En allant travailler à la médiathèque , j'ai eu le Bonheur de trouver ,exposé sur une table, le dernier tome du Manifeste incertain, sur
Pessoa [tome IX]… Même si il y a un certain pincement de savoir que c'est l'ultime volume de cette vaste entreprise du « Manifeste incertain… ». Comme le dit fort bien un(e) autre camarade babéliote… pour nous consoler, il nous reste un autre bonheur possible : la RELECTURE de la série !
Pajak nous éclaire sur ce « Manifeste incertain » qui l'a accaparé un certain nombre d'années
« Les destins que j'ai sollicités, je ne les ai pas choisis: ils se sont imposés à moi au hasard des lectures et des rencontres. hasard ? certes. Mais ils ont en commun d'avoir été un temps ignorés de tous. Ratés magnifiques, ils ont été vengés par la postérité.
Walter Benjamin,
Vincent van Gogh,
Emily Dickinson, Marina Tsetaieva: j'aurais pu ajouter
Franz Kafka et
Robert Walser, sans compter des poètes, et des peintres que le conformisme du marché dédaigne encore.
J'ai donc vu par les yeux des autres, par ferveur ou par curiosité. Ainsi la figure de
Walter Benjamin: son obscure dialectique m'est restée, au fond bien étrangère, mais son destin m'a durablement ému. (p. 15)”
Un très beau portrait central de
Pessoa nous accueille avec la couverture… Toujours la même admiration pour les dessins-tableaux noir et blanc de
Frédéric Pajak…qui sont un vrai régal pour le yeux…
Au parcours de « L'intranquille poète »
Pessoa, alternent des souvenirs de l'auteur, en France, en Chine, ses observations de l'actualité, de la crise sociale, sa défense du mouvement des « gilets jaunes », ses désillusions sur notre monde, notre soit-disante démocratie (bien malade), etc.
Alternent le parcours si complexe, si paradoxal de l'écrivain-poète portugais,
Pessoa et les souvenirs, récits de voyages de Pajak (dont l'Algérie, le désert du Hoggar, où il part à 20 ans, alors qu'il a des idées suicidaires.).
Comme souvent dans les narrations de cet auteur-dessinateur, les états d'âme sombres de ses « héros » choisis font écho aux siens propres….
Frédéric raconte
Pessoa, et se raconte lui-même à travers cette personnalité littéraire, insaisissable, et difficilement compréhensible ; ses voyages, ses doutes, un bilan de cette publication du « Manifeste incertain » dont il nous raconte le noyau central : l'Incertitude, le Doute constant; il nous raconte aussi la genèse d'autres de ses publications dont celle d' une « gazette illustrée » que fut « Station-Gaieté » publiée entre 1977 et 1984, débutée en Suisse, poursuivie ultérieurement à Paris… [publiée par le Dépôt mondial d'exploration passionnelle, section Switzerland [puis] Gazette du bureau pour la création du monde [ Paris ] !!]
On apprend moult choses sur « l'homme intranquille » qu'est
Pessoa, personnalité « paradoxale » au dernier degré…Figure déroutante, utilisant des hétéronymes, homme attiré par l'ésotérisme, les sociétés secrètes… proclamant qu'il n'aime pas les autres… attaché de façon excessive à sa mère, Maria-Magdalena…n'ayant jamais voulu vivre, ou s'engager sentimentalement. Comme une sorte d'homme désincarné, dont l'unique obsession reste son "oeuvre d'écriture" à assumer, envers et contre tous !!..
.A la fin de l'ouvrage, en dépit de l'abondance d'informations et de documentation enregistrées, quelle n'est pas notre surprise de constater que
Pessoa nous restera un MYSTERE aussi complet qu'au début de notre lecture. Ce n'est pas fréquent… de faire rencontre aussi déroutante !!
Pris beaucoup de plaisir et d'intérêt à lire cet ultime volume du « Manifeste incertain »… même si je suis restée bien perplexe sur l'épilogue, tourné vers la figure de « Jésus-Christ »…
Frédéric Pajak , paradoxal, insaisissable comme l'énigmatique
Pessoa, son dernier « anti-héros » choisi !!...
je ne commenterai pas ce dernier point, d'abord car j'en suis incapable, que je préfère rappeler tous les moments épatants passés avec les différentes publications de ce « manifeste incertain ». Que pour me consoler de cette ultime parution, je songe à une relecture de l'ensemble… et lire aussi, pour la première fois, le volume sonsacré à la poétesse,
Emily Dickinson ! Bravo et MERCI, Monsieur Pajak, pour ce double talent d'écrivain et de dessinateur, dont nous avons abondamment profité !