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EAN : 9782080810564
252 pages
Flammarion (01/01/1968)
3.83/5   35 notes
Résumé :
Le dessein général de l'oeuvre est clairement marqué. Au conventionalisme systématique et généralisé de savants et de philosophes tels que Le Roy, Poincaré répond par une étude critique.
S'interrogeant donc sur le rôle et les limites des conventions dans la science, il montre que, fondamentales dans le domaine moyen de la Géométrie et de la Mécanique rationnelle, celles-ci voient leur importance diminuer tant dans le domaine pur de l'Arithmétique et de l'Anal... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Publié en 1902, "La science et l'hypothèse" regroupe différents des articles de Poincaré sur le fondement de la science, sa portée et ses mode de développement.

Tout vient de la succession de nos sensations que nous tentons d'organiser. La première intuition est celle d'un continu physique et elle nous vient de la sensation d'un continu physiologique. Dès lors, les mouvements sont compris comme continus, les lignes et les solides aussi.

La géométrie n'a rien de mystérieux, elle vient de l'étude du déplacement des corps qui s'accommodent le mieux à notre expérience et dont nous idéalisons les formes. La géométrie est l'étude du mouvement des figures supposées se déplacer comme des solides invariants et c'est faute de ne pas expliciter cette prémisse que l'on a cru, comme Kant, qu'elle s'imposait à l'esprit. Une fois qu'on en a conscience, on peut tout à fait envisager d'autres types de géométries, non euclidiennes, et Riemann et Lobatchevsky ne se sont pas privés. La géométrie euclidienne correspond le plus simplement à notre manière d'être au monde et le corps s'est habitué à certains types de déplacement des objets autour de nous, raison pour laquelle nous la préférons. Mais tous les phénomènes se décrivent aussi bien dans n'importe quelle géométrie, euclidienne ou non. La géométrie n'est ni expérimentale (on se rendrait compte que les formes ne sont pas idéales), ni purement intellectuelle (elle repose sur les prémisses de l'expérience que les corps se déplacent sans, en gros, changer de forme).

Ensuite, il faut avoir à l'esprit que les concepts de la physique restent fondamentalement incompréhensibles : ni la masse, ni la force, ni l'inertie, ni l'énergie, par exemple, ne s'expliquent de manière absolue. Ce ne sont que des valeurs qu'il est commode d'introduire pour décrire les mouvements de la matière, laquelle reste inconnaissable. La science n'est pas pour autant arbitraire : ces conventions doivent être vérifiées par l'expérience, dont la mise au point requiert l''énonciation de toutes les hypothèses nécessaires à sa mise au point. Sans cela, une expérience n'est rien qu'un fait ponctuel, on ne pourra rien en généraliser. Or la science a la généralisation pour moteur, qui doit permettre de prévoir et donc, de connaître.

Pour aller encore plus loin, la physique et les mathématiques se fichent de savoir si les images qu'elle emploie (le "courant" électrique, l'éther, les "petits tourbillons" électromagnétiques, etc.) sont justes ou non ou, et si demain, on ne va pas les remplacer par autre chose : les équations, elles, resteront valables. Encore une fois, les images n'abordent la matière que sous forme de métaphore, qui, elle, reste inatteignable fondamentalement.

Les probabilités elles aussi s'établissent seulement si l'on établit l'ensemble des conditions de leur estimation, et le principe de raison suffisante est bien conventionnellement appliqué, du moins, sans principe absolu. Quant à faire dépendre l'ensemble de la science d'une probabilité (puisque la science a pour tâche de prévoir et que n'importe quoi d'imprévu peut surgir qui démente les calculs...), c'est encore un principe à rejeter : les résultats de la science restent valides "toute chose égale par ailleurs". Il n'y aurait plus de science s'il fallait supposer constamment qu'une catastrophe pourrait arriver. A moins que l'on estime que cette probabilité n'est pas négligeable. Et on revient dans la science qui a pour finalité l'unité et la simplicité. Unité car elle tend à tout expliquer en une gigantesque synthèse et simplicité car c'est un principe de base que si rien n'impose à compliquer, on fait au plus simple. Les expériences seront bien capables de nous obliger à tout compliquer de toute façon.

Et, en conclusion, demandons-nous, comme le suggèrent les expériences menées alors (en 1902), s'il l'on doit prendre pour convention que la matière n'existe pas...

Les textes sont très clairs et très abordables, construits avec un peu de suspens par-ci et d'humour par-là. Les contradictions de Russell résumées en fin d'ouvrages ne convainquent pas du tout, mais on aspire à en savoir plus sur les ouvrages théoriques postérieurs de Poincaré.


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Une convention est adoptée, non parce qu'elle est plus vraie qu'une autre, mais parce qu'elle est plus commode, eu égard à un certain nombre de paramètres. Une convention n'est pas une simple loi expérimentale que l'on pourra toujours réfuter ensuite, auquel cas elle ne ferait pas office de convention : elle est bien tirée de l'expérience, mais prend un statut qui la rend d'avance irréfutable quelles que soient les expériences futures, en tant que convention, et de par sa structure. Ces conventions ne sont pas arbitraires : elles organisent véritablement l'expérience, elles ont une fonction heuristique véritable. Par contre, il ne s'agit pas vraiment de paradigmes : la notion de révolution scientifique n'a pas de place dans cet essai. Ce n'est pas non plus du nominalisme, quoique l'auteur ne semble pas tenter une défense du réalisme ou du conceptualisme.

Il y a un point sur lequel je veux brièvement revenir (j'aurais pu critiquer la maladroite mais trop courante identification du raisonnement par récurrence à l'induction, mais c'est un point de détail qui ne change pas le fond de l'affaire). Pour Poincaré, le principe d'inertie n'est pas a priori. Mais si ce principe doit donner lieu à une convention, donc si l'on sait d'avance qu'il ne sera pas réfutable par l'expérience, il devient impossible de contrôler expérimentalement ce principe. Bien entendu, il pourrait encore se tirer de l'expérience, mais alors rien ne permet de contrôler la validité d'une telle induction si ce n'est les découvertes que sa structure rend possible. Si on croit plutôt, comme moi, que les principes sont proposés a priori, puis contrôlés a postériori, si tout du moins on croit qu'ils suivent un schéma hypothético-déductif, je vois mal pourquoi je devrais refuser de faire de l'inertie un principe a priori : s'il sert de convention, s'il est irréfutable en tant que convention, c'est parce qu'il rend a priori possible l'observation scientifique, et qu'il est, par sa structure conventionnelle, a priori irréfutable. Rien nous pousserait pourtant à adopter ce principe d'inertie a priori, de telle sorte que l'expérience apporte au moins le motif de l'adoption. Tout se passe comme si la découverte d'une convention nous menait à une schizologie, entre d'une part la convention que l'on doit adopter comme a priori valable et irréfutable, et d'autre part les raisons qui nous poussent à adopter une convention.
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Un grand livre de sciences par un Immense scientifique.
Henri Poincaré est un mathématicien, dont les travaux de Physique ont servi à Einstein pour élaborer la théorie de la relativité.
Ce livre est d'une grande clarté et d'une grande rigueur. il pose des définitions, distingue les concepts, entre démonstration, vérification, propriétés. Explicite ce qu'est le raisonnement en mathématiques.
Poincaré traite du nombres et des grandeurs, puis de l'espace, des forces et de la nature. Il décrit les mathématiques et leurs mode de raisonnement, les géométries géométries non euclidiennes, celles qui peuvent servir à la description de l'espace physique et de la nature, pour finir par l'hypothèse de la fin de la matière.
Il décrit l'état de la science de son temps, mais plus que cela il laisse à voir ce qu'est la pensée scientifique, le raisonnement mathématiques. C'est en cela que ce livre est d'actualité.
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La science et l'hypothèse (1902) est un essai du mathématicien Henri Poincaré. le livre est destiné au grand public mais n'est pas forcément simple d'accès. Il est divisé en quatre parties, les mathématiques, l'espace, les sciences physiques et la nature et évoque l'importance des modèles scientifiques. Un ouvrage intéressant, jalon de l'histoire des sciences.
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Super intéressant. Je l'ai découvert à l'époque de mes cours de philo et j'ai vraiment aimé. C'est écrit par un de nos grands mathématiciens ce qui bien sûr ajoute au plaisir. C'est clair, compréhensible, cela éclaire sur la démarche scientifique et personnellement ça m'a confirmé que je souhaitais poursuivre sur la voie des maths !
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
...les traités de mécanique ne distinguent pas bien nettement ce qui est expérience, ce qui est raisonnement mathématique, ce qui est convention, ce qui est hypothèse.

Ce n'est pas tout:

1°) Il n'y a pas d'espace absolu et nous ne concevons que des mouvements relatifs;cependant on énonce le plus souvent les faits mécaniques comme s'il y avait un espace absolu auquel on pourrait les rapporter;

2°) Il n'y a pas de temps absolu; dire que deux durées sont égales, c'est une assertion qui n'a par elle-même aucun sens et qui n'en peut acquérir un que par convention;

3°) Non seulement nous n'avons pas l'intuition directe de l'égalité de deux durées, mais nous n'avons même pas celle de la simultanéité des deux événements qui se produisent sur des théâtres différents ;

4°) Enfin notre géométrie euclidienne n'est elle-même qu'une sorte de convention de langage; nous pouvons énoncé des faits mécaniques en les rapportant à un espace non euclidien qui serait un repère moins commode, mais tout aussi légitime que notre espace ordinaire; l'énoncé deviendrait ainsi beaucoup plus compliqué; mais il serait possible.

Ainsi l'espace absolu, le temps absolu, la géométrie même ne sont pas des conditions qui s'imposent à la mécanique.
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Qu'est-ce donc que,une bonne expérience? C'est celle qui nous fait connaître autre chose qu'un fait isolé; c'est celle qui nous permet de prévoir, c'est-à-dire celle qui nous permet de généraliser.
Car sans généralisation, la prévision est impossible.
....
Pour prévoir il faut donc au moins invoquer l'analogie, c'est-à-dire, déjà généraliser...l'expérience ne nous donne qu'un certain nombre de points isolés il faut les réunir par un trait continu; c'est là une véritable généralisation.
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L’une des découvertes les plus étonnantes que les physiciens aient annoncées dans ces dernières années, c’est que la matière n’existe pas. Hâtons-nous de dire que cette découverte n’est pas encore définitive. L’attribut essentiel de la matière, c’est sa masse, son inertie. La masse est ce qui partout et toujours demeure constant, ce qui subsiste quand une transformation chimique a altéré toutes les qualités sensibles de la matière et semble en avoir fait un autre corps. Si donc on venait à démontrer que la masse, l’inertie de la matière ne lui appartiennent pas en réalité, que c’est un luxe d’emprunt dont elle se pare, que cette masse, la constante par excellence, est elle-même susceptible d’altération, on pourrait bien dire que la matière n’existe pas. Or, c’est là précisément ce qu’on annonce. (p. 283)
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D'où viennent les premiers principes de la géométrie ? Nous sont-ils imposés par la logique ? Lobatchevsky a montré que non en créant les géométries non euclidiennes. L'espace nous est-il révélé par nos sens ? Non encore, car celui que nos sens pourraient nous montrer diffère absolument de celui du géomètre. La géométrie dérive-t-elle de l'expérience ? Une discussion approfondie nous montrera que non. Nous conclurons donc que ses principes ne sont que des conventions ; mais ces conventions ne sont pas arbitraires, et, transportés dans un autre monde (que j'appelle le monde non euclidien et que je chercher à imaginer), nous aurions été amenés à en adopter d'autres.
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Le jugement sur lequel repose le raisonnement par récurrence peut être mis sous d’autres formes ; on peut dire par exemple que dans une collection infinie de nombres entiers différents, il y en a toujours un qui est plus petit que tous les autres.
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