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EAN : 9782840490135
Seguier Editions (01/01/2003)
4.21/5   7 notes
Résumé :
« L’homme en amour » (publié en 1897) ou les effets malheureux d’une éducation religieuse fondée sur le mépris du corps, sommet de l’œuvre de l’écrivain belge formé à l’école naturaliste. L’auteur devait néanmoins s’en expliquer devant les tribunaux.
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Camille Lemonnier vit ce livre traîné devant les tribunaux en 1900 pour outrages aux bonnes moeurs. Situé à la charnière entre naturalisme et symbolisme, ce texte enflammé est un récit à la première personne d'un homme dont on ignore le nom, qui raconte d'où vient le mal qui le hante. Dès son enfance, confronté assez jeune à un désir irrépressible, il subit les brimades de son éducation religieuse et la peur du pêché. « Je n'étais alors qu'un jeune homme dépravé par l'excès de ses chastetés même ». de plus, il semble paralysé par le sexe féminin, sorte de bouche rouge d'un enfer qui le terrifie et l'attire tout à la fois. Dans son enfance, il fut subjugué par une jeune fille nommée Alise, tentatrice et esprit de la nature qui la première le prit dans ses filets et l'embrassa. Retrouvée morte, allongée dans l'eau, elle n'est pas sans rappeler le superbe tableau de John Everett Millais, Ophelia. Quelques autres femmes croiseront son chemin sensuel et initiatique qui marqueront à jamais ses fantasmes, ses terreurs, ses délires. Plus les années passent, plus l'obsession le ronge et corrompt ses sens et son esprit. Vient ensuite la rencontre la plus marquante. Face à lui dans un train (qui l'amène rejoindre son père sur son lit de mort / le sexe et la mort sont presque systématiquement associés et imbriqués et indissociables dans ce roman), une femme l'impressionne et échauffe ses sens mais semble ne pas se préoccuper de lui. Il la recroisera plus tard et à maintes reprises, jusqu'à la vraie rencontre. Elle s'appelle Aude. Dès le début elle revêt un aspect trouble et inquiétant, avec son « museau de chien », portant son veuvage et ses airs dominateurs partout où il se trouve. Leur relation perdure des années, sans jamais que l'Amour ne se manifeste, au grand désarroi de notre anti-héros qui vit avec elle « le grand frisson de la mort », une descente aux enfers du stupre et de la dépravation.
Écrit dans une langue incroyablement riche et travaillée, ce texte voue ses lecteurs à une malsaine ivresse et rappelle la beauté des tableaux de Khnopff ou Moreau, des vases de Lalique, portant ce que le décadentisme a de plus troublant et de plus fort.
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L'Homme en amour de Camille Lemonnier, auteur du Possédé, entre autres, est un grand chant de l'amour physique, naturel, presque sacré dans son essence et dénaturé par une société paradoxalement viciée par l'idée de péché. Ce qu'affirme l'auteur, c'est en effet que le christianisme a mis le ver dans la pomme : c'est lui qui a perverti le rapport au corps et au plaisir ; c'est lui qui a généré la dépravation à force de nier la beauté simple et innocente de l'être charnel.

Le narrateur est une des victimes de cet amour devenu passion destructrice, il est la proie du désir épicé d'interdits et de fantasmes divers, de la Bête, comme il l'appelle, laquelle prend les traits de la très fin-de-siècle Aude. Aude au visage de carlin, Aude au corps sublime, incarnation suprême de la créature femelle décadente imaginée par les artistes du temps, mortifère, envoûtante, Circé noire et Salomé sortie d'un tableau de Moreau (oh ! la scène superbe où elle paraît parée de gemmes et de bijoux barbares), Ève biblique et Astarté vénéneuse… Cette femme invraisemblable et mystérieuse incarne dans sa domination totale l'éternel féminin maudit, qui soumet l'homme, annihile sa volonté d'idéal et dévore son énergie vitale.

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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
En furetant, je découvris aussi, derrière un rayon, un paquet d'images. Je fus épouvanté de la beauté de péché qu'elle me révélèrent.
Aucune expérimentation depuis ne me restitua l'âcre et orageux tumulte qu'à travers un méprisable artifice me communiquèrent les grappes de torses diaboliquement noués comme le sarment d'une vigne. Je goûtai là un frénétique et puissant délire ; mes papilles vives s'éréthisèrent jusqu'à l'orgasme ; j'eus l'âme raidie comme un métal sous les marteaux. Il me parut que des mains meurtrières et délicieuses m'ouvraient l'aine. D'ardentes et somptueuses viandes, des amas lourds de mamelles gorgeaient mes faims et bouchaient mes cris. Ma vie se tendit comme en un passage d'agonie ; mes fibres grincèrent comme des câbles autour d'un cabestan. Je ne sais comment je ne mourus pas de l'impossibilité de vivre encore après ce prodige. Un jus acide et riche écumait à mes lèvres. Je subis un instant la sensation de stagner infiniment en des lacs glaciaires, de rôtir longtemps aux pointes d'un brasier ; et ensuite les ombres me saisirent.
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On ne parlait jamais des organes de la vie qu'avec réticences ; il sembla qu'il fût honteux d'être un homme ; et peut-être l'amour, pour mon père, demeura la faiblesse humiliante qu'il allait soulager dans la maison aux volets clos. Je ne connus donc l'harmonie de la vie et la beauté de mon corps qu'à travers la douleur et de les sentir malfaisants, frappés de la réprobation divine et humaine. Mais alors déjà il était trop tard pour les aimer sans la pensée du péché. Et je fus l'enfant qui, pour avoir touché à sa chair, se croit voué à la damnation.
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Un flot, après un peu de temps, la jeta devant moi : elle tournoyait au bras d'un masque déguisé d'un maillot d'athlète ; il la pressait sur sa poitrine et la soulevait de ses bras noueux. Elle passa et me jeta à travers les trous de son loup un extraordinaire regard. Deux fois l'orbe de la valse, par-dessus le mur ardent de la cohue, tourna son nocturne visage de velours de mon côté et le même regard lourd et magnétique se posa sur le mien, puis disparut dans l'immense sautèlement ridicule, comme si cette multitude dansait sur des tôles enflammées.
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J'avais le sentiment que mes globes oculaires étaient projetés hors de ma face, eux-même effroyablement dilatés, pareils à des caïeux germés. Cependant son visage demeurait froid comme si elle eût été habituée à la passion des hommes, et elle continuait à épancher sur moi la ténèbre sans remous et sans pensées de ses yeux comme un Styx. Je ne souffrais pas, je ne sentais plus le vrillement qui, près des autres femmes, m'infligeait le supplice d'un rouet aux pointes de feu pénétrant mes os ; j'étais une chose morte emportée dans un courant.
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" Ton grand-père est mort . " Je crus comprendre que c'était un débarras pour la maison . Celui-là était un homme d'un autre âge , un fragment d'humanité encore voisine des faunes avec des goûts de rapts , inoffensifs au fond . Il eût dû vivre au coin d'un bois , près d'un fleuve , traquant la femelle et le gibier . A soixante-dix ans , étant allé à l'automne dans la maison des bois , il engrossa la femme de l'un de nos paysans : cela tout le monde le savait .
Il y avait beaucoup de petits enfants autour de la maison qui avaient son visage .
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