La vie aigre-douce
Au bord du monde, au bord du temps et de la nuit, au bord de l'enfer, Nadine va écrire dans l'urgence, en apnée, parce qu'elle n'arrive même plus à pleurer ni à crier, parce qu' "écrire, c'est hurler sans bruit", selon
Duras (Marguerite).
"Pour ne pas mourir, je me remplis des Vignes". Son monde à Nadine, c'est Les Vignes, "un squat aux allures de paradis", le repaire de deux marginaux, Jean-Mi et Louis, aussi paumés qu'elle. Adossée à la colline, au milieu des merisiers sauvages, une vieille maison sans eau ni électricité, un poêle, une banquette de DS, un tronc coupé qui sert de table, des transats, un parasol… Il y a aussi trois chèvres, des poules et Chienne.
Et puis, Nono, musclé et bronzé, crâne rasé, "son pantalon et son gilet en cuir (sans manches), ses santiags bien plantées dans le sol, ses tatouages", ses doigts couverts de bagues, ses bracelets de force… Nono qui apparaît et disparaît, qui fait le (beau) temps aux Vignes, parce que "Les Vignes et Nono, c'est pareil. C'est chez lui ici, même si c'est chez personne".
Nono c'est leur nounou, mais Nono n'est pas le propriétaire, même s'il a pris le pouvoir. En réalité, Nono c'est le dealer, le "loup" dominant "au charisme délétère", le funeste bienfaiteur qui règne sur les paradis artificiels.
Et Axel, ado de 15 ans, qui traîne aux Vignes, en fera cruellement les frais. Mais pas que. Nono est une ordure.
Et nous, au bord du monde raconte la survie douce-amère de trois cabossés de la vie, hors des sentiers battus, hors de la société, sans travail, sans revenus, sans eau ni électricité… des paumés, des junkies sous emprise.
Nathalie Sauvagnac raconte la perversité, l'emprise, la violence sourde, la dépendance (affective) et l'abandon sur un air de douce saison.
À sa sortie, ce roman noir a été plébiscité par la critique : Mediapart,
France Inter, Libération, Télérama, L'Express, Lire…
"Deux histoires d'emprise se superposent ainsi, qui vont broyer le destin de Nadine. C'est l'histoire de ceux qui vivent au bord du monde, les Nadine, les Louis, les Jean-Mi. Les bancals, les pas solides, ceux qui ont tant de mal à habiter le monde, à trouver leur place".
France Inter, mai 2022