé de prier. Elle avait prié pour obtenir un grand garçon bien constitué qui ferait honneur à Dieu et pourrait ainsi devenir missionnaire afin d'aller convertir les païens.
Mais, vers les six heures du matin, un cri de bête vint déchirer l'air et se vriller dans toutes les têtes de la maison des Mille. Chacun se mit à supputer.
C'était Elisif qui, n'arrivant plus à se contenter de l'aide céleste, s'abandonnait au seul recours qui lui restait. Le cri originel. Le premier cri véritable de l'histoire universelle. Le hurlement arraché à un être dans la détresse, abandonné de Dieu, seul avec sa douleur. Le combat auquel les livres n'accordent aucune importance particulière parce que la vie nouvelle n'est pas le fait des grands généraux.
Commenter  J’apprécie          270
Un jour, ignorant qu'il y avait une différence entre l'eau de la mer et celle de la rivière, Tora avait bu de l'eau salée.
Elle n'en avait ensuite jamais oublié le goût.
Un goût qui lui avait fait redouter les bains de mer.
Elle préférait les trous dans la rivière, même si l'eau y était plus froide. Et, lorsqu'elle apprenait que quelqu'un s'était noyé en mer, le goût salé et nauséabond lui revenait dans la bouche.
Ainsi savait-elle un peu ce que c'était de mourir.
Commenter  J’apprécie          290
Lorsque Tora venait lui rendre visite, il lui arrivait de préparer du cacao. Sinon, on la trouvait presque toujours dans son coin-cuisine ou devant sa machine à tricoter. Par moments, tournant la tête vers Frits et Tora, elle leur adressait un sourire que Tora, incertaine et étonnée, lui rendait. Et Tora en venait à penser qu'en définitive ce n'étaient pas tant les livres, l'armoire, son gramophone et sa radio qui distinguaient cette maison des autres. Non, c'était ce sourire que l'on adressait à quelqu'un, uniquement pour lui sourire.
Etonnant !
Commenter  J’apprécie          150
Entre autres histoires, Tora en avait une très belle où il était question d'un chemin que l'on parcourait avec une clef dans la poche. La clef d'une petite pièce fermée. Fermée à tout le monde. Chaque fois qu'elle arrivait à un endroit précis du chemin, Tora faisait demi-tour et rentrait chez elle dans la pièce, quelle que soit sa destination. Elle ouvrait la porte, entrait et verrouillait derrière elle.
Nulle voix ne se faisait entendre.
Le péril ? Le péril ne pouvait pénétrer dans ce genre de pièce.
Commenter  J’apprécie          130
Debout près de la fenêtre, Tora se laissait pénétrer par les voix mais ne prêtait pas attention aux paroles. Celles-ci n'avaient plus de sens. Seules comptaient les voix : réconfortantes, douces, rassurantes. Elles comprenaient vaguement que les paroles avaient trait à des choses qu'elles avaient eues auparavant en commun. De ces choses dont l'empreinte n'apparaissait pas sur elles au quotidien : des journées d'été passées ensemble, de communes égratignures, des tempêtes matinales sur le chemin de l'école, des chagrins et des veillées de Noël partagées. Et puis ces moments où elles avaient été contraintes de se détester profondément d'une haine fraternelle, mais pour réaliser l'instant d'après que c'était ensemble qu'elles étaient le plus aptes au combat. Tout ceci, ce n'était pas leurs paroles, ce n'était pas ce qu'elles disaient qui le révélaient. Non, c'étaient leurs voix. Ces voix où transparaissaient les trésors d'affection que chacune éprouvait pour l'autre.
Commenter  J’apprécie          51

Videos de Herbjørg Wassmo (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Herbjørg Wassmo

MP 2014-09-16-824-003048BDD2D9.mp4
Payot - Marque Page - Herbjorg Wassmo - Ces instants-là.
>Autres littératures germaniques>Littérature norvégienne>Littérature danoise et norvégienne : théâtre (126)
autres livres classés : norvègeVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (392) Voir plus



Quiz Voir plus

Famille je vous [h]aime

Complétez le titre du roman de Roy Lewis : Pourquoi j'ai mangé mon _ _ _

chien
père
papy
bébé

10 questions
1429 lecteurs ont répondu
Thèmes : enfants , familles , familleCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..