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Jacques Collin (Traducteur)
EAN : 9782073029737
448 pages
Gallimard (07/09/2023)
3.28/5   43 notes
Résumé :
À la fin du XIXe siècle, le professeur Adler Beck étudie les glaciers et les changements climatiques liés à l'éruption des volcans, aux courants marins et aux cycles solaires. Après des années de recherche, il arrive à la conclusion que la planète subira un refroidissement majeur dans le courant du XXIe siècle.

Pourtant, en 2050, le climat ne cesse de se réchauffer et la montée des eaux semble inéluctable. C'est en tout cas ce que constate au quotidie... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Deux frères, jumeaux, au XIXe siècle. Deux autres au XXIe. de la même famille. Quel lien les unit à travers le temps ? La passion des glaciers ? Leur origine norvégienne ? Et que vient faire cet inconnu, John Smith, condamné plusieurs fois par la justice britannique ? Les réponses sont dans Rendez-vous demain, un puzzle passionnant qui nous conduit à travers le temps et nous parle aussi de notre présent.

Quel rapport peut-il bien exister entre ces personnages ? Des jumeaux ayant vécu au XIXe siècle : l'un, scientifique organisé et bien intégré dans la société, s'intéresse aux changements climatiques et comprend que des bouleversements vont avoir lieu ; l'autre, artiste souvent impécunieux, voyage à travers le monde, l'Amérique du Sud, l'Europe, afin de chanter des airs d'opéra. D'autres jumeaux en plein milieu du XIXe siècle : le premier, journaliste engagé, voyage à travers les pays où les libertés sont mises en cause ; l'autre, profileur pour la police jusqu'à son renvoi, s'intéresse par la force des choses aux bouleversements climatiques qui mettent son existence en péril. Et John Smith, dont on suit les passages devant les tribunaux : usant sans cesse du même stratagème, il aurait trompé des femmes aux abois afin de leur dérober leurs maigres possessions. Et c'est lui, en fait, cet inconnu, dont on ne découvrira l'identité qu'à la fin du roman, qui sert de lien entre les époques.

En effet, John Smith n'est qu'un alias. Et à une époque où la photographie débutait, où les communications étaient, par rapport à notre siècle, d'une lenteur désespérante, il n'était pas facile de découvrir la vraie identité d'un anonyme. Or, rapidement, l'un des jumeaux du XIXe siècle est accusé d'être ce criminel. À tort ? À raison ? La lecture seule du roman permet de le savoir (hors de question, donc, que je révèle quoi que ce soit). Mais en 2050, Gregory, l'un des jumeaux du XXIe siècle, doit faire la preuve de la « pureté » de sa famille pour espérer obtenir un poste. Et l'histoire d'Adolf, lointain ancêtre condamné pour on ne sait quel forfait, remonte à la surface. Il faut en vérifier la véracité pour ne pas compromettre le projet professionnel. Voilà pour le lien. Prétexte un peu tordu, mais on l'accepte bien volontiers parce qu'il permet de raconter une histoire fascinante. Reste le moyen : le deuxième jumeau du XIXe siècle, Chad, se trouve muni, presque malgré lui, d'un moyen de communication avec le passé. D'une efficacité très modérée, permettant d'apercevoir des images du passé sans pouvoir échanger, cette technologie ouvre tout de même un canal entre deux époques.

La grande surprise, pour moi, à la lecture de Rendez-vous demain, en sus du plaisir de découvrir des vies autres, c'est l'érudition dont a fait preuve Christopher Priest. Car tout, ses personnages, leurs recherches, part de bases réelles. Les jumeaux du XIXe siècle, les frères Beck ont vraiment existé (et je repense aux Temps ultramodernes, de Laurent Genefort, qui a créé son univers à partir de notre passé, y mêlant nombre de personnages célèbres, dans un rôle différent). Tout comme le procès dont l'un a été victime. Il en va de même de la théorie de l'autre frère, qui imaginait un prochain refroidissement climatique avec l'augmentation périlleuse de la taille des glaciers. Et c'est un autre fil qui relie les époques. LE fil, en fait : le bouleversement de notre climat. L'auteur décrit un monde, en 2050, qui ne donne vraiment pas envie : les iles britanniques sont sujettes à des vagues de chaleur, de sécheresse terribles. Les tempêtes de sable ne se contentent pas de déposer un fin voile sur les voitures. Elles forment des couches qui nécessitent le passage d'engins pour dégager les routes. Elles bouchent les climatiseurs, vitaux en ces temps où les températures dépassent allègrement les quarante degrés. Et les côtes sont progressivement ravagés par la montée des eaux. L'Europe est à peine évoquée, mais son sort paraît encore moins enviable. le portrait de ce futur est angoissant à souhait. Pas autant que celui d'Étienne Cunge dans sa Symphonie atomique, mais suffisamment pour faire naître une sourde inquiétude. Et une goutte de sueur de couler le long de la tempe, non pas due à la chaleur mais à la peur naissante. Je ne sais si tel était le but de Christopher Priest, mais il a produit un résultat très réaliste, distillé progressivement, histoire de bien laisser infuser les multiples conséquences sur notre quotidien : température excessive, approvisionnement en carburant ou en nourriture difficile, moyens de transport aléatoires. Cela ne donne vraiment pas envie d'arriver en 2050 !

Lire Rendez-vous demain, c'est accepter de se laisser entrainer avec ravissement sans bien savoir où l'on va, d'une époque à une autre, d'un individu à un autre. C'est aussi voyager avec érudition entre la réalité et l'imaginaire. C'est enfin regarder en face le bouleversement climatique et ses effets, le monde qu'il est en train de construire. C'est avoir un aperçu de notre avenir : à demain !
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Entre deux ouvrages de sociologie, j'ai craqué. En parcourant les ouvrages de fiction offerts dans le cadre de l'opération « Masse critique » sur Babelio, je suis tombé sur le dernier roman de Christopher Priest, dont je suis un grand fan depuis « le Prestige ». J'ai eu la chance de le recevoir – je remercie l'éditeur et Babelio au passage –, et je l'ai dévoré en quelques jours.

Les familiers de l'auteur y trouveront leur compte. Priest réexplore toutes ses obsessions habituelles : la gémellité, les paradoxes temporels, la perception de la réalité… Il y ajoute la question du réchauffement climatique. À moins que ce ne soit celle du refroidissement, cela dépend de la manière dont vous préférerez lire l'ouvrage…

Après une centaine de pages nécessaires pour mettre en place le cadre de l'intrigue, la lecture devient plaisante et prenante, le rythme s'accélère à mesure que les différents fils temporels s'entrelacent. L'ensemble est bien documenté sur le plan scientifique comme politique, ce qui achève de rendre l'oeuvre crédible. Il est dès lors d'autant plus facile d'en faire une analyse qui dépasse le strict cadre du divertissement, et d'imaginer certains des bouleversements auxquels nous ferons face dans les années à venir…
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J'avais apprécié, sans l'avoir vu en entier, l'intrigue de ce film le Prestige aussi ai-je voulu découvrir l'auteur. D'où la lecture de sa dernière production.
Un rendez-vous en demi-teinte en ce qui me concerne.
Intrigue à la fois dys- et utopique fragmentée où se superposent plusieurs récits aux temporalités et personnalités distinctes.
Différents thèmes à la mode sont également juxtaposés tel que le réchauffement climatique, les paradoxes temporels et la gémellité.
Tout s'emboite à la fin sur une touche presque optimiste sinon naïve.
Cependant - est-ce le fait de la traduction ? - que dire d'un roman dont il est difficile de retenir aucune phrase ni pour sa beauté ni pour la vérité percutante qu'elle exprime ?
On a ici probablement un très bon scénario de film à défaut d'une vraie écriture littéraire.
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A chaque fois c'est pareil. J'attends le nouveau Christopher Priest avec impatience. Depuis 1974 et la parution de « le monde inverti » je ne lui ai fait que rarement faux bond sur le fil rouge d'oeuvres singulières, originales et ingénieuses.

Quand, se privant du grand bazar éternellement non-exhaustif de la SF traditionnelle, sur la base d'ingrédients resserrés, Priest peut-il encore renouveler sa SF trans-fictive, nous y donner encore goût et plaisir ? Car, à trop se répéter … ? Au petit jeu de la recherche de nouveaux horizons, nombre d'auteurs SF en impasse, proches de la littérature générale, se sont tourner vers la sécurité de la tradition. Priest s'est t'il usé, érodé, abimé ?

Qu'en est-t-il du cru 2022, de ce « Rendez-vous demain » qui, pour de la SF annoncée, s'habille en 1 de couv de bien traditionnelle manière : une ville d'antan au pied de montagnes abruptes, des habitants d'un autre siècle ? Il est vrai que le passé remodelé et la SF de Priest, firent souvent des mariages heureux.

« Rendez-vous demain » semble à la croisée des parallèles de la plupart des thèmes chers à l'auteur, comme annoncé en 4 de couv : voyage dans le temps (le titre s'y prête), gémellité, réalité distordue, manipulations verbales, usurpations d'identité … le tout servi par la belle prose habituelle de l'auteur.

Quels ingrédients ?

1868 et 2050. Les Dorf et les Ramsey. Au-delà des années écoulées qui les séparent, deux fratries de jumeaux monozygotes*. Des patronymes différents, une même famille néanmoins. Quatre personnages, à 182 ans d'intervalle, entrant en scène simultanément. Passé/futur à l'étal : Priest, en auteur SF reconnu, semble promettre quelques jongleries en allers-retours de l'un à l'autre ; le voyage dans le temps espéré prend corps, l'auteur vous l'offre ; ça tombe bien il s'y connait et y a fait succès légitime (« Futur intérieur » précédemment paru dans les meilleurs librairies). La gémellité, itou, une récurrence thématique dans l'oeuvre de Priest (« La Séparation ») qui introduit souvent les usurpations d'identité, un autre leitmotiv cher à l'auteur.

1. Les Dorf (fin du XIXème siècle). N.B. : Ils ont bel et bien existés.

Le premier, Adler, un scientifique norvégien, glaciologue, vulcanologue et climatologue qui, de plus, étudie les courants marins et les cycles solaires. Sur le fil de ses recherches et les preuves scientifiques qu'il accumule, il entrevoit une période de glaciation pour la Terre de 2050. Qui pour le contredire ? La climatologie ne débute que. Sauf que les faits, beaucoup plus tard … mais il ne sera plus là pour affronter son erreur devant ses pairs. A moins que .. !

Le second, Adolf, est chanteur d'opéra ; un rien mythomane, il parcoure le monde à la recherche d'un succès variable, d'une reconnaissance qui le fuit ; impécunieux, il s'engage dans des coups boursiers hasardeux qui le rendent invariablement dépendant de son frère. Adolf est la variable d'ajustement de la fratrie Dorf, le satellite en orbite incertaine, celui par lequel viennent les aléas et les coups durs.

La preuve … à la fratrie Dorf s'ajoute le personnage vaporeux et énigmatique de John Smith, un cinquième larron guère reluisant. Quel patronyme longe-muraille que le sien, tout d'un pseudo ? Arrêté, inculpé, condamné pour faits d'escroquerie (des femmes seules en sont les victimes en série). Qui est t'il ? Peut-être, qui sait, est-ce Adolf lui-même, tant ses lettres à son frère, venues du bout du monde, sans qu'un instant ils ne se trouvent en présence l'un de l'autre, paraissent bizarres et décalées.

2. Les Ramsey (2050).

Chad tout d'abord, profiler criminel (et accessoirement consultant d'une grosse boite pharmaceutique et environnementale). Un homme-augmenté, heureux/malheureux possesseur d'un système nanotechnologique implanté dans son crâne. La CMI (c'est son nom) lui permet de rentrer en contact hélas cotonneux et bref (mais c'est mieux que rien .. !) avec ses cibles du présent, mais aussi du passé, au-delà de la mort même (pratique pour un profiler criminel), pourvu qu'il en connaisse et programme la séquence ADN sur son CMI, le reste n'étant qu'affaire de coordonnées temporelles.

Gregory, son frère, journaliste freelance, est obsédé par la fâcheuse notoriété qu'impose à sa famille les procès intentés à l'encontre de son grand-oncle Adolf Dorf. (N'est t'il pas innocent ?). La CMI de son frère peut t'elle l'aider à se faire une raison, à prouver l'innocence d'Adolf ?
Déjà beaucoup d'ingrédients au menu, donc … et ce n'est pas tout, d'autres gros morceaux attendent. Dont celui d'importance du background dans lequel évoluent les personnages du XXIème siècle.

2050. Une Terre, la nôtre, en versant anticipatoire, celle agonisante sous nos pieds. La queue de comète programmée de dérèglements climatiques non réglés**. La fin ou presque de l'Humanité. Ce à une poussière d'années seulement de 2022. Presque ici et maintenant. Priest en fait une description réaliste, bouleversante, cauchemardesque, effrayante, à mots giflés, assénés, définitifs et irréversibles. le tout est nourri de nombreux détails percutants et représentatifs, jaillis du pire pessimisme possible. Priest se montre cash, direct, uppercut au menton, sans fard. du Ballard ? Non pas, trop soft le Jim, ou alors la poésie des mots en moins et l'horreur de chaque instant en plus. du Ligny issu d'« Aqua TM » ? Oui, davantage, quand la peur nait d'un catalogue précis de tout ce qui menace en rafales incessantes.

2050. Une Terre qui, pourtant, fait semblant de vivre, tant bien que mal. Qui soubresaute à maxima d'une agonie irréversible que personne ne veut nommer. Géopolitiquement remodelée au plus petit dénominateur commun (ou presque) de ses anciens territoires. Politiquement et administrativement pilotée dans l'urgence de l'instant et l'oubli de ce qui semble désormais superflu, la santé au premier chef par exemple. Socialement défigurée à son paroxysme d'inégalités : des pauvres, des nantis, une frange instable dans l'entre-deux, des migrants par millions. Des zones urbaines aux poles, dans le froid résiduel, protégées et enclavées, promis aux seules possibilités de certains. Bergen, par exemple, la belle norvégienne, promue Capitale des Nations-Unies.

La Terre, une boule rognée de ses côtes, désormais posée dans l‘espace comme une pomme-trognon, grignotée à coeur, tous pépins recrachés. Notre Planète, une tête ratatinée de Jivaro mort, tout autant, dégoupillée du sang qui fait la vie. Un Monde de rien, quelques milliards de morts. Tout sera alors dit. Peut-être à jamais ? Clap de fin ?

Et en couche sous-jacente, en lente coulée discrète vers l'épilogue, une Terre qui espère encore quand tout là-bas, en altitude, pousse une petite fleur au doux nom de Dryas Octopetala. « Rendez-vous demain » : un peu de soleil dans l'eau froide ?

CE QUE J'EN PENSE :

L'intrigue est complexe (trop, peut-être ?). Pas tant que çà, en fait. Brouillonne ? Sans crainte, tout se tient, s'emboite parfaitement. Multi-azimutée ? Une convergence d'explications nous attend à l'épilogue, les parallèles s'y croisent ; Priest livre patiemment, clefs en main, toutes les pièces du puzzle. Juste se laisser porter.
L'auteur brouille la réalité (comme d'hab) ; il a besoin de mots trompeurs pour se faire, de chausse-trappes linguistiques, d'illusions, de faits nombreux pour l'y aider ; il lui faut nous perdre (pour mieux nous gagner), imposer des explications scientifiques (d'où l'embonpoint consacré à la climatologie et Cie). Au final, ayant trouvé mon comptant de ce pour quoi je suis venu, l'intrigue ne m'a pas semblé si inextricable que çà (loin de là), elle signe tout simplement un roman qui se mérite. On plonge dans les faits et les explications, patient et conciliant ; une longue mise en place de toutes les pièces du puzzle semble nécessaire. Comment Priest aurait t'il pu faire plus court ? Cette lente approche prend fin au tiers de l'oeuvre, tout vire soudain au page-turner. Simplifiée, l'intrigue s'accélère, s'engouffre dans une linéarité sans cesse rétrécie, comme dans un goulot d'étranglement ; le lecteur a hâte d'aller à l'épilogue, de dénouer enfin tous les fils de l'intrigue. Longtemps, rien ou presque ne se décante vraiment, ne se détache du reste, tout semble d'égale importance, le moindre détail ne parait pas superflu. le lecteur retient tout et emmagasine, comme un hamster dans ses bajoues, pour plus tard.
Priest, 80 ans sous peu, semble soucieux depuis ses débuts qu'on l'attende, à chaque parution, par où il ne viendra pas. Si, ici, avec « Rendez-vous demain », il ne satisfait pas pleinement à ce qu'il s'impose via un thème central pleinement d'actualité (le dérèglement climatique), il ne déroge pas à ses habitudes avec, en satellites, cette bi-gémellité surprenante et son énigme temporo-policière attachée. Cette dernière est, à résoudre, habile, prenante, plaisante et, à sa mise en abime, étonnamment attachante, presque souriante et optimiste. Je pense que cette virevolte temporelle complexe restera seule, mais dans ses grandes lignes, en ma mémoire science-fictive, au-delà du ton sombre, actuel et abondamment médiatisé apporté à la crise climatique.

Il y a un certain consentement presque masochiste, chez le lecteur de Priest, à accepter l'esbrouffe/la mystification qu'il propose. le fil de tapisserie à dévider que le lecteur pensait être le bon n'est qu'un leurre. Au petit jeu auquel Priest semble s'adonner pour nous bluffer, son regard au-dessus de notre épaule, occupé à suivre ce que nous lisons de son intrigue, il se montre d'abord l'oeil attentif, anxieux de nos réactions, soucieux de voir le piège se refermer correctement, bientôt narquois, finalement hilare à l'approche du mot « FIN », heureux de nous d'avoir été dupés et nous heureux de l'avoir été.
Ainsi, « Rendez-vous demain » joue sur deux tableaux : l'anticipation terrifiante d'un monde agonisant et l'esprit ludique d'une énigme tarabiscotée.

« Essaie-encore » semble nous dire Priest, et nous d'y revenir, bientôt, le plus tôt sera le mieux.

*Dixit Wikipedia : « les jumeaux monozygotes .. [ ] .. proviennent de la division d'un oeuf fécondé unique. Ils sont issus du même ovule du même sprematzoîde et possèdent une information génétique unique identique. »
** « Rendez-vous demain » semble avoir une parentèle avec « Notre ile sombre » que je n'ai pas lu

Merci à Babelio, Masse Critique, l'auteur, Denoël ed., "Lunes d'Encre" Collection

Lien : https://laconvergenceparalle..
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Dernier roman en date de Christopher Priest, « Rendez-vous demain » reprend la plupart des thématiques et des procédés narratifs chers à l'auteur du « Prestige ». L'ouvrage met ainsi en scène plusieurs périodes historiques dans lesquelles évoluent plusieurs paires de jumeaux. Une partie de l'intrigue met ainsi en scène un glaciologue de la fin du XIXe siècle, Adler Beck, dont les recherches l'amènent à se pencher sur la question de l'évolution du climat au court du prochain siècle. Or, après des années d'observations des éruptions volcaniques, des courants marins et des cycles solaires, le scientifique entrevoit un futur bien sombre pour l'humanité et anticipe un refroidissement majeur qui pourrait bien mettre en péril la survie de l'humanité. Ce chercheur a un jumeau, Adolf, ténor parti faire carrière en Amérique du Sud et qui correspond régulièrement avec son frère, soit pour solliciter une aide financière, soit pour évoquer avec lui la question de leurs « apparitions ». En effet, tous deux sont victimes des mêmes « attaques », des moments effrayants au cours desquels une voix venue de nul part s'adresse à eux de façon impérieuse, provoquant une paralysie totale et une angoisse difficile à dissiper. A cela s'ajoute toute une série de scandales judiciaires auxquels Adolf se retrouve mêlé, bien qu'il ne cesse de clamer son innocence. Ces chapitres se déroulant à la fin du XIXe alternent avec d'autres dont l'action se déroule cette fois en 2050. Les protagonistes y sont à nouveau des jumeaux, l'un journaliste de terrain, l'autre profileur pour la police. le monde dépeint par l'auteur dans ce futur proche semble en tout cas totalement en décalage avec les prévisions du glaciologue Beck puisque le monde subi de plein fouet les effets du réchauffement climatique. le lien entre ces deux trames ? Les jumeaux de 2050 sont les descendants d'Adler Beck, et, pour des raisons tant professionnelles que personnelles, ils vont enquêter sur le passé sulfureux de leur grand-oncle.

On retrouve ici tous les éléments qui constituent désormais la marque de fabrique de Christopher Priest. Gémellité, usurpations d'identité, futur alternatif… : les thématiques sont les mêmes que dans « Le Prestige », « La séparation » ou encore « L'adjacent », et cela pourra provoquer une certaine lassitude chez les lecteurs connaisseurs de la bibliographie de l'auteur. Outre son aspect répétitif, l'intrigue se révèle dans l'ensemble décevante tant les liens entre les deux périodes évoquées semblent artificiels ou anodins. le mystère mis en scène au XIXe concernant la culpabilité ou non d'Adolf Beck dans les affaires d'escroqueries qu'on lui a mis sur le dos est finalement tout à fait commun et sans véritable lien avec le reste de l'histoire. de même, les éléments fournis pour expliquer la différence entre les prédictions d'Adler et le quotidien des protagonistes de 2050 ne donnent pas lieu à de grandes révélations ou à un quelconque bouleversement d'ampleur. Et c'est là que ce situe à mon sens le noeud du problème dans ce roman : on passe une bonne partie de la lecture à attendre LE retournement de situation, celui qui nous fera réaliser que les anecdotes à priori sans intérêt relatées jusqu'à présent sont en réalité capitales et que toute l'intrigue doit désormais être réanalysée selon un logiciel totalement différent… seulement ce moment n'arrive jamais. L'auteur conclut ces deux trames narratives en fournissant des explications logiques et satisfaisantes à chacune de ses intrigues, mais sans chercher à les lier ou les complexifier davantage. On comprend rapidement d'où provient la voix qui hante régulièrement les des deux Beck du XIXe, aussi non seulement son origine ne provoque-t-elle aucune surprise au moment de sa révélation, mais en plus son influence sur la vie des frères se révélera, en dépit de la forte attente du lecteur, totalement marginale. le seul aspect véritablement intéressant du roman concerne en fait le cadre de l'anticipation proche évoquée par Christopher Priest et qui met le problème du réchauffement climatique au coeur de l'histoire.

En dépit de notre proximité chronologique avec les jumeaux vivant en 2050, on a bien du mal à reconnaître le monde tel que dépeint ici. Instabilité politique chronique, tempêtes d'une rare violence, invasions d'insectes porteurs de maladies mortelles, montée inéluctable des eaux… : le futur imaginé par Priest a tout du scénario catastrophe mais anticipe en réalité en grande partie ce qui nous attend à plus ou moins long terme. La question de la montée des eaux, notamment, est centrale puisque l'un des deux frères vit en Écosse dont le littoral a été totalement transformé ces dernières décennies. le malaise qui saisit le lecteur vient également du fait que les troubles graves dépeints (montée de l'insécurité, exodes massifs, catastrophes naturelles de grande ampleur…) concernent cette fois directement l'Europe, et non pas les continents qui sont d'ores et déjà touchés par ces phénomènes et dont l'éloignement encourage l'indifférence. L'action se concentre ainsi sur le Nord de l'Europe, nous entraînant de l'Écosse à la Britanie (le Royaume Uni réduis à l'Angleterre et au Pays-de-Galle), sans oublier la Norvège, le reste du continent étant de toute évidence presque perdu, tant à cause de la montée des températures que de l'impossibilité désormais manifeste des gouvernements à y maintenir l'ordre. Les bouleversements que ce réchauffement climatique a engendré sur le mode de vie des habitants est sans doute ce qui frappera le plus le lecteur, Priest évoquant aussi bien les nécessaires transformations des habitations que les nouvelles pratiques en terme de mobilité ou encore d'alimentation. En dépit de la gravité de la situation mise en scène, l'auteur parvient à donner à ce futur alternatif une cohérence et à le rendre plausible, ce qui suscite tour à tour fascination ou malaise chez le lecteur. Cet aspect mis à part, le reste du roman se révèle malheureusement trop morne et prévisible pour captiver durablement l'attention du lecteur.

Avec « Rendez-vous demain », Christopher Priest renoue avec toutes les thématiques qui caractérisent la plupart de ses oeuvres, ce qui limite quelque peu l'effet de surprise. Si le cadre futuriste centré sur le réchauffement climatique dans lequel se déroule l'intrigue est intéressant, l'intrigue souffre d'un manque criant de rebondissements et provoque la frustration du lecteur dès lors qu'il apparaît que le retournement de situation tant attendu n'arrivera jamais. Petite déception, donc, pour un auteur dont j'apprécie pourtant d'ordinaire les ouvrages.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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critiques presse (2)
Telerama
09 octobre 2023
Il signe ici une nouvelle réussite dans une œuvre passionnante.
Lire la critique sur le site : Telerama
Bibliobs
20 juillet 2022
Dans « Rendez-vous demain », le génie anglais de la science-fiction s’empare du dérèglement climatique. Un roman prophétique.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Foncièrement, je demeurais convaincu que les exhalaisons industrielles allaient continuer de lentement s'accumuler à tous les niveaux de l'atmosphère et former un miasme qui filtrerait et repousserait la chaleur du soleil. Cela entraînerait une atténuation solaire et un refroidissement de la planète. Cela ouvrirait la voie à ce que je craignais depuis bien des années : l'Holocène prendrait fin et serait suivi par dix mille ans de glaciation.
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Je fus soudain paralysé : mes membres se pétrifièrent, mes yeux restèrent fixés sur ce que je voyais à cet instant-là. Je pouvais encore respirer, mais au prix d'un grand effort. Il m'était évidemment impossible de crier ou d'appeler à l'aide. Il n'y avait personne alentour, de toute façon. Par chance, je venais d'assurer l'appui d'un pied et la corde était tendue au-dessus de moi. Je ne tombais donc pas, mais si cette intrusion avait eu lieu un peu avant ou un peu après, c'eût été ma fin. Je me cramponnais malgré moi. Mes mains étaient irrémédiablement crispées sur les prises de l'instant précédent. Respirant à peine, je regardais le firn qui se trouvait devant moi.
Puis vint la voix.
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Il demeura longtemps éveillé, à revivre des choses qu'il n'avait jamais vécues, des souvenirs injustifiés. Puis il finit par s'endormir. (p. 203)
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Certains réfugiés atteignaient néanmoins les côtes mais ils ne devaient s'attendre qu'à une arrestation quasi certaine ,une incarcération inhumaine et , au final,un renvoi vers les fournaises inhabitables qu'ils avaient fuies.
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Il avait été estimé par l’UNESCO et le bureau des affaires humanitaires de l‘ONU que, durant les cinq dernières années, au moins deux cents millions de personnes étaient mortes des effets dévastateurs du climat, soit directement, soit indirectement en cherchant à se réfugier dans un lieu supposé meilleur, quelque part au nord, un endroit comme la Brittanie ou la Norvège, comme Oslo ou Hastings.
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