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EAN : 9782070371754
211 pages
Gallimard (21/02/1980)
3.62/5   25 notes
Résumé :

" L'hallucinante histoire des rescapés du Télémaque. Arrestation mouvementée de Pierre Canut, l'assassin d'Emile Février.

L'arrestation de Pierre Canut, capitaine du chalutier Centaure, qui a donné lieu, hier matin, à Fécamp, à une véritable manifestation de la part des gens de la mer, n'est pas seulement la suite de l'assassinat d'Emile Février, perpétré voilà dix jours, mais on pourrait dire que c'est l'aboutissement d'événements qui se ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Roman dur de 1938, "Les rescapés du Télémaque" se situe dans un milieu que Simenon affectionnait et qui l'inspirait visiblement pour le meilleur : celui des marins.

C'est à Fécamp que l'histoire débute quand Pierre Cannut capitaine d'un chalutier est interpellé ; on l'accuse du meurtre d'un vieil homme.
Charles Cannut, jumeau de Pierre va chercher à prouver l'innocence de son frère, mais il ne sait trop comment faire et agit avec maladresse...

Roman dur, donc roman d'ambiance et de personnages, mais aussi véritable mystère et vraie enquête,même si menée maladroitement par un homme qui n'est ni policier ni détective ni magistrat et qui d'ailleurs ne sait trop comment se positionner par rapport aux autorités.

Maigret aurait été à son affaire dans cette ambiance maritime où un vieux drame est -peut-être- à l'origine d'un meurtre et où les suspects sont plus nombreux qu'il n'y parait au début de l'histoire.

Une fois encore, Simenon réussit à rendre passionnant ce qui avait tout d'un banal fait-divers.
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Très belle analyse d'une certaine société, celles des marins et en général du petit peuple de Fécamp, dans laquelle la question policière n'est que pur prétexte. En filigrane, analyse tout aussi pointue du lien gémellaire.

Le point de départ de l'affaire remonte loin, d'ailleurs. Un chalutier battant drapeau français, le "Télémaque", brisé par la mer au temps où il y avait encore des Terre-Neuvas. Six hommes, dont un matelot britannique, parviennent à mettre une chaloupe à la mer et à s'y glisser avec quelques vivres. Trop peu, bien sûr. le climat est glacial, frénétique, mauvais et ne cesse de leur porter des coups. Quand on retrouve les survivants, ils ne sont plus que cinq. le Britannique n'a pas tenu. Mais, ce qu'ils n'oublieront jamais, c'est que, une fois mort, ses compagnons ont, poussés par la faim, sacrifié aux dieux de l'anthropophagie. Et sans doute une fin identique guettait-elle également Pierre Canut, mort depuis peu, les veines du poignet droit entaillées au rasoir, si l'équipe de secours n'était arrivée à temps.

Pierre Canut, alors âgé de vingt-quatre ans, laisse une jeune épouse enceinte de jumeaux. le premier portera le même prénom que son père, le second, on le baptisera Charles. Bien évidemment, les deux enfants grandissent dans une ambiance qui n'a rien de particulièrement gai, d'autant que leur mère ne se remet pas de la mort de son époux et vire doucement à la folie douce. Heureusement, il lui reste sa propre mère et sa soeur Louise, laquelle a épousé un pâtissier, pour veiller sur elle. Sans compter sa nièce, la belle Berthe, que, avec le temps, on finit par destiner en mariage à Charles même si, en apparence, la jeune fille a un faible pour l'aîné, Pierre, beau garçon assez "taiseux" (mais quel est Le Normand qui ne l'est pas ?), que tout le monde perçoit comme un chef de meute, un dirigeant et un excellent capitaine et meneur d'hommes, ceci en dépit d'un niveau intellectuel dirons-nous assez lent.

Le Hasard, le Destin, la Vengeance, appelez cela comme vous voudrez, fait que la poisse accompagne désormais les rescapés du "Télémaque." A l'époque à laquelle commence le roman, deux d'entre eux ont déjà rejoint le Grand Océan de l'Au-Delà et voilà que le vieux Février, qui était revenu vivre à Fécamp après un long séjour en Amérique Latine (où il s'était d'ailleurs marié avec Georgette, une "payse" : mais oui, le monde est petit ! ), est retrouvé proprement estourbi dans sa confortable "Villa des Mouettes", au lendemain d'une nuit particulièrement glauque et brumeuse.

Comme les autres survivants, Février a toujours déclaré que Canut Père avait été pris d'une crise de désespoir et s'était entaillé le poignet lui-même. Personne ne l'avait agressé dans le seul espoir de se faire disons un petit barbecue. Certains ont cru cette version de l'histoire, histoire par ailleurs si gênante, si choquante, que nul n'avait envie de s'attarder : Mme veuve Canut jamais. Et elle a élevé ses enfants dans la conviction que Février avait tué leur père. Or, les jumeaux, on le devine bien, ne demandaient guère à ce qu'on leur parlât soir et matin du tragique destin de ce père mort trop jeune et dans des circonstances aussi horribles. Mais, très vindicative et donc, nous l'avons déjà indiqué, la raison un peu dérangée, Mme Canut traquait littéralement le malheureux Février et allait droit à lui dans les rues pour l'accuser d'assassinat et de cannibalisme. le malheureux, disait-on, n'en pouvait plus. A tel point qu'il avait mis sa villa en vente et comptait regagner l'Amérique du Sud.

Par un hasard comme il y en a tant - à moins que ce ne soit pas du tout un hasard - Pierre Canut, le fils aîné, a été vu à la Villa des Mouettes la nuit fatale. Tatine, la servante de Février, serait prête à le jurer sur l'Apocalypse de St-Jean. On attend donc avec impatience le retour du "Centaure", un morutier armé par M. Pissart, l'armateur le plus important de la ville, qui avait pris Canut comme capitaine pour cette campagne. "Le Centaure" était parti à l'aube le lendemain, bien avant que la nouvelle de la mort de Février fût connue.

Pour la justice du coin, il n'y a pas à faire ni une, ni deux. En raison de certains indices, on arrête Pierre Canut qui se contente de son côté de répéter, d'un ton rogue, qu'il n'a tué personne avant de tourner le dos aux policiers et même au juge chargé de l'instruction, le juge Laroche. Quant à son avocat, M° Abeille, Pierre est prêt à lui casser carrément la figure parce qu'il n'a aucune estime pour cet avocaillon commis d'office : pire, il se méfie de lui.

A partir de là, Simenon nous décrit par le menu les efforts de Charles, le jumeau le plus "faible" physiquement mais certainement le plus doué sur le plan intellectuel, pour débrouiller le sac de noeuds. Autour de lui, des personnages un peu en demi-teintes, comme Jules, le patron du bistrot où travaille Babette, la fiancée du jeune homme. Jules que Charles en viendra un temps à soupçonner ... Car Jules avait eu, jadis, de son propre aveu, une liaison torride avec Georgette, bien avant que celle-ci ne rencontrât Février et quand elle était encore à Fécamp ...

Simenon se plonge jusqu'au cou dans l'analyse du personnage de Charles, trop faible physiquement (il a la tuberculose) pour se maintenir dans le dur univers des marins-pêcheurs, qui doit en conséquence se contenter d'un poste plus humble aux chemins de Fer, qui a toujours adoré son aîné tout en se sentant inférieur à lui (même si l'on pourrait assurer qu'il se trompe et que c'est lui qui est supérieur, déjà de par son intelligence, à son jumeau), qui voudrait bien épouser Babette mais qui doute de l'amour de celle-ci (comment pourrait-elle aimer un être comme lui que, elle ne s'en cache pas à un certain moment, dans le feu de la conversation, elle tient pour un faible ?) et surtout qui se pose des questions à n'en plus savoir.

Questions qu'il continuera à se poser l'énigme résolue - en partie grâce à lui d'ailleurs - car, la vie ayant repris son train-train dès la libération de Pierre, le cercle se reforme : tout le monde admire Pierre et Charles, qui épousera ou non Babette, ne sera à jamais que son ombre.

Un roman à mon sens mineur - même si l'identité des coupables ne déçoit pas, loin de là - et à conserver pour les jours où, en tant qu'inconditionnel de Simenon, vous avez un petit creux. C'est lent, méandreux, un peu paresseux et typiquement simenonien. C'est à dire que certains détesteront et que les autres encenseront. A vous de voir. Personnellement, en tous cas, j'ai aimé. ;o)
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Pierre et Charles Canut sont les fils d'un marin décédé au cours du naufrage du "Télémaque". Son corps a été retrouvé dans un canot en compagnie de quatre autres marins qui semblent n'avoir survécu que grâce à un acte de cannibalisme sur leur camarade mort.
Pierre qui jouit d'une excellente réputation à Fécamp deviendra officier de marine, aidé par Charles qui oeuvre toujours dans l'ombre pour son frère.
Un jour, Emile Février, le dernier des rescapés du "Télémaque" est retrouvé égorgé chez lui. Tout permet d'accuser Pierre qui est arrêté dès l'arrivé de son chalutier au port de Fécamp. Celui-ci nie mais ne convainc pas.
Charles décide alors de mener l'enquête et va découvrir l'auteur du forfait. Pierre revient au port et est fêté comme il se doit alors que Charles retourne dans l'ombre.
Ce n'est pas du Maigret, mais c'est un roman comme Simenon a su en écrire beaucoup, qui décrivent magnifiquement un milieu, des caractères et des sentiments.
Comme toujours il s'agit d'un livre très agréable à lire, malgré l'ambiance parfois très dure qui règne dans ce milieu.
Un livre qu'on n'a envie de poser que quand on l'a terminé.
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…Il y a un meurtre dans Les rescapés du Télémaque et il y a un coupable mais l'important n'est pas tant de savoir le mobile de l'accusé, ni si l'enquête du frère de celui-ci va mener vers un autre coupable. En suivant les cheminements du frère, on suit surtout son questionnement intérieur sur sa position à lui dans cette petite société, dans sa famille, ce qu'il considérait comme des certitudes, etc…
Lien : http://livrepoche.fr/les-res..
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Des femmes couraient dans les boutiques, les femmes dont le mari allait rentrer, et les commerçants savaient que tout à l'heure elles viendraient payer leur note de la quinzaine.
Tout cela, encore une fois, c'était le rythme banal des arrivées de bateaux. : les rouleuses mal réveillées qui poussaient leurs charrettes vers le quai où dans une heure, elles débarqueraient le hareng, et Jules, le patron du café de l'Amiral, qui soutirait pour lui le premier jus du percolateur tandis que Babette, les cheveux sur le visage, rangeait tables et chaises.
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[...] ... Pierre avait eu droit à deux sandwiches au jambon et à une demi-bouteille de vin. Il ne savait pas où il était. Il attendait. Il attendit jusqu'à cinq heures lui aussi avant d'être conduit dans une pièce assez mal éclairée, mais surchauffée, où un monsieur assis devant un bureau d'acajou le pria poliment de s'asseoir.

- "Pierre Canut, trente-trois ans, fils de Laurence Canut, née Picard, et de Pierre Canut, décédé ..."

Il avait toujours les menottes aux mains, mais il finissait par les oublier. A une table, un jeune homme était assis et semblait écrire tout ce qu'il disait.

Quant à M. Laroche, le juge, c'était un homme de quarante-cinq ans au plus, avec une barbiche comme on en voit aux héros de Jules Verne et l'air d'honnêteté, de probité scrupuleuse qui caractérise ces héros.

La pièce n'était éclairée que par une lampe à réflecteur qui se trouvait sur le bureau et dont la lumière inondait un gros dossier que feuilletait le juge.

- "Je suppose, Pierre Canut, que vous vous rendez compte de la gravité des charges qui pèsent sur vous. Pour cette raison, précisément, j'ai décidé de ne vous faire subir aujourd'hui qu'un interrogatoire d'identité. Dès que vous aurez désigné un avocat ...

- Je n'ai pas besoin d'avocat," dit Canut d'une voix calme.

- Je vous demande pardon, mais la loi m'oblige à exiger la présence d'un avocat.

- Puisque je n'ai rien fait !

- Ou bien vous en choisirez un, ou bien il vous en sera désigné un d'office. Je crois pouvoir vous dire que, dans votre situation, étant donné que votre situation vous le permet ...

- Puisque je vous dis, monsieur le juge, que je n'ai pas tué M. Février ..." ... [...]
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[...] ... - "Voici Charles !"

Et Charles fendit la foule à la recherche de son frère, le trouva accoudé au comptoir, le regard un peu vague, la voix claironnante.

- "Viens ici, toi, que je t'embrasse ..."

Il était ivre. Il ne pouvait pas en être autrement. Il donnait l'accolade à son frère d'une façon exagérée, comme un ministre.

- "Et maintenant, dis-nous où tu étais, mauvais sujet ..."

Alors Charles grimaça. Les autres ne comprirent pas. Il grimaçait parce qu'il était sur le point de pleurer et qu'il ne voulait pas. Il essayait d'avaler son sanglot. Il voyait Babette, qui avait bu, elle aussi, et qui était heureuse au milieu de tous ces hommes surexcités.

- "Je viens de Dieppe ...

- Donne-lui à boire, Babette !"

Il prit le verre, crut entendre :

- "Tu vas encore faire une bêtise ... "

Il sourit, d'un sourire qu'il était seul à savourer. On le vit boire comme on ne l'avait jamais vu, acceptant, lui aussi, tous les verres qui se présentaient, en prenant des mains de ses voisins.

C'était comme cela, et pas autrement ! Il n'y avait rien à y changer parce que c'était dans l'ordre des choses.

Quel ordre ? Il aurait eu de la peine à l'expliquer. Il le sentait, voilà tout. Il fallait que Pierre continue à être Pierre ...

Et, pour cela, il fallait que Charles ..." ... [...]
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Quant à M. Laroche, le juge, c'était un homme de quarante-cinq ans au plus, avec une barbiche comme on en voit aux héros de Jules Verne et l'air d'honnêteté, de probité scrupuleuse qui caractérise ces héros.
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Vidéo de Georges Simenon
"L'Homme de Londres", Georges Simenon, aux éditions le libre de poche
Mila Boursier, libraire à La Grande Ourse à Dieppe, nous parle du roman "L'homme de Londres" de Georges Simenon. Dans ce polar, l'auteur ne nous parle pas de Maigret, mais d'un homme qui prend une mauvaise décision un soir à Dieppe. de fil en aiguille, le lecteur parcourt les rues de la ville dans une haletante chasse à l'homme.
Un entretien mené à Dieppe, à la librairie La Grande Ourse.
Vidéo réalisée par Paris Normandie.
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