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EAN : 9782130398066
272 pages
Presses Universitaires de France (01/09/1986)
3.8/5   5 notes
Résumé :
Ce qui est racontable et analysable en philosophie première, c'est le progrès des négations secondes, toutes partitives et hypothétiques, parce que toutes présupposant la positivité de la pensée négative elle-même... Il n'y a plus rien à dire sur la dernière, seule effective et décisive et suffisante, car elle est une extinction soudaine et un Presque-rien instantané. L'ultime suppression de l'ultime vérité ne parachève pas à proprement parler l'ouvrage commencé par... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Note de lecture:

"Si Hamlet avait été moins obsédé par la mythologie de la chose, dit Jankélévitch, peut-être aurait-il découvert ce tiers principe auquel l'activisme du XIXe siècle, par la bouche de Faust, trouvera son vrai nom: l'Action. Car justement, il y a un milieu entre prendre et laisser, être et non-être; non pas certes logiquement-vu que tout tiers est exclu entre ces contradictoires- mais irrationnellement et drastiquement. Entre l'être et le néant, il y a le faire, qui n'est ni être, ni non-être. "p179
Cette citation contient en elle-même une partie du vaste spectre de ce livre, à savoir, le respect de la logique en même temps que son dépassement par l'action.
Philosophie première est non seulement une définition de ce qui, aux yeux de Jankélévitch, constitue la philosophie première, mais aussi son développement de manière originale: l'action pleine par excellence c'est le Dieu qui fait l'être sans être lui-même de l'être.
Jankélévitch pose Dieu, non pas à la manière d'une preuve ontologique mais par le moyen d'une demi-gnose (la gnose est une spéculation à la Swendenborg, la demi-gnose est une spéculation qui a encore ses attaches avec l'empirie). Lorsque Jankélévitch parle du vrai don: celui où l'on n'a pas ce que l'on donne, où l'on garde ce que l'on a donné; il explicite là même l'idée de la création, si paradoxale à nôtre pensée finie. Mais si Chestov semble quitter l'empirie lorsqu'il affirme que seul l'homme vraiment libre est à même de déplacer des montagnes, Jankélévitch ne va pas aussi loin...Mais nous y reviendrons. Et en effet, Philosophie Ière, ouvre son exposé sur ce qui n'est pas transcendent, sur ce qui n'est pas Philosophie première, donc. le chapitre s'intitule: de l'empirie à la métempirie, et si ni l'empirie, ni la métempirie ne constitue La Philosophie 1ère, la métempirie est cependant considérée comme un palier dans l'ascension vers le vrai savoir qu'est.... la philosophie première.
Il faut savoir que la pensée jankélévitchienne est alogique, c'est à dire qu'elle monte vers le haut, et, par ce trait de caractère, prend pour départ l'empirie en vu de s'élever à l'éternel de la logique, elle-même simple étape précédant l'accession ultime aux portes de la métalogique.
Il est donc trois niveaux sur lesquels se situe l'accès au vrai savoir: empirie, logique et métalogique. L'action, dont la citation précédente rappelle l'importance, se situe au delà de la logique.
Lorsque l'on s'oriente à partir du présupposé que nous sommes des êtres finis, nous sommes en droit de nous demander: l'homme n'est-il pas prisonnier de l'empirisme ?

Le second sous chapitre: Conductibilité de l'apparence, indique : "le régime amphibolique de l'apparence, est la raison d'être même de l'herméneutique. Aussi y a-t-il encore de beaux jours pour la dialectique..."
L'apparence est partitivement quelque chose de l'essence. C'est une nécessaire méfiance initiale vis à vis de l'empirique, requise pour se dégager de l'apparence et de l'empirie. Cette méfiance provient d'une mutation radicale: de mutation en mutation- s'opérant à chaque niveau de l'échelle du savoir- l'on parvient à la conversion ,qui, elle, est nécessaire pour saisir non seulement le suprasensible mais aussi le métalogique. Elle est étincelle qui transforme toute la vie humaine. Or, l'une des présuppositions de cette étincelle est l'intuition qui se place elle-même, dit Jankélévitch, au delà de la fiction du logos et du paralogisme" p95
C'est l'intuition qui produit aussi la fiction dans l'empirie au sein de quoi l'homme peut être enserré.
Ce que Jankélévitch veut montrer dans son livre c'est que l'être ne fait pas l'essentiel de l'homme car l'être est la matière pur et simple.
Si l'homme n'a pas conscience de sa naissance, il sait du moins qu'il doit mourir, et ce savoir de la mort certaine le distingue dans l'univers environnant. A cause de la mort, l'homme doit utiliser sa vie le mieux possible, la philosophie première de Jankélévitch n'est donc pas une invective contre tous ses prédécesseurs, mais une initiation à l'agir (c'est en dernière instance la mort qui permet de saisir la concrétude de la réalité, parce que l'homme est fini). C'est pour ça que vous auriez tout intérêt à compléter la lecture de ce livre; qui n'est pas un ouvrage de moral, par son Traité des vertus. Et preuve en est, il commence par le plaisir quand celui de la Philo prems' s'annonce sur l'empirie. Comme j'ai du le dire il y a quelques verstes de ça, la Philo Ier demeure un livre de métaphysique (si l'on prend ce mot dans son acception universitaire) et c'est en cette qualité que ce livre ne donne pas de préceptes moraux qui leur ouvre le chemin. La chance de la vie est, selon P1, de réaliser l'ipséité d'un chacun. Si le créateur opère hors catégorie (c'est le titre du 6ème sous-chapitre du chapitre 9: La création) l'homme est bien contraint de respecter l'être et de rester dans une certaine mesure dans les catégories alors que le Créateur ne participe pas Lui-Même de l'être. Créer est au delà de l'être, et c'est cet au delà qui postule entre autre la liberté selon Chestov. Mais si Jankélevitch ne va pas aussi loin en ce qui concerne la liberté humaine, il va autrement plus loin en nous montrant la manière dont l'homme peut réaliser par participation avec la bonté positive divine, un bon bout de cette liberté sur laquelle s'extasiait Chestov.
Si Chestov veut annihiler la mort de Socrate c'est qu'il admet une conception du temps qui n'est en quelque sorte pas linéaire, en revanche Jankélévitch admet quant à lui la nécessité de la mort et donc de la naissance. Il y a chez lui une certaine linéarité dans sa conception du temps. Il souligne que l'empirie est constituée par la pensée de l'intervalle alors que l'ascension vers l'ipséité absolu s'est faite par l'intermédiaire de l'intuition de l'instant unique, celui de la conversion (Maître Ekhart), qui est retour de la conscience vers son passé. Regard visionnaire vers le futur.

Par cette entre-vision du transcendant, l'homme change du tout au tout: il change de vie. Et c'est en cela que la Philosophie première parue en 1953 rejoint son ouvrage antérieur, à savoir le traité des vertus (1949).
Cependant, en garde ! le sous-titre du livre est Introduction à une philosophie du presque: l'homme ne peut pas tout à fait devenir divin. Ce presque distingue Jankélévitch des mystériologies:"L'homme est intermédiaire avec le divin; mixte de Faire et d'Etre".

Et Jankélévitch développe la logique de sa pensée jusqu'au point où se trouve un paradoxe qui est le tertium quid qui s'ouvre dans l'instant et qui se place dans un rien de pensée et une pensée restauratrice du Tout. C'est que Jankélévitch distingue entre la perspective de la première personne et celle de la troisième personne: "Redisons-le à nouveau, l'homme qui réalise sa mort propre, la mienne pour moi, la tienne pour toi, la votre pour chacun de vous respectivement, diffère du tout au tout de l'homme, qui, par raisonnement, applique une lois universelle à son cas particulier." p22
Toute la logique classique serait conçue sur la base de la troisième personne et c'est la raison pour laquelle la mort n'est en définitive pas responsable: car on ne touche pas au delà de la mort dans la troisième personne, mais seulement à ce qui lui précède et au néant qui la suit. Dans la première personne le scandale de la mort devient visible, mais nous ne pouvons penser notre propre mort sur le mode du présent et de l'indicatif. le rationalisme kantien, aurait fait escamoter le vrai moi dans le moi transcendantal, qui n'est qu'une synthèse imparfaite entre le Il et le moi. D'où le refus pour Jankélévitch du criticisme kantien et son adhérence à l'intuitionnisme bergsonien, adhérence qui l'accompagnera toute sa vie.

p169:
"Dans le rapport du logos aux vérités et aux essences, l'évidence est une possibilité implicite et permanente, mais le rapport de ces vérités elles-mêmes à l'insondable sur-vérité- le Dieu créateur de Descartes, qui le pose et pourrait le révoquer; ce rapport n'est plus à proprement parler un rapport-la position absolu étant un pur vide et un pur zéro pour une conscience finie."
"L'évidence et la vérité ne serait pas éclairante mais lumineuse, comme la clarté du grand jour, comme l'éclair d'une seconde qui s'allume dans la nuit." (Jean de la croix ou Denys l'Aréopagite spotted)

C'est en faisant intervenir la notion de temps qui lui permet
de relier l'évidence à l'exigence de la conversion que la moralité de la Philosophie première apparait. Et ce qui préside à cette démarche n'est pas une conversion spirituelle qui bannirait la réalité, loin de là. Vladimir Jankélévitch dirige l'attention du lecteur sur la nécessite de relier le sensible, l'empirie, à une exigence morale réalisable en valorisant et en décantant ces moment privilégiés que sont les illuminations subites qui nous font réfléchir et auxquelles il et nécessaire d'être fidèle.

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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Y a-t-il par-delà le monde comme par-delà l'univers abstrait une sorte de monde-univers qui serait celui de ‘notre mystère’, c'est-à-dire de la “conciliarité” ? par-delà la localisation topographique dans l'espace de la géographie comme par-delà la pure position “atopique” dans l'espace idéal de la géométrie, y aurait-il un miracle d'ubiquité ou d'omniprésence concrète ? 'Partout’, en ce cas, ne signifierait plus seulement Ailleurs ni, au sens négatif, Nulle part : “partout” désignerait la présence “omnilocale”, qui est d'abord localisation surmontée, et de plus supra-spatialité. Une expérience d'omniprésence et d'omniprésent de se situe-t-elle pas au-delà même de la métempirie ?
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L'apatride de Plotin n'est pas un étranger partout, ni un proscrit de partout exilé : il est déraciné ici-bas, mais non pas “là-bas” ; il est dépaysé ici, mais simplement parce qu'il a un autre pays, parce qu'il est citoyen de deux cités, de deux nationalités dont l'une est plus authentique que l'autre. L'Au-delà est sa vraie patrie, l'Autre-Monde est son monde…
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On peut, après tout, vivre sans le je-ne-sais-quoi, comme on peut vivre sans philosophie, sans musique, sans joie et sans amour. Mais pas si bien
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Incipit : La métaphysique n'est pas une physique extrêmement distinguée, une sorte de transphysique qui ne différerait de la physique que par l'essence particulièrement relevée de son objet. Si cette pensée facile était la vraie, nous n'aurions le choix qu'entre le bavardage domatique et les sarcasmes du naturalisme.
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La philosophie est comme la musique, qui existe si peu, dont on se passe si facilement : sans elle il manquerait quelque chose, bien qu'on ne puisse dire quoi.
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