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sur 89 notes
Tout d'abord, je souhaitais remercier Babelio et les éditions Le Cherche Midi pour cet envoi « masse critique » tout à fait étonnant.
Ce roman édité dans la collection Cobra est un roman d'anticipation assez peu banal et goûtant au merveilleux. Il se place dans une forme d'allégorie, une situation hors du commun, comme tous les livres qui caractérisent cette collection particulière.

Quelques cinq siècles plus tôt, une poignée de survivants a réchappé du cataclysme engendré par les Hommes ; les guerres ainsi que les pollutions chimiques ou nucléaires ont pratiquement « nettoyé » de la surface de la terre toute trace d'humanité. Mais le remord, et surtout l'ennui de ne plus pourvoir observer ces « dangereux gesticulants » et s'amuser de leurs étonnantes capacités créatives surprit la grande déesse de la fertilité, de la terre, des eaux et de la végétation qui – dans un instant de faiblesse – autorisait cette poignée d'êtres humains à reconstruire une civilisation.

Et cette nouvelle humanité mue par une lucidité providentielle a retiré au sexe masculin ses anciennes prérogatives de pouvoir et ses anciens privilèges.
Les communautés nomades ont dès lors placé à leurs têtes des femmes.
Et ce sont des reines puissantes et craintes qui se sont octroyé la régence des grands royaumes du Nord. Sur ces terres septentrionales, les hommes doivent rester en retrait ou sont réduits en esclavage, travaillent au fond des mines, recyclent les vieux objets inutiles, contaminants ou dangereux en les jetant au fond des cratères volcaniques restés accessibles. Les mieux lotis sont servants ou gladiateurs et ce sont eux à qui on accorde, s'ils restent vivants, la possibilité de s'accoupler pour engendrer les générations futures.

Sur cette terre désolée en lente reconstruction subsistent encore quelques stigmates des siècles passés ; il s'agit des ruines des édifices les plus solides, d'antiques châteaux de pierre ayant survécus à plus d'un millénaire, des zones polluées pour l'éternité, des maux incurables apportés par des sols ou les eaux, l'alimentation ou un air malsain, quelques objets dont certains sont devenus des breloques sacrées et d'autres, dont on ignore le sens, des mystères… Certains livres aussi ont survécu mais ils sont très rares et un peu redouté car ils étaient les vecteurs d'un savoir qui, on le sait, poussa à la Chute.

Alors, dans ce grand théâtre qu'est la Vie sur la Terre, se jouent et se rejouent toujours les mêmes tragi-comédies écrites par les dramaturges pour les siècles des siècles pourvu que soit respectée la règle des trois unités, de temps, de lieu et d'action. Alors peuvent s'écharper les hommes entre eux tandis que les personnages tragiques issus des récits mythologiques de l'antiquité, comme Phèdre ou Andromaque, font leur marché.

Une petite communauté de nomades – les Britannia – sillonne l'Europe cherchant ça et là sa subsistance, partageant connaissances et articles de première nécessité au hasard des rencontres ; dont Milo, un jeune homme d'ascendance trouble qui prendra soin d'une jeune fille appelée Faith, lesquels en grandissants vont se rapprocher amoureusement.
D'errances acceptées en bannissements subis, ils côtoieront des théâtreux et des chamanes, des reines sombres et des esclaves brillants tout en se rapprochant par circonvolutions successives du sacré et du divin. Leurs ailes fonderont-elles à l'approche du soleil ?

Un livre mystérieux qui pourra plaire ou déplaire mais qui ne laissera pas indifférent.
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Notre civilisation a complétement disparu. Un nouveau monde s'est construit sur ses ruines. Il existe plusieurs royaumes. Tous ont la particularité d'être dirigés par des femmes, "Les Reines". Milo est un jeune homme qui fait partie de la tribu nomade de Brittania. Il est amoureux de Faith, une fille de son âge. Les deux tourtereaux entretiennent une relation en toute discrétion. Lorsque l'on découvre leur couple, Milo est chassé. On lui laisse des vivres pour trois jours. A lui de se débrouiller pour survivre seul. Milo se dirige alors vers les terres du Nord.

Sur sa route, il passe par une île où vit Alba, ancienne Reine de son royaume, aujourd'hui oublié. Elle est dorénavant seule avec ses souvenirs. Elle raconte son passé, les origines.


"Le Vieux Monde avait péri, gangrené par la tyrannie exercée par les hommes sur les femmes, les animaux, les enfants, sur d'autres hommes plus faibles ou moins orgueilleux. Après la Chute, l'humanité avait complétement disparu du monde connu, et cela était à mon sens une excellente nouvelle pour l'avenir du vivant."
Je remercie Babelio et les éditions Le Cherche Midi pour cette lecture.

Ce livre fait partie de la collection "Cobra" de la maison d'édition qui est une série de romans imaginaires et de récits d'aventures, une collection prônant "le fantasmé, l'irréel et l'allégorique". Et "Les Reines" répond parfaitement à cette définition. Dans cette histoire, on se trouve dans une dystopie dans laquelle la femme a une place centrale. L'homme ne dispose ainsi plus d'aucun privilèges sur cette terre. La femme de ce Nouveau Monde est devenue dure et sans état d'âme. Les Reines sont autoritaires. L'histoire alterne entre le récit d'Alba et l'épopée de Milo qui n'a qu'un seul objectif : retrouver Faith.

Le roman est parsemé de références à la mythologie et à la littérature classique. Emmanuelle Pirotte évoque "Antigone" (Sophocle), "Macbeth" et "Othello" (Shakespeare). Mais il y a aussi des passages qui m'ont fait pensé à "L'Odyssée" (Homère).

"Les Reines" est un roman dense dans lequel l'auteure parle d'amour, de trahisons, de jalousies mais aussi de vengeances et de manipulations. C'est une lecture que j'ai aimé et qui me sort de ma zone de confort. Je connaissais l'écriture de l'auteure grâce à son roman "Loup et les hommes" que j'avais adoré. Dans cet ouvrage, elle change complétement de registre pour nous conduire dans un monde dirigé par de femmes et dans lequel on assiste à des manipulations et des manigances politiques.

Un roman imaginaire, des personnages complexes, des femmes de caractère, un homme que nous suivons sur les chemins de ce Nouveau Monde.


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Cela fait plusieurs années, en fait depuis que j'ai lu et été subjuguée tour à tour par La trilogie de l'héritage de N.K. Jemisin et circé puis le chant d'Achille de Madeline Miller, que je cherche leur relève, c'est-à-dire un titre dont la mythologie et la tragédie m'emportera. Je ne sais pas comment Babelio sélectionne ses candidats pour les romans qu'ils ont à offrir, mais avec moi ils ont fait mouche quand ils m'ont mis face aux Reines d'Emmanuelle Pirotte. Enfin, j'avais le nouveau récit mythologique tragique que j'attendais !

Cette autrice et historienne belge n'en est pas à son premier coup d'essai, elle a déjà publié plusieurs romans se déroulant dans des cadres historiques, mais jamais dans des univers aussi fictif que celui-ci. C'était la première fois qu'elle se frottait à la fois à un cadre mythologique et à un récit d'anticipation. Un essai vraiment réussi pour ma part, qui m'a totalement convaincue et seulement, peut-être, laissée cruellement sur ma faim dans les ultimes pages au final abrupte.

Comme l'avait fait autrefois N.K. Jemisin dans La Terre Fracturée, j'ai été surprise ici de l'univers imaginé par l'autrice, où elle dévoie une Terre futuriste qui a vécu une catastrophe pour la faire régresser et revenir en arrière, avec ce qu'elle appelle une Renaissance où cette fois les femmes prennent le pouvoir dans la plupart des institutions sociétales, mais avec des formats rappelant énormément ceux de l'Antiquité et des premiers temps du Moyen Âge. Un sacré écart avec ce qu'on peut imaginer d'une Terre future.

L'histoire démarre dans un camp tzigane, avec deux jeunes enfants : Milo et Faith. le premier à peine plus âgé que la première, s'occupe d'elle depuis toujours et ils ont une relation très fusionnelle. Faith vit dont très mal que, comme le veut la coutume de son clan, on la marie de force à un autre homme qu'elle ne désire pas. Esprit rebelle, elle finit par se retourner contre le pauvre Milo qui n'avait rien demander, et provoque son exil. de là, leur destin tragique n'aura de cesse de nous tourmenter.

J'ai beaucoup aimé la tonalité tragique du récit qui s'empare de nous dès les premières pages et ne nous lâche pas. Nous sommes avec l'histoire d'un amour impossible comme dans les plus grandes tragédies du théâtre et l'autrice en joue énormément. Jamais la vie de nos héros ne sera tranquille. Dans ce nouveau monde, cette nouvelle terre, où les clans sont partout, le plus souvent dirigés par des femmes, nos héros seront sans cesse sur les routes, se rapprochant et s'éloignant sans le savoir, faisant des rencontres signifiantes pour les aider ou les enfoncer au contraire, mais souvent tout n'est que drame.

J'ai eu beaucoup de mal avec la personnalité égoïste et trop entière de Faith. Même venant d'un camp tzigane, non atteint par cette nouvelle toute puissance féminine, elle vit comme telle et n'en fait qu'à sa tête, ne pensant toujours qu'à son propre plaisir. Elle est une superbe représentante de Catherine des Hauts de Hurlevent, capricieuse, égoïste, fougueuse et fascinante du coup. J'ai été beaucoup plus touchée par le discret Milo, qui se retrouve malgré lui entraîner dans les drames qu'elle provoque et n'aura pas une vie facile. 

Avec eux, nous allons partir sur les routes et découvrir l'état de ce nouveau monde, monde fortement inspiré à la fois des tragédies antiques, mais aussi de la mythologie et l'histoire celte. On apprend ainsi que la première femme à avoir pris le pouvoir depuis cette nouvelle ère s'appelait Lagharta. Avec Milo, on découvre la place désormais occupée par les hommes, réduits en esclavage, soumis aux femmes, violés impunément par certaines et durement punis s'ils commettent quoi que ce soit contre elles. Avec Faith, c'est une vie itinérante, celle d'une actrice, d'une saltimbanque, qu'on va découvrir, tandis qu'elle va séduire sans le vouloir une puissance et vieillissante Reine.

Des personnages marquants se retrouveront sur leur route, qui vont participer à la mythologie de cette histoire. Je pense en premier lieu, bien sûr, à Edda, cette reine qui va tenter de capturer la fougue de Faith avant que ça se retourne contre elle. Je pense aussi à Alba, la sibylle dont on entend régulièrement la voix en écho de notre histoire et qui est la mère cachée de Milo, dont l'identité secrète rappelle les plus belles pièce de Shakespeare, mais aussi sa compagne qui malgré les années de séparation, ne peut s'empêcher de continuer à penser à elle et à la servir malgré elle. Il y a également Novak, homme se sentant femme, persécuté pour cela, mais qui ne cède rien et vit sa vie comme il l'entend, aimant hommes et femmes selon ses désirs. Tous témoins des amours saphiques, des amours bisexuels ou pansexuels, qui peuplent ce si beau texte. 

Tous ensemble, dans une toile riche et complexe qui parcoure plus de 500 pages, vivent des aventures très intimes : quête de l'être aimé, esclavage dans de dures conditions, spectacles pour tenter de s'affirmer, découverte de la maternité à travers une drôle de grossesse, lutte à bâton moucheté contre une reine toute puissante jalouse, quête d'une mère absente. Les éléments dramatiques sont partout et peut-être que le choix de cette plume fermée où on entend essentiellement les pensées des personnages et non leur voix a aussi conféré une ambiance très particulière, immersive et intime au récit, mais étrange, nous empêchant d'en sortir.

J'ai été soufflée par la pureté, mais aussi la dureté et le souffle de certaines pages. Quand l'autrice nous plonge dans les nouvelles coutumes claniques de ces personnages, c'est saisissant. Il y a une réelle brutalité dans ce nouveau monde pourtant dirigé par des femmes. L'autrice se plaît ainsi à nous montrer, qu'homme comme femme, quand l'un des deux est dominant, qu'il n'y a pas d'égalité, il y a bien souvent violence et brutalité. Il ne faut donc pas croire, selon elle, que celle-ci n'est que masculine, les femmes peuvent aussi l'exercer. Et l'exercice de style auquel elle se livre pour nous le montrer est saisissant, car bien souvent en lisant les scènes décrites, on imagine les mots des femmes dits par les hommes et vice versa, et c'est glaçant !

Cependant, c'est plus l'histoire de ce couple maudit qui va me rester en tête. Couple dont le héros, Milo, est la figure du héros tragique à qui il n'arrive que des problèmes malheureusement et qui a beau avoir un comportement héroïque, sauvant et aidant les plus faibles, se battant vaillamment (ah, la scène dans l'arène, quel bijou !), aimant au-delà de lui-même, n'a pas le bonheur espéré. On a mal de le voir sans cesse piétiné ainsi. Alors qu'à l'inverse, j'ai bien peu d'empathie pour la capricieuse Faith dont seul le destin final sera parvenu à me toucher, celui-ci transcendant l'enfant capricieuse pour la transformer en mère combattante et vaillante. D'où ma grande frustration de voir l'histoire s'arrêter sur ce point. Il y aurait encore tellement à dire et à faire pour ce couple, pour ces royaumes, pour ces destinées. Cette vaste fresque de femmes et d'hommes d'un autre temps, d'une autre culture et d'autres moeurs aurait mérité une fin moins abrupte. Milo et Faith accomplissent chacun leur destinée mais quelques pages de plus pour le compter n'aurait pas été de trop.

Avec un beau souffle épique à l'ancienne, Emmanuelle Pirotte m'a totalement emportée dans ce récit inspiré des tragédies grecques et Shakespearienne. Avec des personnages âpres mais entiers, pas toujours faciles à aimer, elle m'a déstabilisée avec leurs destinées dramatiques où la place des hommes et des femmes inversées m'a frappée. J'ai aimé cette démonstration que tant qu'il n'y aura pas d'égalité, il n'y aura pas d'équilibre entre les deux et toujours un dominé / dominant et donc des drames. L'inspiration qu'elle a puisé dans la littérature, la dramaturgie et l'imaginaire, ont donné une sauveur toute particulière à ce récit, qui fut pour moi, enfin, un beau successeur à ceux de N.K. Jemisin et Madeline Miller dans le même genre (même si un petit cran en-dessous, soyons honnête).
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Merci à Babelio et à son opération Masse critique pour cette découverte originale !

Au début du roman, on suit un groupe de Gipsies, et plus particulièrement Milo et Faith, avec quelques apartés auprès d'Alba, sur son île... Et le côté "post apocalyptique" et "gouvernements par les femmes" n'est pas vraiment apparent. Il faudra attendre la seconde partie, sur les terres d'Eda pour que ces sujets, pourtant mis en avant par les opérations de communication, deviennent réellement tangibles. Et encore ! Eda est une version féminine d'un empereur romain, avec ses esclaves et ses jeux, pas de grande surprise, donc.

Mais revenons en à Alba, d'une part, et Milo et Faith d'autre part. On comprend qu'Alba était autrefois puissante, avant de devenir cette oracle solitaire, et qu'elle a mis au monde un fils, qu'elle a fait tuer. Quant à Milo et Faith, c'est une drôle d'histoire entre eux, et j'ai pensé à la chanson "L'amour est enfant de bohème, il n'a jamais connu de loi, si tu ne m'aimes pas je t'aime, et si je t'aime, prends garde à toi !"... Et Milo va payer l'amour de Faith, ou du moins son refus de son amour, par son bannissement... Et là, j'ai bien failli arrêter ma lecture, car suite à cet épisode (tout de même bien tiré par les cheveux !), on suit nos personnages par intermittence... Et on les retrouve chaque fois (surtout Milo !) dans de drôles de situations sans avoir la moindre idée de comment ils en sont arrivés là ! Ainsi Milo va-t-il vivre quelques mois avec un fantôme (et d'ailleurs, si cet épisode a un réel intérêt dans le récit, eh bien je suis malheureusement pour moi passée complètement à côté !), puis esclave. Et Faith, on la retrouvera dans une troupe de théâtre, à jouer Desdémone dans Othello.

Et bien évidemment, tout ce petit monde va se trouver rassemblé à la Cour d'Eda, avec un bel imbroglio de triangles amoureux et une belle surprise sur l'origine d'un de nos protagonistes, mais en fait de surprise, on s'en doute quand même un peu depuis le début...

Au vu des publicités autour de ce roman, j'avais cru que j'allais lire un mélange de saga à la Robin Hobb et de dystopie à la Orwell... eh bé non, en fait c'est "juste" une histoire d'amour !

Je n'ai donc adhéré ni aux cheminements et péripéties des héros, qui m'ont souvent fait l'effet de cheveux qui tombent dans la soupe, ni à leurs caractères et choix dans leurs actions. On ne condamne pas quelqu'un qu'on aime à la mort, on ne choisit pas le suicide quand on est pépère et content de sa vie, même en cas de peine de coeur, et surtout si on l'a vue venir de loin ! On ne se transforme pas en mère poule après avoir été un tyran sanguinaire et infanticide !
Et puis même le contexte m'a déçue : on prend les empereurs romains, on en fait des femmes, et on les met dans le futur, en Angleterre. Et du coup, le côté "Et si les femmes dominaient le monde ?", ça ne donne rien car il n'y a pas de réelle réflexion là-dessous, on est bien loin de 1984 côté dystopie ! Et l'écriture, pareil, j'ai été gênée par l'emploi des temps, car Emmanuelle Pirotte utilise beaucoup l'imparfait et le présent, faisant fi, la plupart du temps, du passé simple et du plus-que-parfait, et donc de la concordance des temps.

Bref, une déception totale pour moi. Vraiment. J'ai dû faire un réel effort pour venir à bout de cette histoire, et si je n'ai pas abandonné, c'est bien parce que pour Masse Critique, je m'étais engagée à le lire ! Sinon, je n'aurais, je pense, même pas atteint la fin de la première partie. qui raconte les amours contrariées à la Carmen de Milo et Faith, et comment le destin va les réunir !


Bref, on a compris, je n'ai pas aimé. du tout.
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Dans "Les reines", l'auteur nous propose une dystopie post-apocalyptique de plus de 500 pages qui m'a tenu en haleine une bonne semaine, tant il est riche en détails, en rebondissements et en descriptions autant foisonnantes que fascinantes. Car ce roman est à la fois une épopée, un récit initiatique, et une tragédie grandiose.

Un Nouveau Monde s'est créé sur les ruines de l'Ancien monde dont le lecteur ne saura pas grand chose, sinon qu'il ressemblait beaucoup au notre et qu'il n'a pas survécu à ce que les hommes ont appelé "la Chute".
Les êtres humains ont renoncé au progrès matériel et les femmes ont pris le pouvoir. Elles sont devenues les Reines, réduisant les hommes à de simples géniteurs ayant perdu leurs anciens privilèges, voire à des esclaves, à présent à leur merci. Les Cinq royaumes du Nord sont gérés par des femmes devenues les maîtresses du monde, les "gardiennes de toute forme de pouvoir", qui se transmettent la couronne de mère en fille.
Sur les routes d'autrefois toujours existantes, se croisent des peuples d'origine diverses, les survivants sont devenus chasseurs, nomades, artisans. Les livres sont bannis car ils ne contiennent plus que des choses inutiles pour la vie d'aujourd'hui.
Parmi ces peuples, les Fils du vent, les gitans d'autrefois, sont devenus les "enfants chéris de la Terre". Ils sont les seuls à avoir gardé de nombreuses coutumes ancestrales. Milo Gray appartient à la tribu des Britannia. C'est un magnifique jeune homme roux et très charismatique. Faith qu'il a recueilli après la disparition de ses parents, alors qu'elle était toute petite, est devenue une belle et attirante jeune femme. Ils sont inévitablement tombés amoureux au fil des ans, mais la communauté interdit leur union, la considérant comme un inceste.
Un jour Faith commet l'irréparable et Milo est banni à vie de la communauté. Il part sur les routes et commence alors pour lui un long voyage fait de découvertes et de solitude. Il est attiré par les Terres du Nord où vit la Reine Alba, isolée sur une île battue par les vents au large de l'Ecosse, avec pour seule compagnie, son servant. Alba est la sybille de l'Ouest, elle est la seule à avoir accès à des livres de l'Ancien Monde. Elle connait tout du passé et de l'Histoire de l'Ancien Monde et peut prédire ce que le nouveau monde va devenir. Elle possède le don de vision et peut délivrer des oracles à ceux qui s'aventurent jusque dans son domaine, une terre hostile et prise la plupart du temps dans les glaces. Avant de s'isoler sur son île, elle a été la Reine des Hautes Terres, une reine renommée et puissante. Désormais c'est Helle, son Amazone, et amante qui règne à sa place. Mais cette dernière va bientôt mourir et elle détient un secret...
Pendant ce temps, Faith se sauve et rejoint une troupe de théâtre qui va l'emmener avec eux sur les routes en direction du Royaume d'Edda, le royaume des Amazones, des femmes qui la fascinent depuis qu'elle est toute petite par leur force et surtout leur grande liberté.
Mais Edda est cruelle, jalouse et possessive. Elle est persuadée d'être investie d'une mission : établir une société qui élève les femmes et relègue les hommes au rang d'individus inférieurs. Pour elle, les femmes ont été suffisamment méprisées dans le passé et tiennent à présent leur revanche. Elle va tomber folle amoureuse de la jeune femme...ce qui scellera à jamais son destin, ce que Milo et Faith ignorent, et ni elle ni lui n'y pourront rien changer...

Voilà un roman très prenant qui ne nous lâche plus une fois planté le décor dans ce monde nouveau où les femmes ont pris le pouvoir. Les personnages sont bien présents. L'auteur a des talents de conteuse et sait décrire de manière très réaliste mais néanmoins poétique, l'univers qui entoure ses personnages.
L'histoire est dense mais facile à suivre. le roman nous questionne sans cesse sur la place de l'homme et de la femme dans nos sociétés, leurs réactions face au pouvoir et à l'amour. le lecteur n'a qu'une envie, connaître le destin qui attend chacun des personnages, enfin pour être honnête j'ai surtout eu envie de connaître celui de Milo, car Faith n'est pas un personnage attachant, elle a un caractère détestable, on ne comprend pas vraiment où elle veut en venir, elle est bien trop instable et imprévisible à mon goût.
Deux voix s'entremêlent : celle du récit de la vie de Milo et Faith, entrecoupé de leurs aventures, de légendes, de brefs retours vers les coutumes conservées ou pas de l'Ancien monde. Et une voix off, transcrite en italique qui est, le lecteur le devine très vite, celle d'Alba, seule sur son île hostile des Terres du Nord, prise par les glaces.
Vous vous en doutez cette dernière nous apprend beaucoup de choses qui ne sont pas dites ou qui sont survolés dans la première.
Le théâtre est bien présent dans une grande partie du roman. C'est finalement ce qui reste de l'Ancien Monde, qui permet aux hommes de revivre et de rêver. A la cour d'Edda, la troupe à laquelle Faith appartient, joue Othello, une pièce considérée comme un "plaidoyer contre la tyrannie des hommes" qui condamne leur jalousie, "leur assimilation de l'amour à la possession", mais une belle histoire d'amour. Mais au fil du récit on retrouve aussi Antigone, Macbeth et de nombreuses références à la mythologie.
Les personnages sont tous bien décrits et présents. Bien entendu Milo et Faith tiennent le haut du pavé mais Helle, Alba et Edda ne sont pas en reste tout comme les personnages secondaires auxquels le lecteur s'attache aussi comme Novak, devenu l'ami de Milo, lui qui se sent femme dans son corps d'homme, Erwan, le servant d'Alba, et bien d'autres.
L'auteur ne fait appel à aucun cliché. Elle observe les êtres qu'elle a elle-même créés et cherche à comprendre comment l'amour peut mener ces femmes à commettre l'irréparable : infanticide, torture, jalousie et j'en passe pour vous laisser découvrir tous les détails et rebondissements de ce roman.
Car c'est bien l'amour qui est au centre du roman et l'espoir de retrouver l'être aimé, d'être aimé, de connaître une vie paisible.
Mais le monde n'est pas meilleur parce qu'il est question d'amour et que les femmes le dominent à présent. L'amour provoque lui aussi des trahisons, de la déception, de la colère, de la passion, du ressentiment et des envies qui mènent à la cruauté.
Le lecteur découvre les tensions entre les peuples, les coutumes des uns et des autres, les jalousies, les secrets de famille, et les prophéties. Il vit avec les personnages, les suit dans leur périple sur terre ou sur mer, a froid avec eux dans les châteaux mal chauffés d'Ecosse, a peur dans l'arène. Il passe par de nombreux ressentis parfois contradictoires, il s'interroge, pourquoi tant de cruauté, pourquoi faut-il que la femme réplique les défauts des hommes pour finir par se connaître enfin et par savoir ce qu'elle veut faire de sa vie ?
A la lecture de certains passages, j'ai trouvé quelques longueurs... mais toujours j'ai eu envie de poursuivre, de connaître le destin de Faith et de Milo pour savoir ce qu'ils allaient devenir. La fin est ouverte et n'apporte pas de réponses précises à certaines de nos questions.
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Les reines ont pris le pouvoir après l'effondrement de la société humaine. Désormais c'est un système matriarcale qui est mis en avant dans un roman épique entre guerre de pouvoir, folie, rapport aux hommes et dons surnaturels.

L'histoire : L'humain a failli disparaître sans que l'on sache comment. Les “survivants” ont décidé de mettre en place un nouveau monde. Un monde dans lequel les hommes ont perdu leurs privilèges au profit des femmes. Dorénavant il faut respecter Mère nature et tout ce qu'elle apporte. La violence et l'injustice ont-elles disparu ?
Dans ce monde le folklore fait loi. C'est ainsi que Milo, de la communauté des Gypsies, va être banni de son clan. Seul il affronte la nature sauvage et la violence de son espèce. Mais il n'oublie pas son attirance et son lien puissant avec Faith, une jeune femme qui déchaine les passions autour d'elle. Des personnages au profil de tragédie grecque dans une épopée glaciale sur les Terres du Nord nous entraînent dans un monde où la priorité est la survie.

Retour de lecture : L'écriture épique de l'autrice fonctionne merveilleusement bien avec cette histoire. J'ai nettement préféré “les reines” à “d'innombrables soleils” que j'avais lu à sa sortie en 2019 (et que j'ai chroniqué sur l'ancien blog.) Je ne suis pas certaine du discours qui se cache derrière cette histoire et la prise de pouvoir des femmes (l'autrice l'explique dans une interview que j'ai mis dans l'article du blog ou à retrouver sur le site de d'éditeur). J'ai eu la sensation que c'était avant tout ce nouveau monde et le retour à la survie, aux royaumes, et à un fonctionnement nomade qui intéressait l'autrice.

J'ai beaucoup aimé l'univers présenté par l'autrice. Elle sait si bien installer son décor que j'ai voyagé avec les personnages. S'il fallait apporter une légère réserve ce serait l'apparition du fantastique. Certains personnages semblent avoir des dons magiques. Pas des dons qu'on leur impute comme on a pu le faire par le passé mais des dons véritables pour lesquels il ne fait aucun doute qu'ils sont réels.
Et je donne cette réserve alors que je suis amatrice de fantasy. Je n'oublie jamais que ce n'est pas moi qui écris le livre et je respecte les décisions du créateur de l'histoire (même si on n'adhère pas toujours.) Mais en tant que lectrice ce petit point m'a légèrement dérangée. Il sert à l'intrigue mais pas à l'univers.

Je ne vais pas vous présenter tous les personnages mais si vous aimez les livres où ce sont eux qui font l'histoire, foncez. Vous en détesterez peut-être certains mais ce n'est pas possible d'aimer tout le monde. C'est un aspect que j'ai bien aimé retrouver ici aussi.

Le conseil de la bibliothécaire : Je ne conseillerai pas spontanément “Les reines” aux amateurs de romans d'anticipation, même si l'histoire se déroule dans un potentiel futur. Il pourra plaire à ceux qui aiment quand il y a des jeux de pouvoir (comme une roman historique qui ne vous raconte pas des faits historiques véritables.)
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Sublime !

Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas lu une dystopie aussi brillante !
Enfin, quand je dis dystopie, c'est un peu réducteur.
N'allez pas imaginer le sempiternel roman pour ados. Non, Les reines c'est toute la puissance de la tragédie gréco-romaine, toute la sauvagerie des Highlands et le courage de ses habitants à la Braveheart.

Après la Chute, notre civilisation a disparu. Entièrement. En renaissant de ses cendres, elle a appris de ses erreurs. Cette fois, ce sont les femmes qui sont au pouvoir. Partout, des reines, belles, puissantes… cruelles.
Errant dans ce qui fut la vieille Europe, une communauté de Gypsies perpétue d'anciennes traditions. Mais l'amour entre Milo et Faith est interdit. Un homme seul, banni, peut-il survivre dans ce nouveau monde ?

J'ai avalé les pages frénétiquement. Je savais que le destin des personnages se télescoperaient mais toujours j'étais surprise. Fascinée par ce monde sans âge, aux milles références. C'est l'Histoire de l'humanité qui est convoquée dans ce roman. J'ai eu l'impression de voyager dans le temps et l'espace.
J'ai détesté Faith, Edda, Alba… mais elles m'ont tellement dit sur la nature humaine. Sur les femmes, les mères…

La plume d'Emmanuelle Pirotte est un enchantement. Je regrette déjà de devoir quitter cet univers…

Les reines sera mon choix pour la catégorie le portrait du mal du Pumpkin Autumn Challenge.

À découvrir - car aucun mots ne pourra retranscrire la puissance de ce texte hors norme...
Lien : https://demoisellesdechatill..
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👑ECHEC AU ROI👑
Imaginez. Nous sommes dans le futur et le monde a opéré des mutations radicales. La technologie, jugée nocive pour la nature, a été définitivement bannie, tout comme le patriarcat, source de violence. Les populations vivent comme au Moyen-âge, de chasse et de cueillette, le monde est divisé en royaumes dirigés par des reines.
Dans une tribu nomade, Milo et Faith se vouent une passion folle depuis leur plus jeune âge. Mais c'est un amour interdit par leur communauté qui va valoir au jeune homme d'être banni à vie de son clan...

Quelle lecture ! Quelle aventure ! Quel style ! "Les reines" tiennent à la fois de l'odyssée, de la dystopie, de la fable et de la tragédie antique. On est quelque part entre "Game of Thrones" et les Atrides avec une pincée de "Gladiator", on flirte avec le fantastique et on rencontre des personnages à la fois terriblement humains et complètement hors norme. Edda, reine amazone d'une cruauté sans nom. Faith, jeune femme qui déchaîne les passions et vit sa vie comme on danse au bord de volcan. Alba, prophétesse recluse sur une île déserte... L'écriture d'Emmanuelle Pirotte qu'on ne connaissait pas est éblouissante. Cette histoire de malédiction, de lutte pour le pouvoir et de filiation nous a époustouflées par son souffle, sa démesure, son audace, sa sensualité sauvage. Un mélange de beauté et de férocité incroyable. Attendez-vous à être secoué, ce roman dense et foisonnant va vous faire l'effet d'une chevauchée effrénée !

Il vous tente ? Vous connaissez cette auteure ?
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J'ai lu plus de la moitié du roman sans jamais commencer à entrevoir où cette histoire voulait en venir. Les enjeux et objectifs des personnages ne sont jamais bien définis, même implicitement. On ne sait pas trop où ils vont, ce qui les anime, leur pourquoi, hormis diverses histoires d'amour plutôt insipides et convenues, et ça donne à cette histoire quelque chose d'assez vain, d'assez creux. Les personnages sont victimes plutôt qu'acteurs de leur destin, ils se font chahuter et emporter par les événements mais en sont rarement la cause, du moins pas souvent de manière volontaire et calculée.
L'essentiel du propos est finalement de dépeindre un monde d'après, dans lequel l'ordre social a été renversé et où ce sont les femmes, à présent, qui règnent sur une partie du monde. Sauf qu'il n'y a rien de nouveau : c'est juste une société matriarcale construite exactement sur le même modèle que la société patriarcale que l'on connaît, avec tous ses travers, toutes ses injustices, toutes ses inégalités et toute sa violence. Les rois despotes sont devenus des reines despotes, les hommes mégalomanes sont devenus des femmes mégalomanes, bref, il n'y a aucune construction vraiment intéressante dans ce monde à présent dominé par les femmes, on a juste inversé les jeux de pouvoir et de domination et ça n'a vraiment aucun intérêt à mes yeux.
En fait, je m'attendais à un roman plutôt féministe et au final, c'est le sentiment tout à fait inverse qui m'a accompagnée tout au long de ma lecture. Chacun des personnages féminins a quelque chose de détestable, tandis que les personnages masculins ne sont qu'innocence et honnêteté et subissent les travers haïssables des femmes.
Clairement, ce roman n'aime pas ses femmes. Il ne laisse aucune chance aux femmes de manière générale, il dit juste qu'elles feraient aussi mal, voire pire que les hommes si elles prenaient le pouvoir. C'est réducteur et décevant.
Ce roman s'intitule Les Reines et parle soi-disant de femmes qui règnent, mais c'est plutôt une déclaration d'amour aux hommes. C'est décevant là aussi ; ça le serait moins si ce n'était pas également une déclaration de mépris à peine voilée à la femme. du moins c'est ainsi que je l'ai ressenti. Je ne suis pas allée au bout de ma lecture, du coup. Rien dans ce texte ne me parle.
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La chute du monde a eu lieu entraînant la disparition des êtres humains. ”La Terre soupira d'aise. Et le temps continua son oeuvre, il passa.” Mais celui-ci n'était pas satisfait de ce vide, plus de vie ni de mort, ”plus de regrets, plus de remords, ni de souvenirs flottants dans l'air du soir”. le temps errait comme un désoeuvré. ”Alors il parla à la Terre et la supplia de lui rendre les hommes… Des amours du Temps et de la Terre naquit une première femme de la Renaissance. ” Telle est la genèse du nouveau monde bâti sur les ruines de notre civilisation. Un monde de royaumes gouvernés par des femmes, les Reines. Un monde sans technologie et quasiment redevenu au Moyen Âge.
Si certes le monde a changé, qu'en est-il de l'humain ?
Emmanuelle Pirotte plonge le lecteur dans un monde où tous nos repères ont disparu, et l'entraîne, en suivant Milo et Faith, dans un récit fantastique, captivante épopée aux relents de mythologie, de tragédie antique, de dramaturgie wagnérienne.
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