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EAN : 9782355800269
768 pages
Buchet-Chastel (30/11/-1)
3.54/5   13 notes
Résumé :
Philipp Perlmann, éminent linguiste allemand, réunit, à l’invitation d’un sponsor, quelques spécialistes internationaux des sciences du langage pour réfléchir aux articulations du récit et de la mémoire : La mémoire existe-t-elle indépendamment du récit que nous nous en faisons ?
Cette réunion est, pour Perlmann, un calvaire. En pleine crise psychologique et existentielle après la mort accidentelle de sa femme, il doute de ses capacités intellectuelles, de s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Livre traduit de l'allemand.

Philipp Perlmann a organisé un colloque de cinq semaines en Italie, du côté de Gênes, dans un luxueux hôtel en bord de mer. A ce moment, il était prévu que Agnès, sa femme, l'accompagnerait pour faire des photos. Mais sa femme se tue dans un accident de voiture et Perlmann se retrouve seul au bord de l'Adriatique dans un cadre enchanteur où il se demande ce qu'il va bien pouvoir trouver à présenter comme sujet d'intervention. Vide, il est vide, sans aucune substance intellectuelle et même ses propres travaux, à la relecture, lui semblent ne plus lui appartenir. Il a entre les mains le tiré à part rédigé en russe d'un chercheur qui ne viendra pas. Son thème, langage et mémoire, l'interpelle, lui qui semble avoir vidé sa mémoire comme on vide celle d'un ordinateur.

Perlmann se protège des autres en changeant de chambre, dans une aile quasi désaffectée du palace, il prend ses dîners dans une trattoria médiocre où il instaure des habitudes et lit inlassablement la « Chronique » des années passées. Il entretient des relations difficiles avec ses collègues et suscite leur étonnement. On attend de lui une prestation magistrale alors qu'il peine à traduire le texte russe de son confrère et repousse le plus possible la date de son intervention. Il s'attire des regards surpris voire ironiques et des appréciations mordantes notamment de la part de l'Américain Brian Millar, cet homme jeune qui a tous les talents et un vrai charisme, bref, l'ennemi à abattre. Ce qui devrait être possible en le prenant en défaut, avec des documents émaillés de fautes, une erreur fatale dans une formule mais surtout un aplomb insensé qui fait affirmer au savant américain qu'il joue un morceau quasi inconnu de Bach, qu'il a trouvé hors les partitions enregistrées du musicien. L'occasion pour Perlmann de le moucher en démontrant combien il se trompe, combien il se vante ! Il court à Gênes pour rapporter le CD contenant ce morceau et prouver à Millar qu'il n'est qu'un fat prétentieux.

Ce qui pourrait n'être qu'une lutte puérile entre ego auto satisfaits, pour Perlmann tourne à l'aigreur, au doute, à l'analyse du moi pleine de douleur et d'incertitude. Il fait un aller-retour en avion jusqu'à Francfort, chez lui, pour vérifier que ce qu'il va dire, emprunté (plagié?) de Leskov, il l'avait plus ou moins écrit avant.
Terrifié à l'idée de « n'avoir rien à dire », il alterne café et somnifères et fume comme un pompier, ses nuits sont hantées de cauchemars, il passe des appels téléphoniques nocturnes qui inquiètent sa fille au point de la faire venir en stop en Italie !
Dès lors, sa vie s'organise selon un timing implacable, les jours de répit pour écrire sa contribution fondent comme neige au soleil. Il recourt à toutes les stratégies d'évitement possible, mensonge, fuite vers d'autres villes (il laisse en plan le groupe qu'il a lui-même réuni!). A chaque nouvelle possibilité qui jaillit, vient s'opposer un menu événement pour l'annuler, un enfant qui hurle en voyant son ballon partir dans l'eau, un vieillard qui le heurte, une vieille édentée tenant un chat hideux à la fenêtre d'en face.
Il essaie de justifier sa tentative de vol intellectuel, l'argumente en trois points : il est en état de légitime défense face à l'exigence de ses pairs, toujours avides d'idées nouvelles, la thèse de Leskov, c'est en vérité la sienne, il n'a juste pas eu le temps de l'écrire, Leskov l'a simplement devancé. du reste, il a fait bien plus que traduire, il a explicité le travail de Leskov. Et enfin, les textes traduits, volés, annotés, seront détruits sous peu, perdus par les chercheurs et avec eux, l'imposture. Ainsi va la pensée, quand la mauvaise foi s'en mêle...S'emmêle ?

Son angoisse devant le vide sidéral de sa pensée et son incapacité à « rendre » un texte dans les temps le pousse à des réactions non maîtrisées : il s'enfuit en Allemagne, il explose devant des collègues médusés, il s'abrutit de travail nocturne, évite ses collègues les moins hostiles. A l'annonce de l'arrivée de Leskov, le voilà au bord du gouffre et toutes les solutions sont envisagées : suicide, meurtre, ou les deux à la fois !


Nous sommes, lecteurs, les témoins attentifs et navrés de cette dégringolade et craignons le pire pour cet homme intelligent, cultivé, brillant qui a perdu toute confiance en lui. Avec lui, nous sommes photosensibles, notons avec bonheur ou agacement les lumières du couloir, celles du bar, celles du ciel, nous enregistrons l'absence de couleurs exotiques, sanguine, bleu outremer, rouge anglais, magenta : nous voyons, comme lui, par les yeux, d'Agnès, la photographe en noir et blanc qui l'a quitté. La lumière est présente aussi dans tous ces regards qui pèsent sur Perlmann comme des juges, comme des menaces, regards timides et doux d'Evelyn, ironiques de Millar, suspicieux d'autres collègues, insistants des enfants de l'autobus qui le croise, affectueux et inquiets de sa fille Kristen. Tout converge vers lui et c'est une souffrance indicible.

Le colloque qui réunit les chercheurs est consacré à la linguistique cognitive et s'y retrouvent une spécialiste australienne du langage animal, des cliniciens, des linguistes généralistes. Une part importante du livre aborde la notion de traduction et le jonglage de Perlmann entre l'allemand, sa langue maternelle, l'anglais, langue du colloque, l'italien, langue du lieu d'accueil et le russe, langue du texte traduit et plus qu' « emprunté » par Perlmann. L'obsession linguistique sous-tend le texte de Mercier, lui-même spécialiste de cette science.

Le livre pose des questions intéressantes sur le rapport entre le souvenir et le langage, s'approprier le passé par le récit qu'on en fait, se réinventer des souvenirs juste par le choix des mots employés pour le restituer.
« Le souvenir est en quelque sorte une invention ». « On peut s'approprier le passé en le racontant. »

de la même façon, notre souvenir est altéré par les mots employés et le ton qui les accompagne, a fortiori si c'est dans le cadre d'un rapport affectif fort, ici, c'est la relation père-fils qui est en jeu. le père répète à l'envi à son fils que la « ville de Mestre est laide » et que « la plaine du Pô est morne ». Perlmann, à plus de cinquante ans, règle son fait à son père en faisant exprès le voyage qui démontrera le contraire.

Les mots de son père sont ineffaçables et imprégneront tous ses actes : « Que veux-tu devenir ? Il faut devenir quelque chose. » « Il faut devenir quelqu'un sans quoi on n'est rien. »
Force de frappe des mots..Lui qui aurait voulu être pianiste, aujourd'hui, il aimerait être interprète : ne plus créer, inventer, mais interpréter, dans les deux cas...
Les mots le hantent, tels ceux de son professeur : « L'honnêteté finit toujours par être récompensée, n'est-ce pas Perlmann ? ». Imaginant la scène du meurtre, il la réécrit d'avance, pour la minimiser en construisant de toutes pièces un souvenir réinterprété. Pouvoir des mots sur la mémoire, sur l'émotion.

A contrario, définir le présent comme « quelque chose de fugace par essence, (qui était) maintenu de manière artificielle par la description verbale.[...] le véritable présent, avait-il noté, venait de notre aptitude à nous en remettre sans réserve à la fugacité du vécu. »
P.255, il est question là encore d'un rapport affectif fort, cette fois avec la langue maternelle. Qui de nous n'a jamais été insulté dans une langue étrangère et fait ainsi l'expérience que la même scène nous aurait infiniment plus affecté si elle avait eu lieu dans notre propre langue ? de la même façon, Perlmann relit des articles rédigés par lui en une autre langue que l'allemand et éprouve de la surprise, voire un refus de paternité, devant ce texte. La relation langage-affect est particulièrement forte.

Petit monde des chercheurs où la règle est « publish or perish », où il faut afficher toujours plus de publications, plus d'étudiants-thésards, plus de fonctions officielles ou honorifiques, plus de présence dans les médias si on ne veut pas passer pour un « bon » chercheur, sans plus. Ce côté salonnard, pédant, est exaspérant. Les petites luttes intestines aussi. Mais réduire les métiers de la recherche à de telles mesquineries serait injuste. Il y a aussi de la passion, de l'entraide, des heures et des heures de travail, des échanges nourris, contradictoires et bienveillants qui font avancer la science, le tout sans espoir d'enrichissement quand il est question de sciences humaines comme ici.

Ce livre est d'une richesse inouïe, on pourrait l'aborder au travers de diverses grilles de lecture et y trouver à chaque fois de nouvelles pistes de réflexion. S'il a pu sembler ardu à certains, c'est peut-être que l'auteur a eu besoin de longs passages pour construire la psychologie de Perlmann, on assiste à un travail méthodique qui engendre et nourrit une réflexion sur la recherche, la mémoire, la notion espace-temps, l'importance des émotions et ce qu'elles engendrent. Pas forcément facile mais excellent ! Une traduction par ailleurs qui « coule » si bien qu'elle doit être de qualité !





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A l'initiative d'une firme italienne, Philipp Perlmann, linguiste allemand de réputation mondiale, réunit un groupe de confrères pour une série de conférences sur le rapport entre le langage et la mémoire. le cadre est idyllique : la baie de Gênes, un hôtel de luxe, des températures clémentes. Mais Perlmann va mal. Déstabilisé par le décès accidentel de son épouse, en proie à une crise existentielle, il peine à s'intéresser à son travail et ne réussit plus à écrire. Pourtant, il va lui falloir présenter le fruit de ses réflexions devant ses collègues. le temps passe, l'échéance approche et Perlmann sombre dans l'inertie et la dépression. Au lieu de s'atteler à la tache, il passe ses journées dans une trattoria à lire une chronique du siècle ou dans sa chambre à traduire le texte d'un confrère russe, bloqué à Saint-Petersbourg sans visa. Il voudrait fuir, ou même se tuer, tout plutôt que d'avouer aux autres que l'éminent Philipp Perlmann est incapable d'écrire. La solution viendra du russe absent : faire passer le texte de Leskov pour le sien, commettre un plagiat dont nul ne saura rien et qui lui permettra de sauver la face.


Bienvenue dans la baie de Gênes, petit paradis terrestre où tout n'est que luxe, calme et volupté. C'est pourtant dans ce lieu propice à la réflexion que Philipp Perlmann va connaitre une terrible descente aux enfers. Tandis que ses confrères s'épanouissent, échangent et jubilent à l'idée de se titiller au sujet de leurs travaux, lui erre comme une âme en peine et élabore de multiples stratégies pour ne pas être pris en défaut par ces spécialistes toujours prêts à se gausser d'une théorie mal étayée. Enferré dans sa traduction russe, langue qu'il ne maîtrise pas suffisamment à son goût, ses réflexions le ramènent vers son passé, récent avec la mort de sa femme, et plus lointain avec sa carrière de pianiste avortée. Outre la description plutôt cynique de ces universitaires imbus d'eux-mêmes, c'est surtout la chute de Perlmann qui a perdu la foi, la passion qui donne toute la puissance à ce récit parfois un peu longuet. Mais avec lui, on sent toute l'angoisse de cet homme désemparé et peu sûr de lui. D'une banale panne d'inspiration, il fait une montagne insurmontable et frôle la folie pour s'en sortir. Par moment, il peut paraître ridicule mais l'empathie se crée peu à peu et la tension monte à mesure que lui s'enfonce dans un gouffre sans fond.
Un livre assez difficile, surtout quand l'auteur s'appesantit sur les sciences du langage et les subtilités du travail de traducteur, mais qui, une fois qu'on est pris dans l'engrenage, s'avère passionnant et très prenant. Une pointe d'humour n'aurait pas nui dans cette ambiance torturée et paranoïaque mais on ne peut pas tout avoir.
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En épigraphe, cette phrase : « les autres sont vraiment autres. Autres ». A méditer, en cette période de bac philo

« Philipp Perlmann ne savait pas comment vivre le présent. Toutefois ce matin, c'était pire qu'à l'ordinaire. » Ainsi débute ce gros pavé.
Le « héros » de ce livre, Philipp Perlmann, linguiste de renommée mondiale est l'organisateur d'une rencontre entre confrères éminents dans un grand hôtel de la baie de Naples. Veuf depuis peu ; Agnès, sa présence, son regard, ses piques lui manquent cruellement. Il ne se sent bien nulle part et, surtout, il est incapable de s'en ouvrir à quelqu'un, même à sa propre fille.

Bien que reconnu mondialement, Perlmann est un homme peu sûr de lui, toujours sur la défense, toujours cette impression de devoir se justifier, toujours à se comparer négativement aux autres « Voilà ce qu'au fond je n'avais jamais eu : la curiosité intellectuelle ».
Il doit présenter son travail, mais…. de travail il n'en a pas. Impossible d'écrire un seul mot : Il avait « le sentiment très précis qu'il n'avait rien à dire » Toute la première partie du livre, tourne autour de ces thèmes et nous suivons la lente, très lente descente en enfer de Perlmann. Son silence ne lui autorise même pas l'écoute de ses confrères, tant il est pris dans ce maelström malsain. Tout son monde s'écroule lorsqu'il comprend qu'il a commis le délit de plagiat et qu'il ne peut plus revenir en arrière. Sa solitude, la spirale infernale vers le bas deviennent de plus en pus dures et lourdes à porter. C'est son chemin de croix. Quelles descriptions, quelles forces dans le détail. Oui, c'est long, oui, ce fut dur pour moi d'entrer dans la vie et le cerveau de Perlmannn. Une fois cela franchi, quel plaisir de lecture. Quelle écriture, à la fois simple et forte. Les relations entre tous ces universitaires, leurs jalousies, la paranoïa envahissante de Perlmann… Quelle force dans le dessin, dans la description au scalpel et tout ça avec une lenteur digne des pires tortures hitchcockiennes.
Dans la seconde partie, le rythme s'accélère, le coeur s'emballe. Perlmann envisage sérieusement de tuer, sous couvert d'un accident automobile, l'auteur de l'étude qu'il plagie !
Tout est minutieusement étudié, détaillé jusqu'au moindre détail dans sa tête. Une partie époustouflante dans le crescendo de sa paranoïa. Un rythme d'enfer, des trouvailles risibles, bref, du thriller psychologique.

Perlmannn ferait-il de la procrastination ? Non, je ne pense pas vraiment, c'est surtout quelqu'un qui est au bout du rouleau, qui tourne en rond dans son domaine, qui n'a plus d'essence plus envie de continuer et qui ne sait comme le dire, comment « l'avouer » aux autres.

Mais ce n'est pas que cela. L'étude de Leskov (donc celle de Perlmannn) porte sur « l'idée que l'on pouvait s'approprier son passé au moyen des souvenirs que l'on raconte. » ; Une théorie fort intéressante. En pleine lecture de ce bouquin j'ai écouté l'émission de François Busnel, sur France Inter, qui recevait Boris Cyrulnik. Celui-ci parlant de son livre raconta un souvenir qu'il avait en tête et qui s'est avéré erroné (la dame qui l'a sauvé était, pour lui, jolie et blonde. Or elle était jolie mais brune) modifié, pour lui, par les réclames américaines. Bien dans le ton.

La grande force de ce livre c'est que l'on ne peut le lâcher, même fermé, il vous hante, vous force à réfléchir. Pourtant nous connûmes un début de liaison chaotique tant je voulais le quitter, mais Perlmann, avec ses réflexions philosophiques m'y autorisât pas. La torture psychologique que s'inflige Perlmann l'amène, petit à petit, à se re-trouver.

Voilà, j'ai lâché le mot et vous vous dites, ce n'est pas pour moi. Non, il faut être patient et laisser Perlmann entrer en vous.

Pascal Mercier connait fort bien le milieu universitaire de haut rang et le décrit méthodiquement avec beaucoup d'ironie. Il demande à ses lecteurs un effort, mais le plaisir naît souvent de la difficulté et ce livre en vaut vraiment la peine. Chaque page, outre la lutte interne de Perlmannn, offre un raisonnement philosophique très facile à appréhender.


Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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Philip Perlmann est un éminent linguiste allemand. Il vient de perdre brutalement sa femme d'un accident et peine à s'en remettre. Son travail de recherche en pâtit, il souffre de manque de concentration et petit à petit se laisse gagner par une sorte de dépression larvée et a un comportement un peu bizarre, proche de la folie, par moment.
C'est dans cet état d'esprit qu'il doit participer à un séminaire où il a réuni d'autres brillants linguistes étrangers, ils se retrouvent à 6 dans un hôtel de Gênes pour 6 semaines de partage intellectuel, où chacun d'entre eux doit présenter un texte. Or Perlmann sèche ! Il n'arrive pas à se concentrer, doute de lui-même, de ses travaux. La seule chose qui le motive est la traduction du texte russe d'un autre chercheur appelé Lesbov. Il va avancer dans ce texte et peut-être se l'approprier s'il n'arrive pas lui-même à produire de texte. Au moment où il est tenté par le plagiat, l'auteur russe réussit à se libérer et va venir assister au séminaire ! Perlmann a peur qu'on découvre son acte et envisage même de tuer Lesbov.
Un roman assez exigeant car beaucoup de réflexions sur la linguistique, le langage, la mémoire. J'ai eu du mal à tout comprendre, certains passages sont difficiles.
Au final, pas mal, mais j'étais contente d'en venir à bout et vais passer à une lecture plus légère et aisée !
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«Il ne s'était rien passé.»C'est par cette phrase que se conclut ce roman de plus de sept cents pages... Rien vraiment?En effet, aucun des participants au colloque scientifique qui est le cadre du roman n'a peut-être remarqué le véritable calvaire intérieur vécu par Philipp Pearlmann, éminent linguiste allemand et organisateur de cette longue conférence de cinq semaines. Fragilisé par la mort de sa femme, il arrive dans ce palace italien de la côte ligure, dans la lumière automnale du sud, et très vite se rend compte qu'il lui est impossible d'écrire quoi que ce soit. Malgré les litres de cafés ingurgités, les centaines de cigarettes, les médicaments, rien ne lui vient. Rien.Pour ne pas perdre la face, Pearlmann envisage de s'approprier le texte d'un collègue russe qui n'a pas obtenu son visa. Mais à la dernière minute, le Russe débarque ... Que faire? Se suicider? Disparaître dans la mer ? Assassiner l'intrus?Pascal Mercier, dont c'est ici le premier roman, paru en 1995 mais traduit seulement aujourd'hui en français, met en place un véritable suspense psychologique. Même si le récit est le fait d'un narrateur extérieur omniscient, le lecteur devient Philipp Pearlmann. Ses angoisses sont les siennes. Ses migraines aussi.Au-delà de cette trame narrative, le roman soulève de nombreuses questions. Comme David Lodge, mais sans sa dérision, Pascal Mercier, lui-même professeur d'université, démonte les mécanismes de ce «petit monde». Les rivalités, l'obligation de «publish or perish», la nécessité de se composer un personnage.Pascal Mercier parle aussi longuement du sentiment d'imposture, du plagiat. le thème même du colloque sur les liens entre langage et mémoire est également passionnant. Comment se forge-t-on ses souvenirs? En les racontant neles invente-t-on pas?Comme dans «Train de nuit pour Lisbonne», Pascal Mercier met en scène un intellectuel en quête de son identité, quitte à tout envoyer promener. C'est un roman extraordinaire sur le ressassement et la vanité
de toutes choses. Un roman long et difficile peut-être, mais qui ouvre tant et tant de perspectives qu'il vaut la peine de se laisser entraîner.

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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Auch in fremden sprachen konnte man sich geborgen fühlen wie im Nebel. Kein Angriff, der in einer anderen Sprache vorgetragen wurde, könnte ihn jemals so treffen, könnte so ganz zu ihm durchdringen wie ein angriff in der Muttersprache. Und auch die eigenen, intimsten Sätze trafen ihn weniger, wenn sie in fremde Worte verpackt waren.
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Es war nichts geschehen.
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