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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un polar à l'ambiance jazzy avec pour originalité que l'on connaît dès le début le coupable. Ce que l'on ignore, c'est l'identité de la victime, et surtout de la troisième victime. Et il faudra attendre les dernières pages pour découvrir qui elle est, avec un double rebondissement final !

C'est donc à Harlem que débarque Clyde Morton, le futur Viper, un jeune perdreau émerveillé par ce qu'il découvre. Sa rencontre avec Mr O, après avoir abandonné ses rêves de trompettistes, le propulsera parmi les incontournables de la scène musicale mais pas derrière un instrument. C'est le deal de marijuana qui fait sa fortune. Avec un code d'honneur : de l'herbe pas de la poudre, Viper a eu trop souvent l'occasion de constater les dégâts de l'héroïne sur les musiciens accros. Birdy y a laissé la vie, et combien d'autres.

On comprend aussi que dans ce milieu la concurrence est rude et l'occasion de supprimer un concurrent ou un traitre ne peut manquer d'arriver un jour.

L'intrigue est très intéressante et le décor légendaire. Ces années qui ont vu l'explosion de musiques nouvelles ont quelque chose de mythique et les noms qui hantent les pages sont autant d'icônes inoubliables. du squat au be-bop, les génies se révèlent pour enchanter les oreilles des américains sous le charme.

Au coeur de l'intrigue une femme au teint de miel et aux yeux d'émeraude, dont la voix enchante Paris après New-York, avant que ses démons ne la consument.


Une belle réussite que ce roman noir. Excellent idée que de le traduire en français pour notre bonheur de lecture
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Dans la famille « polar bien troussé que je n'avais pas du tout vu venir », ne cherchez pas trop longtemps la bonne pioche : foncez sur Viper's Dream de Jake Lamar, traduit par Catherine Richard-Mas, qui inaugure de façon prometteuse la nouvelle collection New-York, made in France, de Rivages noir.

Comme Forrest avant lui, Clyde Morton a quitté son Alabama natal, laissant sur place une petite amie éplorée mais persuadé qu'une carrière de trompettiste l'attendait à NY. À la place, ce sera la rencontre rapide de Mary Warner, cette Dame Verte que d'aucuns appellent marijuana, découverte sur un toit de Harlem en 1936 alors qu'elle commence à y faire fureur, dans les milieux du jazz notamment.

Devenant rapidement porte-flingues de Mr O, caïd blanc régnant sur le réseau black, Clyde devenu Viper grimpe les échelons, bien au-delà de ses espérances. Mais arrivé au plus haut, il doit affronter la concurrence de la poudre et la trahison de ses proches alors que l'amour le fuit et que le passé resurgit…

Dans un schéma somme toute assez classique d'ascension mafieuse, Lamar s'en sort brillamment grâce à une construction habile. En partant de la fin et de la réflexion introspective de Viper sur ses remords, il remonte le fil de son drame en mélangeant les époques, sans prendre la peine de les séparer en chapitres, faisant le pari du style simple et direct comme de l'intelligence du lecteur.

Il y ajoute une grande aptitude à donner corps et empathie à ses personnages : Viper bien sûr, mais aussi l'énigmatique Mr O, le trublion Peewee, le costaud Pork Chop ou la belle Yolanda forment une galerie de personnages qui, en quelques lignes seulement, te donnent envie de t'attabler au Peewee's et d'en vider un ou deux avec eux.

Et puis il y a le jazz, omniprésent depuis le titre emprunté à Django, les légendes croisées au fil des pages – Charlie Bird Parker, Dizzie Gillepsie, Miles Davis, Thelonious Monk… - la présence romancée de Pannonica de Koenigswarter, muse et mécène du jazz de l'après-guerre, ou encore la bande son finale qui rappelle fort à propos que Viper's Dream fut un feuilleton radiophonique avant d'être un livre.

Bref une jolie et inattendue réussite à laquelle il convient d'associer le personnage principal du livre : New-York, explorée avec amour et – un peu de nostalgie -, de Harlem à la 52e, le plus souvent de nuit, depuis une cave, un toit ou l'arrière-salle d'un commerce ou d'un club. Un regard qui augure bien pour une collection absolument à suivre !
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Clyde Morton, 19 ans, débarqué à New-York du fin fond de l'Alabama, la tête pleine de rêves de gloire, persuadé d'être un grand trompettiste de jazz. Pourtant, son rêve va s'écrouler dès la première audition dans un club de Harlem. À la place, il va devenir le maitre incontesté de la marijuana. La « viper », ainsi surnommée à Harlem, se répand à toute vitesse, que Clyde va renaître en un dealer de marijuana, en un gangster le plus puissant de Harlem.
On découvre, le destin d'un homme, d'une communauté, sur une période allant de 1936 à 1961, à travers un récit au rythme effréné, d'une densité incroyable, empli de meurtres, de drogue, de flics ripoux et d'avocats véreux.
L'axe narratif, tourne autour des trois voeux les plus chers de Viper, que la Baronne Pannonica, lui demande de consigner dans un carnet, alors que par cette nuit de fin novembre 1961, il vient de tuer pour la troisième fois. Son esprit se brouille, s'égare au gré des souvenirs, pour enfin révéler l'identité de sa victime.
La confession de Viper, emprunte de mélancolie, révèle, ces grands musiciens qui jouent avec la mort, mais aussi ceux qui succomberont à une consommation excessive de drogue ou de marijuana.
C'est roman policier dense, au goût âpre, à la plume rugueuse, qui met en exergue le milieu du jazz, la naissance du Be-bop, avec en toile de fond la Seconde Guerre mondiale, la place des afro-américains, mais surtout la société américaine en pleine évolution, c'est Harlem, ses boites de nuits, ses artistes, les jazzmen, ces filles offertes, jusqu'au bout de la nuit, au rythme du jazz.
Jusqu'à la fin, Jake Lamar brouille les pistes, pour finalement terminer en apothéose avec un excellent double rebondissement, dont on ne se doute pas, révélant un drame digne des plus grandes tragédies grecques.
C'est un roman trop court, dont j'aurais souhaité lire encore une bonne centaine de pages.
Au milieu d'une centaine de chats, on croise, Duke Ellington, Thelonious Monk et Charlie Parker, chez la baronne Pannonica De Koenigswater (baptisée Cathouse par les habitués), qui soutient les jazzmen et les accueille sur les bords de l'Hudson.
Jake Lamar, le plus Français des auteurs américains, inaugure avec ce livre, la série « New York Made in France » qui a connu une version radiophonique, réalisée par Laurence Courtois et diffusée sur France-Culture, que je vous invite à découvrir, tellement c'est immersif. 
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Tous les décors sont propices pour mettre en scène une intrigue en lien avec la littérature noire, mais il faut bien convenir que le milieu urbain à longtemps servi de cadre idéal aux romans noirs et aux récits policiers. Parmi les villes emblématiques du mauvais genre, il faut citer New-York qui a inspiré une cohorte d'auteurs qui ont publié des ouvrages extraordinaires à l'instar de L'Aliéniste (Pocket 1999) de Caleb Carr, Bone (Rivages/Noir 1993) de George C. Chesbro, La Reine Des Pommes (Folio policier 1999) de Chester Himes, Nécropolis (Livre de poche 1979) d'Herbert Lieberman, Z'yeux-bleus (Folio policier 2002) de Jerome Charyn et Gravesend (Rivages/Noir 2016) de William Boyle pour n'en citer que quelques uns. On ne s'étonnera donc pas que les éditions Rivages/Noir lancent une nouvelle collection New York made in France qu'inaugure Jake Lamar avec Viper's Dream. Natif du Bronx et vivant à Paris depuis 1993, Jake Lamar est un romancier et journaliste afro-américain qui a travaillé notamment pour le Time Magazine avant de se lancer dans l'écriture en obtenant une certaine renommée avec Nous Avions Un Rêve (Rivages/Noir 2006), couronné du Grand prix du roman noir étranger de Cognac en 2006. Il est également l'auteur de Brother In Exile, une pièce radiophonique, réalisée par France Culture, évoquant le parcours des auteurs américains Richard Wright, James Baldwin et Chester Himes qui ont vécu, tout comme lui, à Paris.

New-York, 1961, au Cathouse, appartement de la baronne Pannonica de Koeningswarters, surnommée Nica, Clyde Viper Morton se remémore son passé. En quittant l'Alabama pour débarquer dans un club de Harlem afin de passer une audition, le jeune Clyde Morton avait la certitude de parvenir à ses fins en devenant un jazzman renommé qui ne manquerait pas de conquérir le public. Mais ses rêves de conquête s'arrête net lorsque l'on lui fait comprendre qu'il n'est pas doué pour la musique. Bien vite, il se découvre d'autres compétences, comme celle de distribuer cette marijuana que l'on désigne notamment sous le sobriquet de "viper" et qui se répand dans tout le milieu du jazz. Clyde Viper Morton devient ainsi le pourvoyeur de tous les grands noms du jazz en se faisant une réputation de gangster impitoyable qui ne supporte pas l'arrivée de cette poudre blanche tuant bon nombre de ses amis musiciens. Et un gangster qui a des principes peut devenir très dangereux. Trahisons et règlements de compte, l'héroïne n'en finit pas de tuer. Clyde Viper Morton en sait quelque chose.

Etrange parcours que ce roman qui a tout d'abord servi de base de travail pour une pièce radiophonique en huit épisodes diffusés sur France Culture en 2019 mais qui ne sont malheureusement plus disponibles à l'écoute. Vous trouverez tout de même le premier épisode ici, sur le site de l'auteur, afin de vous immerger dans l'ambiance particulière d'une ville de New-York imprégnée de jazz, durant la période située entre les années trente et soixante. Viper's Dream s'articule donc autour du personnage central de Clyde Viper Morton qui, en attendant que la police ne l'interpelle, trouve refuge dans l'appartement de la baronne Nica qui lui demande de rédiger les trois voeux qu'il souhaiterait voir se réaliser. C'est par le prisme de cette démarche géniale que Jake Lamar rédige ainsi le parcours fictif de ce gangster côtoyant toute une galerie de protagonistes réels à l'instar de Miles Davis, de Thelonius Monk, de Dizzy Gillespie et de cette fameuse baronne Nica considérée à juste titre comme une grande mécène du milieu du jazz. Véritable ode à la musique, Viper's Dream nous donne également l'occasion de découvrir le quartier de Harlem et plus particulièrement Lennox avenue par le biais des activités illicites de Clyde Viper Morton et de leurs évolutions respectives durant les trente décennies qui défilent à toute allure à l'image d'un morceau tonitruant de bebop. Avec une écriture efficace, très imagée, faite de sensations et bien évidemment imprégnée de musique, Jake Lamar nous invite également à découvrir cette 52ème rue, surnommée la Swing Street en raison des nombreux club de jazz qu'elle comptait. Typique du roman noir classique on perçoit ces rues mouillées, scintillantes sous l'éclat des néons tandis que les affaires sordides se règlent dans les arrière-salles de ces clubs où transitent tous les trafics. Mais avec Jake Lamar, il faut compter également sur tout ce qui a trait à la discrimination qui sévissait également au sein de cette ville et qu'il dépeint avec beaucoup de subtilité.

Véritable hommage au monde du jazz, Viper's Dream inaugure ainsi de manière spectaculaire cette nouvelle collection Rivages/Noir consacrée à cette ville emblématique de New-York que l'on ne finit jamais de découvrir.

Jake Lamar : Viper's Dream. Editions Rivages/Noir 2021. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Catherine Richard-Mas.

A lire en écoutant : Viper's Dream de Django Reinhardt. Album : Django Reinhardt (Mono Version). 1954 - BNF Collection 2014.
Lien : https://monromannoiretbiense..
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Bienvenue en 1961 à Cathouse, la maison de la baronne Pannonica de Koenigswater. Nous sommes en face de Manhattan et c'est dans cette grande maison pleine de chats que cette mécène accueille tous les jazzmen les plus brillants de leur génération.
Mais qui dit jazzmen dit marijuana, Mary Warner, herbe, cannabis, weed, dame verte, ganja ... bref vous m'avez comprise, cette drogue devait bien être fournie, en de grandes quantités, à tous ces musiciens!
C'est le rôle de Clyde "Viper" Morton, celui-là même qui au début du roman réfléchit à la question fétiche de la baronne : "quels sont tes trois voeux les plus chers?"
Clyde va donc remonter dans ses souvenirs, depuis son arrivée en 1936 à New York avec l'espoir de devenir un grand trompettiste, jusqu'à ce soir de 1961 où il a mis fin pour la troisième fois à la vie d'une personne.
Si cette question permet de structurer le roman, elle ne le limite nullement et c'est avec finesse que l'auteur va nous permettre de découvrir l'histoire d'Harlem sur 25 ans, de plonger avec délice dans le monde du jazz, de rencontrer des personnages attachants, mais aussi de comprendre pourquoi Clyde est si touché par ce dernier meurtre.
Une excellente lecture!
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Lu dans le cadre du Prix des lectrices Elle- sélection octobre 21.
Ambiance : Harlem, bar des années 40 empli de fumée de la Wood loco mexicaine, orchestre jazzy à ne plus s'entendre parler, verres d'alcool qui s'entrechoquent à gogo, gangsters plus ou moins dangereux, plus ou moins sympathiques, rires et règlements de comptes. C'est le gangsta's paradise avant l'heure. Vous y êtes, ne bougez plus, profitez. Vous allez boire un verre avec Miles Davis, croiser Duke Ellington, rencontrer Thelonious Monk et bien d'autres, même la bienfaitrice de cette musique du diable : la baronne de Koenigswarter, alias baronne de Rotschild.
Et au milieu de tout ce bazar, Viper, le superbe Viper, qui pendant 20 ans va trafiquer, gagner, perdre, aimer et tuer sur ces rythmes endiablés, du jazz au rock n'roll en passant par le bebop. Mais qui a-t-il tué ? Et pourquoi ? Les couplets racontent une histoire addictive, sur fond de shoots, de poudre, d'herbes, de musique noire et de flics véreux, rythmée par des allers retours dans le passé, et le refrain viendra vous entêter comme il le fait pour Viper. Son refrain à lui s'appelle Yolanda, la douce, ténébreuse, fascinante, irrésistible et envoutante Yolanda.
Roman noir sur l'histoire du jazz avec en prime une discographie en fin d'ouvrage, celle qui a accompagné l'auteur pendant l'écriture.
C'est beau, c'est bon, plongez-y sans attendre, c'est une addiction.

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Un jeune afro-américain "monte" à New-York, au milieu des années trente, afin d'y embrasser une carrière de trompestite de jazz. Ses espoirs sont douchés dès la première audition mais Clyde Morton (c'est son nom) va se reconvertir en homme de main de l'un des parrains du trafic de marijuana. Son destin bascule, le pli est pris et l'engrenage infernal lui fera rapidement gravir les échelons jusqu'à devenir, à son tour, un grand Caïd. L'ascension fulgurante dans ce genre de milieu promet presque toujours une chute vertigineuse. On attend donc, au fur et à mesure que l'on s'approche de la fin du roman, ce deuxième moment de bascule. L'épilogue est plus que saisissant...

La narration est une sorte de chronique relatant l'évolution des personnages et des décors sur une période d'un quart de siècle incluant la seconde Guerre Mondiale. L'histoire est vraiment bien écrite et traduite avec brio par Catherine Richard-Mas. L'auteur réalise le fantasme de tout curieux en offrant au lecteur le rôle de "petite souris" permettant de tout observer, d'être là où il faut sans prendre le moindre risque: une sensation très enthousiasmante ! le tout est bercé au rythme de l'âge d'or des grands standards du jazz. Jake Lamar confesse d'ailleurs que cette musique fut la toile de fond sonore de son écriture. C'est, d'une certaine manière, un peu frustrant de découvrir cela après le point final car on s'imagine bien être accompagné par Louis Armstrong, Django Reinhart, Charlie Parker et tant d'autres pendant la lecture. Mais soyons honnête: je n'aurais pas trouvé un moment pour me détacher du livre afin d'installer le moindre morceau de musique.

Une très belle découverte, avec les ingrédients idoines à mon plaisir de lecture. Un grand bravo à Jake Lamar... et vivement le prochain !
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j'ai dévoré ce titre. Jake Lamar a réussit à assembler un cocktail d'ingrédients qui donnent au final une oeuvre savoureuse, presque addictive, qui se lit comme tous ces anti-héros fument leur joint de marijuana mexicaine ou californienne : avec délectation.

J'aimerais évoquer le personnage principal, d'abord, puisqu'il donne son nom au titre et dont la vie donne le rythme plutôt percutant au récit : Clyde Morton, qui du pauvre redneck d'Alabama se transforme en parfait gangster de Harlem, qui voit ses rêves de musique voler en éclat dès qu'il débarque à New-York, devient un mafieux de première, ayant monté les marches de la délinquance au rythme des morceaux de jazz qui scandent la vie d'Harlem. Clyde ou Viper, c'est selon, est entouré de types tout aussi impayables, et égaient le récit de leurs lubies. La drogue devient chez ces anti-héros banal parmi les anti-héros dealeur de drogue un art de vivre, sans remord, ni pitié, laissant toute forme de regret au pied du train qui l'a amené en ville. le pire, c'est qu'autant vendeur de drogue qu'il soit, Jake Lamar en fait un personnage somme toute pas antipathique doté d'un code de l'honneur et des valeurs qui lui sont toutes personnelles.

Car Viper de son surnom évolue dans une Amérique encore profondément ségrégationniste, ou les noirs sont relégués au fond d'Harlem, à cette époque-là troisième zone new-yorkaise, et même si ce n'est pas le fond du propos de Jake Lamar, cette séparation les laissent avec la tentation de l'argent facile et ainsi des activités illégales, dans lesquelles Viper comme ses amis ressentent la douce sensation d'exister. Lamar a su donner une atmosphère unique à la vie de Viper, faite de soul food et de morceaux de jazz, de fumettes intempestives qui finissent presque par atteindre l'odorat du lecteur.

J'ai eu l'occasion de lire quelques articles qui classaient Viper's dream parmi les polars : à mon sens, ce titre n'en a pas du tout les caractéristiques. Certes le parcours de Viper est parsemé de cadavres – en tant que dealer de drogue, on serait étonné du contraire – mais l'accent est davantage porté sur le parcours de vie de l'individu. Ces morts, accidentelles ou provoquées, sont à mon point de vue les différentes étapes qui vont forger le caractère de Viper, qui de l'adolescent timoré et naïf a fini par devenir un homme un peu amer, désenchanté, las et mélancolique. Lorsque la famille, l'amour et l'amitié ont perdu tout leur sens, le compte en banque a beau être plein, les dollars issus de la vente de la drogue ne tiennent pas vraiment chaud le soir. Car, il ne faut pas se le cacher, c'est un roman très noir, sans mauvais jeu de mots évidemment, sur la déchéance d'un jeune homme, dont la condition d'homme noir dans des états ségrégationnistes ne lui laissait pas forcément percevoir son avenir sous de grandes perspectives.

Mais le style très gouailleur de Jake Lamar, qui participe largement à la réussite et surtout à mon attrait pour ce roman, allège un peu les ténèbres de cet Harlem impitoyable, ou le système de domination perdure encore ici, ou chacun est prêt à n'importe quoi pour se faire de l'argent. L'auteur américain tisse volontiers un lien avec son lecteur en s'adressant à lui et à travers son regard presque tendre pour Viper. Ce roman ne serait pas ce qu'il est sans cette musique qui imprègne presque les lignes que nous parcourons, le jazz apparaît comme une musique de fond ininterrompue mais capiteuse et appréciable, même pour moi qui n'écoute pas spécialement de jazz. Les figures mythiques du genre, Miles, Coltrane, sont présents et attribuent à la narration une atmosphère authentique. La play-list que Lamar adjoint en toute fin de récit ne démentira pas mes impressions.


Pour une première exploration de cette rentrée littéraire, c'est une inattendue mais très agréable surprise. J'ai hâte de lire le ressenti des collègues qui ont également lu Viper's dream. C'est également la découverte d'un style qui m'a procuré un réel plaisir de lecture.
Lien : https://tempsdelectureblog.w..
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L'histoire commence comme un conte « Quels sont tes trois voeux les plus chers ? ». Nous sommes en novembre 1961, et Clyde Morton y réfléchira tout le long de l'histoire sombre qui va se déployer. C'est aussi et surtout une ambiance, très bien décrite par Jake Lamar : l'Amérique du jazz des années 1940 jusqu'à l'arrivée du Rock à la fin des années 1950. Musique, fumette, ségrégation, c'est l'Amérique de Charlie Parker, Duke Ellington, et même d'un Robert Mitchum qui apparaît à un moment.

J'ai plongé avec curiosité dans cet univers où noirs et blancs se côtoient surtout pour marquer les différences. Clyde Morton c'est Viper, la vipère, rapport au petit bruit que fait sa bouche lorsqu'il tire ses bouffées de Marie Warner, ou marijuana. Ses rêves de trompettiste de jazz seront bien vite relégués à l'arrière salle, mais reviendront en leitmotiv tout le long du livre. Il sera happé par un riche blanc, Mr O, qui en fera son homme de main et dealer.

J'aime bien le style, les petites phrases en leitmotiv « Là je parle de novembre 1961. » Jake Lamar donne le ton, il m'a embarquée dès les premières pages dans cet univers glauque et violent du trafic de stupéfiants. Cependant, Clyde Morton, malgré son sang-froid et ce qu'il est devenu, a des principes, il ne touchera ni ne dealera de l'héroïne.

Je sors enrichie de cette lecture, qui, grâce à la magie des mots et à la présence de légendes du jazz, facilite l'immersion sensorielle, et m'a permis de connaître (je l'ignorais) les destins tragiques des grands du jazz tels que Charlie Parker, Duke Ellington et d'autres. Je ne connaissais pas Jake Lamar, qui a, semble-t- il, déjà reçu plusieurs prix.
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Il y a quelques héros de roman qu'on n'oublie jamais totalement. Ce sont en général ceux qu'on voit grandir et évoluer, ceux qui vivent des choses qui nous traversent ou nous transpercent, ceux qui nous font ressentir l'émoi des premières amours, la peur, l'échec, le deuil… Ceux qui nous font vivre. Clyde Morton, dit Viper, est assurément de ceux-là. Jeune black qui se rêve musicien, Clyde plante sa fiancée pour tenter sa chance à New-York. Et si sa carrière de trompettiste s'arrête après quelques accords, il est pris sous l'aile de Mr O. et devient l'un des dealers les plus influents et les plus respectés de Harlem. Pourtant ce tableau idyllique cache une violence et une misère moins étincelantes.
Ce texte est construit sur la base de flash-backs qui doivent aider Viper à formuler trois voeux. J'ai beaucoup aimé ce texte très rythmé qui aborde efficacement une intrigue intriquée dans les milieux du jazz et de la drogue. Un très bon moment de lecture bercé par l'exceptionnelle playlist de l'auteur transmise en fin d'ouvrage. Parfaitement adaptée.
Cet auteur est une très belle découverte !
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