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EAN : 9782365694452
160 pages
Editions Les Escales (22/08/2019)
3.12/5   90 notes
Résumé :
Dans le Paris d'aujourd'hui, Raphaëlle et Antoine s'aiment, se séparent, se retrouvent... pour mieux se séparer et s'engouffrer dans l'âge adulte. En quête de sens, ils ont du mal à trouver leurs repères.

Arpentant les rues du quartier de Château-Rouge, Lola Nicolle nous plonge dans le Paris d'aujourd'hui.
Après la fête raconte les ruptures qui font basculer dans l'âge adulte. Il y a d'abord celle – universelle – entre deux êtres, quand Raphaël... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (57) Voir plus Ajouter une critique
3,12

sur 90 notes
C'est un constat doux-amer, une sorte d'état des lieux socio-culturel d'une génération née à la fin du vingtième siècle, et qui doit bâtir son futur sur des sables mouvants, tant l'incertitude est grande sur l'avenir qui nous attend tous.

C'est aussi une observation fine du fonctionnement d'un couple, qui au delà des illusions et des promesses imprudentes, se délite lentement sur fond d'inégalité des chances. Une fois la passion apaisée, il faut peu de choses pour que le quotidien se consomme sur des rancoeurs enfouies.

Raphaëlle a la chance de trouver immédiatement du travail après l'obtention de son diplôme. Antoine reste sur le pavé. Il n'en faut pas plus pour que les stigmates du fonctionnement du couple, que l'on voudrait reléguer au passé, surgissent malgré tout : le féminisme est un combat pas encore gagné et la plume de Lola Nicolle le revendique clairement.

L'écriture est résolument moderne, convaincante, lucide, douce et énergique à la fois et très agréable à parcourir.

Malgré un a priori plutôt négatif lié au thème, j'ai finalement beaucoup apprécié ce roman très contemporain mais pas désespéré.





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Un couple voguant entre études et premier travail
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Lu dans le cadre des #68premièresfois
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Ce premier roman s'articule sur la difficulté d'un couple parisien de survivre dans les méandres de la vie quotidienne. Etudes, apprentissage d'une vie commune puis les débuts dans le monde du travail. Et ce d'autant plus complexe quand les milieux sociaux sont différents.
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L'auteure a cette justesse des mots, cette façon élégante de décrire la lente dégradation du jeune couple.
Oui après la fête, que se passe-t-il? On allume les lumières, on remballe les rêves et on entre de plein fouet dans la vie réelle.
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Des références musicales sèment le récit (du rap essentiellement) ainsi que de la poésie (que j'ai trouvé parfois décalée, comme hors du temps). Saupoudré de phrases romantiques, je n'ai pas bien compris la chronologie de cette histoire. Entre les va-et-vients et les coqs à l'âne, ma lecture s'est trouvée chaotique.
De plus, la génération Y n'étant pas la mienne, j'ai eu beaucoup de distance émotionnelle avec nos deux amants.
*
Néanmoins, je pense que ce roman mélancolique pourrait s'adapter en film car tout de même, Paris ferait un bel écrin de cette insouciance propre à l'adulescence.
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Après la fête, premier roman de Lola Nicolle nous plonge au coeur d'une génération en quête d'un sens assez illusoire au cours d'une jolie et triste chronique mélancolique d'une jeunesse, cette fameuse génération Y, dont les rêves s'effondrent une fois confrontée à la réalité.

Antoine et Raphaëlle, jeune couple qui s'est rencontré lors de leur étude de lettres (dans une terne faculté de banlieue parisienne qui n'est jamais nommée mais que ceux comme moi qui y sont allés reconnaîtront facilement ), voit l'édifice conjugal se disloquer lorsqu'ils sont soudain confrontés à la dure réalité du marché du travail .

Cet élégant roman d'apprentissage qui ausculte la fin d'une histoire d'amour décrit puissamment le basculement du statut d'étudiant, toujours un peu dans un cocon à la dureté du monde actif, ce basculement dans le réel si difficile d'autant plus quand les différences de classe sociale s'en mêlent.

Sans que cela soit démonstratif, le texte de Lola Nicolle montre comment une différence de classe sociale achèvera de rendre leur relation pérenne: la jeune fille d'origine plus aisée aura forcément plus de facilité pour s'en sortir que le garçon, qui vient des cités et n'a pas forcément les bonnes relations et le bon bacgkround.

Lola Nicolle, qui travaille désormais dans le milieu de l'édition (chez Delcourt), raconte des situations dans lesquelles tout un chacun pourrait se reconnaître, ses premières expériences professionnelles, ses soirées étudiantes, ses vacances en amoureux, mais le fait avec une plume sensible et parfois poétique, avec des jolis allers retours entre le passé et le présent.

"Après la fête", c'est un peu "la fête est finie" d'Oreslan, le même désenchantement, la même confrontation aussi douloureuse que nécessaire à la dure réalité de la vie .

Après le temps des fêtes , vient celui des défaites, c'est ce que ce très joli fragment de vie et cette douce amère peinture du passage à l'âge adulte est omniprésente nous raconte avec beaucoup de talent.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Raphaëlle et Antoine, génération Y
Pour ses débuts en littérature, Lola Nicolle nous propose un portrait sensible et fouillé de la génération Y. En imaginant la relation entre Raphaëlle et Antoine, elle fait le constat de la difficulté à s'inventer un avenir.

Après deux recueils de poésie, Nous oiseaux de passage (Blancs Volants éditions, 2017) et Les Passagers du RER, (Les Arènes, 2019) ainsi qu'un album de lectures musicales, Les Liseuses (Sony Music), la boulimique Lola Nicolle – qui est en charge de la littérature française aux Éditions Delcourt – nous offre à 27 ans son premier roman dans lequel on sent le vécu.
C'est d'abord l'histoire d'une rencontre sur les bancs de la fac. Non, c'est d'abord la fin d'une histoire d'amour, comme le titre le suggère: «Pour toujours je te quittai. Tu as refermé la porte de l'appartement le 14 novembre très tôt dans la nuit. Et longtemps, j'ai entendu tes pas résonner dans les escaliers.»
En courts chapitres, la narratrice revient après cet épisode de rupture sur leur rencontre, sur la construction de leur belle histoire qui, on l'aura compris, finira mal, comme c'est le cas en général.
Ce qui rend le livre intéressant, ce sont les différentes strates qui le constituent et qui se complètent harmonieusement pour nous donner une image de cette génération Y si difficile à appréhender. La première strate est géographique, nous donnant à voir les lieux dans lesquels se meuvent Raphaëlle et Antoine. le quartier de Château-Rouge dans le XVIIIe arrondissement de Paris, où vivent les amoureux, devient par exemple un élément essentiel de leur histoire et dont il deviendra très difficile de s'émanciper une fois la rupture consommée: «Si je ne jurais que par lui, alors peut-être que t'y installer te rapprocherait de moi. Ou plus encore, que le quartier me remplacerait. À moins que, craignant l'inconnu, tu choisisses de rester dans cet univers confortable que nous avions dompté, te le réapproprier. Mais plus vraisemblablement, tu aimais simplement y habiter. Tu cherchas longtemps un lieu idéal, préférant le canapé d'un ami à un endroit que tu n'aimerais pas, qui ne serait pas ici. Et tu finis par trouver.» Mais la géographie est aussi celle des escapades qui marquent leurs attaches familiales et leurs rêves, de Marseille à Enghien-les-Bains, et de la maison de campagne en Touraine à la ferme du Lubéron.
La seconde strate est celle de l'orientation, des aspirations professionnelles qui vont très vite se heurter à une dure réalité, à la précarité. «Nous étions en quête d'un absolu. Dans la recherche d'un sens que l'entreprise ne semblait guère pouvoir nous offrir. Nous l'avions remarqué: cette poursuite s'annonçait tout à fait illusoire. Alors, nous avions commencé à nous faire une raison. Et se faisant, on s'était demandé qui avait bien pu nous mettre cette idée en tête – que le travail avait un lien quelconque avec le bonheur. Qu'il s'obtiendrait contre une rémunération?»
Dans ce roman de formation, sur le passage dans l'âge adulte, la troisième strate, celle de la psychologie, de l'intime, est sans doute la plus passionnante. Ce qu'Annie Ernaux appelle joliment la «sociologie poétique» nous offre quelques surprises. On y découvre notamment que la lutte des classes ou, pour le moins, la comparaison entre les classes et leur héritage reste un marqueur puissant, tout comme la recherche de valeurs, de rites de passage forts. le mariage pouvant être ce «quelque chose qui serait assez solide pour nous définir». Aspiration vaine, là aussi, entre désillusion et espoir: «Et moi, je t'avais possédé jusqu'à t'acheter. Et toi, piégé, tu n'avais souhaité alors qu'une Chose, m'acheter en retour. Et alors que j'étais là, sur les épaules du dragon endormi de la ville, il m'apparut que la solution était là, juste sous nos yeux.
Il nous fallait réinventer la fête.»

Lien : https://collectiondelivres.w..
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Il y des romans (et il s'agit ici d'un premier roman) dont l'écriture vous transporte et ce fut le cas pour Après la fête de Lola Nicole.

Peut-être parce que je suis parisienne de naissance, peut-être parce que j'ai parcouru et retrouvé les rues, quartiers et ambiances de la capitale, peut-être parce que, même s'il est très marqué par la génération actuelle des trentenaires, ceux dont les études parfois longues ne débouchent pas forcément sur un emploi, par la course à l'indépendance mais sans les moyens pour y faire face, par le désir de réussite, par les clivages sociétaux je m'y suis reconnue, oui peut-être pour toutes ces raisons j'ai aimé ce roman.

Mais le premier argument c'est la découverte d'une écriture, fine, belle, douce et poétique avec laquelle Lola Nicolle nous raconte la fin d'une histoire mais aussi la fin des illusions. C'est un état des lieux ; après l'amour, les études, les fêtes, les espoirs vient le temps du regard en arrière, le temps du bilan. Raphaëlle, issue de la petite bourgeoisie parisienne, s'adresse à celui qu'elle vient de quitter, Antoine, pour la deuxième fois. Elle se plonge dans ses souvenirs, lui confie sa vision de leur histoire commune et nous invite à entrer dans la confidence.

Du temps de leur amour ils ne voyaient pas les barrières qui risquaient de les séparer, de les différencier : lui vient de l'autre côté du périphérique et n'a qu'un seul but : franchir tous les obstacles qui le mèneront à la reconnaissance de son travail et devenir Parisien, comme un graal à atteindre, lui qui ne peut compter que sur lui. Elle, elle est dans une suite logique de réussites, un parcours idéal sans obstacles et même s'ils surgissent elle a sa famille, sa roue de secours. Pour elle la vie est une fête pour lui la vie est un combat…

Une banale histoire d'amour qui finit mal comme beaucoup d'histoire d'amour allez-vous me dire ? Oui et non car il s'agit ici d'évoquer d'abord Paris, ville de tous les espoirs, Paris et ses codes, ses quartiers, la vie que l'on y mène quand on est jeune, que l'on croit en l'avenir, que tout vous est permis parce que vous n'avez pas encore été confronté à la réalité.

"Mais j'avais la pensée verte. le temps n'a de cesse de polir les idéaux, de les dissoudre placidement dans son cours, de couper discrètement l'herbe sous le pied de la jeunesse. Et la réalité de reprendre sa marche. (p110)"

C'est ce qui va arriver à Antoine, une fois le diplôme en poche, pour lui rien n'est simple alors que pour Raphaëlle toutes les portes s'ouvrent sans difficulté, parce que pour elle la vie coule comme un long fleuve tranquille jusqu'au jour où elle ne reconnaît plus l'Antoine qu'elle aime, parce que non seulement il sombre mais surtout il a face à lui l'image d'une réussite qu'il peine à atteindre.

C'est dans l'adversité que l'on se révèle et c'est ce que montre excellemment bien Lola Nicolle dans ce court roman, après l'euphorie vient le temps du quotidien, des frustrations voire des jalousies, où ce que l'on a tant aimé devient insupportable.

Tout en pudeur et retenue, l'auteure dissèque le couple, les gestes du quotidien, les mille et une petites choses qui font que l'on s'aime et qu'un jour on se quitte. Ni tout à fait un autre mais plus tout à fait le même. La distance s'installe : rien à se reprocher, c'est simplement les écueils du passage à l'âge des responsabilités qui vous transforment.

"Toujours, on se dit qu'ils auraient pu durer, ces instants-là, appartenir à la majorité. Qu'ils n'éclatent plus au hasard, qu'ils soient domestiqués, prêts à être convoqués lorsque je m'ombrais et que tu trébuchais. (p130)"

Une prose poétique qui surfe sur les textes d'une bande originale des groupes NTM, IAM mais aussi Juliette Gréco ou Baudelaire. Un petit bémol : l'utilisation de métaphores assez nombreuses, parfois inutiles et qui alourdissent un peu la narration.

J'ai flâné dans les rues de Paris, respirer ses odeurs, écouter ses bruits, retrouver tout ce qui fait son charme mais aussi sa rudesse car c'est une ville belle, cosmopolite mais qui peut également vous broyer.

Oui les lendemains de fête sont parfois difficiles, viennent parfois ensuite la gueule de bois, le désenchantement, le retour aux réalités. Que faisons-nous de nos rêves, de nos espoirs, de nos bonheurs quand la vie vous impose sa loi et que l'amour fait ses valises ?

Car si l'avenir lointain ne semblait rien vouloir promettre, le refuge du passé nous accueillait les bras ouverts, nous rappelant à lui comme pour nous consoler d'une angoisse qui pesait discrètement sur notre conscience. Et si tout s'effondrait ? (p46)

Merci à Lola Nicolle pour avoir avec autant de finesse et de délicatesse parlé d'un amour qui n'est plus, sans violence, sans haine, simplement une flamme qui s'éteint.

Auteure à suivre……

"Jamais tu n'arrêtais de lire. Tu achetais les livres par cinq, dix, de poche et d'occasion, chez les revendeurs qui bordaient le boulevard. Lorsque nous croisions une librairie, c'était plus fort que toi ; tu entrais, embrassais du regard l'ensemble des rayonnages. Tu aurais aimé avoir tout lu. Tu imaginais tout ce que tu avais à rattraper, les textes merveilleux manqués. Ceux dont tu ignorais l'auteur, le titre, l'existence. (p57)"
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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critiques presse (1)
LeFigaro
05 septembre 2019
Lola Nicolle saisit avec délicatesse le passage à la vie adulte. Un joli premier roman.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (48) Voir plus Ajouter une citation
Nous avions la chance – le privilège – inouïe de la liberté. Mais, comme pour l’amour, nous avions rêvé d'un travail qui nous définirait, nous rendrait heureux. Profondément heureux. Dans lequel nous aurions pu pleinement nous réaliser. Mais cela, évidemment, n’était pas advenu. Nous étions en quête d’un absolu. Dans la recherche d'un sens que l’entreprise ne semblait guère pouvoir nous offrir. Nous l’avions remarqué: cette poursuite s'annonçait tout à fait illusoire. Alors, nous avions commencé à nous faire une raison. Et se faisant, on s’était demandé qui avait bien pu nous mettre cette idée en tête – que le travail avait un lien quelconque avec le bonheur. Qu’il s’obtiendrait contre une rémunération? p. 143
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INCIPIT
Et il y a la fin de cette phrase. Ce complément manquant. Surplombée par ton corps-montagne, je te parlais. Que pouvais-je bien dire ? Quelque chose que je voulais compliqué. J’essayais de t’impressionner mais tu ne m’écoutais pas, je le voyais bien. J’ai parlé vite pour combler ma gêne, et de ta bouche, tu as mordu ma parole, coupé les mots en deux. Tu m’as embrassée.
L’histoire débute sur une phrase jamais terminée.

13 novembre. Balafre dans le calendrier.
C’est un anniversaire. Nous sommes dans un bar du dix-huitième arrondissement. Quelque chose se passe. Dans la nuit, une onde traverse Paris. Ni toi ni moi n’avons de batterie. Les autres doivent être inquiets. On hésite entre rentrer, rester là ; on ne comprend pas grand-chose. Et puis, on se décide. L’appartement n’est qu’à vingt minutes à pied. Il ne peut vraisemblablement rien nous arriver. Dans la rue, tu commences à pleurer. On marche vite. On grimpe au cinquième étage en courant, on met la clef dans la serrure, on se précipite à l’intérieur, on trouve nos chargeurs, nos téléphones, des prises, on allume l’ordinateur, on allume la radio, on allume toutes les lampes. Des dizaines de messages nous parviennent enfin. Cela fait quelques heures que nous sommes potentiellement portés disparus. Pour la première fois en France depuis longtemps, sans nouvelles d’un proche, on peut supposer sa mort. Et on attend. Dans la nuit hachée de sirènes, on attend avec cette sensation étrange de voir l’histoire devant nous se faire. De l’observer se déplier, dansante et vénéneuse. De vivre un événement qui fera date. Les balles traverseraient les décennies, nous constituant en « génération ». Et pour longtemps alors, l’anniversaire d’Axelle prendrait des allures de commémoration.
Bien vite, la douleur nationale s’était diluée dans une forme d’habitude.
Les premiers mois, les rues bruissaient de virtuels dangers, de craintes absurdes. Certains éléments de décor nous semblaient tout à coup douteux alors qu’ils avaient toujours été là. L’événement rampait dans les rues. Puis, très lentement, sans même que nous nous en rendions compte, tout était rentré dans l’ordre. Les militaires qui surveillaient l’entrée des centres commerciaux, des écoles, des églises, avaient trouvé parmi nous une place naturelle ; leur présence transformant discrètement le visage de la ville ; elle abandonna un peu de son innocence pour plus d’assurance, de confort – prit le masque d’une vieille dame et de son inquiétude. Et si chaque génération conserve un goût étrange dans la bouche – celui d’avoir, un jour, manqué quelque chose – il nous semblait, pour notre part, que notre singularité reposerait entière entre ces quelques dates sanglantes, comme des bras flous qui, désormais, nous maintiendraient debout.
Ainsi, le quotidien avait repris et nous avions continué à cultiver nos toutes petites jeunesses, foulant de long en large Paris – décor que nous avions choisi.
Mais deux ans jour pour jour après le désastre des attentats, une autre bombe explosa, sans cri ni fumée, sans que tu puisses la déjouer.
Je t’avais attendu longtemps, et comme deux ans plus tôt, ton téléphone n’avait plus de batterie. Nous devions nous retrouver mais je n’avais pas de nouvelles. Je tentais de m’occuper, de me distraire, d’oublier ce que, quelques minutes plus tard, j’allais commettre de façon irrémédiable. Comme un mafieux, je préparais mon exécution, essayant de réfléchir de façon ferme et rationnelle.
Une fois jetée, la bombe nous projeta à des milliers de kilomètres l’un de l’autre. Des blocs de sel jonchèrent le parquet. Le lit, transformé en barque. Et nous, dérivant sur l’injustice. Sur la rage de voir un point final se poser au bout de notre phrase. Sur l’avenir, gouffre sombre, dans lequel il fallait manœuvrer seuls à présent.
Pour toujours, je te quittai.
Tu as refermé la porte de l’appartement le 14 novembre très tôt dans la nuit.
Et longtemps, j’ai entendu tes pas résonner dans les escaliers.
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Jamais tu n'arrêtais de lire. Tu achetais les livres par cinq, dix, de poche et d'occasion, chez les revendeurs qui bordaient le boulevard. Lorsque nous croisions une librairie, c'était plus fort que toi ; tu entrais, embrassais du regard l'ensemble des rayonnages. Tu aurais aimé avoir tout lu. Tu imaginais tout ce que tu avais à rattraper, les textes merveilleux manqués. Ceux dont tu ignorais l'auteur, le titre, l'existence. (p57)
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Lorsque tu quittas la rue de C., lorsque nous nous séparâmes une première fois comme pour célébrer bien sombrement cette première année ensemble, lorsque l’air m’avait manqué, que les murs avaient semblé se rapprocher chaque jour davantage, ne laissant plus de place à notre bien jeune amour, tu n’eus plus qu’une obsession: retrouver un appartement dans le quartier.
Si je ne jurais que par lui, alors peut-être que t’y installer te rapprocherait de moi. Ou plus encore, que le quartier me remplacerait. À moins que, craignant l’inconnu, tu choisisses de rester dans cet univers confortable que nous avions dompté, te le réapproprier. Mais plus vraisemblablement, tu aimais simplement y habiter. Tu cherchas longtemps un lieu idéal, préférant le canapé d’un ami à un endroit que tu n'aimerais pas, qui ne serait pas ici. Et tu finis par trouver. p. 35
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Tout était devenu lumineux, fluide. Les nuits semblaient claires et débordaient de sons merveilleusement électroniques. Nous allions au club. Nous écoutions de vieilles chansons, celles de Niagara, celles de Rita Mitsouko lorsque tu entendais Marcia Baila tu te précipitais vers moi: C’est une chanson tellement triste, personne n’écoute jamais les paroles, mais ça parle d’une fille qui a un cancer. Tu le savais?
Et tu me prenais la main pour que nous dansions ensemble, comme pour conjurer le sort et éloigner le malheur de la maladie qui rôdait trop souvent autour de ta maison. La scène se répétait à chaque soirée. À mesure que le taux d’alcoolémie augmentait, la playlist se révélait de plus en plus nostalgique. Marcia Baila arrivait toujours au moment de la rupture, où, titubant, tu pouvais abandonner ces minuscules émotions dans le puit d’une nuit qui paraissait ne pas trouver sa fin.
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Vidéo de Lola Nicolle
Cette anne?e, trois romans seulement. Trois auteurs qui, chacun a? sa manie?re, se sont penche?s sur le destin de personnages aussi singuliers qu?attachants. Et qui nous font parcourir la France, de la banlieue jusqu?aux plaines, en passant par les cimes.
Notre premier coup de c?ur va a? une de?couverte ; celle de Mathieu Palain qui signe, avec Sale Gosse, son pre- mier roman. Roman urbain, politique et social, il de?peint l?incroyable lien qui se noue entre un jeune de?linquant, Wilfried, et Nina, son e?ducatrice. Puis nous retrouvons Jean-Baptiste Andrea, remarque? avec Ma reine (20 000 exemplaires vendus, traduit en 9 langues et multiprime?), en 2017. Cent millions d?anne?es et un jour nous entrai?ne dans la que?te obsessionnelle d?un pale?ontologue en fin de carrie?re. Un re?ve qui prend la forme d?un dinosaure et qui l?emme?nera au bout de sa folie. Un roman flamboyant ou? vibre la nature, la montagne, la solitude, le silence, l?effort. Mais aussi l?enfance, sombre et lumineuse. Enfin, quelle joie d?accueillir une romancie?re et poe?tesse confirme?e, Ce?cile Coulon (prix des Libraires 2017 pour Trois Saisons d?orage), qui a choisi L?Iconoclaste pour publier son sixie?me roman et poursuivre sa carrie?re. D?une e?criture puissante, elle livre Une be?te au Paradis, texte charnel, fe?minin, qui nous plonge dans l?attachement aussi passionnel que destructeur d?une grand-me?re et de sa petite-fille pour les seules choses qu?elles posse?dent : leur terre et leur ferme. Se jouer du destin, aller au bout de ses re?ves, rompre le male?fice; sous leur plume cine?matographique, jeune, cre?ative, ces sujets qui, depuis toujours, font vibrer la lit- te?rature deviennent urgents, absolument actuels. En un mot, Iconoclaste. SOPHIE DE SIVRY avec JULIA PAVLOWITCH et LOLA NICOLLE
Musique : Lou Rotzinger
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